Les D-Dimères

Les D-Dimères

Les D-dimères sont des produits de dégradation de la fibrine (stabilisée après action du facteur XIIIa) par la plasmine. Ils regroupent un ensemble de molécules de taille variable, mais qui comportent toutes un motif protéique commun : le motif D-D. Ce motif est absent du fibrinogène et de la fibrine soluble. Les D-dimères sont donc le reflet de la lyse par la plasmine de la fibrine polymérisée et stabilisée par le FXIIIa. Ces concentrations sont augmentées dans toutes les circonstances pathologiques où de la fibrine générée est dégradée par la plasmine comme la maladie thrombo-embolique veineuse (MTEV), la coagulation intravasculaire disséminée (CIVD), le sepsis, l’inflammation, le cancer, le traumatisme, la thrombose artérielle, ou au décours d’un acte de chirurgie, mais également physiologiquement avec l’âge et au cours de la grossesse. La demi-vie des D-dimères est de six à huit heures, leur élimination se fait par le rein et le système réticuloendothélial.

Nous l’avons évoqué plus haut, la demi-vie des D-Dimères est de six à huit heures. Il existe donc une relation inverse entre la concentration en D-Dimères plasmatiques et la durée des symptômes : le taux de D-Dimères décroît lorsque la réalisation du dosage des D-Dimères a lieu à distance de l’apparition des signes cliniques.

De plus, les traitements anticoagulants diminuent le taux de D-Dimères : en moyenne, selon la littérature, les D-Dimères diminuaient de 25% après 24h de traitement par l’héparine.

Ces notions sont importantes pour l’interprétation d’un taux limite sur un prélèvement réalisé à distance de l’apparition des signes cliniques ou après l’instauration du traitement anticoagulant.

Le diagnostic de MTEV (EP et thrombose veineuse profonde) est loin d’être simple : il repose sur des données cliniques, biologiques et paracliniques (échodoppler, angiographie, etc…). Aucun examen ne permet à lui seul un diagnostic de certitude, d’où l’utilisation d’une stratégie diagnostique prenant en compte :

·        Niveau de probabilité clinique (scores cliniques prétest)

·        Imagerie médicale

·        Biologie

Plusieurs scores cliniques évaluant la probabilité clinique pré-test existent (cf tableau 1). Deux scores ont été validés : score de Wells et le score modifié de Genève. Ils permettent de classer la probabilité en faible, intermédiaire ou forte.

La valeur prédictive négative (VPN) des D-Dimères est excellente pour les patients ambulatoires dont la probabilité de MTEV est faible ou intermédiaire : un taux < 0.5 µg/ml permet d’exclure une MTEV et dispense même de la réalisation d’une imagerie.

En revanche, si la probabilité clinique est élevée, le dosage perd de son intérêt en raison de l’importance des résultats positifs dans ce groupe. 


La CIVD est un syndrome caractérisé par l’activation systémique de la coagulation qui génère de la fibrine dans le compartiment intravasculaire. Elle peut survenir au cours d’un sepsis, d’une pathologie néoplasique, d’un traumatisme, d’un anévrysme, etc… Bien que les D-dimères ne soient pas spécifiques de la CIVD, ils appartiennent au score diagnostique et pronostique redéfini récemment par l’International Society of Thrombosis and Haemostasis (ISTH) et sont, dans cette indication, des marqueurs de la fibrinoformation et de la fibrinolyse . Leur élévation contemporaine de la diminution des plaquettes, du fibrinogène et de l’altération du temps de Quick est un marqueur biologique en faveur de la CIVD. L’ISTH recommande ce système de scoring fondé sur la répétition de tests simples (numération plaquettaire, temps de Quick, D-dimères ou monomères de fibrine, fibrinogène) : un score supérieur ou égal à 5 est en faveur d’une CIVD décompensée.

La spécificité du test diminue avec l’âge : les D-Dimères permettent d’éliminer le diagnostic d’EP chez 66% des patients de moins de 40 ans, et chez seulement 5% des patients de plus de 80 ans. Des données récentes suggèrent qu’une augmentation du seuil chez les personnes âgées de plus de 50 ans pourrait augmenter la spécificité du test sans diminuer sa sensibilité. Un cut-off adapté à l’âge a été proposé en divisant l’âge des patients par cent à partir de 50 ans.

Cut-off = [âge / 100 ] µg/ml

Ainsi, la valeur du cut-off serait de 0.6 µg/ml chez les personnes de 60 ans, 0.7 µg/ml chez les personnes de 70 ans, etc… Ce cut-off a été proposé à partir de plusieurs études rétrospectives incluant des patients ambulatoires avec un score préclinique faible ou intermédiaire. Il semble impératif avant l’utilisation généralisée de cette pratique de valider cette attitude à l’aide d’études prospectives. 

Dans l’étude Vienna Cancer and Thrombosis Study (CATS), les D-dimères ont été validés comme marqueur de risque de thrombose au cours du cancer. Ces résultats conduisent à l’élaboration de « modèles d’évaluation des risques » permettant de classer les patients atteints d’un cancer en fonction du risque de développer une thrombose afin d’identifier ceux qui pourraient bénéficier d’un traitement anticoagulant. En effet, la prévention primaire de la MTEV des patients ambulatoires atteints d’un cancer n’est, à ce jour, pas recommandée à titre systématique, mais l’utilisation d’un score regroupant D-dimères, paramètres de la numération sanguine (plaquettes, leucocytes, hémoglobine) et paramètres cliniques (grade de la tumeur) pourrait être intéressante pour sélectionner les patients les plus à risque de thromboses.

La grossesse normale est considérée aujourd’hui comme un authentique facteur de risque de la maladie thromboembolique veineuse. On admet qu’au cours d’une grossesse normale, indépendamment de tout autre facteur, le risque de survenue d’un évènement thromboembolique veineux (TVP, EP, retard de croissance majeur et/ou mort fœtale in-utero par infarcissement placentaire, etc.) est augmenté de 6 fois. Ceci est dû au fait que tout au long de la grossesse on assiste à une augmentation des processus de coagulation physiologique et à une diminution de l’anticoagulation physiologique et de la fibrinolyse.       

Ainsi, l’évaluation de cette hypercoagulabilité par le dosage des D-Dimères est délicate en raison de l’élévation physiologique des D-Dimères au cours de la grossesse. On peut cependant constater qu’en deçà de respectivement 1 µg/ml, 2 µg/ml et 3 µg/ml aux premier, deuxième et troisième trimestres, on peut dans la plus grande majorité des cas écarter une pathologie thromboembolique veineuse. 

D’après la dernière conférence de consensus, The American College of Chest Physicians (ACCP) fixe la durée de l’anticoagulation en fonction du type d’événement clinique, des antécédents et de la présence de certaines comorbidités (cancer, syndrome des antiphospholipides). Certaines études ont tenté d’utiliser les D-dimères afin d’adapter le traitement de manière individuelle. Des études récentes ont mis en évidence l’intérêt des D-Dimères pour identifier les patients à risque de récidive après l’arrêt d’un traitement par antivitamines K (AVK). Si les D-Dimères sont négatifs 3 à 4 semaines après l’arrêt du traitement, la probabilité qu’il y ait une récidive thromboembolique veineuse est plus faible que si le taux de D-Dimères est élevé.


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