Voilà, c’est fini : Thierry Peugeot, 58 ans, n’est plus au cœur du réacteur. Depuis jeudi 3 juillet dans la soirée, selon un communiqué laconique envoyé par Peugeot Citroën, il ne fait plus partie du conseil d’administration du groupe, dont il était encore le vice-président hier, et le président avant l’Assemblée générale du 31 mai. Il est remplacé par sa soeur : Marie-Hélène Roncoroni, 54 ans. Challenges annonçait qu’une décision en ce sens était imminente dans son édition du 26 juin : elle a effectivement été prise mardi 1er juillet dans l’après-midi.
C’est son interview-suicide accordée aux Echos le 23 juin dernier qui a mis le feu aux poudres. Il y attaquait son cousin Robert et son « approche financière » alors que lui-même est « un industriel ». Plus grave, il y regrettait l’arrivée du chinois Dongfeng au capital, mais surtout de l’Etat : « Je suis un capitaliste libéral moral et un défenseur de l’entreprise privée. Quand l’Etat rentre dans le groupe pour la première fois en 200 ans d’histoire cela pose nécessairement des questions ». Une petite phrase qui a rendu Louis Gallois, grand serviteur de l’Etat et président du conseil de surveillance de Peugeot Citroën, littéralement fou de rage.
Quant à la famille, ce sont les critiques adressées par Thierry à Philippe Varin, ancien président du directoire, en particulier l’échec du partenariat avec General Motors, qui les a agacés. « C’était d’une inélégance rare », affirme l’un des cousins Peugeot.
Finalement, c’est Jean-Philippe Peugeot qui a pris la décision – en accord avec Louis Gallois, Robert Peugeot et l’Etat – d’envoyer à Thierry la lettre qui le démet de son rôle de vice-président du conseil d’administration. En effet, ce n’était pas en son nom propre qu’il occupait ce poste, mais par délégation des Etablissements Peugeot Frères, dont Jean-Philippe est le président… et qui pouvait donc, à tout moment, le révoquer.
C’est pour sauver la face de Thierry que ses cousins lui avaient offert le poste en question : déprimé par la chute du groupe et démoralisé de ne plus pouvoir en diriger le conseil d’administration, la famille avait voulu le préserver. A-t-il cru qu’il avait toujours le pouvoir, et qu’il avait donc gardé sa liberté de parole ? C’est ce qui se murmure dans les couloirs. Décidément, avec le duo Gallois-Tavares soutenus par Robert Peugeot, une page se tourne pour le constructeur français.
Anna Rousseau et Airy Routier