Nancy | Justice Jean-Christophe Breuil, ex-PDG de Smoby, veut solder le passé

Jugé depuis ce lundi et pour deux semaines à Nancy, Jean-Christophe Breuil, ex-patron du géant du jouet basé dans le Jura, reconnaîtra certains des délits pour lesquels il est poursuivi. Des infractions qui risquent de lui coûter de la prison ferme.
Eric NICOLAS - 01 oct. 2019 à 05:03 | mis à jour le 01 oct. 2019 à 10:40 - Temps de lecture :
Jean-Christophe Breuil (à droite), ancien PDG de Smoby, ici aux côtés de l’un de ses avocats, M e Thinat.  Photo ER /Eric NICOLAS
Jean-Christophe Breuil (à droite), ancien PDG de Smoby, ici aux côtés de l’un de ses avocats, M e Thinat. Photo ER /Eric NICOLAS

« Le fait de perdre l’entreprise a été très dur pour ma famille et moi… ». Tempes grisonnantes, discours assuré, Jean-Christophe Breuil, 49 ans, est à la barre du tribunal de Nancy. Le procès de l’ancien patron du groupe Smoby, entreprise jurassienne fleuron de l’industrie du jouet, créée en 1924 par le grand-père du prévenu, s’est ouvert ce lundi. L’homme, qui se rend souvent en Asie pour son activité professionnelle, ne mettra cependant pas un pied en Chine durant deux semaines, retenu par la justice française.

Il est poursuivi pour 16 infractions, notamment des abus de biens sociaux. L’accusation chiffre ces détournements à 10 millions d'euros, entre 1999 et 2008. C’est un tract syndical de la CGT, fin 2006, qui a dénoncé un montage frauduleux, avec une société basée à Hong Kong qui aurait volontairement payé des fournisseurs chinois avec un prix surévalué de 6 %. Ce supplément aurait été reversé à une autre boîte liée à la famille Breuil.

Ce lundi, Jean-Christophe Breuil a longuement détaillé l’historique de Smoby, « entreprise familiale, paternaliste, jurassienne dans le bon sens du terme. Mon grand-père puis mon père ont fait fonctionner cette entreprise comme une équipe de foot autour de son capitaine ».

Le principal prévenu de ce dossier dans lequel comparaissent six autres personnes a pris en 1993 la suite du paternel à la tête du vaisseau familial. « Et ce, alors que je n’avais pas fini mes études. C’est quand même compliqué d’arriver comme ça. Et ce n’est pas forcément un cadeau de reprendre l’entreprise familiale ».

2005, début de la déconfiture

L’ex-boss de Smoby a retracé la croissance exponentielle de Smoby, axée sur le rachat de sociétés en difficultés. « Mais, avec l’acquisition de Majorette, nous avons touché les limites de nos capacités financières ». C’était en 2003.

« Deux ans plus tard s’est posée la question du rachat de Berchet. Nous n’avions plus de fonds propres mais les banques nous ont dit qu’il n’y avait pas de problème. Or, nous avons sous-estimé les coups de restructuration de cette entreprise ». Le début de la déconfiture de Smoby daterait de cette période.

On souhaite que Jean-Christophe Breuil et ses complices soient condamnés à la hauteur des actes qu’ils ont commis.

Richard Dhivers et Gilles Rizzi, CGT du Jura

« Il avance des problèmes de gestion mais ça ne tient pas », soufflent Richard Dhivers et Gilles Rizzi, de la CGT du Jura qui s’est constituée partie civile. « Il y a eu des montages pour soutirer de l’argent. Et le préjudice est énorme : des familles ont été brisées. L’incidence économique sur le tissu économique du département, c’est 800 salariés en moins. Et 1.200 avec les sous-traitants. On souhaite que Jean-Christophe Breuil et ses complices soient condamnés à la hauteur des actes qu’ils ont commis… »

« Notre client est devant le tribunal pour solder le passé », note Me Saint-Pierre. « Il répondra de sa gestion passée, des fautes qu’il a pu commettre ». Dans ce dossier de délinquance en col blanc, Jean-Christophe Breuil risque la prison ferme. L’avocat n’y songe pas : « Non. Et le droit est pour nous. La loi dit en effet que, dans notre situation, avec des faits très anciens et un client parfaitement inséré, une peine de prison ferme ne peut pas être prononcée ».