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L’Argentine doit-elle diviniser Lionel Messi ?

Antoine Donnarieix

Mis à jour 27/03/2018 à 22:39 GMT+2

Qualifiée pour le mondial russe au terme d’un terrible suspense, l’Argentine de Jorge Sampaoli peut remercier son leader Lionel Messi. D’ailleurs, depuis cette qualification, le sélectionneur national encense sans cesse le sauveur de la patrie. Mais est-ce vraiment une bonne stratégie pour préparer la coupe du monde ?

Lionel Messi - Argentine

Crédit: Getty Images

Cela fait maintenant trois mondiaux que cela dure. D’abord présenté comme le futur de l’Argentine en Allemagne, puis baptisé fils spirituel de Diego Maradona en Afrique du Sud, Lionel Messi était tout proche d’un sacre avec l’Albiceleste au Brésil il y a quatre ans. Pour tenter le coup une quatrième (et dernière ?) fois, La Pulga s’est donné les moyens de participer à l’édition russe, prévue du 14 juin au 18 juillet prochain. Comment ? À l’aide de six buts fondamentaux en phase de qualification : un face à l’Uruguay (1-0), un autre face au Chili (1-0), un coup franc magistral contre la Colombie (3-0) sans oublier ce triplé en Équateur (3-1). Messi, le patron de l’Argentine ? Non, désolé.

Sampaoli, l’heure de mûrir

Entraîneur de l’Argentine depuis le 20 mai 2017, Jorge Sampaoli est devenu une référence planétaire en la matière grâce à la coupe du monde 2014. Bourreau d’une Espagne championne en titre avec le Chili (2-0), El Sabio de Casilda était tout proche de vaincre un Brésil hôte en huitième de finale (1-1, 3-2 tab). Sans aucun doute, cela forge une réputation de grand tacticien. Mais voilà, Sampaoli est un homme qui possède une faiblesse : comme de nombreux fans de football, l’Argentin est un fervent admirateur de Leo Messi.
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Jorge Sampaoli

Crédit: Getty Images

Bluffé par l’influence sur l’équipe du quintuple Ballon d’or, le coach originaire de Santa Fe est sous le charme du meneur de jeu depuis ses premières foulées au Barça. Lors de son passage au FC Séville, Sampaoli s’exprimait sur Messi sans langue de bois pour le quotidien Mundo Deportivo, deux mois avant sa nomination en tant que sélectionneur national de l’Argentine. "Je veux entraîner Messi pour le voir tous les jours. C'est un rêve unique de voir le meilleur joueur du monde de près, en permanence." Le souci, c’est que ce rêve, devenu réalité, tourne presque à l’orgasme quotidien.
Cette équipe est beaucoup plus celle de Messi que la mienne
Avant d’affronter l’Italie vendredi dernier à Manchester (une rencontre que l’Argentine a par ailleurs remportée 2-0 sans l’aide d’un Messi convalescent), Sampaoli répondait avec une franchise débordante et révélatrice de son état d’esprit actuel. "Sans aucun doute et à voir la réalité du terrain, cette équipe est beaucoup plus celle de Messi que la mienne, révèle l’entraîneur. Cette équipe est liée à ce que fait le meilleur de tous dans une situation donnée, et crée ainsi une sécurité collective pour donner à ses coéquipiers une force supplémentaire." Pourquoi pas, mais dans le fond, tarir d’éloges pour son meilleur élément n’est-il pas le frein majeur de la progression de l’Argentine ?
Autrement dit, comment Sampaoli, entraîneur de l’une des plus prestigieuses sélections nationales, peut-il s’exprimer de la sorte sans que cela soit contre-productif pour une équipe toujours à la recherche d'un onze de départ stable ? Lors de ce fameux match salvateur en Équateur, le triplé de Messi a-t-il rendu aveugle le technicien sur la pauvreté technique de son collectif ? Papu Gómez, Eduardo Salvio ou Enzo Pérez sont-ils des joueurs qui méritent d’être rappelés en sélection vu leurs prestations individuelles chaotiques ? Apparemment, non. Et grand bien nous fasse !
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Messi - Sampaoli - Icardi - 2017

Crédit: Eurosport

Le virage de l’Italie

Lors de cette rencontre contre l’Italie, Sampaoli vient au moins d’éclaircir un point : le chauve sait garder la tête froide. En titularisant Fabricio Bustos et Nicolás Tagliafico, les deux latéraux formés au CA Independiente et champions d’Amérique du sud avec El Rojo en fin d’année 2017, le possible retour d’une défense à quatre avec deux ailes de qualité devient enfin un plan réalisable. Une énorme avancée quand on sait que le secteur défensif reste le talon d’Achille de cette équipe depuis une décennie. Certes, cette Italie non qualifiée pour la coupe du monde amorçait une phase de reconstruction dans un match amical sans enjeu.
Toujours est-il que sans prendre de but et à l’aide d’un Éver Banega aussi métronome que buteur, l’Argentine tient un match rassurant après son inquiétante copie rendue lors de la défaite face au Nigéria en novembre dernier (4-2). Deux rencontres qui possèdent un point commun : l’absence de Messi. Preuve que l’Argentine peut faire du mauvais, mais aussi du bon sans son soi-disant "joueur indispensable". Ce mardi, personne ne peut assurer que Messi soit de la partie contre l’Espagne. Mais peu importe : ce qui est certain, c’est que Sampaoli ferait bien de ressortir sa recette de 2014.

L’utopie de 1986

Pour aller plus loin et remporter un troisième sacre mondial, l’Argentine devra former un groupe de guerriers, une famille soudée prête à ramer ensemble vers le but commun. Cristiano Ronaldo et le Portugal en 2016 en sont un exemple, tout comme celui de Maradona en 1986. Reste encore que l’image de cette Argentine championne du monde reste biaisée. El Diez serait-il devenu champion du monde sans Jorge Burruchaga ? Pas sûr. Et sans les latéraux José Luis Cuciuffo et Julio Olarticoechea, pions essentiels du 3-5-2 de Carlos Bilardo ? Encore moins sûr. Alors cassons le mythe : si l’Argentine fût sacrée championne du monde cette année-là, ce n’était pas grâce au seul Maradona, mais avant tout grâce à une formidable discipline tactique.
Aujourd’hui, voir un joueur comme Paulo Dybala laissé de côté par Sampaoli peut surprendre. Mais qu’en était-il de l’Argentine en 1986 ? Sur le banc de touche, Ricardo Bochini était dans l’ombre du Pibe de Oro. Cette légende d’Independiente, idole de Maradona durant sa jeunesse, avait compris que son rôle était d'assurer une doublure à Diego en cas de coup dur pendant le tournoi. Et à la fin, cette hiérarchisation acquise dans les consciences finissait par payer. "Que Paulo ne soit pas dans la liste ne veut absolument pas dire qu’il ne sera pas au Mondial", affirmait Sampaoli au moment de dévoiler sa liste pour les matchs contre l'Italie et l'Espagne. Peut-être que Dybala doit juste se mettre dans la peau du Bochini de 2018...
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Dybala - Messi - Argentina 2017

Crédit: Getty Images

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