Henri Giscard d’Estaing : «J’aimerais beaucoup ouvrir un Club Med sur le littoral français»

Dans un entretien au Parisien-Aujourd’hui en France, le président du Club Med évoque les ambitions du célèbre opérateur de villages de vacances, racheté en 2015 par le groupe chinois Fosun.

 Paris XIXe, le 3 juillet. Henri Giscard d'Estaing, PDG du Club Med.
Paris XIXe, le 3 juillet. Henri Giscard d'Estaing, PDG du Club Med. LP/Olivier Corsan

    Henri Giscard d'Estaing nous a longuement reçus début juillet au siège parisien du Club Med. L'occasion pour celui qui préside depuis quinze ans aux destinées du célèbre opérateur de villages de vacances d'évoquer les ambitions du groupe passé, en 2015, sous pavillon chinois. Il nous annonce notamment son souhait d'ouvrir en France un nouveau Club Med en bord de mer.

    Comment se présente la saison estivale ?

    HENRI GISCARD D'ESTAING. Elle se présente bien avec la plus forte croissance de notre activité en France depuis très longtemps. Nos clients ont tendance, c'est notre force, à réserver à l'avance. Nous sommes quasiment pleins et depuis longtemps car les réservations ont été plus anticipées encore que les années précédentes.

    Toutes les destinations sont touchées par cette reprise des réservations ?

    Ces dernières années, le marché touristique avait été compliqué par la crise, l'absence de confiance mais aussi des événements géopolitiques qui avaient poussé les Français à ne plus aller au Maroc, en Tunisie ou en Égypte. Aujourd'hui, on voit, et l'on doit s'en réjouir, à une renaissance très forte de ces destinations majeures.

    Vous faites face à d'autres aléas géopolitiques…

    En réalité, depuis le 11 septembre 2001, le monde est devenu instable et cette instabilité s'accroît. Il y a à la folie des hommes, avec ses attentats, révolutions, ses guerres, et la folie de la nature avec les tsunamis, les tremblements de terre ou les cyclones. Face à ces événements imprévisibles, notre stratégie consiste à minimiser les risques en diversifiant nos destinations et notre clientèle qui est à 62 % internationale.

    Lorsque l'on voit vos prix, ne vous coupez-vous pas justement d'une partie de vos clients français ?

    Nous avons trois types de clientèles. La plus importante, ce sont les familles avec de jeunes enfants auxquelles nous offrons le meilleur rapport qualité-prix. Pour un couple avec deux jeunes enfants, une semaine au club Grand Massif à Samoëns dans les Alpes, c'est en ce moment (NDLR : la semaine du 3 juillet) 1 400 euros par personne tout compris, puisque c'est gratuit pour les enfants de moins de 6 ans Vous êtes dans les mêmes catégories de prix, voire inférieurs, qu'à Punta Cana qui est une très belle destination. Nous avons deux autres types de clients : les couples actifs, sans enfants, qui veulent profiter à plein des activités sportives, et la catégorie 3G, des trois générations -enfants, parents et grands-parents-, qui veulent vivre ensemble leurs vacances au Club, mais chacun à son rythme.

    Après avoir traversé pas mal de difficultés, le Club Med est-il redevenu rentable ?

    Oui. En 2017, sur 1,5 milliard d'euros de chiffres d'affaires, nous avons fait 30 millions de bénéfices avant impôts et nos résultats vont encore progresser en 2018.

    Vous appartenez depuis trois ans à 100 % à Fosun. Pour le Club Med, qu'est-ce que cela a changé de passer sous pavillon chinois ?

    Étions-nous auparavant une entreprise française ? Nous avons eu comme actionnaires de référence la famille Agnelli, la Caisse des dépôts du Maroc… Notre capital était éclaté et nous étions vulnérables à un prédateur. Dans ces conditions, c'était compliqué de se financer et de trouver des partenaires immobiliers. Nous avons trouvé avec Fosun un actionnaire stable qui a soutenu avec constance notre stratégie d'internationalisation et de montée en gamme. Cela fait qu'aujourd'hui notre situation financière est extrêmement saine et que nous sommes en position d'ouvrir plus de cinq Club Med par an, ce qui ne s'était pas produit depuis vingt-cinq ans. Cette année, nous allons investir plus de 100 millions d'euros sur nos fonds propres et nos partenaires immobiliers y ajouteront 300 millions d'euros, ce qui est absolument considérable.

    Quelles sont vos priorités en France ?

    Nous misons beaucoup sur les Alpes françaises. Nous avons la chance d'avoir les plus belles montagnes accessibles du monde et un concept de tout compris haut de gamme particulièrement adapté à des séjours au ski pour des familles françaises et étrangères. Nous misons aussi sur nos deux fleurons qui sont la Palmyre (Charente-Maritime), avec un objectif de montée en gamme et d'extension, et le domaine d'Opio en Provence. Il a été entièrement rénové et va accueillir un espace très haut de gamme, l'Exclusive Collection, destiné notamment à attirer une clientèle étrangère. Enfin, nous allons investir dans la rénovation de nos clubs en Martinique et en Guadeloupe.

    Un nouveau Club Med sur le littoral français, c'est possible ?

    J'aimerais beaucoup. C'est très difficile car nous sommes dans un environnement réglementaire verrouillé mais nous regardons. S'il y a un site magnifique, nous excluons pas du tout d'ouvrir un nouveau Club Med sur le littoral français.

    En France, Fosun a aussi racheté Saint-Hubert et, récemment, la marque de luxe Lanvin. Quelles sont ses ambitions de France ?

    Fosun a clarifié sa stratégie et se concentrer sur trois secteurs : la santé, la banque-assurance et les loisirs pour les familles. Dans ce cadre, le groupe veut continuer à se développer. Il y a une dizaine de jours, le président de Fosun, Guo Guangchang, a rencontré le Premier ministre, Édouard Philippe, en tête-à-tête. Il lui a bien confirmé que Fosun comptait continuer à investir en France.

    AccorHotels souhaite reprendre les parts détenues par l'État dans Air France-KLM. Est-ce un dossier que vous regardez?

    Nous sommes l'un des premiers clients d'Air France-KLM et nous souhaitons que cette compagnie réussisse. Mais nous n'avons pas vocation à investir dans le transport aérien.