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De Gaulle est un nom lourd à porter. Son fils, l'amiral Philippe de Gaulle, en sait quelque chose. Son petit-fils Yves aussi. Il n'aurait pas hérité de ce nom illustre, il est sûr que la critique se serait jetée sur son troisième livre, un roman prenant, Chevalier solitaire.
Yves de Gaulle y raconte sur le mode épique la vie imaginaire d'un chevalier du XVe siècle, messire Jehan de Gaulle, ancêtre du Général et donc de lui-même, qui a vraiment existé mais dont on ne sait pas grand-chose sinon qu'il fut capitaine de la ville et du château de Vire. Tenant tête, en 1417, aux envahisseurs anglais, les Godons, il les repoussa jusqu'à Carentan avant de rendre les armes au terme d'un long siège.
Le premier de Gaulle avait déjà la résistance dans le sang. Refusant de jurer fidélité au roi anglais vainqueur, il choisit l'exil, mais pas à Londres, il va de soi. Contemporain de Charles VII, l'un des plus grands rois de France, et de Jeanne d'Arc, ami de Jacques Cœur, il mena, à l'aube de la Renaissance, une vie d'errance à travers l'Europe, de la cité vaticane à Venise en passant par Rouen où il assista au supplice de Jeanne d'Arc. Sans oublier l'Orient.
Messire Jehan de Gaulle. Pour accoucher de ce livre, Yves de Gaulle s'est livré à un travail de titan. À l'évidence, il maîtrise la langue de cette époque et, s'il n'en abuse pas, nous remet en tête des mots (remembrance, malefaim, etc.) qui, pour avoir souvent disparu de nos dictionnaires, n'en sont pas moins familiers, comme le phrasé du roman. Il a visité les lieux, repéré les odeurs, lu tous les livres. Résultat : ça marche. Chevalier solitaire nous emmène dans le passé, sur les pas de messire Jehan de Gaulle, « vieux, têtu mais droit, regardant l'horizon plutôt que le pavé ».
Même si ce n'est pas l'objet du livre, Chevalier solitaire nous rappelle que les racines chrétiennes de l'Europe sont une réalité que rien ni personne ne pourra jamais effacer. C'est chez saint Thomas que Jehan de Gaulle va chercher l'idée de « guerre juste », « la paix parfaite » étant à ses yeux chimérique. Les chiens ne faisant pas des chats, on retrouve dans ce roman le pessimisme foncier du Général pour qui l'Histoire était tragique, forcément tragique.
C'est ce qui fait la force de ce livre étrange. On croit souvent entendre monter du fond des siècles la voix du Général que son petit-fils fut en âge de bien connaître et sur lequel il a déjà écrit deux ouvrages, l'un de souvenirs, l'autre de Mémoires apocryphes. Magie de la littérature…§
« Chevalier solitaire », d'Yves de Gaulle (Plon, 528 p., 22,90 €).
Sandrine Roudeix/Ed. Plon
Le général de Gaulle, remontant sa généalogie, écrivit qu'à Crécy (1346) Jehan de Gaulle déconseilla à Philippe VI de Valois, roi de France, d'y livrer bataille. 1417-1346, vue l'espérance de vie des hommes de guerre de l'époque, il y a un doute. La bataille de Crécy est considérée comme "le tombeau de la chevalerie française".
" Charles VII, l'un des plus grands rois de France " ? Vous en êtes vraiment sur ?