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ALEXANDRE LANGLADE 1820-1900 Poésies Languedociennes ...

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<strong>ALEXANDRE</strong> <strong>LANGLADE</strong><br />

<strong>1820</strong>-<strong>1900</strong><br />

<strong>Poésies</strong> <strong>Languedociennes</strong><br />

Edition intégrale de l'œuvre parue de 1873 à 1906, augmentée d'inédits.<br />

Avec une biographie de Langlade, une bibliographie, un choix de critiques et d'études<br />

contemporaines,...<br />

Textes réunis, présentés, annotés par Jean-Marie PETIT, Professeur à l’Université de Montpellier III<br />

avec la collaboration de Huguette Régis-Lebrun


AVANT PROPOS<br />

La présente édition réunit la totalité de l'œuvre lyrique d'Alexandre Langlade écrite à partir de 1872 et<br />

publiée à partir de 1873. Selon les vœux du poète nous avons classé les grands poèmes dans l'ordre<br />

chronologique de leur parution et nous avons regroupé les pièces éparses sous un même titre. Ceci<br />

bouleverse quelque peu l'économie des deux tomes prévus par le premier éditeur Alphonse Roque-<br />

Ferrier qui ne put mener l'entreprise au delà du premier volume (1906).<br />

L'édition critique que nous aurions souhaitée et qu'un certain public pouvait attendre ne nous a pas été<br />

réalisable. Les manuscrits originaux de Langlade que nous avons retrouvés se sont révélés trop<br />

lacunaires, trop peu lisibles — souvent à l'état de simple brouillon — pour être utilisables et les<br />

quelques copies destinées à la composition étaient, soit de la main de Roque-Ferrier, soit abondamment<br />

surchargées par lui, ce qui nous renvoyait directement à ses publications. Le travail de normalisation<br />

graphique et de correction effectué sur l'œuvre de Langlade à son impression semble important, il nous<br />

est malheureusement impossible d'en connaître exactement les contours. A cette distance nous n'avons<br />

pas voulu ajouter celle d'une nouvelle normalisation qui n'aurait fait que compliquer une situation déjà<br />

contestable de manipulation. Nous étions dès lors condamnés à suivre la voie étroite de l'imprimé —<br />

La Fada Seranéla exceptée — libre à nous de sélectionner les éditions quand il y en avait plusieurs.<br />

Nous avons donc écarté de notre choix les textes provençalisés sous la responsabilité de Paul<br />

Mariéton ou de Frédéric Mistral dans la Revue Lyonnaise ou dans la Revue Félibréenne et donné la<br />

préférence par un simple souci d'homogénéité à leur reprise, d'ailleurs systématique, dans le Felibrige<br />

Latin sous la forme languedocienne à la manière de Roque-Ferrier.<br />

La rareté des originaux nous posa le même genre de problèmes pour les traductions françaises. Les<br />

textes remaniés et les copies d'une autre main que celle de l'auteur sont encore ici majoritaires...<br />

L'ensemble n'est certes pas dépourvu de qualités mais on aurait pu souhaiter pour l'Estanc de l'Ort en<br />

particulier un certain nombre d'éclaircissements lexicographiques tels que ceux que nous avions prévus<br />

et rédigés. Des difficultés matérielles nous interdisant une nouvelle composition et l'impression de<br />

notes en regard des textes eux-mêmes, nous avons dû nous résigner à reproduire les traductions<br />

existantes et renoncer à publier un glossaire, qui, nécessairement aurait été paginé à part, ce qui l'aurait<br />

rendu pratiquement inutilisable.<br />

La nouveauté de ces deux volumes est cependant évidente. Le corpus complet rassemblé ici pour la<br />

première fois est entouré d'une série, d'études inédites et récentes qui orientent et enrichissent sa<br />

lecture, l'essai de biographie sort enfin le poète de l'enfer où les clivages idéologiques et les fausses<br />

pudeurs l’avaient relégué. La bibliographie, le choix original des textes critiques des contemporains<br />

sont autant d'éclairage qui étaient devenus nécessaires.<br />

Les textes de F. Amy de la Bretèque, P. Caizergues, P. Gardy, J. M. Petit ont fait l'objet de<br />

communications au Colloque Alexandre Langlade du 8 juin 1988. Ils clôturent cette édition comme un<br />

nouvel hommage de l'Université Montpelliéraine au paysan poète de Lansargues.<br />

Jean-Marie Petit<br />

Essai de biographie d'Alexandre Langlade*<br />

D'une vieille famille rurale<br />

Les plus lointains ancêtres que l'on ait pu attribuer au poète sont originaires de Saint-Nazaire de Pézan,<br />

petite bourgade située entre Lunel et Mauguio. La lignée des Langlade de Lansargues remonte pour sa<br />

part et de façon certaine au XVIIe siècle avec Jean Langlade né le 20 janvier 1681 qui occupera les<br />

fonctions de Lieutenant de Maire en 1702 (1).<br />

Il y a dans la filiation directe des ménagers (propriétaire-agriculteurs) et des tonneliers. Le métier de<br />

tonnelier sera exercé chez les Langlade à partir de l'an VI c'est-à-dire du grand-père du poète, qui est de<br />

plus à la tête de la municipalité lansarguoise en 1790 (2).<br />

Famille nombreuse qui restera pendant plus de deux siècles géographiquement stable dans le Lunellois<br />

et qui comptera aussi des soldats (dont un colonnel-baron d'Empire) un procureur juridictionnel, deux,


apothicaires, un notaire, un chirurgien, un viguier... et dont la grande majorité des membres signent de<br />

leur nom les registres d'état civil.<br />

Le père et la mère du poète échangeront avec leur entourage une abondante correspondance qui<br />

témoigne d'un bon niveau d'instruction en français (3).<br />

Contrairement, à ce qu'a longtemps dit ou laissé supposer une critique contemporaine, Alexandre<br />

Langlade n'est pas, comme par miracle, surgi d'une ruralité épaisse.<br />

* Cet essai apporte un grand nombre d'éléments inédits sur la vie et l'œuvre d'Alexandre Langlade.<br />

Pour ne pas alourdir un texte déjà riche, il nous est apparu indispensable de renvoyer à des notes<br />

abondantes. Nous nous en excusons auprès du lecteur pressé qui pourra, s'il le désire, en faire<br />

l'économie.<br />

Son ascendance n'est certes pas celle de grands notables ni de gros propriétaires terriens, mais elle n'a<br />

rien à voir avec la misère (sociale, intellectuelle) dont le XIXe a voulu faire le terreau privilégié des<br />

poètes paysans (4).<br />

Sous le toit paternel.<br />

Philippe Alexandre Langlade est né à Lansargues le 14 octobre <strong>1820</strong> à quatre heures du matin. Il est<br />

l’aîné des quatre enfants du mariage de Jean Langlade, tonnelier, et de Françoise Lange. Son père sera<br />

par la suite distillateur à Lansargues puis homme d'affaires à Montpellier et à Mireval (5). Sa mère<br />

possède des biens propres qu'administre un tuteur… Elle est d'un tempérament maladif, d'une langueur<br />

romantique et s'adonne au spiritisme avec passion (6).<br />

Le couple subira des revers de fortune dus à la mauvaise gestion du chef de famille qui accumule<br />

hypothèques et faillites (7). Alexandre sera très tôt en conflit avec son père dont il devra par la suite<br />

réparer les erreurs.<br />

Son frère Germain (1823-1888) après une enfance Lansarguoise deviendra pharmacien et s'installera à<br />

Lyon définitivement en 1846 (8); son second frère Alexandre-Aimé né en 1828 et mort à 22 ans après<br />

des études aux beaux arts aspirait à devenir sculpteur et musicien, suivant sur ce point une tradition<br />

familiale (9), le dernier enfant Eléodore, une fille est née en 1832 et morte l'année suivante.<br />

Enfance et adolescence<br />

Nascut d'una familla de mainajeirots, mainajeirot parier, ai treva fescola de moun vilatge saique 3 o<br />

4 ans. A ma sourtido savie per aqui patatin-pares, dit le poète dans une des brèves autobiographies<br />

qu'il nous a laissée (10). Un autre texte précise qu'il fréquenta cette école de village jusqu'à 14 ans<br />

(11).<br />

Fin qu'a l'age de 18 ans ai viscut pas mai que de pantais de joinessa, de cant, de dansas et de<br />

necijes, pasmens quand pouvié atrapa un libre lou debourissié (12).<br />

Langlade reviendra plusieurs fois sur ce double aspect d'une folle jeunesse amoureuse des plaisirs<br />

villageois et avide de savoir. Il apprendra cependant (et en cela il demeure dans une norme coutumière)<br />

les métiers familiaux de tonnelier, de distillateur et de paysan (13).<br />

A 17 ans il se brouille avec son père. Il quitte Lansargues d'un cop de testa (14), à la suite de quelque<br />

fredaine dira-t-on encore (15), et lui d'ajouter: un matin quitère lou nis de rescoundoun (16). Il part<br />

pour Lyon. Non pas à l'aventure puisqu'on le retrouve comme apprenti-pharmacien chez un Monsieur<br />

André originaire de Lansargues. Ce départ quelle qu'en soit la raison avait certainement été préparé et<br />

avait probablement reçu le consentement mitigé de sa mère (17). Il lui sera cependant reproché comme<br />

une fuite, moralement condamnable, par un parent proche du côté maternel (18).<br />

Alexandre ne restera que 18 mois dans l'officine lyonnaise de M. André où sa présence n'était<br />

d'ailleurs pas assidue (19).<br />

Il renonce au métier d'apothicaire pour de nouveaux horizons, suivant sa naturelle inclination au<br />

mouvement et au voyage. E puéi vos eau dire tabé qu'aimave lou viage, me semblava que tot en fora<br />

del pais éra béu que se pot pas mai (20). et c'est en Amérique que le jeune homme rêve de tenter sa<br />

chance.<br />

A pied, avec un compatriote de son âge, il tente de rejoindre à Marseille un paquebot en partance pour<br />

New york. L'embarquement pour l'Amérique ne se fera pas. Arrivé à Marseille Alexandre devra<br />

chercher du travail pour subsister en attendant une autre occasion de voyage. Il retrouvera sur les quais<br />

la doloire de tonnelier, un métier de terre et de port (22).


En 1839 l'aventure outre-mer passe aussi par l'Algérie. Après la campagne des Portes de Fer, l'invasion<br />

de la Mitidja par l'émir Abd-el-Kader, l'armée, recrute et en particulier le 2° régiment d'Infanterie légère<br />

caserné à Draguignan. Rêve d'Afrique, patriotisme juvénile habilement exploités par la réclame des<br />

sergents spécialisés, Langlade signa un engagement pour 7 ans à la mairie de Marseille, le 28<br />

novembre 1839, non sans avoir sollicité de son père les autorisations nécessaires car il est mineur. Il<br />

est incorporé à Draguignan le 3 décembre de la même année (23).<br />

La campagne d'Afrique<br />

Langlade fit les campagnes de 1840 et de 1841, sur une durée de 18 mois réglementaires (24). Il reçut<br />

le baptême du feu le 12 mai 1840 au col de Mouzaïa et il guerroya dans la région de Médéa sous les<br />

ordres du colonel Changarnier. Aussi bien par son courage que par sa forte tête Langlade, se fit, dit-on,<br />

remarquer de ce chef pittoresque (25). Un certain nombre d'anecdotes rapportées par des tiers donnent<br />

de cette période l’image bigarrée d'un soldat tour à tour héroïque et facétieux (26), toutes laissent<br />

cependant entrevoir la dureté de ces campagnes d'Afrique dont il dira quelques mots dans la viradona<br />

sa première œuvre lyrique importante.<br />

Lion deter ai vist la tempesta<br />

Ai trementit jot son esfort<br />

De la fam oumbrenco e mourruda<br />

Ai sentit la rusta mourduda<br />

Ai sentit l'alen de la mort<br />

En trevant la sabla mouventa<br />

Dels deserts de l'Africa ardenta<br />

Te sies moustrada fossa fes (27).<br />

Il mène une carrière militaire en dents de scie. Nommé caporal en 1840, cassé quelques mois après,<br />

rétabli dans son grade en 1841 pour être cassé à nouveau et rétabli et promu et rétrogradé plusieurs<br />

fois (28). Roque-Ferrier fait part des désenchantements de Langlade qui avouait avoir souffert au delà<br />

de toute expression en voyant de ses propres yeux que la mission d'Afrique était faite d'égorgements,<br />

d'exactions et de pillages, que le viol des femmes et le meurtre des enfants y avaient leur place, que les<br />

arabes enfumés comme des renards au fond des grottes, où leur patriotisme vaincu s'était réfugié,<br />

mettait de tristes taches au front de la civilisation française... (29)<br />

Ce n'est donc pas un héros, fier de ses exploits, qui reviendra d'Afrique en cette fin d'année 1842 mais<br />

un soldat déjà las de son engagement et peu enclin à faire carrière militaire.<br />

Retour en France.<br />

Le 2° léger à son retour d'Algérie fut caserné à Montpellier et cette garnison proche de Lansargues<br />

permit à Langlade de renouer avec sa famille. Il fut reçu dans la maison paternelle en enfant prodigue<br />

et, sans souci des règlements, il y séjourna à l’envie au risque d'être plusieurs fois porté déserteur.<br />

L'indiscipline au retour d'Afrique était d'ailleurs chose commune chez ses compagnons d'arme et pour<br />

Langlade les sourires d'une proche jeune cousine un attrait supplémentaire (30).<br />

Après son séjour languedocien le 2° léger fut déplacé sur Paris. Après 30 jours de marche Langlade se<br />

trouva logé à l'Ecole Militaire où il partagea la vie de garnison jusqu'au 11 octobre 1844 (31).<br />

Les longs loisirs que lui laissera son service lui permettront d'améliorer sa formation intellectuelle. Il<br />

passera le plus clair de son temps à la Bibliothèque Nationale, dans les musées, à suivre divers<br />

enseignements, des conférences, avide de connaissances (32).<br />

Dans sa correspondance avec sa famille il exprime cependant le désir de rentrer à Lansargues, et de<br />

s'établir à la terre, imaginant toute sorte de moyens pour contourner les obligations de son engagement<br />

de 7 ans. Cet engagement devra cependant (faute de motif valable) être intégralement<br />

honoré et Langlade suivra son régiment de Paris à Phalsbourg, (octobre 1844) et à Metz (octobre<br />

1845).<br />

Ses lettres de France marquent encore de profondes désillusions sur l'état militaire (33). Langlade ne<br />

cherche cependant pas à heurter les opinions légitimistes des siens, même s'il émet des réserves ou s'il<br />

ironise sur certaines pratiques de casernement. A Metz l'armée chargée du maintien de l'ordre va le<br />

mettre en face de la misère et de la révolte populaire. Dans une lettre du 2 août 1846 il semble avoir


une vision lucide de la situation de la classe ouvrière et des rapports de force en présence dans les<br />

conflits du moment (34), il est cependant en terre lointaine, impatient de retourner au pays, à ses gens, à<br />

la liberté civile. Il sera libéré le 1er novembre 1846 et retournera immédiatement dans ses foyers.<br />

Le retour à la terre.<br />

En 1 846 les parents d'Alexandre Langlade ont quitté Lansargues pour Montpellier. La distillerie<br />

paternelle étant en faillite, le père avait manifesté le désir en avril 1846 de vendre (35) tous les biens de<br />

Lansargues grevés d'hypothèques, mais la vente ne se fit pas, bloquée par la famille matérielle (36).<br />

Alexandre, aîné des enfants est chargé, probablement par décision d'un conseil de créanciers de<br />

reprendre la situation en main. Le domaine agricole familial est en ruine, les autres biens sous tutelle, il<br />

payera une partie des dettes attachées à la distillerie, replantera les vignes, lèvera l'hypothèque de la<br />

maison en devenant pendant deux ans commis de banque à Montpellier et à Nîmes (37).<br />

En 1847 il est définitivement installé à Lansargues (38), à la fin de 1848, il est paysan à part entière, sur<br />

la propriété paternelle en semaine et menestrier c'est-à-dire musicien instrumentiste les dimanches et<br />

fêtes et travailleur à l’emperau (heures supplémentaires) pour arrondir les fins de mois difficiles (39).<br />

La propriété compte 10 sétérées de vignes (entre 2 et 3 hectares) 2 sétérées, d'oliviers, une sétérée de<br />

chênes verts et amandiers et un jardin potager, ce qui est modeste. Pour amortir l'entretien d'une bête,<br />

cheval ou mulet, il loue des champs (41) qu'il ensemence. Il travaille seul, beaucoup et durement.<br />

Cette situation matérielle difficile dès son installation ne s'améliorera guère au cours des temps.<br />

Nouvelles dettes, nouvelles faillites de son père qui fuit la France en 1854 le laissant face à ses<br />

créanciers, affaires hazardeuses de son frère Germain, le pharmacien de Lyon qui prend sans crier gare<br />

les terres de Lansargues pour couverture hypothécaire et le met en danger d'expropriation (42) —<br />

Crise phylloxérique qui vers 1878 ruine son vignoble qu'il devra replanter intégralement. Certains des<br />

ses amis félibres lui prêteront de l'argent vers 1880 (43) et il aura beaucoup de peine à les rembourser<br />

pendant la décennie suivante.<br />

Au moment des difficultés les plus noires il envisage certaines reconversions professionnelles plus ou<br />

moins illusoires, il projette d'installer une imprimerie à son domicile (44), de vivre de sa production<br />

poétique en organisant des soirées-récitals comme un troubadour moderne, de devenir musicien de bal<br />

à temps plein (45), de planter une pépinière de plants de vigne américains dont il espère la fortune (46).<br />

Rien de tout cela ne se réalisera mais Langlade en parlera et en rêvera beaucoup.<br />

En décembre 1889 enfin, après des années de démarches officielles infructueuses, il obtient au titre<br />

d'ancien, militaire un bureau de tabac-régie (47). Il le tiendra jusqu'en 1894, ce qui lui donnera une<br />

certaine autonomie financière (48) quand il aura cédé la propriété agricole à son fils Germain (en<br />

1888).<br />

Langlade aura donc mené une vie de paysan pauvre, une vie de labeur ou incertitudes matérielles et<br />

catastrophes ne lui on pas été épargnées. Il a su faire face avec probité selon la règle non écrite de la<br />

société paysanne traditionnelle. Il a payé au prix fort sa liberté rurale tant aimée.<br />

Lou nis… La vie familiale et affective.<br />

Le jeune homme si l’on croit sa correspondance de militaire semble avoir été très sensible au charme<br />

des jeunes filles... C'est un amateur de bals populaires et de réjouissances villageoises, cap de jovent<br />

(49), de Lansargues à son retour de l'armée il a la jambe leste et le vers facile... On a retrouvé de petites<br />

compositions galantes (acrostiches, quatrains, chansons) en français destinées à diverses demoiselles,<br />

du village (50) où par de subtils raccourcis il proclame une passion à chaque fois incendiaire et<br />

éternelle. Il n’est pas exclu cependant que Langlade ait prêté sa plume à quelque camarade moins doué<br />

que lui pour ce genre de compliment. Après six années de célibat lansarguois qui, malgré les<br />

occupations, multiples ne furent pas moroses, Langlade trouva la perle rare en la personne d'Agathe<br />

Pouchet, du village voisin de Valergues. Langlade avait 32 ans, elle en avait 22. Il l'épousa le 17 juin,<br />

1852 (51).<br />

Pouchette sera pour Langlade le port d'attache, défini. Amour conjugal tout rond, tout simple, tout vrai<br />

qu'il évoque avec simplicité et sans détours dans la Viradona.<br />

Pioi aici l'amour m'encadena<br />

l'amour de tus e de ma femma<br />

Das enfanton et de l’oustau


Sa femme, ses enfants, ses petits enfants, la famille que l'on fait, l'amour que l'on vit, valeurs pour lui<br />

exaltantes et exaltées, inépuisables...<br />

Le couple aura une fille et trois fils. Les deux premier Marie-Estelle et Jean-Martin mourront en bas<br />

âge, le troisième Aimé-Henry de tempérament artiste et maladif mourra à 25 ans, le dernier Jean-<br />

Antoine-Germain (1862-1935) lui donnera enfin le bonheur d'être grand père, situation qu'il vivra avec<br />

délices (53).<br />

Les deuils familiaux, la perte de son frère Aimé en 1850 celle de ses premiers enfants en 1854 et<br />

surtout celle de son fils en 1884 furent autant de douleurs qu'il fallut vivre et dépasser. A celles-là<br />

s'ajoutèrent d'autres blessures moins visibles et pourtant tout aussi réelles: la rupture avec son père,<br />

probablement ancienne, mais aggravée par une suite de mécomptes affectifs (54) et d'inconduites<br />

diverses, les comportements conjugaux et familiaux singuliers de son frère Germain à partir de 1876 et<br />

la rupture avec lui, deux taches d'ombre qu'Alexandre tentera d'éclairer avec bonté, pansant les<br />

blessures des proches, prenant sur lui la réparation des torts, avec douceur, sans faiblesse, mais aussi<br />

sans complaisance (55).<br />

L'optimisme de Langlade n'est pas une donnée immédiate et facile, mais une vertu qui se gagne et sur<br />

des champs où le malheur laboure à contre sens.<br />

Le républicain.<br />

De 1847 à la Commune Langlade jouera un rôle de premier plan dans le camp des républicains de<br />

Lansargues et du Lunellois. Rôle d'animateur, de propagandiste, de porte parole, de polémiste, de<br />

chansonnier… militantisme romantique qui s'interdit les mandats électifs importants pour sauvegarder<br />

une image de pureté sur la place publique.<br />

Aux lendemains du 24 février 1848 Langlade fonde l'Association fraternelle des travailleurs de la terre<br />

qui est l'une des premières sociétés de secours mutuels de l’Hérault (56). Cette société fonctionnera<br />

jusqu'au coup d'état du 2 décembre 1851 où elle fut interdite par le pouvoir bonapartiste après des<br />

affrontements pittoresques (57).<br />

Langlade ne se tint pas pour battu, bien au contraire, il mit toute son énergie à organiser le Parti<br />

Démocratique lansarguois et en fit un foyer de propagande républicaine qui rayonna largement sur les<br />

cantons avoisinants (58).<br />

La fondation du Club des Montagnards de Lansargues inaugure une longue période d'action riche en<br />

péripéties. La Montagne se réunira d'abord dans les cafés soit chez Gouberte soit chez Mazagran puis<br />

pendant les périodes difficiles dans des lieux plus discrets et parfois secrets: les caves ou les masets<br />

des champs (60). Et Langlade sera l'animateur du groupe, lisant la presse d'opposition, chantant ou<br />

disant des compositions satiriques, rédigeant textes et motions.<br />

Les retombées municipales de cette action sont évidentes. La ville de Lansargues, avec l'appui de la<br />

population refusera de voter le plébiscite à Napoléon III du 20 décembre (61). L'adjoint au maire<br />

Bonnet protestera officiellement contre les déportations, au nom de ses concitoyens. La répression ne<br />

se fera pas attendre. Les notables montagnards Jean Roux (maire) Auguste Bonnet (Adjoint) A.<br />

Langlade, Bonhomme, Radier, Brunel (père) furent convoqués devant les fameuses commissions<br />

mixtes et se trouvèrent dans l'obligation de fuir ou de se cacher pour éviter le pire (62). Langlade se<br />

réfugia pendant deux mois chez son frère Germain à Lyon. De retour à Lansargues alors qu'il croyait<br />

tout danger écarté (63) il fut arrêté et traduit devant la justice impériale. Il refusa de se défendre, bravant<br />

même le pouvoir mauvais. Il ne dut son salut qu'à l’intervention de son oncle Castel — homme<br />

d'ancien régime mais au cœur droit — dit un chroniqueur, qui se porta caution pour lui et le ramena à<br />

Lansargues maugrat el: contre sa volonté. Un montagnard Lansarguois Mayran pauvre revendeur de<br />

poissons moins chanceux que Langlade fut déporté en Afrique (65).<br />

La pacification bonapartiste ne désarma pas les démocrates lansarguois qui trouvèrent un stratagème<br />

électoral pour continuer à vivre en République. En 1852 Langlade prépara les élections en proposant à<br />

l'un des gros possédants du bourg (Servières) indifférent, en politique mais sensible aux honneurs de<br />

se porter en tête de liste, réservant, avec son consentement, les autres postes de conseillers municipaux<br />

aux républicains (Radier, Bouscarain, Refoussat, Bruel et lui-même). Ainsi fut élu, puis choisi par le<br />

préfet, un maire qui n'exerça pendant plus d'une décennie qu’une tutelle nominale laissant le pouvoir<br />

au parti démocratique (66). Langlade ne prolonge pas son mandat électif au delà de cette période<br />

préférant se consacrer à l'action de terrain de la Montagne (67).<br />

Le club lansarguois est en relations étroites avec les républicains de Montpellier et Langlade mentionne<br />

qu'il lui est arrive plusieurs fois de faire de nuit le trajet Montpellier-Lansargues pour des réunions


communes (68). Langlade organise en 1869 la souscription au journal La Liberté (69), il correspond<br />

avec les notables républicains de la ville: Brousse, Teule, Baumis, Barlet, Laissac, Servel, Audibert du<br />

journal la République. Faut-il dater son engagement maçonnique, évident par la suite de cette époque<br />

de militantisme? Rien ne le prouve et rien ne le contredit. Nombre de ses correspondants et de ses amis<br />

républicains sont franc-maçons et ne s'en cachent pas de lui (70).<br />

Camille Brunel raconte avec lyrisme l'action de Langlade en 1870: la scène célèbre où le 4 septembre,<br />

sur la place publique il proclame la République monté sur une table, son engagement dans la garde<br />

nationale du canton de Mauguio qui le choisit comme chef de bataillon (71) La commune et ses<br />

épisodes de luttes fratricides le mirent dans le désarroi, il écrivit dans Les Droits de l’Homme (le<br />

journal de Jules Guesdes) une pièce de vers intitulée n’ia prou (Français de Versailles et Français de<br />

Paris n’ia prou, assez de larmes, assez de sang!) 72.<br />

Cependant, en vue de résister à toute tentative de restauration monarchique les républicains de l'Hérault<br />

s'organisèrent et avant de passer aux actes envoyèrent une délégation à Thiers pour le mettre en<br />

demeure de se prononcer nettement pour la République. Langlade représenta le canton de Mauguio<br />

dans cette délégation qui comprenait 13 membres dont Casals de Béziers, Bedos de Lunel, Guiraudon<br />

de Caux, Maffre de Mèze, Galtier de Lodève, Calas de Villeneuve les Béziers, Maffre de Montblanc.<br />

A pied le plus souvent, traversant villes et villages en répandant la bonne parole, drapeau tricolore en<br />

tête, la délégation fut arrêtée et emprisonnée deux fois, l'une à Dijon, l'autre à Nevers, puis libérée (73).<br />

Après avoir été entendue par M. Thiers (74) et quelque peu rassurée sur ses intentions, elle revint dans<br />

ses foyers après une courte visite aux communards parisiens.<br />

L'activité politique militante de Langlade se poursuivra encore quelques années où l'enthousiasme des<br />

débuts sera quelque peu émoussé. Il s'avouera par la suite déçu par l'embourgeoisement de la<br />

République, bien éloigné des aspirations socialistes qu'il avait défendues. Idéaliste impénitent, il se<br />

tourna vers la poésie, s'y adonnant aussi totalement qu'il le fit pour la politique.<br />

Le chansonnier satirique (75).<br />

Aux années politiques de Langlade correspond une œuvre satirique encore très mal connue et qui faillit<br />

être perdue à la mort du poète. Les cours coculaires cours de justice carnavalesques dont la coutume<br />

est très ancienne à Lansargues comme à Montpellier fournirent à Langlade une scène de choix pour<br />

exercer ses talents de rimeur. La Montagne eut d'ailleurs tôt fait de prendre possession de la fête, pour<br />

combattre, ici comme ailleurs le régime impérial et ses retombées locales et régionales. Tous les genres<br />

lyriques s'y trouvaient généralement confondus nous dit Camille Brunel et Langlade faisait place<br />

comble (76). Ici prirent place Las cabras de Marabeu contre l'enseignement congréganiste que l'Empire<br />

imposa à Lansargues, l’Esperoun contre le candidat Esperonnier au Conseil Général, la Coussa de<br />

biou où l'on voit un picador borgne (Gambetta) cribler le féroce taureau Le Corse de bandérilles, la<br />

Porta d'Orian, romance allégorique (sur l'air de la reine Hortense) inspirée par le voyage de<br />

l'impératrice Eugénie de Constantinople, Viva Picard, Brulo de vi qui soutiennent la candidature du<br />

démocrate Picard (77) contre le député perpétuel Pagezy, maire de Montpellier et candidat officiel de<br />

l'Empire.<br />

Langlade dans le même contexte écrivit une comédie: Lous Guindous ou Mestre Barlocòu<br />

(carnavalada en deux actes, en vers) qui fut jouée par la jeunesse lansarguoise en diverses occasions et<br />

reprise plus tard en 1880, à Montpellier, par le Théâtre Roman.<br />

Langlade qui avait jadis fondé un orphéon était excellent musicien (78). Il animait avec son ami Truel<br />

les bals dominicaux (79) accompagnant la jeunesse dans les fêtes et les ferrades (80) et c'était autant<br />

d'occasions de chanter des couplets républicains, en général des couplets d'espérance qui<br />

prophétisaient l'avènement glorieux de la République dans Lou Din-dan de la campanos, la Cansou de<br />

la lauseta ou l'Aubre de la libertat. Mais la jeunesse lui demandera aussi des compositions plus<br />

intimistes plus sentimentales et c'est à ce contact que Langlade écrivit les premières versions de<br />

quelques chansons que l'on classera plus tard dans son œuvre lyrique...<br />

Le poète dans la renaissance méridionale et languedocienne.<br />

La carrière poétique de Langlade commence alors qu'il a dépassé cinquante ans. Elle sera liée aux<br />

rencontres successives de personnages importantes dans la renaissance felibréenne: Charles de<br />

Tourtoulon d'abord, puis Alphonse Roque-Ferrier, Paul Marieton, Louis-Xavier de Ricard, W.


Bonaparte Wyse qui lui apporteront encouragements et appuis et qui l'aideront à publier ses œuvres en<br />

revues.<br />

Le Baron Charles de Tourtoulon (81), châtelain de Valergues, membre fondateur de la Société pour<br />

l'Etude des Langues Romanes est une des grandes figures de la renaissance languedocienne. Historien,<br />

dialectologue, philologue, théoricien de l'Idée latine, directeur de la Revue du Monde Latin, cet<br />

aristocrate républicain découvrit le poète de Lansargues en mars 1878, à la lecture du manuscrit de La<br />

Viradona qui lui fut communiqué non pas par Langlade mais par un ami commun M. Rivière.<br />

Tourtoulon corrigera l'orthographe du texte et le publiera dans La Revue des Langues Romanes (82).<br />

Il parrainera la candidature du poète à la Société, l'incitera à se présenter à tous les concours, littéraires<br />

où il a quelque influence, l'attirera chez lui à Valergues pour le présenter à ses visiteurs et le fera élire<br />

enfin comme Majoral en 1876 (83). Amitié toute fraternelle de l'aristocrate et du plébéien, intimité<br />

vraie, sans nuages et pour la vie (84.<br />

Alphonse Roque-Ferrier de 24 ans son cadet, grand érudit montpelliérain, secrétaire charismatique de<br />

la Société pour l’Etude des Langues Romanes, de la maintenance du Languedoc, apôtre puis hermite<br />

de l'Idée Latine, fournira un travail immense dans le cadre de la renaissance languedocienne.<br />

De tempérament pointilleux, ombrageux, autoritaire (dictatorial disent ses ennemis) il mène avec fièvre<br />

l'opposition languedocienne à l'école provençale et au Félibrige avignonais, et cela jusqu'à la rupture et<br />

la fondation d'un Félibrige bis. Le Felibrige Latin, s'opposant à Albert Arnavielle et à Louis Roumieux<br />

dans des polémiques sans fin (85). Bonapartiste et clérical, Alphonse Roque-Ferrier est<br />

idéologiquement à l'opposé de Langlade (86). Cela ne l'empêche pas même s'il avoue parfois son<br />

désaccord de pensée de publier dans les revues et almanachs qu'il dirige successivement tous les textes<br />

que Langlade lui confie (87).<br />

Les deux hommes s'admirent et se respectent et Langlade choisissant le camp languedocien acceptera<br />

d'être président d'honneur du Félibrige Latin schismatique et de sa maintenance de France (88).<br />

Langlade, poète de l'Idée Latine ne pouvait guère agir autrement en 1890. Il ne donna pas, cependant,<br />

sa démission du Félibrige comme le firent Tourtoulon et Roque-Ferrier et resta le plus possible en<br />

dehors des polémiques (89) sévères du moment.<br />

Louis Xavier de Ricard, lui aussi républicain, franc-maçon et patriote latin le découvrit chez Tourtoulon<br />

lors de son séjour à Montpellier. Il publia des vers de Langlade dans l'Alauseta (l'Alouette), le fit<br />

publier chez ses amis et l'appuya auprès de la critique parisienne et provinciale qu'il connaissait bien<br />

(90).<br />

Paul Marieton a certainement beaucoup estimé l'œuvre de Langlade et il contribua à la faire connaître<br />

outre-Rhône en imprimant un certain nombre de textes, mais dans des versions provençalisées par<br />

Mistral au désespoir de Roque-Ferrier qui cria à la trahison (9l).<br />

W. Bonaparte Wyse, personnage bien connu dans la renaissance du XIXe siècle sera l’admirateur<br />

inconditionnel de Langlade et l'accompagnera de sa chaleureuse amitié (92).<br />

Langlade poète fut fêté dans le Félibrige qui se réjouit d'avoir un authentique paysan à ajouter à ses<br />

palmarès (93). Le coup d'envoi de la célébrité fut donné lors du banquet des Fêtes Latines de<br />

Montpellier, le 24 mai 1878. Mistral y salua Langlade publiquement et de façon spectaculaire et c'était<br />

dans la société très ritualisée des écrivains d'Oc du XIXe siècle le meilleur passeport poétique (94).<br />

Loué ou couronné d'un nouveau prix à chaque publication (95), Langlade recevra une abondante<br />

correspondance d'admirateurs tout au long de sa carrière. En Languedoc, particulièrement dans<br />

l'entourage du Félibrige Latin, on ira même jusqu'à lui donner le titre de Virgile languedocien et<br />

Roque-Ferrier, Auguste Brun font assaut de rhétorique pour soutenir une comparaison qui ne manque<br />

pas de lever des boucliers du côté des provençaux. L'intention, de ce côté du Rhône est certes de<br />

célébrer un poète tenu pour important, mais c'est aussi d'opposer à Mistral un autre patriarche de la<br />

renaissance, supposé aussi grand que lui, à un Homère, un Virgile des pays d'Oc (96). Langlade se<br />

prêtera peu à ce genre de controverse mais ses rapports avec Mistral en souffriront au point d'être à<br />

peu près inexistants dans la dernière décade de sa Vie (97). Dans plusieurs écrits inachevés, on sent<br />

d'ailleurs Langlade très critique sur l'œuvre de Mistral, notamment de Mireille qu'il n'aime pas et envers<br />

le Félibrige en général (98). Assidu les premiers temps aux félibrées surtout quand elles se déroulent<br />

en Languedoc, il le sera beaucoup moins par la suite, prétextant des travaux agricoles ou d'autres<br />

motifs d’empêchement. La mondanité de certaines manifestations, leur protocole, et les querelles de<br />

personnes lui seront aussi désagréables (99).<br />

C'est à Lansargues lou brès, lou nis son espace poéticolinguistique privilégié qu'il se trouve le mieux et<br />

c'est là qu'il reçoit de nombreux amis dans sa maison ou dans les champs disant volontiers ses œuvres<br />

qu'il sait par cœur (100).


Un problème hantera Langlade toute sa vie qui est celui de la diffusion de ses écrits. Il a certes<br />

bénéficié du support de grandes revues et de leur système de tirés à part ce qui n'est pas négligeable<br />

(l01) mais l'édition d'un recueil cohérent d'un grand poème comme l’Etang de l’Ort rencontreront<br />

toujours des difficultés financières qu'il ne saura pas résoudre (102). Trop pauvre pour supporter le<br />

compte d'auteur, maladroit quand il s'agir de lancer une souscription, mal servi par des amis trop<br />

engagés dans des controverses interminables, incompris comme poète dans son entourage immédiat, il<br />

ne peut non plus attendre de ses compatriotes à peine sortis de la ruine causée par le phyloxéra, une<br />

aide substantielle. La clientèle pour la poésie, fut-elle en langue d'Oc, est aussi chose rare en zone<br />

rurale (103).<br />

Les deux volumes de, ses oeuvres poétiques préparées patiemment ne verront pas le jour de son vivant<br />

(l04).<br />

L'écriture de la langue occitane.<br />

Langlade est un occitanophone qui a fait ses premiers essais d'écriture du languedocien de Lansargues<br />

avec la chanson de village.<br />

Le premier modèle, qu'il se reconnaît est le potier-poète Peyrottes de Clermont-l'Hérault. Sa formation<br />

livresque est française et il n'aura entre les mains les œuvres des félibres qu'à un âge déjà avancé (l05).<br />

Cette situation socio-linguistique et socio-littéraire est complexe et les repères sont encore trop flous<br />

pour être envisagés ici avec sérieux.<br />

Les manuscrits retrouvés de Langlade prouvent à l'évidence que l'orthographe — qu'elle soit française<br />

ou occitane — n'est pas son souci majeur, aussi bien dans les premières œuvres que dans les<br />

dernières. Les textes fourmillent de notations approximatives, d'à peu près, d'un polygraphisme et d'un<br />

polymorphisme qui, conjugués avec son écriture parfois à la limite du lisible, ont rendu et rendent la<br />

tâche fort difficile à ses éditeurs (106).<br />

Au strict point de vue de la langue, la richesse de vocabulaire, les tournures parfois très idiomatiques,<br />

son recours fréquent au dire populaire font partie de sa norme. Rien n'est ici artificiel mais conforme à<br />

sa situation de ruralité. Langlade pousse cependant l'appétit de langage et le souci d'exactitude fort loin,<br />

quand il traite de sujets très précis comme la chasse, la pêche, les étangs ou la mer. A l'école de<br />

Tourtoulon qui fut le premier grand dialectologue de France (107), il fera des enquêtes linguistiques<br />

dont nous avons retrouvé certains manuscrits. Une seule de ces enquêtes sera publiée comme telle<br />

(108), mais les autres rentreront dans la composition du paysage linguistique de son œuvre pour<br />

laquelle elles avaient d'ailleurs été entreprises.<br />

Nous n'avons pas retrouvé le glossaire qu'il avait entrepris de rédiger sur le dialecte languedocien<br />

(109), mais dans ses papiers d'enquête y compris dans ceux de ses dernières années se trouvent encore<br />

des ensembles de proverbes, des formules, des expressions, des notations ethnographiques sur<br />

Lansargues et les villages voisins (110.<br />

Un autre problème est posé par la version française des poèmes de Langlade. Vraisemblablement ses<br />

éditeurs ont exigé de lui qu'il fournisse une traduction de ses textes et tous les manuscrits connus en<br />

sont pourvus (111). Mais Langlade qui écrit par ailleurs fort bien en français (112) semble mettre un<br />

malin plaisir à négliger ce travail qui apparemment ne l'intéresse pas. Traductions approximatives mais<br />

cependant peu littéraires avec des déséquilibres sémantiques et rythmiques qui devront être corrigés à<br />

l'impression comme la graphie de ses textes. Ceci sera fait avec plus ou moins de bonheur. Alphonse<br />

Roque-ferrier qui sera le principal correcteur de Langlade se contentera de rendre le texte français<br />

lisible alors qu'il normalisera le texte occitan de façon beaucoup plus stricte mais en le ramenant à ses<br />

modèles du purisme montpelliérain (113). Pour l’Alerta parue dans la Revue Felibréenne et pour<br />

certains fragments de la Fada Seranela (qui furent provençalisés) la traduction revue par Mistral ou<br />

Mariéton le fut dans des conditions aussi discutables (114). Sauf dans le dernier cas qui fut l'objet de<br />

litiges graphiques, Langlade semble s'être fort bien accommodé de cette situation qu'il ne chercha pas à<br />

modifier au cours des ans.<br />

Portraits.<br />

Les portraits de Langlade ne manquent pas qui ont été écrits pour leur grande majorité après sa mort.<br />

Ses amis, ses proches ont tenu à porter témoignage du personnage dans sa singularité ou son<br />

exemplarité et les écrivains ont parlé du poète (115). Ces images croisées ou superposées n'ont rien de<br />

contradictoire et définissent un profil cohérent.


Au physique d'abord, il est d’une taille et surtout d'une robustesse que l'on situe au-dessus de la<br />

moyenne (116). A 78 ans, on le dira encore alerte, vigoureux et toujours jeune. Durci par le travail, il<br />

s'impose par sa forte présence, son visage bruni au grand air, son regard vif droit et intense. On parlera<br />

de sa noblesse paysanne hautaine par certains aspects et dans un siècle qui aime les portraits et<br />

découvre la photographie, les artistes (E. Marsal, le photographe Euzèbe Bras...) s'emploieront à servir<br />

cette image (117).<br />

Au moral, la polyphonie de ses contemporains a fini par composer une hagiographie qui pourrait<br />

paraître abusive si le détail de sa vie assez bien connu aujourd'hui ne venait pas en confirmer les traits<br />

principaux.<br />

Paul Hamelin salua celui qui fut le simple, le grand, le noble et le bon Alexandre Langlade (118)<br />

Roque-Ferrier insista à plusieurs reprises sur sa réserve et sa bienveillance naturelle, son honnêteté et<br />

sa franchise: Langlade l'honnêteté et la franchise personnifiées (119).<br />

Je n'a jamais entendu Langlade dire du mal de personne il fallait que le mal lui fut non pas sept fois<br />

mais soixante et dix sept fois prouvé pour y croire — mais sa conviction faite il y tenait avec un<br />

attachement de vieux romain (120).<br />

Je n'ai jamais surpris sur ses lèvres à l'égard d’un confrère en Félibrige ou en littérature méridionale,<br />

d'un concitoyen ou d'un ami la moindre critique, le plus léger dénigrement. Il ne voulait voir et ne<br />

voyait les choses que sous l'angle d'un esprit toujours optimiste et disposé à croire le bien plutôt que le<br />

mal (121). Ceci s'applique au poète dans la mouvance félibréenne. Roque-Ferrier demeurera plus<br />

réservé sur les années de militantisme républicain qu'il n'a d'ailleurs pas connues (122).<br />

On parlera encore en termes plus ou moins voilés de son héroïsme familial, de son calvaire et de sa<br />

générosité d'autant plus exemplaire qu'elle émane d'un pauvre (123). Dans le camp de ses amis<br />

républicains, son ami Ulysse Bouscarain écrivit vers 1902 un Retra d'el (124) qui en quelques lignes<br />

résume cette vie d'homme. Portrait certes lyrique mais qui mérite d'être reproduit ici intégralement:<br />

Retra d'el per un lansargoou<br />

De l'illumina engaja volountari d’Africa, la testa cafidade glourio la francésa, estrassant lou troplen<br />

de saba de soun cor de 19 ans din las palusas empouisounairas d'un mounde niou, revengué un<br />

Langlada assaji, amourous de soun cantoun d'aou fioc.<br />

Din lou pantayaire quéra 48 trouvé embraiga d'aire e de sourèl, lou pacan affama, di drech degus,<br />

voulounta d'apôtra, courage d'ataou.<br />

Din sa prisoun de 51 acos vertadié, tengué testa aou poude marri. Maougra él, soun oustalada lou<br />

revégué, endoulenti.<br />

18 ans d'espera fan d'el lou soulas das simples cadajour que fallisié lou rhetou das innocéns lou<br />

resounadou de sous pariés, lou baile ounoura d'una colha valhenta, arderousa.<br />

Sas cansouns pouliticas q'uestreiavou de man de mestre lous Jourtunàs de la vida, eroun l'estec de<br />

l'ime populari. 70 ensannousi crouciné soun cor del viel souldat francès (e subre tout, 71 lou vegué<br />

una branca d'oulivié) a la man aou mitan de sous frairés baouch ou fols. Din tout aco, crans (3)<br />

laguis, trigones de sa vida miserousa, l'ounou das sious qu'aimava fins a la fouié. L'ataou se<br />

reviscoulé, l'apôtra reprengué sa cresença e, coumo lou missiounari sa dralha, lou cantaire sous<br />

versés e remounté soun escala en cantan las flourétas dé soun jardin é dé la prada, sa viradona, tant<br />

poulida, sa jouinessa sérèna dins sous lacs d'amour (entre tem lou viel omé s’arquetava: soun biai<br />

d'amour per la beouté rustica fasié ferni lou counquistairé daurà) Canté la liberta din lous ancels de<br />

soun. Estan dé sort, canté féleno e familla amistousa, traval noble, san d'aou travalladou, é gandis<br />

au suc, é aqui... O, aqui sagué tout el: gloriola de jouinessa, amour de jouven, pensadas d'omi<br />

madu, féou, amarun de la vida que l'avien tan enfioca, mougu, croueina tout s'avaligué, é de soun<br />

ime embéluga nasquét lou garda-mas.<br />

Obra magistrala que res escafara pas. Obra soubeirana clamada per lou gigants de tras las mars,<br />

cant solemne d'un sage, ser lous pastres daou grand troupil qu'es l’Umanità.<br />

Traduction de l'auteur<br />

De l'illuminé engagé volontaire d'Afrique, la tête pleine de gloire française, gaspillant le trop plein de<br />

sève de son corps de 19 ans dans les marécages empoisonneurs d'une terre vierge, revint un Langlade<br />

assagi, amoureux de son coin de feu.<br />

Dans le rêveur qu'il était 48 trouva, avide d'air et de soleil le paysan, affamé, des droits dus, volonté<br />

d'apôtre, courage de géant.


De sa prison de 51, cela est vrai, il tint tête au pouvoir mauvais. Malgré lui sa maisonnée (famille) le<br />

revit, souffrant.<br />

18 ans d'attente font de lui le consolateur des simples chaque journée qui finissait, il était le maître<br />

d'école des ignorants, l'avocat de ses égaux, le chef respecté, d'un parti vaillant, plein d'ardeur.<br />

Ses chansons politiques qui flagellaient de main de maître les fortunés de la vie étant la plus haute<br />

conception de l'idée populaire.<br />

70 rouge de sang crucifia le cœur du vieux soldat français et par dessus tout 71 le vit une branche<br />

d'olivier à la main au milieu de ses frères fous furieux. Dans tout cela, inquiétude, soucis, déboires de<br />

sa vie de misère, l'honneur des siens qu'il aimait jusqu'à la folie. Le géant revint à la vie l’apôtre reprit<br />

sa croyance et comme le missionnaire sa route, le chanteur ses couplets, il remonta les gradins de<br />

l'échelle de la vie en chantant les fleurs de son jardin et de la prairie, sa Viredona si jolie, sa jeunesse<br />

sage, calme dans les Lacs d'Amour (parfois le vieil homme montait sur ses ergots, sa manière d'aimer<br />

la beauté rustique faisait trembler par la pensée le conquérant orgueilleux) il chanta la liberté dans les<br />

oiseaux de son Etanc de Lort, il chanta enfants et petits enfants, famille d'Arion, le travail noble, sain du<br />

travailleur de la terre et arriva au sommet de l'échelle et là... O! là il fut tout lui-même: gloire de<br />

jeunesse, amour de jeune homme, pensées d'homme mûr, fiel, amertume de la vie qui lui avait mis le<br />

corps en feu, moulu, crucifié tout disparut peu à peu dans le lointain, et dans son esprit étincelant<br />

naquit la Garda Mas. Œuvre, livre magistral que rien n'effacera que personne ne niera. Œuvre<br />

souveraine, glorifiée par les géants d'au delà des mers, chant solennel d'un sage pour les maîtres du<br />

grand troupeau qu'est l'humanité.<br />

L'évolution que l'on se plait à remarquer dans le comportement de Langlade et que l'on met sur le<br />

compte de sa maturité n'est certainement pas étrangère à son engagement maçonnique.<br />

La Franc Maçonnerie est avant toute chose une école de perfectionnement individuel (au service du<br />

perfectionnement de l'humanité), sa dialectique de la tradition et du progrès, ses valeurs essentielles<br />

d'humanisme, d'universalisme se retrouvent chez Langlade avec une telle limpidité aussi bien dans sa<br />

vie que dans son œuvre, qu'il pourrait être tenu pour un maçon exemplaire. Cet aspect que nous<br />

dévoilons ici est une des clefs de lecture importante de l'homme et de l'œuvre (l25).<br />

Langlade, son public et la critique littéraire.<br />

L'abondante correspondance que conserva Langlade (126) témoigne de l'estime dans laquelle il était<br />

largement tenu dans et en dehors du Félibrige, en Languedoc et dans la Provence voisine. A côté des<br />

montpelliérains et des languedociens de la renaissance, tous présents à ce rendez-vous épistolaire des<br />

écrivains plus marginaux, moins célèbres, plus populaires ou populistes comme Gratien Pons, Martin<br />

Crouzet (de Fabrègues) des amis républicains ou maçons comme Camille Brunel ou Servel et bien<br />

d'autres inconnus aujourd'hui qui lui ont fait une guirlande de louanges considérable (127).<br />

Si Mistral n'est présent que par deux cartes postales (128), Tavan et Brunet joignent leurs voix à celles<br />

de Marieton ou de Bonaparte Wyse.<br />

Des parisiens de la cause Félibréenne Sextius Michel, François Delille et bien d'autres personnages<br />

importants comme Henry de Bornier de l'Académie Française, E. Dorchin, Eugène Roucher de<br />

l'Institut, E. Pintard, critique et publiciste, Paul Ginisty, directeur de l'Odéon et critique littéraire, sans<br />

oublier J. Ch. Brun et Louis Xavier de Ricard sont aussi là avec une sympathie qui n'a rien de<br />

conventionnel.<br />

L'ensemble de cette correspondance constitue aujourd'hui un témoignage des lecteurs de Langlade et il<br />

mériterait d'être considéré avec attention. On s'apercevra en particulier à l'étude de ce corpus que la<br />

poésie de Langlade renvoyait à chacun une image où il reconnaissait toujours un peu de sa vérité et de<br />

sa beauté, telle qu'il pouvait la pressentir ou la rêver, que le rapport avec la langue en était du propre<br />

aveu des lecteurs considérablement enrichi et que la situation de ce paysan-poète ne laissait pas<br />

d'éveiller curiosité et attachement. Témoignages d'hommes, d'écrivains et d'une époque aussi, que<br />

l'histoire littéraire ne devait pas laisser passer.<br />

La part publique, celle de la critique, si elle se place dans un genre tout autre n'est pas moins importante<br />

par son volume et son contenu. Les signataires sont nombreux à commencer par Antonin Glaize<br />

rapporteur des concours poétiques de la Société pour les Langues Romanes, Roque-Ferrier, Auguste<br />

Brun, Paul Ginisty, Célestin Pontier, Eugène Pintard, Louis Xavier de Ricard, Ch. de Tourtoulon, Jules<br />

Véran...<br />

Antonin Glaize donna en 1875 une orientation essentielle en parlant de naturel, de vérité, de spontanéité<br />

poétique et linguistique et en faisant de Langlade ce paysan qui a le goût instinctif de la poésie, un<br />

artisan de la renaissance. A propos des Las d’Amour le même Antonin Glaize quatre ans plus tard


edira son admiration pour le poète de l'idylle moderne sincère et profonde, naïve en même temps<br />

qu'élevée. Désormais, Langlade sera le naïf en poésie et ce contemporain du douanier Rousseau aura à<br />

ses débuts beaucoup plus de chances que lui, étant peut-être mieux compris, en tous cas mieux<br />

reconnu.<br />

Les réserves sur cette naïveté et sur la place à lui donner ont certainement existé, mais elles ne seront<br />

pas exprimées en dehors de la polémique sur le Virgile languedocien qui fut le cheval de bataille du<br />

Félibrige Latin (129). Car il s'agit bien là non d'une naïveté jouée mais d'une forme vraie et cette vérité<br />

rentre dans la série des idéaux félibréens proclamés: nature, ruralité, langue du peuple, authenticité...<br />

générant la poésie...<br />

Le cas de Langlade au milieu des fantasmes d'époque est épineux car il vient, quand il est compris, les<br />

conforter mais en même temps détruire la part d'artifice que beaucoup ont posé en a priori artistique,<br />

celle d'une épaisseur rurale de façade, celle de ces poètes qui prétendent après Mistral ne chanter que<br />

pèr li pastre e gens di mas, par eux, avec eux et en eux... Langlade mieux que personne sait où se situe<br />

l'espace d'une parole pour le peuple, il est parfaitement conscient de changer de lieu en devenant poète<br />

lyrique et félibre (130) il n'en demeurera pas moins lui-même, ne faisant qu'épouser les rythmes les<br />

plus proches de l'amont de sa parole vécue et vécue au quotidien...<br />

Tout cela sera entrevu par la critique et plus ou moins explicité sans aller trop au fond du problème.<br />

Les publicistes préféreront célébrer le miracle Langlade, celui de cet illettré (131) devenu poète, de ce<br />

rustique aux gants de velours qui pêche des perles dans la mer d'une langue méprisée... Certaines de<br />

ces critiques parurent dans la presse parisienne, surtout après la mort du poète dans Le Pain de Paris,<br />

La Plume, Le Peuple français, Le Jour... mais c'est dans la presse languedocienne et felibréenne la<br />

même qui le publia qu'il faut chercher les jugements contemporains les plus proches de ses lecteurs...<br />

(132)<br />

La mort de Langlade.<br />

Langlade mourut à Lansargues le 5 février <strong>1900</strong>. Le Félibrige Latin lui fit des funérailles très<br />

honorables et publia. immédiatement après (1901) une plaquette d'hommage où l'on trouve des<br />

discours de circonstance, la reproduction de certains articles précédemment parus sur le poète et la<br />

reprise des querelles entre languedociens et provençaux (133).<br />

La souscription aux œuvres complètes d'Alexandre Langlade (lancée un an avant par les amis de<br />

Roque-Ferrier) n'étant pas close, un nouveau projet revu par un comité élargi est annoncé. On pense<br />

publier deux forts volumes de poèmes accompagnés d'études, de témoignages et d'une biographie de<br />

l'auteur.<br />

Des propositions généreuses sont faites dont celle de la municipalité de Lansargues d'ériger un buste<br />

de Langlade sur la place du village (134), un comité de parrainage pour l'érection du buste est lui aussi<br />

créé, une tournée de conférences dans le Lunellois est organisée pour promouvoir ces initiatives (135)<br />

et tout semble découler du consensus, le plus parfait. Il n'y a là qu’apparences. Le Félibrige Latin a eu<br />

toute la gloire du poète, les républicains de Lansargues réclament leur part de l'homme qui les a si<br />

longtemps représentés. Une guerre froide est dès lors déclarée entre les droites félibresques et latines<br />

et les gauches lansarguoises soutenues par Germain Langlade le fils du poète et Camille Brunel son<br />

ami, ancien montagnard à la plume alerte.<br />

Germain Langlade demande à Brunel une biographie de son père qu'il estime nécessaire en préface<br />

aux œuvres complètes en souscription (136). Celui-ci fournit un texte lyrique certes mais bien écrit et<br />

fort documenté sur le républicain et le sens républicain de son œuvre (137). Roque-Ferrier refuse de<br />

l'insérer et la situation se bloque pendant cinq ans alors que les textes poétiques, du premier volume<br />

sont déjà composés en 1902. Querelles envenimées entre rouges, blancs et bleus qui remplissent des<br />

cartons de correspondance...<br />

Le tome I des <strong>Poésies</strong> <strong>Languedociennes</strong> ne paraîtra qu'en 1906. Chez Germain Langlade à Lansargues<br />

et aux bureaux du Félibrige Latin à Montpellier, et Roque-Ferrier à nouveau maître d'œuvre trouvera<br />

une formule pudique pour expliquer l'absence de biographie en tête du premier volume:<br />

— Comme celle de la plupart de ses contemporains, la vie d'Alexandre Langlade fut mêlée de trop près<br />

aux controverses politiques, dynastiques et félibresques de la seconde moitié du XIXè siècle pour qu'il<br />

soit encore possible de l'écrire avec une suffisante impartialité. Tout au plus est-il permis de rédiger la<br />

préface bibliographique et de noter les traces de l'action littéraire du Virgile languedocien (138).<br />

Camille Brunel, interdit de préface, ne désarmera pas, cependant il continuera des recherches en vue de<br />

publier un livre vengeur contre les jésuites du Félibrige qui ont encapouchiné (sic) Langlade...


Ce livre comme les autres projets de biographie, ceux de J.C. Brun, de F. Donnadieu, d’E Pintard, de<br />

Roque-Ferrier ne vit jamais le jour. Il n'en reste que quelques notes dans la maison Langlade à<br />

Lansargues, épargnées par une crue de la Viradona qui fit son choix dans les papiers de famille, avant<br />

de l'aller noyer quelque part tout au fond de l'étang de l'Ort ou de le confondre à jamais dans la terre de<br />

Langlade (139).<br />

Jean-Marie Petit<br />

NOTES<br />

1. L'office de lieutenant de maire, conseiller du Roi est une charge qui s'achète et Jean Langlade<br />

l’acheta à sa création à Lansargues en 1702, cf. Grasset-Morel Une villette de la baronnie de Lunel:<br />

Lansargues-Montpellier 1903.<br />

2.Généalogie des Langlade de Lansargues.<br />

*Jean Langlade, mort à Lansargues le 3/02/1704 à 65 ans, époux de Magdeleine Rouvière.<br />

* Jean Langlade, né le 20/01/1681, mort en 1753, lieutenant de maire en 1702.<br />

* Guillaume Langlade né le 6/03/1709, ménager, épouse Catherine Chauchon le 6/11/1732.<br />

* Guillaume Martin Langlade né le 11/11/1733, époux de Marie Clavière.<br />

* Philippe Langlade né le 27/02/1757, mort le 19/03/1817, épouse Marie Marqués le 24/01/1784,<br />

agriculteur en l'an V, tonnelier en l'an VI, propriétaire à sa mort.<br />

* Jean Langlade né le 16 ventôse an VI, mort Alghero, le 23/08/1870, tonnelier en <strong>1820</strong>-23-28, épouse<br />

Françoise Lange (morte en 1867).<br />

* Philippe Alexandre Langlade, né le 14/10/<strong>1820</strong>.<br />

Sources: Registres de catholicité de la paroisse de Lansargues, Etat civil, de la commune.<br />

3. Ces lettres, comme la plupart des documents familiaux qui seront cités ici sont conservées à la<br />

maison Langlade, rue Alexandre Langlade à Lansargues, chez les descendants du poète, Yvan et<br />

Huguette Régis.<br />

4. cf. l'anthologie des critiques et jugements sur l'œuvre de Langlade en fin du volume II de cette<br />

édition.<br />

5. Comme la plupart des artisans de village, Jean Langlade possède une propriété agricole. La sienne,<br />

bien de famille, après avoir été l’enjeu de ses créanciers, reviendra à Alexandre après diverses<br />

procédures.<br />

L’itinéraire de Jean Langlade passe à Montpellier par la maison Duval et Codognan (Avenue du<br />

Chemin de Fer de Cette) en 1843-44 et en 1851 par la maison Achille Durant où il est régisseur.<br />

6. Françoise Lange (1799-1867) était orpheline à son mariage. Son tuteur Aimé Verdier préserva ses<br />

intérêts dans les faillites successives du père d'Alexandre. Son tempérament maladif, langoureux est<br />

souvent évoqué dans la correspondance familiale tout au long de sa vie. Les documents que nous<br />

possédons à son sujet — outre les lettres à ses enfants — sont surtout ses cahiers de séances spiritès...<br />

Cette activité à laquelle s'adonne aussi son fils Germain de Lyon - sera intense à la mort de son fils<br />

Alexandre-Aimé (1850) dont elle évoque l’esprit, son interlocuteur favori sera aussi par la suite<br />

Lacordaire (mort en 1861).<br />

7. La cascade des faillites de Jean Langlade commence très tôt vers 1934-35... et se poursuit jusqu'à sa<br />

fuite en Sardaigne en 1854 (ses créanciers l'ont menacé de mort...). Il sera là gérant d'une fabrique<br />

d'alcool à Alghero, puis tonnelier jusqu'à sa mort en 1870. La correspondance de ce père, en exil<br />

devient rapidement très amère, Alexandre se refusant à répondre à ses demandes d'argent réitérées. Il<br />

faut croire que Langlade — qui n'apprendra sa mort qu'en 1886 (par son frère Germain) — a renié ce<br />

père dont il ne parle jamais, Le contentieux n’est certainement pas que financier.<br />

8. Personnage de la Comédie humaine de Balzac... ce frère Germain, pharmacien à Lyon deviendra un<br />

chimiste assez renommé à Lyon, esprit expérimental, il inventera toute sorte de produits miracles qui


auront leur heure de gloire. Alexandre lui fournira longtemps des plantes et du vin pour ses<br />

médications et gardera de bonnes relations avec lui jusqu’en 1876.<br />

Germain Langlade fera fortune pour un temps avec une fabrique de médicaments sise à Fontaine sur<br />

Saône, mais ses spéculations multiples le mettront vers 1880 dans des situations difficiles dans<br />

lesquelles il entraînera Alexandre sans aucun scrupule en hypothéquant les biens familiaux. Menant<br />

une double vie, il aura un fils en 1867 avec l'une de ses maîtresses et abandonnera à la générosité de<br />

son frère son épouse légitime en 1876. Celle-ci fortement dépressive à la suite de ses mésaventures<br />

conjugales finira sa vie à Lansargues auprès d'Alexandre qui dit-on mit tout son cœur à soulager ses<br />

souffrances, en réparation... Germain Langlade s'occupe aussi de spiritisme (il est l'ami d'Alan Kardec)<br />

tout en affichant bruyamment des opinions de libre penseur. Il est un personnage connu du parti<br />

démocratique lyonnais (c'est aussi l'ami de Raspail) et siégera plusieurs fois un conseil municipal de la<br />

ville. Emprisonné en 1856 pendant trois semaines pour activités secrètes, il se réfugiera quelques<br />

temps à Genève en 1877 dans une période d’ordre moral. Si nous ne savons pas la date de son entrée<br />

dans la Franc-maçonnerie, nous savons qu'il en a été exclu en 1879 (lettre à son frère du 15 avril).<br />

9. On lui doit un buste d’Alexandre Langlade jeune, conservé dans la maison familiale. Les Langlade<br />

sont tous musiciens amateurs. Alexandre et son fils le seront aussi.<br />

10. A. Langlade: autobiographie I, brouillon sur cahier d’écolier d'un texte intitulé Langlade et Mistral,<br />

Archives maison Langlade.<br />

11. Germain Langlade, Notes destinées à E. Pintard biographie succinte de Langlade reprise par divers<br />

auteurs (Archives maison Langlade). Traduction: Né d’une famille de petits propriétaires, petit<br />

propriétaire moi-même, j'ai fréquenté l'école de mon village quelque trois ou quatre ans. A ma sortie je<br />

ne savais, presque rien.<br />

12. Lettre à F. Donnadieu (brouillon au dos d'une lettre de celui-ci datée du 17 mai 84) (Archives<br />

maison Langlade). Traduction: Jusqu'à l'âge de 18 ans je n’ai vécu que de rêves de jeunesse, de chants,<br />

de danses et de bêtises, cependant quand je pouvais me saisir d’un livre, je le dévorais.<br />

13. Germain Langlade notes... op. cit.<br />

14. Lansargue endrech de ma naissença<br />

Temon de ma fola jouvença...<br />

Te quitère d’un cop de testa... (La Viradona, IX).<br />

15. cf. Article de E. Cat. dans l'Education Sociale (voir bibliographie), Cat tient ce renseignement de<br />

Camille Brunel (cf. infra). La famille G. Langlade, Rose-Aimée en particulier, parle de brouille.<br />

16. Lettre à Donnadieu (citée infra).<br />

17. Il est vraisemblablement parti avec son camarade Servel qui le suivra aussi à l'armée.<br />

18. Il s'agit de l’oncle Verdier (Lettre à Alexandre s.d.).<br />

19. Biographie d'A. Langlade par Camille Brunel (copie Valette) 1ère partie.<br />

20. — Et puis il faut que je vous dise aussi que j'aimais le voyage, il me semblait que tout en dehors du<br />

pays était beau à n'en plus finir. Lettre à F. Donnadieu op. cit.<br />

21. Servel, encore une fois.<br />

22. Germain Langlade (Notes) et Camille Brunel n'en disent pas plus sur cette période.<br />

23. Archives Langlade, maison Langlade papiers militaires, correspondance et biographie de Camille<br />

Brunel.<br />

24. Un certain nombre de biographes, dans la presse en particulier, lui font faire sept ans d’Afrique ce<br />

qui n’est pas exact.<br />

25. Camille Brunel: biographie I (copie Valette).


La situation en 1840 est critique en Algérie. Les français ont des difficultés à se maintenir malgré une<br />

armée de 50.000 hommes et il n'y a pas d'autre alternative que d’évacuer ou de conquérir l'Algérie.<br />

Bugeaud en décembre 1840 décrètera l'occupation totale mettant en place des colonnes mobiles et<br />

rapides allégeant l'équipement des soldats. Il adopte aussi la tactique de la razzia avec saisie de bétail,<br />

destruction des récoltes et de villages entiers.<br />

Changarnier, le héros de Constantine et des portes de fer (1839) celui que l'on surnommera l'élégant<br />

général Bergamotte qui fait la guerre en dentelles sous le soleil d'Afrique, aura la partie dure durant<br />

cette période qui fut, disent les historiens, particulièrement dangereuse.<br />

26. Ces anecdotes sont rapportées plus ou moins longuement par Germain Langlade (Notes...)<br />

Camille Brunel (Biographie I, copie Valette) Roque-Ferrier (Biographie I et divers articles) Rose<br />

Aimée Langlade (conférence de Nîmes), Langlade les aurait paraît-il notées par écrit mais nous n'en<br />

avons pas trouvé trace. Nous renvoyons aux documents réunis en fin de volume II.<br />

27. Voir traduction accompagnant le texte...<br />

28. Dans sa correspondance il donne son adresse avec le grade de sergent-chef pendant les deux<br />

dernières années de sa carrière. Il sera cependant libéré comme sergent (cf. document: Certificat de<br />

bonne conduite).<br />

29. Alphonse Roque-Ferrier, Biogr. Man. II, archives maison Langlade.<br />

30. Il fait allusion à une cousine sans la nommer, dans plusieurs de ses lettres... ses parents sont<br />

vraisemblablement au courant de ce début de liaison.<br />

31. Les renseignements qui suivent sont extraits de la correspondance de Langlade à l'armée, lors de<br />

son séjour en France (maison Langlade: liasse correspondance militaire) à noter que nous n’avons pas<br />

retrouvé une seule lettre d'Algérie.<br />

32. Il se perfectionnera aussi en musique apprenant à jouer de l'ophicléide dans l'orphéon de sa<br />

garnison.<br />

33. Cela va jusqu'au rejet de l'armée, la lettre du 9 mai 1844 datée de Paris est très éloquente:<br />

Il y a quelque temps que mon frère m'a écrit une lettre qui m'a fait beaucoup de peine. J'ai connu dans<br />

sa manière de parler que l'état, civil lui déplaisait, il ne m'a pas dit le fin mot mais j'ai vu que l'état<br />

militaire ne lui déplaisait pas et pour cela il me demandait des renseignements. Vous pouvez penser<br />

comme il a été reçu. Je lui ai écrit une lettre foudroyante et j'ai appris par sa réponse que ma lettre avait<br />

fait son effet et je le crois pour longtemps guéri de cette mauvaise pensée.<br />

34. Depuis la dernière lettre que je vous ai écrite il y a eu des troubles sérieux à Nancy. Dans ce paysci<br />

la misère est très grande, le pain se vend cher et les ouvriers ne gagnent que très peu d'argent. Le<br />

meilleur ouvrier ne gagne que trente à trente-cinq sous en travaillant depuis le matin jusqu'au soir ce<br />

qui fait que la classe ouvrière s'est révoltée sérieusement. Il y a eu plusieurs personnes de tuées. Cette<br />

émeute n'a pas été, sitôt étouffée que les habitants de Metz en ont voulu faire autant mais ils n'ont pas<br />

été loin, la garnison est trop forte pour qu'une révolte soit possible...<br />

35. Après avoir demandé l'accord écrit d'Alexandre, l’aîné des fils. Alexandre donnera cet accord (qui<br />

contrarie ses projets) par affection pour les siens (correspondance militaire de 1846).<br />

36. Il est probable que l'arrière-oncle Verdier ait à ce moment-là fait patienter les créanciers.<br />

37. Nos sources sont ici une grande liasse de papiers notariés et de jugements des tribunaux conservés<br />

à la maison Langlade.<br />

38. Il y habite et y travaille à mi-temps, sa mère vient lui faire le ménage et demeure le plus souvent<br />

avec lui.<br />

39. Nous avons retrouvé les feuillets comptables du travail de cette époque. Cet emploi du temps est<br />

confirmé dans un manuscrit autobiographique: Langlade et Mistral.


40. L'état de cette propriété ne variera pas beaucoup, nous trouvons les mêmes superficies vers 1895<br />

dans divers écrits.<br />

41. Location des champs Servières, Castel pendant plusieurs décades (papiers comptables: maison<br />

Langlade).<br />

42 Voir note 8.<br />

Les papiers d'huissier, la littérature procédurière est trop abondante dans les archives Langlade pour<br />

qu'il en soit ici rendu compte même superficiellement. Une chose est certaine c'est qu'Alexandre<br />

emploie tous les moyens pour dédommager au maximum les créanciers.<br />

43. Notamment Paul Marieton dont le père est banquier à Lyon et Charles de Tourtoulon qui, lui, ne<br />

voudra jamais être remboursé.<br />

44. Lettre de Roque-Ferrier, réponse au verso, s.d. vers 1876.<br />

45. Lettre de Charles de Tourtoulon 1880 (mois illisible) où celui-ci lui déconseille de tels expédients.<br />

46. Langlade est l'ami de Planchon, le montpelliérain, qui a introduit les plants américains mais il n'a<br />

pas le premier sou pour se lancer dans une telle entreprise. Son frère Germain intéressé un moment<br />

par ce Nouvel Eldorado préférera se lancer dans des recherches chimiques pour détruire le parasite. Il<br />

enverra à Alexandre de multiples échantillons de ses trouvailles qui auront certes l'avantage de tuer la<br />

maladie mais le triste inconvénient de tuer aussi le cep traité.<br />

47. Son dossier de demande sera bloqué pendant des années pour des raisons politiques - voir infra.<br />

48. Il sera aussi débiteur de poudre de chasse et vers les mêmes dates inspecteur des écoles avec une<br />

faible indemnité. Langlade vieillissant se fait un honneur de n'être à charge de personne (lettre à la<br />

marquise d'Uzès (brouillon) non datée (vers 1897-98) archives maison Langlade.<br />

49. On trouve dans l'œuvre de Langlade de nombreuses références au chef de la jeunesse. Garçon: cap<br />

de jovent ou abat, fille: abadessa (cf. Las d'amour... par exemple). Cette institution bien connue des<br />

ethnologues et des historiens est encore bien vivante au XIXè siècle.<br />

50. Une prénommée Lucie (Bouscarain) semble avoir cependant sa préférence.<br />

51. Nous possédons leur contrat de mariage du 13 juin 1852 signé chez Maitre Emile Amavielhe<br />

notaire à Lansargues. Agathe Pouchet se constitua pour dot 400 francs en bijoux en or et son père lui<br />

accorde une rente annuelle de 200 francs. De son côté Alexandre est doté de la moitié de la maison<br />

(qu'il a déjà payée) et des terres (qu'il a libérées des hypothèques et réhabilitées) le tout est évalué à<br />

quatre mille francs et représente un revenu de 200 francs par an.<br />

Cet acte qui ne fait (du côté de Langlade) que légaliser une situation existante sera par la suite contesté<br />

par le frère d'Alexandre (en 1886) mais sans succès.<br />

52. C’est comme souvent en Languedoc - par le nom décliné au féminin que l’épouse sera désignée et<br />

c'est ainsi qu'Alexandre appelle sa femme.<br />

53. Descendance d'Alexandre Langlade<br />

* Marie-Estelle née le 13/03/1853, décédée le 4/07/1854, vivra un an et Jean-Martin né le 1/01/54,<br />

décédé le 9/09/1855, vivra neuf mois et vingt jours.<br />

* Aimé-Henry né en 1859, décédé le 2/04/1884, vivra 25 ans.<br />

* Jean-Antoine-Germain (1862-1935) épousera Léontine Garini du Grau du Roi en 1888. Le couple<br />

aura un fils Jasmin mort en bas âge et quatre filles.<br />

54. La mère du poète vivra avec lui à Lansargues dès le départ de son père pour la Sicile.<br />

55. Voir note 8.<br />

56. Si ce n'est la 1ère, Langlade semble le croire dans un brouillon de lettre à Gariel le directeur du<br />

Petit Méridional (datable de 1898) Archives maison Langlade.


57. A la dernière réunion de l'Association Fraternelle, Langlade trésorier accusé de détournements de<br />

fonds mit les livres comptables et les sommes correspondantes sur la table et se leva pour souffléter<br />

publiquement son principal calomniateur (qui était Bonapartiste) que l’on surnomma désormais lo<br />

bofetat, la gifflé. Cet épisode est rapporté par plusieurs témoins dont Camille Brunel (biographie I,<br />

copie Valette, p. 43).<br />

58. Lettre à Gariel op. cit. — J'ai été le premier dans le département à organiser une réunion privée (du<br />

parti démocratique) avec le concours de Paul Gleize (?) (illisible) le pauvre exilé et le défunt Bonnet<br />

mes deux meilleurs amis......<br />

59. Il existe à Montpellier une société de Montagnards communément appelée Club des Casemes qui<br />

se réclame de socialisme. Elle a été fondée en juin 1848 (cf. Histoire de Montpellier, ed. Privat, 1986,<br />

p, 301). La Montagne de Lansargues se réclame à peu près des mêmes idéaux mais semble largement<br />

les démocrates (Langlade et Brunel seront de tendance socialiste). Elle a été fondée aux lendemains<br />

(début 1852). Camille Brunel (biographie I, copie Valette p. 13) la présente comme une assemblée<br />

égalitaire qui n'avait pas de président et non, secrète - quoi qu'on en ait dit et où Langlade devait exercer<br />

un véritable sacerdoce pendant les 18 années de l'empire.<br />

60. Lettre à Gariel op. cit. Ce n'était pas aisé à cette époque où il fallait se réunir par petits groupes et<br />

par divers chemins à l'insu de la police dans une campagne ou au fond d'une cave.<br />

61. Ce fait est rappelé dans une lettre de Camille Brunel à Langlade, du 30/12/1869.<br />

62. Camille Brunel, biographie I, copie Valette, p. 13-14.<br />

63. Il est déjà promis à Agathe Pouchet, ce qui explique aussi sa hâte à revenir.<br />

64. Ulysse Bouscarain (correspondance avec Camille Brunel en 1901) cité par Brunel I, p. 15.<br />

65. Camille Brunel biographie I copie Valette p. 15.<br />

66. Ce fait rapporté par Brunel (biographie I p. 16-17) a été vérifié dans les archives municipales de<br />

Lansargues.<br />

Ce n'est pas le seul fait passionnant de cette période qui sera étudiée dans le détail dans l'édition que<br />

nous préparons des Œuvres politiques de Langlade. voir note 75.<br />

67. Langlade fera à nouveau partie de la municipalité (maire: Dombras) entre 1874 et 1876.<br />

68. Brouillon de lettre de Langlade s.d. destinataire inconnu.<br />

69. Voir document. Ce fait est rappelé dans la lettre à Gariel.<br />

70. Sa signature à:. de ses correspondants est un indice assez fiable mais Langlade à notre<br />

connaissance ne l'employa jamais (du moins dans la correspondance conservée et ses brouillons...) on<br />

n'a pas retrouvé le nom de Langlade sur les tableaux de loges de Montpellier et de Lunel, mais<br />

beaucoup de ces documents ont disparu... Un certain nombre de journaux qui lui parviennent à cette<br />

époque sont proches de la franc-maçonnerie mais cela ne suffit pas, les indices seront beaucoup plus<br />

évidents après 1870.<br />

71. cf. document n' et lettre à Gariel. — En 1870, j'avais 50 ans, j'ai été le premier à me faire inscrire<br />

comme mobilisé, mes compatriotes me nommèrent capitaine, quelque temps après le canton me nomma<br />

chef de bataillon.<br />

72. cf. Les lettres des délégués Calas et Maffre qui évoquent les parties de bouchon en prison et qui<br />

rappellent que Langlade dans son voyage composait des vers patois. La lettre de Maffre mentionne<br />

aussi la pièce de Langlade Lous delegats de l’Erau sur cette épopée. Nous en avons retrouvé une copie<br />

de la main de Langlade qui sera publiée ultérieurement.<br />

73.


74. Brunel II p. 4 raconte l'entrevue en ces termes:<br />

- Reçus en audience privée par M. Thiers - déjà vivement impressionné par de nombreuses délégations<br />

qui lui avaient apporté les mêmes vœux de tous les coins de la France - ils lui exposèrent simplement<br />

et dignement l'objet de leur mission. M. Thiers leur répondit, comme à ceux qui les avaient précédés,<br />

ces paroles textuelles qu'il devait répéter à ceux qui les suivirent: — Je ne suis pas ce que vous appelez<br />

un républicain, je suis un ancien monarchiste. Mais j'ai reçu la République en dépôt, et je garderai<br />

fidèlement ce dépôt.<br />

Et M. Thiers, en. reproduisant ces paroles lors de sa déposition à l'enquête parlementaire sur<br />

l'insurrection du 18 mars, ajoutait: — Les hommes qui s'adressaient à moi savaient que j'étais incapable<br />

de donner une parole sans la tenir. J'avais donc un certain crédit sur eux. M. Thiers disait vrai: il<br />

convainquit les délégués de l'Hérault comme il avait convaincu ceux des autres départements; mais il<br />

leur devait à tous d'être lui-même converti à la République.<br />

Et ce qui prouve que les craintes de la France n'étaient pas aussi chimériques qu'on l'a dit, c'est que —<br />

poussé à bout par les injustices de la Droite — M. Thiers devait bientôt jeter aux députés<br />

monarchistes, impatients de voir l'insurrection vaincue, cette phrase cinglante et cruelle: — Il ne me faut<br />

plus que huit jours, dans huit jours le danger sera conjuré, et la tâche de gouverner sera alors à la<br />

hauteur de vos courages. (1)<br />

Huit jours après, en effet, la Commune de Paris était vaincue par la République... qu'elle venait de<br />

sauver.<br />

Paix donc — comme disait Langlade — aux cendres de ces nouveaux martyrs de la Liberté!<br />

75. Nous ne faisons que survoler ici la carrière et l'œuvre de chansonnier satirique de Langlade. Ceci<br />

sera développé largement en préface des pièces politiques que nos recherches nous ont permis de<br />

retrouver en grande partie, alors qu'on les croyait perdues.<br />

76. C. Brunel I (copie Valette) p. 18-19.<br />

77. Langlade chantait aussi ses chansons dans les tournées de ses candidats. Il accompagna Picard à<br />

toutes les réunions électorales dans le canton de Montpellier (lettre à Gariel).<br />

78. En 1848, mais cet orphéon trop politique fut dissous après le 2 décembre. Langlade, jouait certes<br />

de l'ophicléide comme nous l'avons dit plus haut mais aussi du hautbois, de l'harmonium et<br />

certainement d'autres instruments.<br />

79. Il était le musicien-animateur coutumier des bals et fêtes de Mudaison.<br />

80. Ces ferrades n'ont rien à voir avec les taureaux et leur marquage, mais s'apparentent plutôt au<br />

Charivari et découlent des cours coculaires (Brunel I p. 25).<br />

81. Nous renvoyons pour Charles de Tourtoulon et Alphonse Roque-Ferrier à notre article. Trois<br />

figures de la renaissance languedocienne Charles de Tourtoulon, Louis-Alphonse Roque-Ferrier,<br />

Camille Chabaneau, Revue des Langues Romanes LXXXIX 1, 1985 p. 93-121.<br />

82. R.L.R. et tirage à part de la même année. C'est la première œuvre imprimée d'Alexandre Langlade<br />

préfacée d'une note orthographique et linguistique de Charles de Tourtoulon. Le poème est dédié à ce<br />

dernier.<br />

83. Langlade deviendra membre de la Société des Langues Romanes en 1873, il sera parrainé par<br />

Tourtoulon et Octave Briguier (Lettre de Tourtoulon 25 avril 73). C'est Tourtoulon qui l'a proposé et<br />

qui lui annonce son élection au majoralat en 1876 (lettre du 23 mai 76).<br />

84. La correspondance de Tourtoulon avec Langlade révèle cette intimité qui contient des détails sur<br />

leur vie à tous deux et qu'une simple amitié félibréenne ne justifierait pas. Tourtoulon est franc-maçon,<br />

en tous cas de façon certaine en 1876 (il est sur un tableau de loge montpelliérain à cette date) et on<br />

relève des propos de ses lettres qui marquent un état d'esprit:<br />

Le 28/12/187 8 - à Langlade:<br />

— Il faut travailler pour la satisfaction que procure le travail lui-même comme il faut faire le bien pour<br />

l'unique souci d'être utile.<br />

Le 12 juin Tourtoulon est à Paris et on vient de lui proposer un ministère. — On m'a beaucoup félicité<br />

mais on a pris bonne note du peu de dispositions que j'ai pour le métier de mannequin parlant. Cela


n'empêche pas que l'on m'accable de problèmes et de politesses, j'allais dire d'offres, que je refuse en<br />

leur disant que je veux avoir jusqu'au bout le mérite d'être un républicain qui n'exploite pas la<br />

République et qui n'en vit pas.<br />

Sur ces points comme sur bien d'autres les hommes se rejoignent...<br />

85. Nous ne pouvons traiter ici dans le détail des oppositions entre languedociens et provençaux du<br />

Félibrige, ni du Félibrige Latin, ni de l'antagonisme droite-gauche qui caractérise la renaissance<br />

occitane du XIXè siècle. Ceci sera au cœur même de l'ouvrage que nous préparons sur l'histoire du<br />

félibrige en Languedoc.<br />

Albert Arnavielle dit l'Aràbi majoral du Félibrige est un personnage bien connu, pour ses idées<br />

monarchistes et son tempérament volcanique... Louis Roumieux est aussi bien connu pour son œuvre<br />

littéraire et ses facéties félibresques.<br />

86. En réalité A.R.F. est un blanc-bleu passé par le monarchisme à ses débuts, il vira au bonapartisme<br />

peut-être pour mieux s'opposer à ses adversaires royalistes du Félibrige, c’est un personnage parfois<br />

difficilement compréhensible.<br />

87. Revue des Langues Romanes, Publications languedociennes de la maintenance du Languedoc puis,<br />

à son exclusion du Félibrige, le Félibrige Latin où Langlade aura une très large place.<br />

88. La Maintenance de France est celle de Paris où le personnage clef est J.C. Brun. Les titres de<br />

président d'honneur du Félibrige Latin et de la Maintenance de France figureront sur les dernières<br />

cartes de visite de Langlade et sur son faire-part de décès.<br />

89. Il n’intervient que très brièvement au début de la rupture. Les grands ténors demeureront Roque-<br />

Ferrier et J.C. Brun.<br />

90. Le rouge Louis Xavier de Ricard (1843-1911) amis de Fourès, personnage très attachant et de très<br />

grande envergure (il est le fondateur du Parnasse avec Catulle Mendès) mena l'opposition de gauche à<br />

l'école d'Avignon. L'homme et son action sont incomplètement présentés dans J. Salvat La vie<br />

tourmentée de Louis Xavier de Ricard, Toulouse 1943 et J.M. Carbasse Louis Xavier de Ricard Felibre<br />

rouge, Montpellier 1977.<br />

91. Paul Marieton d'origine lyonnaise (né en 1862) majoral en 1891, sera l'animateur de la Revue<br />

Lyonnaise et de la Revue Félibréenne. On lui doit chez l'éditeur Lemerre en 1890 La Terre Provençale<br />

et en 1896 Le Livre de Mélancolie. Il fut chancelier du Félibrige et écrivit des articles sur les<br />

languedociens: A. Fourès, Tourtoulon. C'est réduire le personnage que d'en faire l'éminence grise de<br />

Mistral.<br />

92. Milord W. Bonaparte Wyse (né à Waterford Irlande en 1826, décédé en 1892) fut majoral la<br />

même année que Langlade. Il fut le poète de Li Parpaioun blu (Avignon 1869) et Li Piado de la<br />

princesso (Avignon 1881). F. Donnadieu écrivit un ouvrage sur lui Bonaparte Wyse étude littéraire<br />

(Montpellier 1884) et A. Roque-Ferrier préfaça Li Piado. Il était paraît-il franc-maçon. Nous donnons<br />

de lui (infra) deux lettres à Langlade parmi les plus significatives.<br />

93. En Languedoc il y avait aussi Jean Laurès de Villeneuve les Béziers (qui fut majoral en 1892) dont<br />

la première œuvre importante Lou Campestre est de 1877 et en Provence Tavan (qui fut l'un des<br />

membres fondateurs du Felibrige).<br />

94. Roque-Ferrier (biographie manuscrite II) rend compte du triomphe de Langlade de la façon<br />

suivante.<br />

Les fêtes latines de Montpellier - 24 mai 1878 — Des vingt cinq années de gai savoir.. la journée du<br />

Chant du Latin, fut celle qui devait réserver à Langlade les plus vives satisfactions. Trois jours après<br />

une représentation de la fille de Roland qui avant transporté la société montpelliéraine, quelques heures<br />

après le discours prononcé au Peyrou par Albert de Quintana, un banquet réunissait dans la salle des<br />

concerts les félibres et les invités. La tempête qui avait mêlé sa voix à celle du grand espagnol s'était<br />

apaisée et sur la place de la Comédie au milieu d'une foule qui commentait avec passion l'appel fait à<br />

toutes les races latines de l'ancien monde et du nouveau, la musique militaire jetait de multiples<br />

harmonies. Dans la salle, Mistral, Henri de Bornier, Paul Glaize, Léon de Berluc Perusis, Charles de<br />

Tourtoulon, Louis Faliès, Frédéric Fabrège, William Bonaparte Wyse, Théodore Aubanel, Camille


Chabaneau, Joseph Roumanille, Francesch Matheu, le Comte de Toulouse Lautrec, Gabriel Azaïs,<br />

Jules Gaussinel, Balaguer et Merino, Antonin Glaize, Boucherie, Henri Delpech, confondaient leurs<br />

brindes et leurs veux, le catalan, le français, la langue d'Oc ancienne et la langue d'Oc moderne<br />

alternaient tour à tour. Les autorités montpelliéraines, les félibres et les philologues s'étaient fait<br />

entendre lorsque Langlade commença presque timidement la lecture de la canson de la Cigala. Le<br />

poète n'avait ni les dons sonores du diseur, ni l'ampleur du geste oratoire, mais petit à petit le murmure<br />

des auditeurs se dressait si intense et si charmé, si pleinement approbateur l’éloges et l’expression que<br />

Mistral n'y tint point et se levant brusquement, s'écria en termes qui n'ont pas été recueillis mais qui<br />

impressionnèrent profondément les auditeurs que c'était pour un idiome, un honneur sans égal, une<br />

bénédiction véritable de compter des poètes semblables à celui de Lansargues et de pouvoir grâce à eux<br />

affronter sans péril l'épreuve des années et l'examen de la plus lointaine prospérité.<br />

95. Le Palmarès de Langlade s'établit comme suit:<br />

* 1874: 2ème prix au sonnet pour Pétrarque en Avignon<br />

* 31 mars 1875: 1er prix au concours philologique et littéraire de la Société pour l’Etude des Langues<br />

Romanes pour l'Estanc de L'Ort.<br />

* 1878: 1er prix au concours des Races latines.<br />

* 1884 médaille d'or aux Jeux Floraux du Centenaire de Favre (pour la Fada Seranela).<br />

Mais la liste n'est peut-être pas complète. Langlade est sensible à ces prix et il en fera état en diverses<br />

occasions.<br />

96. Voir infra et la partie documentaire et critique, vol. II.<br />

97. Nous n’avons pas, retrouvé de correspondance de cette époque. Nous pensons que les rapports<br />

furent assez tendus au point que Langlade refuse de donner son portrait à Mistral pour le Museum<br />

Arlaten... Mistral dans le Trésor prénommera Langlade: Auguste... (coquille?) et provençalisera toutes<br />

les citations du poète. Mistral, à la mort d'A. Langlade enverra une simple carte de visite de<br />

condoléances à la famille.<br />

98. Dans Langlade et Mistral (man. cité) il ironise sur le côté peu naturel, surfait de Mireille et des<br />

autres personnages. Il reproche à Mistral son côté reialista e capelanié et ne voit dans le Félibrige que<br />

capitulations et zizanies: Entre les cordas de la lira, Los vols de l'ira.<br />

99. Il reprochera de façon cocasse à Roque-Ferrier ces protocoles, notamment les cour d’amour où les<br />

Félibres se sentaient obligés de dédier des poèmes aux grandes dames présentes. Langlade n'aimant<br />

que Pouchette, ne désirant chanter que pour elle et n'ayant pas assez de ressources pour payer sa place<br />

à tous ces banquets, propose de faire moissonner tout ce beau monde ou de le faire vendanger après<br />

quoi Pouchette et lui qui ne sont pas ingrats offriront un repas champêtre sur l'aire et non dans un parc<br />

de château comme c'est la coutume. (brouillon de lettre à Roque-Ferrier au dos d'une invitation sans<br />

date).<br />

100. Ses visiteurs réguliers seront A. Roux le félibre de Lunel-Viel, Tourtoulon, Roque-Ferrier, J.C.<br />

Brun, Camille Brunel...<br />

101. L'imprimeur Hamelin de Montpellier lui assure des tirés à part de 1000 exemplaires, ne facturant<br />

que la couverture et le papier. Pour rentabiliser quelque peu ces tirages, Langlade les fait diffuser par la<br />

Société du Sou des Ecoles Laïques qui est une fondation des franc-maçons (cf. le prospectus en<br />

illustration).<br />

102. Langlade lancera après 1875 une pré-souscription à l'Etang de l'Ort qui ne recueillera que<br />

quelques dizaines d'adhésions et très peu à Lansargues même. Découragé, il renonça à l'édition<br />

complète du texte dont seule une partie était parue dans la Revue des Langues Romanes.<br />

103. Lettre à la Duchesse d’Uzès s.d. (brouillon II)<br />

— Des souscripteurs en aurais-je assez pour faire mes frais? Par modestie ou par fierté, peut-être les<br />

deux à la fois, je n'ai jamais cherché la popularité quoique je me plaise de préférence avec les paysans,<br />

les pêcheurs, les bergers, les gardiens de chevaux ou de taureaux. Malheureusement, mes écrits ne les<br />

intéressent pas beaucoup puisque les scènes que je décris se passent journellement sous leurs yeux, ils<br />

en sont pour ainsi dire les héros et par surcroît malheureusement pour eux comme pour les ouvriers<br />

des villes, ils sont empoisonnés journellement par les romans à la mode, à 2 sous...


La plupart des Félibres provençaux, Mistral en tête, me gardent rancune de ce que je n'ai pas voulu<br />

écrire en Provençal. Je suis de cet avis que puisque on veut émanciper du français les idiomes<br />

provinciaux ce n'est pas la peine de les remettre sous le joug du Provençal, qui plus est de Maillane.<br />

Faut-il s'adresser aux bourgeois, cette classe de parvenus qui ne rêve que grands discours, députations,<br />

ministères et qui la plupart cherchent à faire oublier leur passé de roturier en ajoutant une particule à<br />

leur nom. Comment aller parler à ces gens là de paysans et de bergers?<br />

Je n'ai plus d'autres ressources que parmi les érudits et les grands seigneurs, mais où irais-je les<br />

trouver?<br />

104. La souscription est lancée en 1899, les deux tomes s'intitulent:<br />

I La cigala et la fourmiga<br />

II La cansoun de la cigala.<br />

La souscription suivante, après le décès du poète ne portera plus ces titres. De même le titre original:<br />

<strong>Poésies</strong> languedociennes de Langlade, sera transformé en: <strong>Poésies</strong> languedociennes d'Alexandre<br />

Langlade... Roque-Ferrier était passé par là.<br />

105. cf. Langlade et Mistral man. cit.: (Langlade)...— a coumença a faire de verses en 1851 fossa avan<br />

de counouisse lous Felibres. Peirotta ero soun ômr d’aquitant que conousquet lous félibres en 1873.<br />

106. cf. fac. similés insérés ici de certains écrits de Langlade.<br />

107. cf. notre article: Trois figures... op. cit.<br />

108. Le nom de la pierre à bâtir à Lansargues — Revue des Langues Romanes tome XVI p. 31, 1879.<br />

109. Ce manuscrit a été déposé dans les archives du Félibrige Latin qui ont été éparpillées à la mort de<br />

Roque-Ferrier.<br />

110. Cet ensemble fera l'objet d’une publication spéciale.<br />

111. C'était d'ailleurs la règle dans la Revue des Langues Romanes et dans beaucoup de revues de<br />

fournir une version française des textes en Oc.<br />

112. Contrairement à ce que dit J.C. Brun à diverses reprises, Langlade sait parfaitement tourner un<br />

texte en français. Les archives familiales conservent des lettres en français d'Alexandre à sa bru<br />

(l'épouse de Germain) qui sont des chefs d'œuvre d'humour, de dextérité langagière, de jonglerie<br />

verbale qui feraient bien des envieux.<br />

113. voir fac-similés donnés en illustration.<br />

114. La version provençalisée est de Mistral, nous en avons la certitude par un télégramme de<br />

Marieton à Langlade en date du 10 décembre 1885.<br />

— Autorisez imprimions poème en Rhodanien, Mistral veut arranger... Marieton.<br />

115. cf. la bibliographie sur Langlade.<br />

116. Les journalistes le présentent en général ainsi. Son passeport de 1870 ne lui accorde cependant<br />

que l m 63 (voir document).<br />

117. Nous donnons dans la présente édition la totalité des portraits retrouvés d'A. Langlade.<br />

118. Hommage à Alexandre Langlade. Montpellier 1901. Paroles de Paul Hamelin.<br />

119. Poésie Languedocienne d'A. Langlade, Tome I, p. XXXVII.<br />

120. Roque-Ferrier, biographie Langlade, Manuscrit I.<br />

121. Roque-Ferrier, biographie Langlade, Manuscrit II.<br />

122. op. cit. note 121. A. Roque-Ferrier ajoute:


— Cet homme qui eut parfois la méchanceté de l'esprit n'éprouva par contre jamais la méchanceté du<br />

cœur.<br />

123. Notamment A. Roque-Ferrier (biographies manuscrites) et Camille Brunel (manuscrits).<br />

124. L'original se trouve dans les archives de la maison Langlade.<br />

125. Nous tenons à remercier L.D. Grand Maître adjoint de la Grande Loge de France, les loges<br />

Auguste Comte et les Apprentis Ecossais de Montpellier pour leur aide bienveillante. Sans trahir la<br />

discrétion dont tient à s'entourer la Franc-maçonnerie, je peux dire que les détails qui concourent à<br />

faire de Langlade un franc-maçon sont très nombreux. Si son réseau d'amis dans et en dehors du<br />

Félibrige n'est pas une preuve absolue, certains éléments symboliques, codes épistolaires, formules<br />

rituelles retrouvées dans ses papiers ou dans l'œuvre elle-même ne laissent plus la place au doute. Une<br />

des clefs de la vie et de l'œuvre de Langlade se retrouve dans le Rite écossais ancien et accepté et dans<br />

d'autres rites antérieurs. Il s'agit des invocations d'ouverture et de fermeture des loges. Les officiers<br />

allument et éteignent les étoiles du temple en prononçant les paroles rituelles suivantes.<br />

Ouverture:<br />

que la Sagesse préside à la construction de notre temple<br />

que la Force la soutienne<br />

que la Beauté l'orne.<br />

Fermeture:<br />

que la Paix règne sur la terre<br />

que l'Amour gouverne les hommes<br />

que la Joie soit dans les cœurs<br />

Sagesse, Force, Beauté, Paix, Amour, Joie,<br />

tout un programme que Langlade essaiera de mettre en œuvres.<br />

126. Langlade classa cette correspondance à laquelle, apparemment, il était attaché.<br />

127. Il faut ajouter une quantité non négligeable de poèmes divers à lui dédiés...<br />

128. Où Mistral félicite Langlade pour la richesse de son lexique.<br />

129. Voir documents jugements et critiques...<br />

130. Ceci est très clair dans un texte inédit. — A prepaus del coungrés d'Avignoun où il fait clairement<br />

la part du populaire et du populisme. Il se moque d'ailleurs de Félix Gras et de ses phantasmes... ici et<br />

dans un brouillon de lettre qu'il lui adresse.<br />

131. La formule est de J.C. Brun, elle fut reprise plusieurs fois.<br />

Il faut prendre illettré à son sens étymologique mais c'est parfaitement inexact. Langlade n'a certes pas<br />

fait d'études classiques, mais on ne peut pas préjuger de ses lectures d'autodidacte qui ne semblent pas<br />

négligeables.<br />

132. Voir bibliographie<br />

.<br />

133. Voir bibliographie.<br />

134. La municipalité vota aussi pour Langlade une concession à perpétuité au centre du cimetière de<br />

Lansargues.<br />

135. Organisée par le Félibrige Latin et A. Roux...<br />

136. Correspondance Germain Langlade — Camille Brunel (Archives Langlade, maison Langlade).<br />

137. Voir la description de ce travail.


138. Poésie Languedocienne Tome I p. 1 et 2.<br />

139. Une crue de la rivière détruisit et emporta en effet une partie des papiers de Langlade.<br />

Noste cèu blu, noste terraire<br />

Soun pèr nous-autre un paradis.<br />

(MISTRAL, Lou Cant di Felibre.)<br />

L’ŒUVRE POETIQUE<br />

LA VIRADONA<br />

A CARLES, BAROUN DE TOURTOULOUN<br />

I<br />

Dins lou baissau de la coustieira,<br />

Au ped de la richa perieira<br />

Ounte traçoun lou Maravels (1)<br />

Per asti palais e castels;<br />

Dau roc ounte l'escouda dinda<br />

Ie sourdis una font tant linda<br />

Que, vista d'amount en aval,<br />

Diriàs un grand got de cristal.<br />

De Sant-Ginieis las jouinas filhas,<br />

Siegue en iver, dins sas mantilhas,(2)<br />

(1) Pierre de qualité supérieure de Saint-Geniès des Mourgues.<br />

(2) Manteau à capuchon, en usage dans les environs de Montpellier.<br />

Siegue l'estieu, à la calou,<br />

Couifadas d'un blanc capelou,<br />

Toujour gaias e fricaudetas,<br />

Lou sourrire sus la bouquetas,<br />

Chaca matin — se Dieus ou vòu –<br />

Van aqui roumpli soun ourchùou.<br />

D'una man laugeira e sans pena<br />

Cabussoun la rusta cadena<br />

D'un viliè (1), naut couma un gigant,<br />

Que rena e crida en brassejant.<br />

De l'aiga frescament tirada<br />

Tetoun una bona lampada,<br />

Dins la font s'espinchoun un pau,<br />

Pioi, plan-plan, prenoun lou dralhau.<br />

Souvent lous jouines amourouses,<br />

Couma toujour prou vergougnouses,<br />

Quand es per se dire quicom,<br />

De rescoundoun van à la font.<br />

La jouina filha — achàs la rusa!<br />

Prend soun ourchòu per desencusa.<br />

Vous dirai pas à quau s'en prend<br />

Se la nioch per fes lous susprend.


(1) On appelle viliè en langue d'or une machine rustique servant à puiser l'eau. Le viliè se compose<br />

d’une longue perche formant bascule sur un tronc d’arbre. A l’une des extrémités de la perche est<br />

suspendu un seau, à l’autre extrémité une grosse pierre qui sert de contre-poids.<br />

(1) Pierres de différentes dimensions.<br />

Que voulès! estent à l’oumbreta,<br />

Bèu drollàs e jouina filheta,<br />

Qu'on a sege ans, qu'on s'aima ben,<br />

Ai! que passa vite lou tems!<br />

Chagrin, trigos, laguis, tristessa,<br />

Aublidàs tout, bela jouinessa...<br />

Quand de moun tems serés venguts,<br />

La nioch vous susprendrà pas pus.<br />

Mais, se perdès de souvenença<br />

Lous juraments de la jouvença,<br />

Per tant ingrats que devengués,<br />

Oh! jamai noun oublidarés<br />

La font e soun oumbra tant bona,<br />

Que chacun aima, que tout prona,<br />

Qu'as viels fai gaud, qu'as jouines plai..<br />

Aqui la Viradona jai.<br />

II<br />

Es aqui que jai dedins sa bressola,<br />

Es aqui que nai; mais dins la regola,<br />

Ai! couma pigreja e s'en vai planet!<br />

Per ma fe, diriàs un enfantounet<br />

Que tout escasseta es sourtit de muda<br />

Quan l'à sous penous la força es vengu-la,<br />

Lou gaubi ie prend de s'en anà soul;<br />

De sa maira alors bandis lou grinoul,<br />

Mais à chaca pas s'abrounca, trantalha,<br />

Agroupa sas mais contre la muralha;<br />

Mouquet, regretant lou repau dau bres,<br />

Se tanca en virant la testa en arriès.<br />

Ansinda, bèu rieu, fas à ta salida...<br />

De que te reten? Es-ti la manida<br />

Qu'ai vist un matin davalant dau pioch<br />

En resilha negra, apoulun de nioch,<br />

Que t’a d'iols negras couma d'agrunelas,<br />

E que, per toussi las longas trenelas<br />

De soun pèu floucat, lusent, imourous,<br />

Dins toun linde avenc chaucha sous detous?<br />

Regretes belèu lou garrut traçaire,<br />

Que tusta ailamount de long et de caire,<br />

Dau matin au vespre, en toutas sasouns,<br />

Derroucant perpins, bougets et cairouns; (1)<br />

Que ven aiçaval à la caumagnassa<br />

Emé soun flascàs, mudat de bourrassa;<br />

Qu'en sermant soun vin negre e capitous,<br />

Dins toun rajolet mescla lous degouts<br />

Que soun front relent de longa escampilha.<br />

S'aco soul te ten, pos segui ta via.<br />

Bota, n'en veiràs belèu mai qu'en naut<br />

De poulits mourrets que te faran gaud.<br />

Ie veiràs tant-ben lou ruste trimaire<br />

Gimblat sus lou tal, lou coutre (1) e l'araire.


(1) Espèce de charrue.<br />

Milhou, vers Sent Jan, lous jouines gavots,<br />

Escampant voulams, bandissent esclops,<br />

Au cop de miejour, quand lou blat s'espoussa,<br />

Lous veiràs veni toutes d'una escoussa<br />

Pourtant sus lou col doùlhous e barraus;<br />

E pioi à l'oumbreta, en pèu e descau.<br />

Veiràs lous goujats, chacun sa goujada,<br />

Dansant la gavota e la bourrelhada.<br />

Tout aco veiràs, e'ncara ben mai.<br />

S'es pas la bèutat que t'arresta anlai,<br />

Ni mai lou brassiè, de qu'es que te brida?<br />

Auriès-ti pòu d'estre aval engoulida.<br />

Per la fendasclassa ou lou caraven<br />

Badant, alterat que be talament?<br />

Cregnes-ti l'arrest de quauca peissieira,<br />

Ou que la rasclausa e la martelieira<br />

Desviroun toun aiga à l'aise ou per saut<br />

Dins lou recantoun d'un proufound agau,<br />

Per te fa passà dins l'estrecha trapa<br />

Qu'un mouliniè pigre à lesé destapa,<br />

E boumbi, brusent, à flac grumejous,<br />

Sus lou viel roudan d'un moulin poussons?<br />

Per aco toun aiga es pas destinada,<br />

E de ta salida au founs de la prada,<br />

N'as pas res à cregne, ô moun paure rieu,<br />

Res que lou brausent alé de l'estieu.<br />

III<br />

Avans! camina e regoula à granda ersa!<br />

Te veja-aici trempassant la traversa<br />

Qu'autant que tus d'un pau mai comta d'ans.<br />

Lous ditatous e lous cònsous roumans<br />

D'aquel dralhou n'avien fach la grand via<br />

Que seguissien, de Rouma en Iberia,<br />

Lous capouliès de sas grandas legiouns.<br />

Se capitatit dins las caudas sasouns,<br />

Centuriouns, souldats e caps d'armada,<br />

En bivacant sus ta douga embaumada<br />

Bevien toun aiga embé tant de ferou<br />

Que te metien saique à l'assecadou.<br />

IV<br />

As vist mai que mai lous anciens Galeses,<br />

Longa-mai avans que d'estre Franceses,<br />

Plens de foga, ardits, parant pas à pas<br />

La Gaula, sous dieus e sas libertats.<br />

Detràs lous roucàs qu'esquichoun ta rasa,<br />

Defendien tant ben toun estrecha gasa,<br />

Que lous qu'an fach testa à tant de naciouns<br />

Toumbavoun aqui per rengs à moulouns;<br />

E toun aiga linda, e sana, e clarina,<br />

Se tenchava lèu coulou de sanguina,<br />

Gourgoulhant en miech d'orres bastardels<br />

De chivals matats, d’omes en moucels.


(1) Clapàs, tas de pierres, surnom de Montpellier.<br />

As encara vist la longassa tieira<br />

D'omes encourdats couma bestia en fieira,<br />

Encadenats, muts, soumbres, l'aire enquiet.<br />

O paure Galés! paure presouniè!<br />

Lous as vist gasant toun aiga amistousa,<br />

Saupejant sous cops sa facia terrousa,<br />

Toumbant sa lagrema en te benissent,<br />

Per lou circle mai de força partent.<br />

V<br />

E Carlemagne e soun armada franca<br />

Couma un viel tau qu'an ferrejat dins l'anca,<br />

L'as-ti pas vist fugissent Rounçaval?<br />

Passa à Besiès, Frountignan, Miraval,<br />

Vei Magalouna e sa gleisa en rouïna.<br />

De l'oura en lai un pensament lou mina.<br />

Ni Mount-peliè, que n'era alors qu’un mas,<br />

E que per temps serà lou grand Clapàs; (1)<br />

Ni soun bèu sòu couma se n'en vei gaire,<br />

Ni soun sourel, res noun pot lou distraire.<br />

Passa lou Lez au pont de Sustancioun,<br />

Gafa ta gasa e, vers lou fier Saissoun,<br />

Soumbre, apensit, camina en grand despacha;<br />

Couma toujour, l'assipa en mala facha.<br />

V<br />

L'escrapouchina e refresca amoundaut<br />

Sous rams passits dins noste Miejournau.<br />

VI<br />

Aqueles guerriès brutes, sanguinouses,<br />

De la douça pas enemies feriouses,<br />

Que t'an trepilhat sans fa cas à tus,<br />

Per lous viels escrits nous soun couneguts.<br />

Lous vesem detràs lou floc, la fumada,<br />

D'un endrech rasat, d'una vila usclada,<br />

Bachuchats de sang das peds au galet.<br />

Tus, dins aquel tems, fas toun trigoulet:<br />

Reviscoules fiou, grel, fiolha, aubre, planta;<br />

Abeures l'aucel qu'au bord dau nis canta,<br />

Mema quand, per fes, la fouliè te prend,<br />

De toun gras limpun fumes lou terren.<br />

Quand sus toun dougan, de vers las garrigas,<br />

Lou pastre çai ven embé sas beligas,<br />

Ie trova subran l'oumbra e ta frescou…<br />

Ah! s'enchauta be, lou paure pastrou,<br />

Que lou grèu pousset que l'avé rebala<br />

Age poussejat jouta la cavala<br />

Qu'empourtava anlai lou grand Scipioun…<br />

Ai! ai! quanta escorna e quanta liçoun!<br />

Proufitàs-n'en douné, bregouses destrussis;<br />

Vautres, Alemands, Franceses e Russis,<br />

Ou vesès, la guerra es un grand bauchun,


Lou renoum que dona es res que de fum!...<br />

VII<br />

Mais, tout en fasent la chamada,<br />

Toun aiga vai este arrivada<br />

A l'intrada dau grand planàs.<br />

Te seguisse de tras en tras;<br />

Vese tas ribas escartadas<br />

Ajougnidas per dos arcadas.<br />

Sus lou camin qu'es d'anivel<br />

Dau terren e dau parapel,<br />

Dous parelhats de longas relas,<br />

De la vapou soustas fidelas,<br />

S'alongoun sus lou sòu peirous<br />

Couma de coulobres moustrous.<br />

Tout d'un cop, à l'oura sounada,<br />

La pensada es destressounada<br />

Per lou sambroun e la bourchou<br />

Qu'en barrullant fai la vapou.<br />

Diriàs que la mar se rebilha<br />

En fora de l’auta mountilha<br />

Que Dieus aubouret tout de long,<br />

Disent: — Anaràs pas pus lion.<br />

Mais mai vai, mai lou bruch redoubla...<br />

Bestiau d'avé, bouhina, coubla,<br />

Preses d'un grand rebouliment,<br />

N'ausissent ni coumandament,<br />

Ni la cridada dau menaire,<br />

Aupetoun per tout lou terraire.<br />

La sauvagina, l'auceloun,<br />

Dins l'aire ou vers lou rescoundoun<br />

— Tant la terrou lous devarilha —<br />

A bel ime prenoun sa via,<br />

De tout soun van, afalenats,<br />

N'ausant pas espinchà detràs.<br />

Mais la vapou!... De sa narrilha<br />

Lou fum salis e s'escampilha!...<br />

Diriàs que tout vai s'abissà...<br />

Es en vista!... Ven!... A passat!!!..<br />

A passat couma la tronada.<br />

Ai! quante van! quanta bramada!<br />

Mema l’ome, soun creatou,<br />

Se tanca, agantat de terrou!<br />

E tus que sies tant minsourleta,<br />

Qu'una mejana granoulheta<br />

Te sauta d'un van sans bourlà,<br />

Tus qu'à pena on vei trescoulà,<br />

Dins toun pichotet jas de grava,<br />

Eh be! quand la vapou siblava,<br />

Quand tout tramblava, tout escàs,<br />

Tus soula, n’a ges fach de cas!<br />

Per que te sies pas treboulida?...<br />

— Es que, dins lou cous de ta vida,<br />

N'as tant vist d'emboudenaments,<br />

Brounzins, tremols, engrunaments!<br />

As vist belèu sourdre de terra<br />

Sant-Loup, lou causse de la Serra, (1)<br />

Quand lous rocs que te fan rampart<br />

Bourlavoun dins la granda mar


(1) Montagnes de l'Hérault.<br />

(2) Volcan éteint.<br />

E vesien madurà lou date;<br />

Quand lou serre vinous d'en Ate (2)<br />

Mandava dins l'aire brausent<br />

De lamps de fioc mai trelusent,<br />

E de rampeladas mai vivas<br />

Que toutas las lacoumotivas<br />

E lous auts fournels reünits,<br />

E tout aco, quand tus l'as vist,<br />

L'ome, era encara un grand misteri…<br />

Sarem toutes au cementeri,<br />

D'astres se saran damoussats,<br />

Q'encara tus bresilharàs.<br />

VIII<br />

Aici Valergues, bèu vilage;<br />

Se miralha dins toun rajòu;<br />

Es amagat dins lou fiolhage<br />

Couma lou nis d'un roussignòu.<br />

Dau castel l'oumbrousa clausada<br />

Ven espinchounà sus toun gour:<br />

Es tant espessa, tant ramada,<br />

Que fai la nioch à plan de jour.<br />

De la terrassa on vei l’arcada<br />

Que sousta lou pichot pountil,<br />

Ounte toun aigueta esquichada<br />

Fai ressounti soun dous bresil,<br />

Dons bresil que la Valergola<br />

De sa cansouneta groussis,<br />

Quand passa ou que dins ta regola<br />

Lava, bacela e retoussis.<br />

E pioi, dins la plana enfinida,<br />

Das iols seguisse toun courrent,<br />

Quoura d'una granda espandida,<br />

Quoura prim couma un fieu d'argent.,<br />

IX<br />

Viradona, sies ben noumada...<br />

Se d'aquel noum t'an batejada,<br />

Es que, de ta sourça aiçaval,<br />

En passant la dona se vira,<br />

S'arresta, s'espincha, t’amira:<br />

De la bèutat sies lou miral!<br />

Sariès encara mai poulida,<br />

S'un jour d'autouna, entre-foulida,<br />

Rasaves toun gour de Crouset,<br />

Ounte, dins de baumas founsudas,<br />

La Mort, emb sas arpas croucudas,<br />

Clava sa proia à soun lesé.


De l'inmensa plana vinousa<br />

Que toun courrent crousa, e recrousa,<br />

As davans tus lou majourau:<br />

Lansargues, lou gros travalhaire;<br />

Lansargues, lou gai festejaire;<br />

Lansargues, riche e liberau.<br />

Lansargue, aiçai passat las segas,<br />

Ausis lou trepil de las egas, (1)<br />

Dins sous baissaus, au mes de mai,<br />

La dalha croussis dins lou fòurre,<br />

E, quand aoust s'en vai sans plòure,<br />

I'a de vin, de vin que noun sai.<br />

Lansargue, en drech de ma naissença,<br />

Temon de ma fola jouvença,<br />

De mous bèu jours disparescuts,<br />

T'aime, — que servis d'ou rescondre?<br />

Mais, bèu rieu, pode te respondre<br />

Qu'es un pau per amor à tus.<br />

Te quitere d'un cop de testa;<br />

Lion de tus ai vist la tempesta,<br />

Ai trementit jout soun esfort;<br />

De la fam oumbrenca e mourruda<br />

Ai sentit la rusta mourduda,<br />

Ai sentit l’alen de la mort.<br />

(1) Las egas sont les chevaux de la Camargue dont on se sert pour battre le blé.<br />

En trevant la sabla mouventa<br />

Das deserts de l'Africa ardenta,<br />

Te sies moustrada fossa fes<br />

A moun ideia pantalhaira,<br />

A travès la lionchou troumpaira.<br />

Regoulant dins tous verds rausets.<br />

Mais la fouliè destimbourlada,<br />

Un pau pertout l'ai semenada:<br />

Dedins ma testa ara fai siau.<br />

Pioi, aici l'amour m'encadena,<br />

L'amour de tus e de ma femna,<br />

Das enfantous e de l'oustau.<br />

X<br />

T'aime quand, de ploja couflada,<br />

Fas trementi la vielha arcada,<br />

T'escampilhes, devapourada,<br />

Per camp, per orta, per camin,<br />

Alin!<br />

T'aime quand vese jouina filha.<br />

Que dins soun cor l'amour bresilha,<br />

S'engafà fins à la cavilha,<br />

Per prene un ban fres dins toun rieu,<br />

L'estieu.<br />

T'aime quand la jouina femneta,<br />

A l'oumbra, plega la fardeta<br />

De soun premiè nascut, que teta


6 d'abrieu de 1873.<br />

Un sen roundelat per l'amour<br />

Au tour.<br />

T'aime quand dins la tantossada,<br />

Sus lou bartàs de ta rasada,<br />

S'adraca la fresca bugada<br />

Lusenta couma un blanc ridèu<br />

De nèu.<br />

Ploure quand lou sourel dardalha<br />

Dins ta maire que s'abadalha;<br />

Tout-escàs se vese ta dralha<br />

'Nenquelida per las calous<br />

D'aoust.<br />

XI<br />

Mola toun aiga! oh mola, mola encara!<br />

Siam dins la prada, e la mala-aiga amara<br />

T'espera aval dins l'immense caniè.<br />

Revira-te de-vers Camp-Centeniè...<br />

Nais no... vai, vai seguis ta destinada:<br />

Siegues palus, estang, plena, salada;<br />

Au grat de l'oire, un bèu jour agandis<br />

Ounte tout coumença, ounte tout finis!<br />

(1) Tènement des environs de Lansargues.<br />

(2) La Plena est l'eau d'un fleuve ou d'une rivière au point où la mer la fait refluer.<br />

(3) On appelle oire les petites vagues des étangs.<br />

Au fin founs dau riche terraire<br />

Que plan-plan davala dau gres (2),<br />

Entre lous bords flourits dau Les (3)<br />

E dau Vidourle (4) roundinaire,<br />

Se capita l'estanc de l'Ort.<br />

L'ESTANC DE L'ORT<br />

PREMIEIRA PASSADA (1)<br />

L'Estanc<br />

PER ANTOUNIN DE GLAIZE<br />

L'ÉTANG DE L'ORT<br />

(1) Le mot de passada désigne ordinairement la traversée de l'étang en chassant à la rame.<br />

(2) Cailloux. Nom des collines qui limitent la plaine au Nord (lou plan e lou gres).<br />

(3) Rivière qui passe près de Montpellier.<br />

(4) Autre rivière qui descend des basses Cévennes et qui limite le département de l'Hérault à l'Est.<br />

Es ailaval que s'eschalata,<br />

Dins soun inmense jas de grata,<br />

Pimpant (1) à l'aise lous rais d'or


Que noste caud sourel escampa.<br />

Dins sous levadouns erbagieus,<br />

En soumilhant, embeu e lampa<br />

Una ribieirassa e cinq rieus.<br />

Amai, quand ven la grand secada,<br />

Que lous rajòus soun de camins<br />

E que, dins l’agau das moulins,<br />

La vaca velha, tressecada,<br />

S'engorga de quatre canaus,<br />

De la trincanta font de Rulla (2)<br />

E de salada que barrulla<br />

Dins lou grau d'Escoula-barraus.<br />

Quand sem à la Sant-Miquelada,<br />

Aiçai, au tems das grands coumplots,<br />

Que dessus la terra, embraigada,<br />

Aco tomba à negà de piochs;<br />

Que, de pertout, lou treble raja,<br />

Se la mar, en delai la plaja,<br />

Es coufla dau cop de levant,<br />

Lou dourmeire adounc prend l'escamp,<br />

(1) Le verbe pimpà se dit, principalement, des poissons quand ils montent à la surface pour respirer.<br />

(2) Fontaine dont l'eau, prise en trop grande quantité, donne des tranchées (trincadas).<br />

(1) Nom d'un marais du terroir.<br />

Couma un atau jagut d'esquina<br />

Agroumoulit sus sa jassina,<br />

Que dins soun som un pantai grèu,<br />

En lou destressounant, l’atissa,<br />

Lou galavard boufa à plen lèu,<br />

Susa, grumeja, s'esfoulissa,<br />

Rounca, estira, alonga, espandis<br />

En long, en largue, à gaucha, à drecha,<br />

Sous membrasses enrampesits<br />

En fora sa jassina estrecha,<br />

Qu'embounna d'un cop de ginoul,<br />

Ansinda fai l’estanc sadoul,<br />

De tant d'aigassa que regola!<br />

Ves-lou! se coufla à vista d'iol;<br />

Vidourle ie trai couma un fol;<br />

Estrifarà lèu sa talhola,<br />

Sa talhola verda à longs plecs,<br />

Taissuda de bola e de sagna,<br />

Ounte acoumençoun lou rausets<br />

E s'acampa la rastagagna.<br />

E toujour crei. Lou levadoun<br />

Que, dins sous recouides, l'esquicha,<br />

Es trempassat; dins Boulàs round (1),<br />

L'Averna (1), Plan de Peira-Ficha (2)<br />

Se trai, s'espandis de sounn long;<br />

Enaiga Coussou (3), Mourre-long (4),<br />

Liga Patus (5), nega Cairela (6),<br />

Aplana jounc, sòuda, coutela (7),<br />

Enfin à la longa coubris,<br />

Ou de briva ou de reculada,<br />

Touta la fringa de païs<br />

Que, d'en Carnou (8) jusqu'en Calada (9),


Centura soun inmense liech,<br />

Male e mouvent gargameliè (10)<br />

Ounte la febre se coungrilha<br />

E que leu marin escampilha<br />

Embé las pudentas sentous<br />

Dau surgentieu (11) qu'espira Avoust.<br />

Pamens pau à pau lou crei mola;<br />

Es tems que maine lou refresc.<br />

Adejà, dor lou Mas dau Gres (12),<br />

Çai ven lecà la pegairola.<br />

Tout escàs velhoun lous illouns,<br />

Un pauquet mai dins las cabanas,<br />

(1-6) Noms de marais du terroir.<br />

(7) C'est un narcisse dont les feuilles ont l'aspect d'une lame de couteau, d'où son nom.<br />

(8) Carnon, port sur le canal du Rhône à Cette, près Pérols.<br />

(9) Marais.<br />

(10) Chaume des marais coupé en biseau (coupat en gargalha ou en gargamela).<br />

(11) Humidité qui remonte des profondeurs de la terre, provoquée, probablement, par l'excès de<br />

chaleur; elle arrive à son apogée vers le milieu du mois d'août.<br />

(12) Campagne près des marais.<br />

A travès l'aparet de canas,<br />

Vendriè faire sous espinchouns.<br />

Mais, de memoria de pescaire,<br />

Res qu'una fes aco s'es vist,<br />

Amai encara gramecis<br />

Que Rose, en aval de Bèu-caire,<br />

Lou fol, crelbet de ves deçai,<br />

Ce que belèu veiren jamai.<br />

Es dins soun plen, lou crei s'aflanca;<br />

Pausa la ganta, pescadou,<br />

E laissa està dins la calanca<br />

Toun prim e laugè barquetou.<br />

Mais, se la pesca te couvida,<br />

Crei-me, raseja lou bord, car,<br />

L'estanc, quand a tant d'espandida,<br />

Es pus estanc, es una mar:<br />

Couma ela, a sas boumbourinadas,<br />

A de rauquiges, de bourjous,<br />

E de vira-vòuts e d'oundadas,<br />

E de cops de tems esfralhous,<br />

Malur à tus, paure pescaire,<br />

S'en largant vela, dau rouncaire,<br />

N'as pas devistat lou signau<br />

Dins la parada que s'estripa<br />

Entre la rocalha, aqui d'aut,<br />

E se lou magistrau t'assipa<br />

Au largue, aval, lion dau boulàs,<br />

Sies urous d'aguedre bon bras,<br />

Car amai tombes banc de vela,<br />

Amai assoulides l'estrop,<br />

Se noun te pos tene d’à-pro,<br />

La capa au vent larg que rampela,<br />

Pos pregà Dieu, Madona e sants;<br />

Ben lèu ta femna e tous enfants


Que lou gros tems mes en alerta,<br />

D’aginoul sus lou boutarel,<br />

Veiran ta beta descouverta,<br />

Presa per banda ou per cantel,<br />

Ou sus lou plan, ou travirada,<br />

Barrullant au grat de l'oundada;<br />

Pioi, ailalin, tout s'avalis.<br />

Paura femna! paures manits!<br />

Amai tus, asardiè cassaire,<br />

Qu'embé toun sounet, degaugnaire<br />

Dau cant de la cassa en amour,<br />

T’en vas lou vespre, à l'escabour,<br />

De tras un boutarel de bola,<br />

Pieuletà la paura bestiola<br />

Que vai e ven alatejant,<br />

Siegue quand reguegs l’estanc,<br />

En cassant à la revougada,<br />

E que, la cassilha à pourtada,<br />

T'amagues dins lous amadiès,<br />

Una man à la canardieira (1),<br />

De l'autra servant, à l’arriès,<br />

Lous rems fora de l'escoumieira,<br />

Se dins l'entremiecha te ven<br />

Una rounfladassa de vent,<br />

D'aquel que jout soun vanc tout branda,<br />

Aqui tout soul, e dins l'escur,<br />

(Car n'aimes pas, per toun malur,<br />

Lou dous trelus d'una nioch canda;<br />

Tires un pau das maufatous)<br />

La negra nioch per tus es bela,<br />

Oi, mais s'un cop perdes l'estela (2),<br />

De que devendràs, malurous?<br />

Crei-me, quand las aigas soun plenas,<br />

Amai que lou tems siegue siau,<br />

Cassa, se vos, à las pantenas<br />

(1) La canardière est un long fusil pour la chasse aux canards.<br />

(2) Perdre l'étoile polaire (perdre la tête).<br />

E laissa-me ta barca au pau,<br />

Se vos pas que res noun t'avengue.<br />

Maugrat mous dires, se, per cas,<br />

Te preniè quauque ratigàs,<br />

De Valadiè te n'en souvengue,<br />

De Valadiè lou Perolenc!<br />

Aquel d'aqui, l'era, cassaire;<br />

Era engincous e bon menaire<br />

Tant à, la vela couma au rem.<br />

Que de fes, devès la Rudela (1),<br />

L'an agut vist, à plena vela,<br />

Acoutissent tous gafarots,<br />

Embé tant.forta marinada,<br />

Que lous marins lous pus farots<br />

N'ausavoun pas quità parada.<br />

Pecaire! lou paure mesquin,<br />

Sa benurança saguet courta:


(1) Quartier de l'étang de l’Ort.<br />

(2) Quartier de l'étang.<br />

Faliè be qu'en fasent ansin,<br />

Quauqu'una ie venguesse courta.<br />

Un jour s'embarca à Castilhoun (2).<br />

Lou vent de bas boufava e proun;<br />

Lous cabaniès ie disien: — Resta,<br />

Lou tems es fossa ennevoulit;<br />

Davans que siegue nioch-falit,<br />

D'asard se i'aurà pas countesta.<br />

— Aco, s'ou dis en galejant,<br />

Sarà, crese, de marin blanc (1),<br />

E pioi tournarai de bona oura.<br />

Partis. Quand es sus lou mitan,<br />

Lou vent ressauta dau levant;<br />

Desempioi sa femna lou ploura!…<br />

Quand las aigas an demairat,<br />

Que fague bèu, que l'aura bousque,<br />

Que l'estanc siegue linde ou fousque,<br />

Vous counselhe d'endarrairà<br />

Lous plasés qu'en d'autres tems dona.<br />

Es vrai que sa bèutat vous sona;<br />

Mais sariè lisc couma un miral,<br />

Couma as jours de granda bounança,<br />

Qu'en lou devistant dau terral,<br />

L'iol jouta la parpela dansa<br />

De soun trelus qu'embalausis.<br />

— Bèu tems d'ivèr, que l'on se dis,<br />

Ai, quante bèu jour de fichouira!<br />

(1) Vent violent du Midi, qui passe sans amener la pluie.<br />

(1) Le tasquejaire est le pêcheur à la meurtrière.<br />

(2-3) Nom de deux habitants de Lansargues.<br />

(4) Deux têtes folles, deux têtes de grenouille.<br />

Se de lion lou gaud vous bourdouira,<br />

Es be quicom mai de pus fort,<br />

Quand vous capitàs sus lou bord,<br />

Que soun biai vesiat vous fai lega.<br />

Lou cor, las mans an petelega;<br />

Tout, es aqui dins lou barquet,<br />

E rem, e fichouira, e rouquet.<br />

Ai! la man desper ela aganta.<br />

— An! d'aut-d'aut; arriva que planta!<br />

Fau que passe ma fantasiè.<br />

Eh be, maudespiech de toun rire,<br />

Couma qu'ane, couma que vire,<br />

Fichouiraire, es una fouliè:<br />

Quauque jour m'ou saupràs à dire.<br />

Ansin que tus trefoulissien<br />

Dons forts tasquejaires (1) d'anguila;<br />

I'aviè Periè (2), lou paure Mila (3),<br />

Dos testas verdas (4), e venien:<br />

— Siam per carema e granda velha,<br />

Segu que Dona Chichoumelha (5)<br />

Sarà de soupada à l’oustau.


(5) Chichoumelha, qui est ici un nom de femme, est le terme dont on sert pour désigner un mets<br />

grossier et mal apprêté.<br />

Se pescavem quauque apougaut,<br />

Desoundrariè pas nosta taula.<br />

Couma lou faire e la paraula<br />

En elles dons era tout un,<br />

Sounjoun pas fossa de tems: l'un,<br />

Aganta e brandis la partega,<br />

L'autre, assetat sus lou palhòu,<br />

Peses tancats au carcagnòu,<br />

A remà lèu-lèu se boulega.<br />

L'aiga sembla d'argent foundut;<br />

Dins lou cros lou mai rescoundut,<br />

De tant que lou sourel dardalha,<br />

Dau choùchou devistoun la dralha;<br />

Mais-nou, lou choùchou vau trop pau,<br />

Lou margagnoun ou l'apougaut,<br />

Rai (1)! sa car es ben agoustousa;<br />

Vau belèu mai que car de croc,<br />

E sa mena es fossa aboundousa,<br />

Maugrat lou musclau e lou croc.<br />

Lous dous amics van de brivada,<br />

Targant lou regard dor lou sòu,<br />

(1) A la bonne heure! Peut-être est-ce le mot vrai ayant perdu sa première consonne.<br />

Quand tout d'un cop, dins lou briòu (1)<br />

Milou devista una boufada (2).<br />

— Boudieu! Noste-Segne! quante un!<br />

S'esclama en fiscant la partega.<br />

Aladounc, dedins lou limpun,<br />

Un bout de couetassa boulega,<br />

Pioi una cana (3) par delai,<br />

La bauma ounte chauma e se jai<br />

La bestia craumousa e sadoula.<br />

Plan-plan lou fichairoun trascoula;<br />

Dins l'aiga sembla retoussit.<br />

Lou tascaire, de reda força,<br />

Manda lou cop, e sent croussi<br />

L’animaudàs que se bigorsa,<br />

Ansin qu'un moustrous serpatàs,<br />

Autour das longs pounchouns bertats.<br />

Mais, de l'afecioun que i'anavoun,<br />

Lous pescaires n'avien pas vist<br />

Lous nibous que se derrabavoun<br />

D'ounte lou magistrau salis,<br />

Quicom que se fau prene garda<br />

En Vacairieus (4) encara mai;<br />

(1) Plante touffue qui croît au fond de l'étang, où se cachent les grosses anguilles.<br />

(2) La boufada est la trace que fait l'anguille en agitant sa queue en arrière de sa grotte.<br />

(3) Mesure de huit pans.<br />

(4) Les Vacairieus sont les quatre derniers jours de mars et les trois premiers d'avril, où le vent souffle<br />

plus fort que jamais.


(1) Nom d'un chasseur de Lansargues.<br />

(1) Nom d'un autre pêcheur.<br />

(2) Quartier de l'étang.<br />

(3) Nom d'un autre quartier de l'étang.<br />

Segur que se vou'n ven pas mai,<br />

Ie bougnarés e pel e farda.<br />

Avien pecat, mau i'en prenguet.<br />

Lou cop de tems lous susprenguet,<br />

Tout juste au moument que tiersavoun,<br />

E l'apougaut, que tirassavoun,<br />

Ie descapa dins lou rambal;<br />

Pioi l’oire ven, lous amadieira.<br />

En van manejoun l’agoutal;<br />

Un autre monta en cavalieira,<br />

E la barca e lous pescadous<br />

Dau ourg van canà las founsous.<br />

Per bounur, lous an vist de terra,<br />

Per bounur, se i’es atrouvat<br />

Lou soul que poudiè lous sauvà<br />

De la mort qu'alin lous espera.<br />

Mais quau es aquel afrountous<br />

Que, dins sa pichota barqueta,<br />

A l'estanc ven faire lengueta,<br />

E se trufà de soun courous?<br />

Es Lalet (1) — quau voulès que siegue?<br />

Lou pichot matelot Lalet.<br />

Aquel e soun amic Solet (1),<br />

Pecaire, davans soun Dieu siegue!<br />

N'an vist mai d'un escafarnel...<br />

Terré! la fes dau Grand-Rudel (2),<br />

Qu'ensem fasien la reboucada.<br />

Es aqui que n’i’ aguet d'espés.<br />

Crenissien fossa, aquela fes,<br />

De ie quità pel e pelada.<br />

Avien avarat de Plagnòu (3)<br />

Mountats chacun d'un barquet nòu.<br />

Lalet, qu'au rem degus pot segre,<br />

Dins soun cruvel de nose, alegre,<br />

Au lion fasiè lou cop de man,<br />

Lou vent boufava dau levant,<br />

Talament fol que s'espetava.<br />

Poudien pas causi milhou tems,<br />

Car la cassa que reboucava,<br />

Tout escàs remountava à vent<br />

A sieis canas per d'aut la testa.<br />

Poudès vous pensà quanta festa!<br />

Couma lous fusils boumbissien!<br />

E cinq ou sieis chacun n'avien,<br />

Toutes cargats jusqu'à la maissa.<br />

S'aviè durat, quante bèu jour!<br />

Per malur, au cop de miejour,<br />

Dau Pounent s'auboura una raissa,


Embé trounadas e groupats;<br />

Lou tems se prend, de pertout fuma.<br />

Embourgnats de ploja e de gruma,<br />

Nostes cassaires, agroupats<br />

A las bandas per se mantene,<br />

S'en van à la garda de Dieu;<br />

E toutes dous passat bon brieu,<br />

Saboun pas à de que s'en tene;<br />

An perdut soun esprit present.<br />

Solet, lou pus proche de terra,<br />

Per un foulet ben lèu se sent<br />

Panlevat dau ròdou à-m-ounte era,<br />

Pioi escampat sus lou moutàs.<br />

Era sauve aquel, mais: — Gueitàs!<br />

S'ou disien lous de la guerita (1):<br />

— De qu'es aco qu'emb aquel tems<br />

Juste en plen estanc se capita?<br />

Quoura de vista lou perdem,<br />

Monsegut per la remoulina;<br />

Quoura de pounchas rebessina,<br />

(1) C'est une plate-forme émergeant au-dessus des plus fortes crues. Au sommet sont des huttes.<br />

E quoura se vei varalhant<br />

Sus l'ounda couma un tros de sieure.<br />

Es-ti peissàs, moustre ou crestian?<br />

S'es crestian, a prou fach de vieure<br />

E sous jours saran lèu finits.<br />

Sariè-ti la moustrousa laucha (1),<br />

La que, dins sa courrida baucha,<br />

Creba gangui, coua e canis?<br />

Ou sauprem lèu; d'en Capoulieira (2),<br />

Diriàs que seguis la dressieira,<br />

I'anam? sarà ce que sarà!<br />

Vague! Ie soun dins una escoussa<br />

E trovoun Lalet que s'espoussa<br />

Dins soun nega-fol (3) aterrat.<br />

Pioi, s'assetant dessus lou tèune,<br />

Desplega un moucel de pan tèune,<br />

Lou crousteja, e d'un bralle gai:<br />

— Ou vesès, n'en sarà pas mai:<br />

N'en passarem d'autras encara!<br />

E, tout disent aco, se carra<br />

Couma un capitani de mar<br />

Qu'auriè tengut testa à Jan Bart.<br />

(1) La laucha est un poisson fabuleux.<br />

(2) Quartier de l'étang.<br />

(3) Le plus petit des bateaux; littéralement un noie-fou.<br />

Segur qu'on disiè per s'encreire,<br />

Car desempioi an pouscut veire<br />

Qu'aviè fossa sermat soun vin.<br />

Ben i’a vougut de faire ansin...<br />

Entre que las aigas soun plenas,<br />

Cassaire, cassa à las pantenas<br />

E laissa-me ta barca au pau.


(1) Gros bateau. Littéralement museau de porc.<br />

E tus, pescadou, resta siau.<br />

Entremens que l'estanc repoufa,<br />

Que lou magistrau crana e boufa,<br />

Se vos fa quicom de toun corp,<br />

Adouba toun mourre-de-porc (1),<br />

Sarcis tous ars, pega ta barca,<br />

Fougueja toun rem que s'enarca,<br />

As pas long tems à trefouli;<br />

Lou magistrau a lèu falit:<br />

Tres jours lou mai e pioi s'escana.<br />

Se pot que reprengue au vent-drech,<br />

Mais, vengue à boufa tramountana,<br />

Entre que sentirà lou frech,<br />

Lou veirés lèu cercà la cauma,<br />

De long de la mar enrebat,<br />

Couma un lusert davans sa bauma,<br />

Que dau sourel beu lou rabat.<br />

Alor de longa, au largue! au largue!<br />

Escampa toun rasal sans pòu.<br />

Ara, ou jamai nou, faràs bèu.<br />

Cassaire, escandalha toun cargue,<br />

Cala toun las de tamaris;<br />

Aqueste cop auràs pas blanca (1);<br />

Çai vai veni de cassa blanca (2)<br />

Couma ome vieu n'a jamai vist!<br />

(1) Faire blanca, c’est manquer son coup (fusil qui rate).<br />

(2) La cassa blanca désigne tout le gibier de l'étang, à l'exception de la macreuse, qui est noire.<br />

SEGOUNDA PASSAU<br />

La Cassa blanca<br />

PER GRASSET-MAUREL<br />

L'estanc es dins soun espandida,<br />

L'oire vai e ven en palus;<br />

L'autouna es estada aplougida,<br />

Toutes lous rajòus soun venguts,<br />

Tabé, manca pas de gargalha,<br />

Ni de fòure, ni de vitalha;<br />

Lous clars, soun cafits de grouhun,<br />

De pieuta à flou d'aiga e tendreta;<br />

Sus lou parvel, sòuda, blanqueta,<br />

Manca pas de cagaraulun.<br />

Anem, aucels, la taula es messa<br />

E i'a plaça per se cabi;<br />

Bona pignata es aproumessa,<br />

Dirés pas noun à tal couvit.<br />

Mais de fautà res noun s'enchauta:<br />

Soun talament agroumandits!<br />

Dejà, tre que lou jour lusis,


Dins lou jouncàs que l'aura apauta,<br />

Sus lous levadouns toujour verds,<br />

Jout la moutousa, dins la pampa,<br />

Fugissent counglàs e silampa<br />

Dau païs d'aut as longs ivers,<br />

D'aucels d'aiga, à belas centenas,<br />

Çai venoun de tras las Cevenas,<br />

Cercà becage e caud sourel.<br />

Ara es soun tems, car de l'autouna<br />

S'es vist passi lou darriè grel,<br />

E la nèu amount s’empilouna<br />

Sus lous nauts acrins de l'Aigal.<br />

D’or l'estanc que per aiçaval<br />

Dins sas rausieiras se miralha,<br />

D'un primadiè que las amalha,<br />

A travès noste ciel seren,<br />

Gruvas, aucas, en bessoun reng,<br />

Angle mouvent que res enbolha,<br />

Landoun, mandant de cris de joia,<br />

E van se pausà sus sous bords.<br />

Ven de canards en longas flotas;<br />

Bouices vieus, oustardas palotas,<br />

Rotaires nòus, tristes betors,<br />

La pigra e brodousa abanela,<br />

Gafetas, sardinaus pudents,<br />

Pieulaires, cacharèus brusents,<br />

Culieiràs, lipega, cabrela,<br />

Fumet, càssaire gal-pesquiè,<br />

L'arniè, la fina cabidoula,<br />

La galinela au vol ratiè,<br />

Flau que tant graciousament voula,<br />

(1) Montagne des Cévennes.<br />

(2) Variété de canards.<br />

(3) On le nomme plau à Montpellier. C'est une variété de canard.<br />

(4-5) Deux variétés de canards.<br />

(6) Canard dont le bec forme une sorte de pochette.<br />

(7) Le flau est une variété de flamant.<br />

Bernat plagnent, ganta au vol flac,<br />

Subretout de foucas à flac.<br />

N'i'a de tout crei, de tout terraire;<br />

Despioi lou lutrat cabussòu<br />

Que se trufa tant dau cassaire,<br />

Jusqu'au gabian voulastrejaire<br />

Que sembla jamai toucà sòu;<br />

Dempioi lous que, de la Russia,<br />

Dau bèu Miejour an pres la via,<br />

Bandissent soun nis dins la nèu,<br />

Jusqu'en d'aqueles que de l'Inda,<br />

Sus la ploumada rosa e linda,<br />

De soun sourel portoun lou sèu.<br />

E tout aco dins l’aigatilha,<br />

En palus, en plaja, en salant,<br />

Voula, nada, gafa, trepilha,<br />

Cabussa, raspilha, courris,<br />

Pieula, sibla, graula, cloussis.


Ai! que soun bèus e pouderouses!<br />

Ciel, terra, aiga, tout i’aparten.<br />

De l’oire doundoun lou courrent,<br />

(1) La ganta est une variété d'oie.<br />

(2) L'aigatilha est une couche d'eau à peine perceptible.<br />

(3) Parties de l'étang où les eaux sont profondes.<br />

E lous foundàs espetaclouses,<br />

De la Mouta ou dau Grand Travès,<br />

Ounte jamai l’iol ne davala,<br />

Per eles n'an ges de sicrets.<br />

Pioi, d'aqui, d'un garrut cop d'ala,<br />

Trempassant pourg, cros-de-peiròu,<br />

Jusqu'en de nautous que fan pòu,<br />

Tout en voulastrejant s'aigrejoun;<br />

Pioi, ailamount, rodoun, negrejoun,<br />

Retrasent end un nivoulàs<br />

Que dous vents countraris secutoun,<br />

E que d'un à l'autre rebutoun<br />

Dins un inmense fouletàs.<br />

Mais ben lèu touta l'aucelalha,<br />

En voultant, ven fa graumilhet<br />

Dor l'estanc qu'ailaval dardalha,<br />

Couma lauseta que varalha<br />

Pipada per lou miralhet.<br />

Poulits aucels, que sias urouses!<br />

Ai, que voste bounur fai gaud!<br />

Das ivernasses reguinnouses,<br />

Poudès fugi l'alen brutau;<br />

E pioi, quand l'estieu nous acaura,<br />

Quand nautres, que çai demouram,<br />

Tout escàs se ie tempouram,<br />

Dins l'aire e proumtes couma l'aura,<br />

Avès largat despioi long tems<br />

Dor lous endrechs qu'un dous printems<br />

Tout escàs auboura la sàba.<br />

Mais à mounte es aco qu'anàs?<br />

La bela vida que menàs,<br />

Ounte acoumença? Ounte s'acaba?<br />

Vautres souls, ou sabès, aucels.<br />

E l’ome qu'à maire Natura<br />

Derraba sicrets à moucels,<br />

Que, maugrà ‘co, toujour tafura,<br />

Noun pot, e saique noun jamai<br />

Poudrà, quand fariè mai que mai,<br />

Desemboulhà dins lou grand libre<br />

Lou fiol ounte sias escrieutats.<br />

Ah, couma vautres s’era libre!<br />

Coussi bandiriè sas cieutats;<br />

Ai, qu'estripariè de misteris!<br />

Mais lou que, dessus terra, crei<br />

De la creacioun este rei,<br />

Pichot reinou que lous enferris (1)<br />

Aiçaval tenoun clavelat,<br />

Noun pot vous segre qu'en pensada,<br />

Quand, per vous veire à la passada,<br />

Auboura soun corp envelat.


(1) Les inferris sont les entraves des Chevaux de la Camargue et des forçats.<br />

(1-2) Parties de l'étang.<br />

(3-4-5) Autres quartiers de l'étang.<br />

Pamens, se d’enregà l’espaça,<br />

Ansinda que vautres, noun a<br />

Lou poudet ni lou saupre-fa;<br />

Se, quand lou devistàs en cassa,<br />

Poudès vous panlevà tant naut,<br />

Que ie fasès passà lou gaud<br />

De vous rebilhà sa granalha,<br />

E que ben lèu, d'enodi pres,<br />

Se venja sus la menudalha,<br />

Tant que lou papach dis pas res,<br />

E qu'es jour, d'aquel que roundina,<br />

Aval, poudès vous aparà;<br />

Mais, quand la tripalha fouïna,<br />

Ou que lou sourel embarrat<br />

Fai plaça end una nioch sans luna,<br />

Adounc voste poudet finis;<br />

Per tant que segués escarnits,<br />

Lou ruscle soul parla e tout d'una<br />

Dins soun emperi davalàs.<br />

Aqui se ie ten la mangilha;<br />

Aqui paluses, clas, valats,<br />

L'aiga das rajòus que bresilha,<br />

E pioi l’estanc que vous souris,<br />

Ounte belèu s'en trova fossa<br />

Que dins lous Fourmieus (1), ou Gros-Ossa,(2)<br />

Antau se ie soun abarits.<br />

Aqui las belas niochs serenas,<br />

Lous bons abrics, as marrits jours<br />

Que rounca de ves las Cevenas;<br />

Aqui lou nis e las amours,<br />

Mais aqui tant-ben se i'atrova<br />

L'ome emb sous estruments de mort.<br />

Fourbiàs, quand trevàs Estanova, (3)<br />

On lou Roc (4), ou Caissa-de-Mort, (5)<br />

Aqueles jors de tamarissa<br />

Qu'en sus de l'aiga pausadissa,<br />

Se vei en miech ceucle toussits;<br />

Es el que ie lous a pounits<br />

De rode en rode, à tems destourbe;<br />

Ara qu'un pichot groumandoun<br />

Passe lou col jouta lou courbe,<br />

Per becà, lou floc d'anguiloun<br />

Que sus lou cabilhot simbela,<br />

Dau cop la jeta fouitarela<br />

Se revertega en brounzissent,<br />

E dins sa proumta coumba-leva,<br />

En fora de l’aiga panleva,<br />

Gansat dedins lou nous courrent,<br />

Lou paure aucel que raufeleja,<br />

Se tors, e tremola, a cambeja;<br />

E vautres, mandant de longs crids,


(1) Sorte de filet.<br />

Voua 'nfugissès espavourdits.<br />

Car lou calaire en mala facha,<br />

Que vieu res que de soun engin,<br />

Dins sous estibaus se despacha,<br />

Per veni querre soun choupin....<br />

El mai, entre dos aigas cala,<br />

De longs filats, juste à la cala<br />

Ounte anàs vous abitalhà,<br />

Quand lou tems es destrantalhat,<br />

Tout en pescant la pieuta amara,<br />

Per la fouca tant bon moucel,<br />

E la cairela, e lou parvel,<br />

L'anguilounet, qu'alin s'entarra,<br />

E lou cauquilhun doucinàs,<br />

Qu'embé tant de goust boufinàs,<br />

Gardàs-vous de la cabussieira! (1)<br />

E per aco, quand fai fresquieira,<br />

Tenès-vous lion das bons abrics,<br />

En çai, en lai, dessapartis,<br />

Se que de noun, de la coulada,<br />

Per tant que siegue escardussada,<br />

Sega, qu'après chaca cabus,<br />

N'i'aurà que tournaran pas pus;<br />

Saran alin, l’ala tesada,<br />

Apegats au malhun espés,<br />

Couma lous paures mouissalets<br />

Qu'on vei dins una estrigagnada.<br />

Se d'aquel dangè vous garàs,<br />

N'agués pas, au mens, la cresença<br />

De n'este ansinda requitats;<br />

Pagariàs care l'emprudença.<br />

Mesfisàs-vous toujour; ben mai,<br />

Quand dins noste ciel qu'escaluga,<br />

On vous vei tout floc, tout beluga,<br />

Voulastrejant deçai, delai,<br />

Se devistàs, aval en terra,<br />

Quand d'ailamoundaut agachàs,<br />

Quauques aucels entrepachats,<br />

Que per s'aubourà fan espera,<br />

Emb un pichot crid pietadous,<br />

l'anés pas jamai au secous;<br />

Engardàs-vous ben d'aco faire:<br />

Soun de cimbels qu'un pantejaire (1)<br />

Dins sas pantas a cabilhat,<br />

E que per lous dessagrilhà (2),<br />

En vous vesent dins la dressieira,<br />

De soun reseoundoun de brancun,<br />

Vira à tout cop la cimbelieira, (3)<br />

Dins l’estigança que quauqu'un<br />

Vai davalà d'amount das aires,<br />

Per veni secouri sous fraires:<br />

Sap proun qu'à mounte un soulet vai,<br />

Touta la frapa se ie trai,<br />

Quand es per tirà de la pena<br />

Un das vostres blassat, malaut.


De voste bon cor que vous mena,<br />

Se seguissès ansin lou frau,<br />

Tant lèu pausats, sus vosta testa,<br />

Ansinda qu'un vent de tempesta,<br />

Das filats mouguts de redou,<br />

Ausirés la rauca bourjou;<br />

Aurés bèu boumbi de maliça,<br />

Contra lou malhun fiblarel<br />

Que vous emplastra e vous atissa,<br />

En van dau mouvent cabucel,<br />

1 Le pantejaire est le chasseur aux filets.<br />

2 Dessagrilhà, signifie secouer, donner de l'élan.<br />

3 La cimbelieira a pour but de secouer les appeaux.<br />

A cops de becs, à cops d'arpadas,<br />

Brandirés las longas plessadas.<br />

Empachoucats de mai en mai,<br />

Despoudentats e plens d'esfrai,<br />

Veirés s'abrivà lou calaire,<br />

Que per vautres n’es gaire mol,<br />

Vous agantant e pioi, pecaire,<br />

Un per un faire torti-col.<br />

Bristàs tant-ben aquel que roda,<br />

Embé soun fusil jout lou bras;<br />

De l'agachà 'nsinda diriàs<br />

Que çai ven passejà sa broda;<br />

E pamens, tal que lou vesès,<br />

Quand saupriè de couchà defora,<br />

Amagat dins lous penaisiès,<br />

N'entournarà dins sa demora<br />

Que noun porte au mens soun sacàs<br />

Plen d'aucels morts ou desalats.<br />

Avisas! es un esperaire.<br />

D'ailamoundaut achàs-lou faire;<br />

S’en vai plan-plan, à soun passet,<br />

Resca pas res d'acampà set;<br />

Quoura ailamount dor vautres guincha,<br />

Quoura s'arresta, au sòu espincha,<br />

Espepidant voste trafic,<br />

Car lou bord de l'aiga es cafit<br />

De dralhas e de trepilhadas;<br />

Aqui devigna, à las pautadas,<br />

Quau soun lous que venoun trevà,<br />

Quoura se pausa la cassilha;<br />

Se i’a bona ou paura mangilha,<br />

Quand ce que cerca l'a trouvat.<br />

De grata-pautas se recata,<br />

Au moument que lou jour falis,<br />

De tras un jouncàs ou la mata<br />

De salan, sòuda, ou tamaris.<br />

Ara, que boufe la senepia,<br />

Que barbaste, que tombe un glas,<br />

Agroumoulit couma una sepia,<br />

Res lou destourba, en res fai cas;<br />

L’iol fissat dins rescuresina,<br />

L'aurelha tibada, e lou det<br />

Sus la palheta que fouïna,


De la petelega e dau grep;<br />

Sa man ie tomba; espera, espera;<br />

Lou frech piala, espera toujour;<br />

Contra lou tems noun s'enchimerra;<br />

Sap be que vendrà lèu soun tour,<br />

E que doumai lou frech rampela,<br />

Doumai la cassa passa bela,<br />

E dournai sarà requitat<br />

Dau marrit tems qu'a capitat.'<br />

Mais ben lèu, de sa mingra cala,<br />

Ausis un long brounziment d'ala,<br />

Couma diriam un ventoulet<br />

Qu'alena un pauc e pioi s'amourra,<br />

Pioi qu'en viroulejant, auboura<br />

La fiolha morta e lou pousset.<br />

End aquel bruch soun cor bacela;<br />

Lou prus ie ven emb la calou;<br />

Sous iols, que fasien parpantela,<br />

Devistoun lèu dins la negrou,<br />

Quicom couma d'oumbras mouventas,<br />

Que rodoun, venoun, van, ardentas,<br />

Dralhant de ceucles que mai van,<br />

De ves soun rescoundoun se barroun<br />

E de la terra, en tout soun vanc,<br />

A chaca vira-vòut se sarroun.<br />

Ausis encara un,pichot brieu,<br />

De las aladas lou flieu-flieu,<br />

E pioi un gourgoul d'aigatilha.<br />

Tant lèu, e dins aquela via<br />

Un cop ressountis dins lou siau,<br />

Un cop sourd qu'es toujour mourtau.<br />

Antan chaca vespre se passoun.<br />

E plan-plan lou vol demenis,<br />

D'aqui que sagués acoutits<br />

Par lous abramats que descassoun;<br />

Ou qu'entre eles a pescadous<br />

S'entremescle un patio de bisquerla,<br />

Quicom qu'es pas ben miraclous,<br />

De ie veire crebà la gerla. (1)<br />

Alor as rodous que trevàs,<br />

De las mans memas das pescaires,<br />

La nioch de fiocs soun atubats,<br />

E mau despiech das esperaires<br />

Que se vesoun, par quauque tems,<br />

Destetats d'aquel passa-tems;<br />

Car, au trelus de la flamada,<br />

De longa avès quitat parada,<br />

Atraïnats devès d'endrechs<br />

Ounte coumtàs trouvà paissença,<br />

Seguretat, pausa, silença.<br />

Mai, pecaire, à mounte qu'anés,<br />

Partout pagarés lou carnage;<br />

En Sèuva, au Tes, dins lou Sauvage, (2-3-4)<br />

(1) Crebà la gerla (briser la jarre), c'est en arriver aux injures.<br />

(2-3-4) Noms de lieux.<br />

Dins lous clars, sus lous estagnòus,


Lous mendils (1) e gardians de biòus,<br />

De tout branle vous fan la cassa.<br />

Dins lous giscles, Galicianencs, (2)<br />

E Vauverdiès, e Cailarencs,(3-4)<br />

Per vous secutà soun pas traça.<br />

L'aigalous e sablenc païs<br />

Que lou sourel uscla e chauris,<br />

Lou vaste païs d'Aiga-Morta,<br />

A, per vous cassà, lous sauniès,<br />

Tant desobrats en sasoun morta,<br />

E goudrimans e cabaniès;<br />

Enfin, dins touta la planada<br />

Que s'espandis, aigassejada,<br />

Dau Rose en païs catalan,<br />

Tout ce que ten fusil en man,<br />

Per sous plasés ou per lucrige,<br />

De vous cassà sent la prusige.<br />

Ai! ai! per-que tant d'enemics,<br />

Ansin que la rata-penada,<br />

Que la bauma de nioch goumis,<br />

An-ti fach pache embé la fada,<br />

La fada befia de verin?<br />

(1) Le mendil est l'aide-berger, l'aide-gardien d'un troupeau, d'une manade de chevaux ou de bœufs.<br />

(2-3-4) Villages du département du Gard.<br />

An-ti, Cournla ton gros douguin,<br />

E soun coumpaire ton béu-l'oli,<br />

Gant esfraious, triste, plagnent,<br />

Regard senistre e trelusent,<br />

Que diriàs un lamp de petroli,<br />

Qu'on vei la nioch sus tous teulats<br />

De la tourre, ou dau castelàs,<br />

Ou de la capela en rouïna,<br />

E que lou pastre, que cantine,<br />

Proun à la tarda, ves lou cast,<br />

Loue prend per d'amas de damnats?<br />

Se, couma la suita abousida,<br />

De la mort avien la sentida,<br />

S'anavoun miaulà, dins lou siau,<br />

Sus lou fenestroun d’un malaut,<br />

Au moument qu'à soun oustalada,<br />

A l'entour dau liech arrambada,<br />

Fai sous adieus, e que belèu,<br />

De l'esperança un pau fumousa,<br />

Vei lusi lou doucet calèu....<br />

Mais à sa vos espetaclousa<br />

El e sa familha plourousa<br />

N'esperoun que la mort lèu-lèu.<br />

De l'aigla an pas lou gouludige;<br />

Ni mai dau vautour lou rossige;<br />

Dau vautour pigre e gaspinèu.<br />

Jamai n'an, de sang garinada,<br />

De l’agnel ou de l’agnelada,<br />

Rougit la tafa de la nèu.<br />

Mais pioi que de l’aucel de proia,<br />

N'an pas lou ferouge talent,<br />

Qu'au contre de l'aucel niochenc,


N'an que de cants d'amour, de joia,<br />

Per-de-que ie vos tant demau,<br />

Crestian, que tant lous acousseges?<br />

Sa despolha te fai-ti gaud?<br />

Milhou, sariè-ti que i’enveges<br />

Soun bounur e sa libertat?<br />

A loga de s'escabartà<br />

Amount dins l’espaça serena,<br />

Lous voudriès-ti, per mens de pena,<br />

Encastrats dins lou galiniè,<br />

Couma aqueles qu'as de sa mena<br />

Au mas, à la maimajariè?<br />

Lous voudriès couma aquel esclava<br />

Que ta mouliè de vespre enclava<br />

De crenta saique dau seren;<br />

Toujour sadoul de gran, de bren,<br />

De touta mena de mangilhas,<br />

De vilaniès e d'escoubilhas,<br />

E que, fauta d'un clar surgent,<br />

D'un rajòu, d'un valat courrent,<br />

Vai tout rabalant sa panoulha<br />

Dins lou bachàs salle e pudent,<br />

Ounte se bachucha e gourgoulha.<br />

Lou salle bestiau qu'aco fai;<br />

N'a ges de gaubi, ges de biai;<br />

Milhou, s'un jour ie veniè l’ime<br />

De descampà de soun terren,<br />

Crese ben, lou diable me rime,<br />

Que mouririè de patiment,<br />

Mema dins lous prats de Laprada,<br />

A fauta d’atrouvà becada.<br />

Soun talament abastardits<br />

Que saboun pus basti soun nis!<br />

Anem, aucels, per ie coumplaire,<br />

Per vous aparà das filats,<br />

Dau cop de fusil ou dau las,<br />

Voire, ensajàs de ie retraire;<br />

Bandissès lous lindes rajòus,<br />

Roubinas, fluves, estagnòus,<br />

Ounte passàs tant bela vida,<br />

Au bachàs l’ome vous couvida;<br />

Quitàs-m'aqui lou bel estanc<br />

Ounte en iver vous plasès tant;<br />

Pas pus d'aquelas abrivadas<br />

A travès ciel, mars e countradas;<br />

Quoura, raflant à contra-vent<br />

La nèu grespada de la tepa,<br />

Quoura, sus l’oundada que trepa,<br />

Franquissent remòus e courrents,<br />

Couma de naus que van alerta<br />

Jouta lou pole en descouverta,<br />

Lou pole mut e souloumbrous,<br />

Qu'à vautres n'a res de cachous;<br />

Quoura, voltant per d'aut aurages<br />

Ou das nivasses autouniès,<br />

D'ounte devistàs lous vilages<br />

Couma de pichots fournihiès;<br />

Davalàs de las nautous lindas,<br />

N'aurés qu'à vous espesoulhà,<br />

Manjà, beure e s'estourroulhà


Embé lous porcs, embé las guindas;<br />

Adieu, adieu, castas amours,<br />

Que naissès embé l'espelida,<br />

E qu'aloungant touta la vida,<br />

La mort ne trinca pas toujour!<br />

Un mascle per chaca toucada;<br />

De vielhige ou de la sannada!<br />

Car, enfin, cau mouri qu'un cop.<br />

De fes mema la vida alassa.<br />

Mouri per tus, de qu'es aco?<br />

O Libertat, que sies belassa!<br />

TRESENCA PASSADA<br />

Lous Pescadous<br />

PER LOU DOUTOU PONS<br />

I'a bon brieu que las vendemiadas,<br />

Emb sous cants e sas gandesadas,<br />

An delargat dau vignarés.<br />

Lou vin grumejous e tebés<br />

Dins lous dougencs se fourtifia,<br />

En escampant per lou tinau<br />

Soun alen capitous e caud<br />

Que l’audou soula escarrabilha.<br />

Lous travals soun pas afougats:<br />

I'a res à faire as semenats,<br />

Lous autres saran capounats.<br />

Mais, atabé, quanta arribada!<br />

Couma anàs este poupounats!<br />

Quauques meses d'aquel ben-estre,<br />

Anàs espetà dins la pel;<br />

Pamens un jour, çai ven lou mestre.<br />

Ounte vai embé soun coutel?<br />

A soun entour ven la poulalha,<br />

Coumtant que porta au manjadou<br />

Tout ce qu'a de bon e milhou;<br />

Mais el, das iols fasent trialha,<br />

A lèu devistat lou pus gras:<br />

— Lou diable me siè, se m'embaure,<br />

S'ou dis, en secutant lou paure;<br />

De vespre embé ieu souparàs.<br />

D'un vanc l'aganta per la pata,<br />

End aco, pioi, zou, lou sagata...<br />

Aucels, es antau que finis<br />

Aquela vida tant presada;<br />

Vida sans gaubi e sans ounou.<br />

N'en voulès-ti? Segu que non,<br />

Vòu be mai cercà sa becada<br />

En libertat, deçai, delai.<br />

Petà per petà, que ie fai<br />

Que siegue d'una fusilhada,<br />

L'ouliva es pa’ncara madura<br />

E, per la pouda, noun i’a fioc.<br />

Tant ben, dins lou plan, sus l'aussura,<br />

Per las garrigas, en tout lioc,<br />

Se vei de colas de cassaires;


Mais, en cercant gabre, lebraut,<br />

La calla, l'estournel viajaire,<br />

Chaca fes que dor aqui d'aut,<br />

Sus un truc, la partida barra,<br />

En tems fresquet, escardussat,<br />

Dor l'estanc qu'ailaval se carra,<br />

Dins soun liech tout espantoulhat,<br />

Pas un d'eles que noun se vire;<br />

Milhou, i'auriè' na lebre au jas,<br />

Qu'es una coumparança à dire,<br />

Crese que ie farien pas cas.<br />

Es de fet qu'en virant l'espalla<br />

E lou regard d'aquel coustat,<br />

S'es vist sauvà, mai d'una calla,<br />

Mai d'un perdigal envòutat.<br />

De tant que soun rebat lous sona,<br />

Saboun pas, dedins aquel tems,<br />

Se soun sus aiga ou sus terren,<br />

Dins la roucalha ou per la lona.<br />

Soun aqui courna estabourdits;<br />

Pioi, un cop desemrampesits<br />

D'aquela douça estavanida,<br />

Amai countugnoun la partida,<br />

An la pensada en quicom mai;<br />

Ce que i'agrada mai que mai<br />

E i'avena un pauquet la charra,<br />

Es que nosta vota se sarra,<br />

Car es sensat qu'à Sant-Martin,<br />

Se fai la premieira voulada,<br />

En musant, d'aquela journada,<br />

Parloun tout de long dau camin.<br />

Dau tems que d'unes trefoulissoun,<br />

Vesent pas l’oura e lou moument<br />

De metre man e qu'entremens<br />

Per lou terraire s'espandissoun,<br />

A d'autres aco fai pas lum,<br />

Amai de bravament s'en manca.<br />

Dins la cabana, à la calanca.<br />

Sus la guerita, se quauqu'un<br />

Era aqui proche, per entendre<br />

N'ausiriè de man moustrigat,<br />

Mais, en tout, justiça cau rendre,<br />

N'an pas tort de repoutegà.<br />

D'esper el, es cran lou pescaire:<br />

Renega, quand a res à faire;<br />

Quand i'a foga, renega mai;<br />

Milhou, se l'entendiàs, quand prega,<br />

Per ma fe, diriàs que renega.<br />

De que voulès, aco's soun biai!<br />

Dounc se, quand noun i’a sujet, charpa,<br />

De qu'es pas, quand lou terrassenc<br />

Vai, dins soun païs, bougnà l’arpa,<br />

Fa la voulada ou cassà 'u rem?<br />

Ai, se n'en dis, aqui vous laisse!<br />

Amai veni dins soun estanc,<br />

Sa fasenda, soun gagna-pan,


Soun bel estanc, que l'a vist naisse,<br />

Ounte a viscut en pèu, descau,<br />

A las plojas, au frech, au caud,<br />

Dins sas bralhas repetassadas,<br />

Que soun de toutas las sasouns,<br />

Negre couma lous giroundouns,<br />

Enfant, faire d'escarlimpadas,<br />

Barbèu, emb soun paire e pioi soul,<br />

Dins l'aiga linda au lou patoul,<br />

Au lion, anlai de la guerita,<br />

Calà lous ars, fa la vesita,<br />

Cassà la fouca, l'alabran;<br />

Enfin lou barbèu deven grand,<br />

Es ome, e, de pescaire qu'era,<br />

Sus un grand bastiment de guerra,<br />

Moussi de mar un jour se vei;<br />

Mais, lion de soun bres, lou pescaire,<br />

An bèu à dire, an bèu à faire,<br />

L’amour qu'a per el toujour crei;<br />

E quand, à la maire-patria,<br />

A ben fach soun devé d'enfant,<br />

Quand i’an dich: — Vai dins ta familha,<br />

Tournaràs quand te sounaran.<br />

Mais, au mens, à chaca sounada,<br />

Per la patria, cau quità<br />

Mouliè, paire, maire e callada;<br />

D'aqui que siegues requitat;<br />

E n'as, n'as, per una passada!<br />

Sus la marina sies classat<br />

Ara, per te recoumpensà<br />

D'aquela censa, qu'es pas traça,<br />

As drech de pesca, as drech de cassa<br />

Sus lous estancs e sus la mar.<br />

Vai! Lou matelot prend soun quart, (1)<br />

— Couma l'alerta giroundela<br />

(1) Prendre son quart se dit de quelqu’un qui part avec armes et bagages.<br />

Partida à l'estrange païs,<br />

Qu'on vei, à la sasoun nouvela,<br />

Veni mai vers soun mema nis;<br />

La joia au corp, dor sa cabana,<br />

Devès l'estanc vai adralhat,<br />

Caminant couma la tartana, (1)<br />

Arriva fier, mai que malhat;<br />

End aco, pioi se mes à l'obra,<br />

Couma un mainagè dins soun ben,<br />

Que doumai ie fai, doumai rend;<br />

Es pas magnagous ni fuch-l'obra:<br />

Dins sas roupilhas engançat,<br />

Que de fes per s'apitançà,<br />

Dau tems que vend touta sa pesca,<br />

Que sauta encara, tant es fresca,<br />

Vend tout lou bèu e per sa part,<br />

Garda anguiloun, talan, sangar;<br />

Mais es pas per el la cassilha:<br />

Das quauques solets que n'en fai,<br />

N'a per se croumpà d'estancilha;<br />

Tomba-leva, d'aiçai, d'alai,<br />

Nourris enfants, e paire e maire,


E voulès pioi qu'aquel trimaire<br />

Noun carpine quand, sus l'estanc,<br />

(1) La tartana désigne à la fois un oiseau de proie et un bateau pêcheur.<br />

Tout l'enviroun ven fa la cassa,<br />

Avès encara un brave plan:<br />

Voudriei be vous veine à sa plaça!<br />

Pamens, quand tout lou mounde en cor<br />

Vòu una causa mort à fort,<br />

Quand sariè touta de biscaire,<br />

Es lou milhou de laissà faire<br />

E de segui lou vol plan-plan;<br />

Mais quau pot retene soun sang,<br />

Quau garda lous trons dins la bouca,<br />

Quand lous sentissès vous prusi?<br />

Faudriè ben este sang de fouca<br />

E lou pescaire es pas mousit.<br />

Mais couma, après la ramassada,<br />

Lou tems s'en torna mai au bèu<br />

Una fes sa gruma escampada,<br />

Lou pescadou reven e lèu;<br />

Coumprend que laissà courre l'aiga<br />

Vòu mai que de s'emboutignà.<br />

S'aquel jour, per milhou gagnà,<br />

Se noun pesca mùjou, palaiga,<br />

Escarpa, loup, sola, merlan,<br />

Lous moussurots que çai vendran,<br />

Dins soun barquet demandà plaça,<br />

Embé l'ajuda de sa brassa,<br />

Voudran per el un brave bòu,<br />

Se sap qu'una manada vòu<br />

Una pistola, aco's la tassa.<br />

Lou pres es double, quand soun dous,<br />

Sans coumtà lou flàscou e la biassa.<br />

E sauprés que lous pescadous,<br />

S'aimoun l'aiga, qu'aco's se renda,<br />

Es per lous peisses, mai que mai,<br />

Ce que pertoca sa bevenda;<br />

Se lampoun d'aiga, es qu'au pas mai,<br />

E se, quand n'an, fan pitanceta,<br />

Per espargnà sous bèus solets,<br />

Es au rebous quand costa res.<br />

De vin à rand e la peceta,<br />

N'i 'a pas per se descrestianà<br />

E sans lou chaple que van faire,<br />

De la foucalha, que, pecaire,<br />

Coumtava este soul de i’anà<br />

Faire à soun lese quauqua plega,<br />

Tal un pastre qu'argent fai lega,<br />

De tems en tems vai curalhà<br />

Soun troupel escarrabilhat,<br />

Per se tene la pelha fresca;<br />

Sans aco, jamai noun, la pesca,<br />

Mestiè qu'es pas gaire gagnieu,<br />

Pourtariè dins una journada<br />

Ce que vai gagnà dins un brieu;<br />

Aco d'aqui, pioi la pensada<br />

Que noun se pot renjà qu'ansin,


Lou fan davalà de l'escala,<br />

Ounte toujour monta e davala<br />

Lou renegoun e lou carpin.<br />

E quand, de la granda voulada,<br />

Per vila, vilage e masada,<br />

Lous cridaires van, afrescats,<br />

As ròdous lou mai traficats,<br />

En apegant e cridant quoura<br />

Aurà lioc, mema jusqu'à l’oura<br />

Qu'au pus tard, cau este renduts,<br />

Qu'aco's, au mens, ioch jours d'avança.<br />

Lous pescadous d'aquela istança<br />

N'an prou per este resourduts;<br />

Adounc la velha s'amatinoun,<br />

D'aquel trigos adousilhats,<br />

Entre eles, lous assouciats,<br />

De per darriès se n'en penchinoun. (1)<br />

Ce que lous tarnavela un pau,<br />

Es que davans faran missau, (1bis)<br />

E mema ioi doubla journada.<br />

Couma quicom la coudrilhada<br />

S'avansa, alerta; à soun anà,<br />

Se vei que cau pas n'en mautraire<br />

E qu'an enveja de ie faire,<br />

An pas aublidat lou canat.<br />

Qau sap, fai bèu e l'aura chauma,<br />

L'estanc es lisc couma un miral,<br />

De mùjous, belèu per aval,<br />

Quand vendrà l’oura de la cauma,<br />

Poudran capità quauque ourdòu (2)<br />

Que suparan, se Dieus ou vòu,<br />

E faire de bravas sautadas;<br />

An pas fach segui las mairadas, (3)<br />

Soun penjadas sus lou saumoun, (4)<br />

Emb au globe e las mascougneiras;<br />

Per ara, n'an pas de besoun<br />

Que de veire las paradieiras<br />

E de las ben assegurà:<br />

Es dor aqui qu'an avarat.<br />

(1) Littéralement: Ils ne s'en peignent pas par derrière.<br />

(1bis) ils sortiront de leurs habitudes quotidiennes.<br />

(2) L'ourdou est un banc de poisson.<br />

(3) La mairade est une sorte de filet.<br />

(4) Le saumoun est la poutre, la charpente de la cabane.<br />

Un seguis l'aste dau trabàcou,<br />

Assoulida lous paus que flacoun,<br />

D'autres fan de mema au sandrieu, (2)<br />

A l'andana (3), dins aquel brieu,<br />

Vesoun lou tour (4); end aco bouidoun<br />

Las couhas que dau pes s'acouidoun;<br />

Pioi au gangui (6) van faire un tour.<br />

Aquela sarcia e las esturias<br />

Se prenoun mau dins aquel jour,<br />

Vendrà pas saique de las lurias,<br />

Couma aqueles ars soun calats<br />

Sus las grandas emboucaduras,


(1-2-3-4-5-6) Filets divers ou parties de filet.<br />

Es pas dich que quauque foulàs<br />

Noun ie fague d'esquinsaduras,<br />

Siegue au vouge ou dins lous gaugnouns;<br />

Aqui metoun sas atenciouns<br />

A renfourti lous brus que brandoun,<br />

Ben nousà lous pignouns as paus;<br />

En d'aco, dau castèu qu'alandoun,<br />

N'en tiroun choùchous, apougaus,<br />

Loup, merlan, gobi, sola, mougna;<br />

Tout aco, dins lou carcagnòu,<br />

Se trai à rand, à plena pougna<br />

De chacun agroussis lou bòu.<br />

Mais l'obra es pa' 'ncara acavada:<br />

Cau vesità lous bertoulencs (1)<br />

E, per i'anà d'una abrivada,<br />

Ie cau la vela amai lous rems.<br />

Mais ie van tant de viga-mola<br />

Que chaca beta (2) pouja, vola,<br />

Dins dos ouretas soun gandits,<br />

Amai an fach testa au canis (3).<br />

Aici soun pas espepidaires<br />

Car, per faire couma se deu,<br />

Faudriè veire toutes lous caires;<br />

Largoun soulament ves un cueu<br />

Ou la pouncha la mai trevada,<br />

Adrechoun quauque salasart; (4)<br />

Doubrissoun, quand, per cop d'asard,<br />

Quauqua enregada es arrasada,<br />

Das armals de cops estrassats,<br />

N'en despescoun lou gros peissàs,<br />

E de la couha que couheja,<br />

(1) Le bertoulin est un filet verveux.<br />

(2) La beta est une sorte de bâteau usité sur l'étang et le long du littoral languedocien. Poujà signifie<br />

littéralement cingler.<br />

(3) Le canis est une muraille de roseaux et, à Montpellier, un compartiment de bois et de roseaux<br />

entrelacés sur lequel on élève des vers a soie.<br />

(4) Le salasard est un filet.<br />

Couma l’oundada, quand aureja,<br />

Tiroun lou jol tant agoustous<br />

A boudre embé la caramota,<br />

Roussignòu, sarguet (1) verinous,<br />

Tout es aqui, franc de la pota,<br />

Mais d'aco res n'es pas mouquet.<br />

Quau voudriè veire en soun barquet<br />

Aquela limaucousa engauma,<br />

Aquel mouchoun d'oumbra e de crauma,<br />

Gruma que la mar abaris<br />

E qu'una empaumada abouris?<br />

Ara s'entancha la batuda,<br />

Es adejà tems d'aterrà<br />

E la flota, d'ounte es venguda,<br />

S'entorna vougant assourat;<br />

Es pas que, dins la travessada,<br />

Noun agoun l’iol deçai delai.


(1) On le nomme aussi esparagnome.<br />

Aco lous destourba pas mai<br />

Sans endarrairà l’arrivada,<br />

E s'es capitat fossa cops<br />

Qu'embé de pei fins as estrops,<br />

De jour de bounacia e sans oire,<br />

Sans que metessoun mai à coire,<br />

Poujà sus un ardòu de pei.<br />

Per un pescaire aco se vei<br />

A l'aiga que prend una tencha<br />

Un peu fousqueta, as roundelets<br />

Viroulhounant à rodoulets:<br />

— Bòu, crida lou baile, à la cencha!<br />

Pas pulèu badat que chacun<br />

A faire la cencha s'afana,<br />

Dau tems lou canat se debana<br />

Dins l’aiga autour dau revoulum;<br />

End aco pioi toutes baceloun<br />

Embé l'esclop, embé lous rems,<br />

Mais, dau tems que lous cops rampeloun,<br />

Au gourg i’a de rebouliments:<br />

Lous gourgouls que flouretejavoun<br />

Tout escàs e d'en sus en sus,<br />

Qu'on vesiè qu'en i'estent dessus<br />

E qu'à vista d’iol s'escrafavoun,<br />

Ara soun de grands boulidous<br />

Que montoun de las perfoundous<br />

E dralhoun de rounds, de pleçadas,<br />

Couma de pichotas oundadas,<br />

Entremens, de chaca roundel,<br />

Un pei pouncheja e se panleva,<br />

Tout fasent lou saut dau bacel,<br />

Tomba, cabussa, mai se leva,<br />

De couha, de testa, de biai,<br />

De cantel, e n'i'a que noun sai;<br />

Mais à força que sautourlejoun,<br />

Dins lous regiscles que perlejoun,<br />

Vesoun pas lou canat, i'en coi:<br />

A beles paus, un ara, un pioi<br />

Dins la calucha van fa testa,<br />

E quand lou pescaire s'arresta<br />

De bacelà sus l'agoutal,<br />

Tout l'escachoun sautourlejaire<br />

Dedins la beta se vei faire,<br />

Badalhant lou darriè badal.<br />

Un cop fenida la sautada,<br />

Cau pensa de dounà virada<br />

Dor la cabana, es couma tems:<br />

Das peissouniès, qu'an fach assaupre<br />

De veni d'oura per reçaupre,<br />

La cola espera i’a de tems.<br />

Mema adejà n’i'a que roundinoun,<br />

E per pau qu’endarrairoun mai,<br />

N'i’aurà pas ges que noun fouhinoun;<br />

Lou mestiè n'es l'encausa, es vrai!<br />

Es pas un traval de fuch-l'obra<br />

Que fan aqui lous peissouniès:<br />

A despart d'este matiniès,


Encara fard de menà l'obra,<br />

Couma fossa autres mestieirots,<br />

Cau mai d'un cop passà las niochs,<br />

Courre de tout tems, à touta oura,<br />

Per faire la revendariè<br />

De quicom que se dessanfloura<br />

Mai que. la car de boucariè;<br />

Que de fes, coumtant sus sa venda,<br />

Fenissoun per repoutegà;<br />

Lou pei s'endeven martegat<br />

E, per fourvià boucans, emenda,<br />

S'en van escampant per valats<br />

Sous peisses morts dau jalibràs;<br />

Aco, padieu, se vei pas gaire,<br />

Au tems que siam ioi, pas jamai;<br />

Pioi lous salabres soun alai<br />

Sus las trantas penjats de caire.<br />

Pot pas este aco que lous rend<br />

E sans patiença e roundinaires.<br />

Per ioi, ce que ie descounven<br />

Es de veire que lous pescaires<br />

Ajoun p a' 'ncara debarcat.<br />

S'aco jusqu'à la nioch countugna.<br />

Caurà toujour bailà pecugna<br />

E per este à tems au mercat<br />

Passà touta aquesta nioch blanca,<br />

Mais lou trantus que lous aflanca<br />

A pas lou tems de s'avenà:<br />

Devistoun lèu, dins l'emplanat,<br />

Lous batèus qu'ailalin negrejoun,<br />

Mais tant lion que, d'aici, diriàs<br />

Un vol de bernats apariats:<br />

— Es eles! ve couma brassejoun;<br />

Chut! lou baile nous fai signau....<br />

Tout vai ben. Anem, dins un pau<br />

Van este agandits à l'amara.<br />

Avans, las servas, lous sarrouns,(1)<br />

Soun davalats das carretouns,<br />

Coufas, faissilhaus, tout se sarra<br />

Aqui ras das debarcadous;<br />

Dins aquel tems, bus pescadous,<br />

An aterrat, nousoun la malha,<br />

(1) Les serves et les sarrons constituent l'attirail élémentaire des marchands de poisson.<br />

Relents e d'aiga e de susou;<br />

Mais de que fai aco? Zou, zou!<br />

Cau fa d'entanche, à la trialha,<br />

E sans mai bourjoun à brassau;<br />

Dins lou mouloun mol couma limpa,<br />

Pautiroun lou menut que pimpa, (1)<br />

Lou grossàs per sous dous gaugnouns<br />

Que, tant lèu agantat, coueteja,<br />

E dins l'escach que limauqueja,<br />

Gourgoulha, grumeja, se tord,<br />

Plantoun las mans, metoun tras bord,<br />

Lou bèu, lou fin, e se rebilha<br />

Per delai, dins un recantoun,<br />

Sepia, muscle, cranca, bigoun.


A la fin tout ce que coungrilha<br />

L'estanc es aqui lot à lot<br />

Dau pus allegro au mai palot.<br />

Lou fin, lou mejan, lou pus traça,<br />

A soun mouloun, soun pres, sa plaça,<br />

Tant lèu presat, pesat, cargat,<br />

Tout se bouloga à delargà<br />

Vos Mauhio,Peròu, Candilhargue,<br />

Sant-Just, Lansargue, Medasoun,<br />

(1) Par le verbe pimpa, on exprime l'aspiration des poissons à la face ou hors de l'eau.<br />

A carga d'ase, à carretoun,<br />

Menats per miòu, miola, camargue,<br />

E tout bandat, cafit, coumoul:<br />

— Bona journada, se s'endura!<br />

Dis leu pescaire, un cop qu'es soul,<br />

Per tant qu'a fach, saique es madura,<br />

Un parel d'ouras de sourel,<br />

End aco pausarem l'aurelha<br />

En pensant qu'aquesta es un grel.<br />

Pamens, entrernens que s'espelha<br />

Lou boùlhou (1) qu'es avantajous,<br />

Pus lèu couma las armagnolas,<br />

Se cagnardà, brasses en crous,<br />

Dona un cop d'iol à las palholas,<br />

Sarcis una malha, se fòu,<br />

Dau bouliè remenda lou còu,<br />

Tencha lou col d'una batuda,<br />

(vers qui manque sur le manuscrit)<br />

Amer dan pieure (2), en de quitran;<br />

Pioi, courna ioi e tout deman,<br />

Ie vai toumbà prou de vesitas,<br />

Per qu'ajoun plaça au fougueiroun,<br />

(1) Le boulhou est une soupe aux anguilles plutôt qu'une bouillabaisse.<br />

(2) On a dit plus haut que le pieure était un insecte qui vivait dans l'eau et rongeait les filets des<br />

pêcheurs.<br />

Escampoun sus lou badalhoun<br />

Lou globe, sas agas, sas bitas, (1)<br />

Enfin lou mai embarrassous.<br />

Ara, se dins lou tems plojous,<br />

Un bout de messenga (2) a pres peca,<br />

I'a pas fioc per parà l’endeca,<br />

Mais pioi qu'ara es prou de lesé,<br />

Tant vòu qu'on fague à soun aiset;<br />

Lou degout per toujour s'emboursa,<br />

Tard on à tems, saique belèu<br />

Poudriè magagnà la coundoursa,(3)<br />

E la fourqueta e lou cancèu;<br />

Enfin, dau tems que rabasteja,<br />

La nioch espandis soun mantel<br />

Amount dins l'emplanat dau ciel,<br />

Plan-planet lou lucar pouncheja,<br />

E lou farot, en se levant,<br />

Ven se miralhà dins l'estanc;


(1) Filet et ses agrès.<br />

(1) C'est une sorte de ficelle.<br />

(3) Piquets et solives des huttes.<br />

Es pas soul que sa lusou tira:<br />

D'aquesta oura, i’a per camins<br />

Prou de cassaires coustoulins,<br />

Qu'un grèu sacàs carga, espautira,<br />

E que n'an pas d'autre signau<br />

Que soun lus, mais n’i’a tant que cau;<br />

Car, s'as jours que lou ciel negreja<br />

Couma de dòu enmantelat,<br />

Aqui toujour quicom blanqueja,<br />

De qu'es pas, quand' es estelat?<br />

Couma quicom, enfin se rendoun,<br />

Embé lous cabaniès qu'atendoun<br />

Se donoun de pougnats de man:<br />

— Bon vespre, l'oste; eh be, çai siam?<br />

Couma aco vai? E la familha?<br />

— Gramecis, tout aco vai ben;<br />

Amai vautres? — Nautres, tant-ben.<br />

— An, laissem aqui la babilha,<br />

A taula! A taula! noum d'en Goi! (1)<br />

E dau gros boùlhou que gargota,<br />

Coumpoustat de pebre e de pota,<br />

Cadun, en soun culiè de boi,<br />

N'en pesca una bona sietada,<br />

Dins un virà de man mourfiada.<br />

N'an pas per sa pichota dent.<br />

Après aco, l'anguiloun ven;<br />

Es tant patet que se devigna<br />

(1) Goi, qui signifie boîteux, désigne aussi Dieu en quelques localités.<br />

Que per avans tirà l'espigna<br />

D'aqueste, l'autre es degerit;<br />

S'avien qu'aco per se nourri,<br />

Poudrien manjà jusqu'à Sant-Blasi<br />

Sans este saique embouiricats.<br />

Per bounur, que lou grèu sacàs<br />

Es aqui; couma d'un armasi,<br />

N'en tiroun giga, cambajoun,<br />

E lou flàscou qu'es dau cantourt.<br />

Ai, bou-dieu! quanta sessalega!<br />

Pioi, ma fe, lou lengau boulega,<br />

Aco se vesiè be veni;<br />

Pa-Dieu, soun d'aquela familha<br />

Que pot toujour s'endeveni<br />

Per lou prus e per la babilha.<br />

Un conta, l'aire escardussat,<br />

Tout ce qu'a vist, tout ce que sap;<br />

Un à per un ie tenoun sorga,<br />

End aco, quand an debitat<br />

Ce que saboun de veritat,<br />

Aqui lou tour de la messorga;<br />

Amai vous la trasoun tant ben<br />

Qu'on vei ben qu'es pas la premieira,<br />

Mais d'aco cau pas n'en fa fieira:


(1) Nom d’un pêcheur,<br />

(2) Noms, de chasseurs.<br />

Siam pas que nautres qu'on sabem.<br />

E toujour lous contes varalhoun.<br />

Degus jamai noun feniriè,<br />

Se lou flàscou teniè coustiè;<br />

E se n'i'a d'unes que se laioun,<br />

Cresès que, lasses de trimà,<br />

Lou som, enfin, lous espautira;<br />

L'un badalha, l'autre s'estira.<br />

Es que i’a pus res à chimà.<br />

Mema à la fin lou mai barjaire<br />

Que sent sa lenga de petàs<br />

Apegada à soun paladàs<br />

Cala, entremens tout se vai jaire.<br />

QUATRENCA PASSADA<br />

La grand cassa<br />

PER ANFOS DE TAVAN.<br />

Anem, ma Musa, un pau de vanc!<br />

Zou, que nous sarram de la toca!<br />

De ben proche aco nous pertoca;<br />

An, d'aut! dourmirem mai deman.<br />

Sabe que sies pas matinieira,<br />

Aimes pas de mascassejà<br />

Lou bon matin per la carrieira,<br />

Mais per un jour pos be'nsachà<br />

De bandi ta cauda jassina.<br />

De qu'es aco? Dises de nou,<br />

Vos pas dounc te picà d’ounou,<br />

On be quicom mai te carcina;<br />

As fach quauque marrit pantai,<br />

Tus qu'aviès toujour tant bona aiga!…<br />

Ah! sabe, as pòu que, per anlai,<br />

Noste nega-chin fague d'aiga.<br />

Aco se pot, mais de que vos?<br />

Maugrat mous passes e demandas,<br />

N'ai agut qu'una vielha pos<br />

Per fa lou plan e, per las bandas,<br />

De retals toutes quissounats.<br />

Lou Barchot (1) me las a pegadas.<br />

Sabes, aquel grand flandrinàs,<br />

Que se plai qu’à las necijadas.<br />

M'a be dich que fariè milhou<br />

Que per lou Bresil ou Folou,<br />

Mais, per ieu, me fise pas gaire<br />

As aprournessas d'un trufaire,<br />

Ai mai de fe per lous escamps,<br />

Lou grand Banal (1) i’a mes las mans,<br />

Amai i’anava pas de broda;<br />

Mimieu (2) a fach lou ped de roda


Tant de davans que de darriès;<br />

Perou (1), toutes lous amadiès<br />

E ieu, embé, de fanabrègou,<br />

N'ai majencat de rems que plegoun<br />

Couma de sause amarinenc,<br />

Courts en chignouns, largs de palada,<br />

Amai siegue mau engaubiada,<br />

Menada per un margoulin,<br />

Sarà be 'stanca saique, fin<br />

Que saguem à la Peiramida. (3)<br />

D'aqui, das iols e d'assetouns,<br />

Seguirem touta la partida.<br />

Mais ve, quand saupriei d'anà founs,<br />

Ieu, embé touta la barcada,<br />

Ai aproumés à man toucada;<br />

Couma que torne, i'anarai.<br />

(1) Nom d'un chasseur.<br />

(2) Nom d'un pêcheur.<br />

(3) Haute pierre isolée dans l'étang. Elle est de forme pyramidale.<br />

(1) Nom d'un chasseur.<br />

Anem, zou, pigrigem pas mai.<br />

Te! lous amics qu'an ma paraula<br />

Aval brandilhoun la cadaula:<br />

— Òu! t’auboures? — Ie siam, ie siam;<br />

Soui alestit. Cargue ma biassa!<br />

D'aqui aqui, de plaça en plaça,<br />

De floc en floc, de plan en plan,<br />

Esclafis las memas sounadas<br />

E lou bruch de grevas pesadas<br />

Dins las carrieiras ressountis.<br />

— Ai! qu'es escur! quau ven? — Amics!<br />

Respondoun dins l’escuresina<br />

D'oumbras que, sans lou carracol<br />

Que fan en tustant las caladas,<br />

Las creiriàs un escach de fadas<br />

Que van au sabat. — Sies dau vol?<br />

— Oi! — Eh be, seguis nosta dralha,<br />

Resques pas res. Boumpart (1) amalha<br />

E, barrisca-barrasca, avans,<br />

A tusta-borgne, tomba-leva;<br />

D'aqui aqui la troupa greva<br />

S'agroussis d'ançai e d'anlai.<br />

Bou-dieu! que lou camin es laid<br />

Jouta lous peses fastigueja;,<br />

Se vei qu'una prima courrecha<br />

Ounte i’a plaça que per dous.<br />

— Avisa! avisa! as Boulidous!<br />

— Trop tard, trop tard! Noste amalhaire,<br />

Après el saique dous ou tres,<br />

Se ie soun engafats, pecaire;<br />

Auran tout ioi lou cambau fresc!<br />

E, zou, lous rires esclafissoun.<br />

— De qu'es aco que tant lusis?<br />

Diriàs douns lums que nous seguissoun


(1) Fusil de Saint-Étienne en Forez.<br />

(1) Nom de Chien.<br />

D'aquesta man, devès alin.<br />

— Aco soun lous iols d'un douguin<br />

Que treva lou Cros de las Mascas.<br />

Se ie fasiei siblà, quicora?<br />

— Aimariei mai, un viel respond,<br />

D'aiga benesida de Pascas<br />

Per lou cassà qu'un bon fourés. (1)<br />

Aprend de leu que d'aquel caire<br />

E d'aquesta oura lou cassaire<br />

Garda soun cargue e passa lisc;<br />

Quante camin e que de gibas!<br />

Anem, cau dralhà sus las ribas;<br />

Pus lion, prendrem lou carrairoun.<br />

Un à per un cau fa rengueta.<br />

Avans, avans… una lauseta<br />

Se leva a vola par anlai<br />

Embé mens de mau que d’esfrai.<br />

Pus lion un vol entiè s'auboura.<br />

— Bourra aqui, Chichou (1)! bourra, bourra!<br />

Buta, Perlina! te, te, te!<br />

De qu'es aco qu'an pres lou ped,<br />

Que talament lous enterina?<br />

Deu este quauqua sauvagina<br />

Que teniè l'espera as lapins;<br />

Mais ben lèu s'entornoun lous chins;<br />

E cassaire e martra e moustela,<br />

Dins la nioch que lous enmantela,<br />

Cadun reprend soun trin, babil.<br />

Japada, agarrida, tout mola,<br />

E bon brieu, de touta la cola,<br />

S'ausis que lou pesuc trepil.<br />

Vaqui aqui quauqu'un se tesa<br />

E, de las dos mans, samboutis<br />

Lou grèu sacàs que l’apoudesa<br />

Un autre rena ou barboutis<br />

Enfin quicom d'aiçai blanqueja.<br />

Aco's lou Coùssou (1); ara nous cau<br />

Segui lou carrau que negreja,<br />

Se que de nou, dins lou canau<br />

Pescariam à la grapaudina,<br />

Se trapavem pas la jassina<br />

A mounte Laguerra (2) dourmis<br />

L’eternal som dau negadis.<br />

Avans... avans... noste menaire,<br />

Que vai couma un debarroulhaire<br />

A mounte lou camin se tors,<br />

Vira e crida: — Enfants, au franc-bord!<br />

Avisàs, las aigas soun plenas,<br />

Aiçai, à l'agau de las Trenas<br />

Faudrà sautà; gara au chinet!<br />

Vau mai que bougnem las caussetas<br />

Pus lèu que de ie fa sas petas,<br />

Couma autan lou paure Estieinet. (3)<br />

Plan-planet tout seguis e sauta,


(1) Nom d’un marais.<br />

(2) Nom d’un individu qui s'y noya.<br />

(3) Nom d’un chasseur qui s'y noya par accident.<br />

(4) Nom d'un chasseur.<br />

(1) Noms de chasseurs.<br />

Franc d'un qu'ou a fach en dos fes,<br />

Lou Perotet (4), mais un refresc<br />

Per el de qu'es aco? S'enchauta<br />

Couma de beure un cop de vin.<br />

Ah!... siam au grand revenge, enfin!...<br />

Aici la cola se debana:<br />

D'unes fan testa à la cabana,<br />

Que s'entrevei lou courneloun;<br />

Lou fum que sort de l’igranieira<br />

Fai encreire que lou patroun,<br />

D'aquesta oura, es pas à l'ilheira.<br />

D'autres qu'an soun embarcadou<br />

A la cabana dau Gascou,<br />

Devès aquel ròdou s'endralhoun;<br />

Mais soun pas souls qu'alin amalhoun:<br />

Que de mounde! quanta bourjou!<br />

E pioi aval, dins la lionchou,<br />

Aquelas vossas que se sonoun,<br />

Groussidas dau ressoun que donoun<br />

Las aigas e bon gargatet:<br />

— Òu, Cadet, Ze! Nounou! Tetet! (1)<br />

Aiçai que, Zaga! Ceset! Bichou! (1)<br />

Ai! ai! bou dieu! quante moundàs!<br />

D'unes dins las barcas s'esquichoun,<br />

Dau tems que d'autres, reboundats,<br />

Descaus jusqu'à la fourcadura,<br />

S'engafoun, maugrat la frescura,<br />

Au coustat das qu'an d'estibaus;<br />

Pamens, per tant que siegoun baus,<br />

E maugrat lou tron que lous peta,<br />

Segu que fan pas la pigneta.<br />

Que de mounde, tournà dirai!<br />

Dins una armada, n’i’a pas mai.<br />

Talament que la fresca aubeta,<br />

En s'aubourant de sa bresseta,<br />

Ounte se coungrilhoun lous jours,<br />

Trementis e lèu, de sa cara,<br />

Degouta un aigage de plours;<br />

Sousca de ce que s'aprepara<br />

Per vautres, aucels, sous amics,<br />

E, per parà lou chapladis,<br />

Amai n'age una fe ben mansa,<br />

Tencha, dins aquela estigança,<br />

Lou ciel d'un grand vele grisàs;<br />

De soun, emperi de counglàs<br />

A sounat la tremountanela,<br />

Mais tout aco ie fai pas lum,<br />

Car, en espinchant de tout caire,<br />

A vist, dins aquel revoulum,<br />

Lous milhous fusils dau terraire.<br />

Amai, es vrai, toutes ie soun!


Gachàs aval, dins l'escachoun<br />

De Peroulencs (1), que se debounda<br />

Sus Carnou, Boulàs de Caunier, (1)<br />

I’avès Tatagna, Taula-rounda, (2)<br />

Manja-recate, amai lou Tier;<br />

Aublidave Matau, Minota;<br />

Après ven la cola farota,<br />

Qu'on counoui as acoutraments<br />

Per este de Mount-pelieirencs.<br />

Veja-lous couma trefoulissoun,<br />

An pòu de ie pas este à tems.<br />

An tant de poudra à traire au vent!<br />

E pamens das que s’espandissoun<br />

Per tout l'estanc, menats à rem,<br />

En cercant ben n’atrouvarem<br />

Que soun pas de la rafatalha:<br />

Bardou (3) lou paire, et soun enfant,<br />

Qu'au noumat lou rei de l’estanc,<br />

Estrassoun pas trop sa granalha.<br />

Cresès-ti qu'à Francés Girard,<br />

(1) Nom d'un village près Montpellier.<br />

(1) Noms de lieux.<br />

(2) Noms de chasseurs.<br />

(3) Noms de trois chasseurs bien connus à Montpellier.<br />

Quauqu'un mai ie fague sa part?<br />

Sariè tant paura desencusa,<br />

Couma se, de Fernal Anduza, (1)<br />

Disiàs couma das mau adrechs,<br />

Que, toutas las foucas qu'amata,<br />

Es embé de granalha (2) plata.<br />

Fabre de Mount-auberou i’es,<br />

Amai se vouida sa flasqueta,<br />

Segu que sa prima barqueta<br />

De bona oura negrejarà.<br />

I'a de Fesquet (1), ai, quanta narra,<br />

Per ce que voulastrejarà<br />

A dous cents passes d'el encara.<br />

Que se fisoun pas trop d'aco.<br />

E pamens, per fourvià soun cop,<br />

Cau pas que se tragoun dau caire<br />

A mounte es Mila Bouscaren, (1)<br />

Car i’es tant-ben aquel, anem,<br />

Amai, osca, per ie ben traire.<br />

Lous qu’on vei de la Couarcha (3) en çai,<br />

Das Mauhiolencs gardoun lou biai,<br />

Vous an un aire de s'encreire<br />

Que, dau pus lion, tant lèu lous veire,<br />

(1) Noms de chasseurs bien connus à Montpellier et à Lansargues.<br />

(2) La granalha plata désigne la monnaie.<br />

(3) Partie de l’étang.<br />

Aisadament lous counouirés<br />

(Ou dise sans causa de res),<br />

Pioi de se pensà dins sas peiras,<br />

Soun pas d'ideias maufaseiras,<br />

Sabre-tout quand, longs a longs brieus,


L'estanc a mai soun estats siens.<br />

S'encresoun tabé de sa Mouta,<br />

Tancada aqui d'un avenant,<br />

Misteri que lou passat bouta<br />

Sus las pesadas dau sabent<br />

E que toujour es muda a reda;<br />

De soun oustau de la Mouneda,<br />

D'ounte sourtissiè lou melgor,<br />

Fabregat de vanc en abounde,<br />

En loutoun, en argent, en, or,<br />

Per s'escampilhà sus lou mounde;<br />

De soun couvert, de sous valats,<br />

De sous barris endavalats<br />

A founs de terra embé las foulas<br />

Que lous an vistes negrejant<br />

Dins l'aiga linda de l'estanc,<br />

Quand veniè lecà sas ancoulas.<br />

De Melguel, elena cieutat,<br />

(1) Mauguio, anciennement Melgueil, localité près Montpellier.<br />

(2) Monnaie fabriquée à Melgueil.<br />

Qu'aimava tant d'ausi pieutà<br />

Lou cant masclàs d'endependença,<br />

An saique encara souvenença;<br />

Saboun que, dins l’age mejan,<br />

L'evesque en testa guerrejant,<br />

Quand res n'ausava levà batas,<br />

Per sous drechs, emé galhardiè,<br />

Veniè fa targa à Mount-peliè<br />

Dins las grands pradariès de Latas.<br />

Mauhiolenc d'ioi, dau viel Melguel,<br />

Oi, as bon drech de te n'en creire,<br />

Mais cau pas que, dau tems nouvel,<br />

T'enleve l'ausida e lou veire;<br />

A tas peiras, tenes; vai ben,<br />

Ansin qu'à las nostras tenem.<br />

Sans t'afourti, pense qu'on creses,<br />

Eh be, quand, de nostes endrechs,<br />

Avem ben plaidejat lous drechs,<br />

Soungem un pau que siam Franceses.<br />

E que ieu muse à bresilhà<br />

Sus lou passat, de ma revista.<br />

Es tems que reprengue la vista,<br />

Car vese adejà Bresilhat,<br />

Meste Agè, lou Vielhet, Boulega,<br />

Laurage, Mountelhet, Janet,<br />

Agantats per la petelega,<br />

Vengue un pauquet mai de journet,<br />

E lou Bourrut, Prat e Tounerra,<br />

Auran delargat lion de terra.<br />

Entanchem-nous de n'en feni;<br />

Te, lou Russi es pas escarnit?<br />

Nou, qu'es aqui sus la levada,<br />

Preste à faire la grand voulada,<br />

Eh be, l'auriei pas cresegut;<br />

Cau sap, belèu, çai es vengut<br />

Per veire, enfin, se l'estanc crema.


(1) Noms de chasseurs.<br />

(2) Nom de lieu.<br />

(1) Les habitants de Baillargues.<br />

Oi, es aquel toujqur lou mema<br />

Que nous conta aco chaca fes<br />

Que çai reven sans pourtà res,<br />

Ple de patoul, lisc couma un veire:<br />

— Basta se ie metesse floc!<br />

Crida un d'aqueles de Mauhio.<br />

Que, per s'en rire, van lou veire;<br />

Sabes se fan un cacalàs.<br />

Mais laissem aquel faviolàs<br />

E seguiguem aquela tieira<br />

Que dralha dor la Capoulieira,<br />

Ounte se soun amoulounats<br />

Lous Sent-Bresòus entenciounats<br />

E lous Castriòus que, per la terra,<br />

Donoun pas sa part à degus.<br />

Mais lous que venoun sans espera,<br />

Lous ai ben lèu recouneguts:<br />

A sous fusils nòus que lusissoun,<br />

As chis de mena que seguissoun,<br />

Acoutrats pas d'aco dau sòu,<br />

Pioi, à soun aire cranejaire,<br />

Un pau, se voulès, branquejaire,<br />

Dise: — Aqui i’a lou Balhargòu! (1)<br />

En testa vese lou viel Marra,<br />

Lou mema qu'a cantat la garra:<br />

Sous dous enfants, Poumpoun, Lafont,<br />

Briset, lou quitoun pas de lion;<br />

La Plouma, Toni, Clancaud, Milha,<br />

De bon ped seguissoun sa via,<br />

Lou Magre, Cisèu, Sandre, Estru,<br />

Cigau, Claisergue, Paulin Baile,<br />

Toutes enfin couma lou baile,<br />

Soun forts à l’aiga amai au truc.<br />

De Cros-Martin à la Rudela,<br />

Lous Candilhargòus (1) soun cabits.<br />

Aqueles, seguent dau païs,<br />

An pres la plaça la pus bela,<br />

Toutes ie soun, pichots e grands,<br />

Rafis, bouiracs, jusqu'as enfants,<br />

Armats, quau d'una canardieira,<br />

Quau d'un viel fusil à pistoun;<br />

S'en vei tabé que n'an à peira,<br />

D'autres, enfin, n'an qu'un bastoun;<br />

Eh be, se venien au partage<br />

Embé lous qu'au bel acoutrage,<br />

'Mai que siegoun sans fard, belèu,<br />

Pourtarien l'escach lou pus bèu.<br />

Es que saboun coussi s'en prene;<br />

Ie soun nascuts; tant ben coumprene<br />

Per que toutes an de renoum,<br />

E dins lous pus forts dau cantoun,


(1) Les habitants de Candillargues.<br />

(1) Noms de chasseurs.<br />

(2) Habitants du village de Mudaison (Hérault).<br />

(3) Pe?? patus ou marais.<br />

(4) Noms de chasseurs.<br />

(5) Nom d'un ruisseau.<br />

(1) Noms de lieux très fertiles.<br />

(2) Noms de chasseurs.<br />

(3) La raspilhada est le tir à fleur d’eau.<br />

Sans que degus me contradigue,<br />

Per lou fusil e lou sounet,<br />

Poudès ie metre Peirounet, (1)<br />

Lou Gravat, leu Sendi, que digue? (1)<br />

Per mantene à toutes soun drech,<br />

Me lous cauriè prene aderé.<br />

Lou païs ounte s'espandissoun<br />

A tant de longou que sous rengs,<br />

Per lous countene, s'esclairissoun,<br />

Mais vengue das Medasounencs (2)<br />

La tieira que se descourdela,<br />

Alin dedins la palusela, (3)<br />

Alor pot i’avedre foucan;<br />

Que se mostre e n'aurà pas mola.<br />

Encara mai que dins la cola,<br />

Deviste Capitane, Alban, (4)<br />

Madou, Boutelha, es pas estrange (4)<br />

Que l'endrech siegue ben gardat.<br />

Couma ie siam, cau regardà<br />

Sus las dos ribas dau Berange,(5)<br />

E dau Lansargòu fa la part.<br />

Mais coussi causi lous tiraires.<br />

Dins aquel mouloun de cassaires<br />

Qu'alin fai muralha de car,<br />

Voudriè tant, dins una tousela<br />

D'en Prada ou Cros de Counsegat,<br />

Quand es aqui preste à segà,<br />

Trià l'espiga la pus bela;<br />

Veguem en m'apenant un pau,<br />

Per tant que siegue ciselada,<br />

S'atrove pas quauque espigau,<br />

A faire au mens, una manada.<br />

Lou premiè que me sauta à l'iol<br />

Es Boumpart, pioi Bernat lou fol;<br />

Toutes dous, à la raspilhada,<br />

Per mages soun recounouguts<br />

E n'en pourtarien sa barcada<br />

Que n'en susprendrien pas degus,<br />

Pioi, à coustat d'aqueles diables,<br />

Que tiroun, car soun prou penables,<br />

Ie vese lou gros Canouniè;<br />

Engendra pas malancouniè,<br />

Aqueste, oh! nou, car fai la passa,<br />

Tout en fumant lou carchimbaud,


(1) Le tir en candela est le tir perpendiculaire<br />

. (2) Nom de chasseurs.<br />

(1) Nom d'un chasseur.<br />

(2) Nom d'un village de l'Hérault<br />

Quand tira es que, ben à perpau,<br />

En candela una fouca passa.<br />

Atabé, pourtàs e venès,<br />

Peça morta entre que la fissa.<br />

Lapaura, qu'es aqui, tenès,<br />

A soun tirà, sa mema tissa,<br />

Tout en estent mai praticous;<br />

Das jouines lou pus engincous,<br />

Es lou Pitou, pioi Margouès, Bàchou<br />

Mais cau pas que d'aco se fachoun:<br />

Lous viels soun encara au dessus<br />

E, se l'age lous rend pesucs,<br />

Trevoun toujour un cop de mestre<br />

Qu'eles an pas; aco pot estre<br />

Qu'à la longa lou counouiran,<br />

Mais sarà pas ioi ni deman;<br />

Amai que seguigoun sa dralha,<br />

Per avans que siegoun de talha<br />

Dau viel Perot, Pèu, Coulondret,<br />

Passarà d'aiga per la prada;<br />

Soun quauques uns encara endret,<br />

D'aquela famousa coulada<br />

Que se n'es tant parlat per tems.<br />

Lou Niçou n'era; me reven,<br />

Quand clavelet contra la banda,<br />

Una manassa trop groumanda<br />

Que ie panava un gros foucar.<br />

Sabès s'après tala coutiga,<br />

Lous gaspinèus de touta liga,<br />

En lou vesent fasien escor.<br />

Encara quand se crida: — Au Niçou!<br />

Amai siegue mort i'a bon brieu,<br />

Per eles toujour soun noum vieu,<br />

Car lous vesès que trementissoun.<br />

Assa, quau es aquel en pèu<br />

Que s'auboura e fai l'estirada?<br />

Diriàs qu'es aqui de couchada.<br />

Ah! lou counouisse, es Peire Pèu, (1)<br />

Lou Peire Pèu de Sant-Nasari, (2)<br />

Lou que sa femna crida: — Flèu!<br />

Oi, l'estanc sarà toun toumbèu<br />

E la barqueta toun susari!<br />

Ara veguem se, de Lunel,<br />

L'armada es pa' 'ncara agandida.<br />

La vejaqui; d'una escourrida,<br />

Ven d'envòutà, tout lou Cairel<br />

E s'espandis jusqu'à l'Averna. (1)<br />

Lunel çai es! Lunel gouverna!<br />

I'a pas un moutàs, pas un tes,


(1) Nom de marais.<br />

(2) Noms de chasseurs,<br />

(1) Noms de chasseurs.<br />

(2) Quartiers de Lunel.<br />

Nema pas una trantalieira,<br />

Sans que noun la cola laugeira,<br />

En barcar, à la gafa, à sautets,<br />

Dins un moument l’ajoun cafida.<br />

Es pas à sang-frech que se fai:<br />

Couma pensàs, un buta, un crida,<br />

Fossa cops un vira-t-enlai<br />

Respond à quauqua paraulassa.<br />

Ai, que Lunel es rambaliè!<br />

E pioi, quand a ce que vouliè,<br />

Cresès que branla pas de plaça?<br />

Ah! vai, se moire es un besoun.<br />

Lous cassaires de proufessioun,<br />

Couma diriam Testet, la Trelha, (2)<br />

Pas per tout ce que se sourelha,<br />

Lous fariàs pas tene esta-siau.<br />

An begut d'aiga dau canau,<br />

Lou Becassoun, Sabent, Maboula, (1)<br />

Soun lestes couma l'aiga d'oula.<br />

L'Auboi-vert, Singe, Tamerlan,<br />

Capuchin, Fustiè, Rasineta,<br />

Cassa-tout-l'an, Caisseroleta,<br />

Galichet, Cimbre, Catalan,<br />

Cambet, lou Pilot, Pesoulhassa,<br />

Tua-tout, Bofis, tout en raça,<br />

Au desart, à sous escai-noums,<br />

On lous counoui sus cent, sus mila,<br />

Per este abitants de la vila<br />

D'en Camp-nòu e das Caladouns.<br />

Eh b'amai siegoun rambalhaires<br />

E lestes que se pot pas mai,<br />

An de bon que souri pas troumpaires.<br />

S'es un defaut, aquel me plai;<br />

Mais n'es pas un, amai s'en manca,<br />

Car, se ie van trop à la franca,<br />

S'an d'argent vieu dedins lou sang,<br />

An, au mens, lou cor sus la man.<br />

Es pas couma lous bistourloris,<br />

E n’en vese ioi que tout n’es,<br />

Que s'eroun nascuts de caulets,<br />

Sarien pas ni rabents ni floris;<br />

Voloun retraire au Parisian.<br />

Per aco i’a pas fossa à faire:<br />

Renegà soun paire e sa maire<br />

E lou parlà lengadoucian;<br />

Pioi cau se foundre en manieiretas.<br />

Terré! se lous d'en païs d'aut,<br />

Lous prenien per de Miejournaus!...<br />

O pauras, pauras mariounetas,<br />

Sabe pas quoura coumprendrés


Que dau moument que sias pus vautres,<br />

Sias aqui patata-pas-res,<br />

Se noun las mouninas das autres;<br />

Per ara, vou'n dise pas mai,<br />

Car n'i'auriè que farien la beba…<br />

Mais de que vese ieu? ai! ai!<br />

Bou-dieu, lou bourdigou se creba,<br />

De tout, en per tout, à la fes!<br />

Es un deluge de barquets<br />

Es una plena deboundada,<br />

Escampant à la reculada<br />

Au lion de l'amar revoulum<br />

E rastagagna e remoundun!<br />

E tout aco fusa, resquilha<br />

(manque un vers dans le manuscrit)<br />

A vista d'iol, sans mouvement.<br />

Que lou tira-mola das rems<br />

E de las mans que lous manejoun;<br />

Mais, à força de brassejà,<br />

Lous pus adrechs an adejà<br />

Dounat de corda as que capejoun;<br />

Dins un brivet saran gandits<br />

Sus la cassa qu'espavourdis<br />

Aquel proumte e fol arrambage.<br />

D'aquel tems, per fugi l'aurage,<br />

Lous aucelous, en tout sòun vanc,<br />

Nadoun, nadoun dor lou mitan<br />

Ounte i’a pas degus encara.<br />

Anàs, anàs, ara per ara!<br />

La nada vous sauve entremens!<br />

Vendrà trop lèu aquel moument<br />

Que caurà prene la voulada!<br />

Mais lou boui, que lou mai crenis<br />

E qu'a l’ala tant ben nousada,<br />

En vesent que se destrenis<br />

D'aqui aqui la cencha negra,<br />

Auboura au vent sa testa alegra,<br />

Au vent qu'alena fres e grèu,<br />

Sinne que s'envoularà lèu.<br />

Adounc l'entieira coudrilhada,<br />

Brusenta couma la trounada,<br />

Se panleva dins l’aire e part,<br />

Ansinda que la nivoulina<br />

Qne lou vent tors ou remouchina<br />

En l'escampant en plena mar,<br />

E la fouca soula demora.<br />

Es que, per la metre defora<br />

D'aquel estanc que tant ie plai,<br />

Cau mai qu'aco. De que ie fai<br />

Qu'à la nada siegue acoutida,<br />

Tant qu'a de vanc per se garà;<br />

E quand pourrà pus tempourà,<br />

Aurà das aires l’espandida.<br />

E, zou, nada que nadaràs!<br />

Mais de cops de fusils espetoun<br />

Deçai, delai, davans, detràs.


Ai! ai! lous brutaus se ie metoun!<br />

Paura bestiola, es pas trop lèu<br />

Que de l’escamp prengues la via!….<br />

Amai i’es pas à tems belèu?<br />

Car, à la fin, quand se rebilha,<br />

En raflant per prene lou vent,<br />

Davans d’este fora pourtada,<br />

Es presa dau cop multrissent,<br />

Per cisèu, à la rebalada.<br />

E toujour vogoun lous barquets,<br />

E toujour de foucas s'envouloun,<br />

E, zou, lous petards, lous espets!<br />

Dins leu tems que d'unas trascouloun,<br />

D'autras tomboun mortas cop sec.<br />

D'autras alongoun, escroupadas;<br />

Amai, quau las vòu, las charpadas,<br />

E lous cops de poung fan pa' 'n plec.<br />

M'estoune couma en ges encara,<br />

I' a pas pres quauqua tintamarra.<br />

Chut! chut! crese que vai pas lion.<br />

N'ausisse un ailalin que bada,<br />

Veire, escoutem, ie vai de bon:<br />

— Te dise que ieu l'ai tuada,<br />

E me reven, saique belèu?<br />

— Es pas vrai, sies un gaspinèu!<br />

Ieu, de davans, l'aviei pounida!<br />

Tout escàs à tus s'es gandida.<br />

E, pioi, ve, pas tant de garguil!<br />

La laisses?... D'un cop de fusil!...<br />

— Que, douça, douça, camarada,<br />

(1) On nomme per cisea le tir oblique, à fleur d'eau.<br />

Ou sauprem lèu, se l'a panada!<br />

Au juge! au juge! voire un pan<br />

— Couma as tirat, tus? — Ieu, d'en naut!<br />

Cau qu’age de ploumbs sus l'esquina.<br />

— Vesès, la plouma rebessina!<br />

— Es vrai, ie soun, mais ges de san,<br />

Era miech-morta de davans.<br />

— E tus? — Ieu! Couma raspilhava,<br />

Moun cop trop bas la debroutava<br />

Fora man. — Es tieuna! — Bailàs.<br />

— Ie deves un cargue. — Aqui l'as!<br />

Anem, dau bon biai s'acoumodoun.<br />

Mais lous barquetiès, pau à pau,<br />

Soun mestres de l'estanc e, d'aut,<br />

Dins, lous aires las foucas rodoun.<br />

Das petassaus se fourvioun lion;<br />

Tant que las alas tendran bon,<br />

Vai ben, mais s'un cop flacoun, gara!<br />

Un moument diriàs que s'en van<br />

De bon.... Mais non, çai revendran.<br />

Es vrai, l'ourdòu tournà se sarra,<br />

Aquesta fes roda pus bas,<br />

Se vei que soun afalenadas,<br />

Mema as ròdous que i’a de clas,<br />

Se i'en destaca de floucadae,


En granda foga assecutadas.<br />

E, zou, d'aqui, lous petadous!<br />

Diriàs una pichota guerra,<br />

Mais i’a de trin! N'en vese dous<br />

Que n’an, un crida: — A terra! à terra!<br />

Ensemble anem derevesi...<br />

Rauba-tout-l’an! Que?… M'as ausit!…<br />

L’autre, qu'entend pas badinage,<br />

Pouja sus el à l’arrambage:<br />

— Espera, anarem pas tant lion;<br />

S'ou dis, que servis d'anà courre?<br />

Pioi que vos de car sus lou mourre,<br />

Au pus lèu e d’aco dau bon!<br />

— Quau, tus? Saique n’en venes querre!<br />

— Veni, tant que voudràs, t’espere.<br />

Ai! ai! agantoun lous rouquets,<br />

Soun tant proche que das barquets<br />

An adejà crousat las fustas,<br />

Couma se fai dins las ajustas,<br />

Mais aqui n'an pas lou pavés.<br />

— Assa-mais! saique fenirés.<br />

— Es pas ieu, es aquel belitre!<br />

Pas pus lèu dich que, dins lou pitre,<br />

Tira un cop de pouncha tant fort<br />

Que l'escampa detràs lou bord.<br />

— Secous! secous! quauqu'un se nega!<br />

Devès el tout voga aderé.<br />

L'an repescat, mais lou furet<br />

Qu'a fach lou cop, tant se boulega,<br />

Que dine la lionchou s’avalis.<br />

Au diable lou revaladis!<br />

Ara veguem de que se passa.<br />

Bon-dieu! la foucalha s'alassa!<br />

Dins l’aire pot pas pus andà:<br />

Alateja, bec alandat,<br />

A port,de fusil, sans courage.<br />

Es l’oura dau grand mourtelage;<br />

Couma se laissa canardà!<br />

Ounte que vogue s’asardâ,<br />

Passa toujour talament bela,<br />

A la raspilhada, en candela,<br />

Que chaca cop es cop, vesès!<br />

Tomboun, tomboun, sembla un revès.<br />

E, zou, la saupetra peteja,<br />

E la fumada que carreja<br />

Ennivoulis l'aiga e lou ciel<br />

E lous qu'aquel fum ruste alenoun,<br />

Dau pus jouine jusqu'au pus viel,<br />

Tant lous que tirou ou lous que menoun,<br />

Soun agantats dau ferniment.<br />

Dins lou cor sentoun la prusige<br />

Que lou souldat sent au moument<br />

Qu'ausis das canouns la rauquige.<br />

Pas pus de pòu, ni de pietat!<br />

An febre de vengença e d'ira!<br />

Zou, toujour! avans! carga! tira!<br />

Pas lèu la mort que d'arrietà!<br />

Ara n'es ansin dau cassaire.


Ai! ai! paures aucels, pecaire!<br />

Fugissès, fugissès lion d'el,<br />

D'aqui que fague pus sourel,<br />

Amai en delargant dor terra,<br />

Voulastrejàs ben aut, ben aut!<br />

Car, sus lous bords, la chourma fera<br />

Trefoulis de rabia e de gaud.<br />

Tout d'un cop de crids esclafissoun:<br />

— Avisa, avisa, que sourtissoun!<br />

Es ara! — Tant lèu à terren,<br />

Milanta fusils que s'abracoun!<br />

Mai la fusilhada reprend<br />

E mai de foucas se destacoun;<br />

Ara de quau soun, quau lou sap,<br />

Pioi que toutes tiroun à boudre,<br />

Per las avedre, ie vai foudre<br />

Metre man ou se rebaussà;<br />

Dau tems qu'aqueles s'espoutiroun,,<br />

D’autres engautoun, d'autres tiroun;<br />

D'autres, après s'este sarcits,<br />

Retenguts per lous camaradas,<br />

S'en cridoun de las pus granadas:<br />

— Diga-z-ou, l'amic, se te plai?<br />

Aquela peça magagnada,<br />

Fai-me l'aduse à la passada,<br />

Aco t'en coustarà pas mai.<br />

E se veses que trop s'alargue,<br />

Acaba-la, rendrai lou cargue.<br />

Ansida crida un terrassenc<br />

End aquel traca d'escourrent<br />

Que, ras de la bola, capeja.<br />

— Quau? ieu! Eh be, n'ai pas enveja!..<br />

Saique me prendriès per toun chin?<br />

Ie dis b'aco, mais lou couquin<br />

Sans fa semblant, sans cap de pressa,<br />

Serva sus lou vent de la peça<br />

E l'escabarta antau plan-plan.<br />

L'autre, que vei l'estec, boulega,<br />

N'en prend de pertout, d'una lega<br />

Se fai entendre, à soun boucan,<br />

Lous pàntous s'arramboun per rire<br />

Autour dau pichot escourrent,<br />

E galejant, toutes à dire:<br />

— L’aurà! L’aurà pas! Ou veirem!<br />

Enfin, quand es fora pourtada<br />

Dau que toujour brama amoundaut,<br />

Pouja sus la fouca blassada,<br />

L'adus, ie manda l’arpa e, vlan!<br />

Juste lou tems de frounzi l’ussa;<br />

E la bestiola au founs cabussa,<br />

E lous pàntous risent detràs:<br />

— L’aurà, vous dise, l'aurà pas!<br />

Cau saupre de qu'es devenguda;<br />

E cercant à la beseguda,<br />

Devistoun per aqui, pas lion,<br />

Una poucheta de quicom<br />

Qu'en sus de l'aiga floureteja;<br />

Es lou bout dau bec que negreja.<br />

Lou capejaire part dessus,<br />

Malur! au moument que s'ajouca


Per agantà soun fusil, chouca.<br />

L'aucel fai un autre cabus,<br />

E tout aco n’escacalassa;<br />

Vesent que pot pas l’embarcà,<br />

Siague dau cop, siegue à la cassa,<br />

S’avalis sans mai la cercà.<br />

E toujour lous fusils boumbissoun,<br />

Tant sus l’aiga couma à terren!<br />

Pas de tout tant granats pamens.<br />

Adejà lous cops s'esclairissoun,<br />

N’en resta dous ou tres, pas mai,<br />

Dau cueu dau Berange en deçai.<br />

Tabé las barcas se ie trasoun<br />

E mai lous petadous s’abrasoun!<br />

Mais quau es aquel? Me fai pòu!<br />

Tira sans ime de tout caire,<br />

Soun menaire, qu'es lansargòu,<br />

Fariè pas mau de prene afaire.<br />

A la fin saique i’ou dirà.<br />

Mai!... Es-ti permés de tirà<br />

Una peça à la raspilhada,<br />

Quand i’a tant granda, moulounada?<br />

Bon, i‘a pu vist, aquel barbèu!<br />

— Ai! l’a granalhat! — Macarèu!<br />

O noble fil d'una bagassa,<br />

Crida lou drolle tout sannous,<br />

— Pioi qu’es ansinda que se cassa,<br />

Nou’ ‘n anam veire toutes dous!<br />

E proumte couma la paraula,<br />

Aganta sa longa cadaula:<br />

— Boum! — Siei mort! — E lou sabarnòu<br />

Tomba sus lau plan de sa beta;<br />

Lous temons d'aquela disfeta<br />

Lou cresoun mort; l'enfant tant-ben,<br />

Dins lou bourlisse perd pas tems;<br />

Devès la terra, à grands vougadas,<br />

Fai l'anguila e gagna l'escamp.<br />

— An tuà 'n ome sus l'estanci...<br />

Cridoun de toutas las barcadas,<br />

Lou clam sinistre s'espandis<br />

Tant rede couma la pensada.<br />

Cadun crent per un camarada,<br />

Per un das sieus, per un païs.<br />

— Quau es? D'ounte es? tout aco bela<br />

De la Mouta fins à terren;<br />

Enfin s'anouncia la nouvela<br />

Qu'es un moussu mount-pelieirenc;<br />

Pioi s'en crida una qu'es pas bassa<br />

Se dis que l’ome a ges de mau,<br />

E que s'a fach la vira-passa,<br />

Es davans que lou cop mourtau<br />

Saliguesse de la canulla.<br />

De proche en proche se redis,<br />

Tout s'en bat las maissas e ris.<br />

Assa, per-de-que tout barrulla<br />

Dor terra per desembarcà?


La pòu dau tems es pas de creire:<br />

Jamai n'a pas milhou marcat,<br />

E tant que mous iols podoun voire,<br />

En naut, en bas, as quatre vents,<br />

Deviste pa' 'na nivoulada;<br />

Sus l'estanc bounancia calhada,<br />

Jamai sourel milhou plasent!<br />

Per-que dounc van ansin à terra<br />

Espaurugats e pau de sen?<br />

D'ounte ven que lou terrassenc<br />

Fugis dau cop en granda espera?<br />

I’a mai que de l’ome, veguem!...<br />

— Es oura ou nou que fugiguem!<br />

Au pus lèu bandiguem la plaça.<br />

Çai a gendarmes e sendics!<br />

Au crid de mort se soun gandits<br />

E saique, tout faguent la cassa<br />

Au qu'a tirat lou Jan-l'an-pres,<br />

Prendran lous qu'an pas soun permés!<br />

Lèu toutes lous que soun en fauta<br />

(1) Jan-l'an-pres est le personnage principal d'un petit roman de l'abbé Favre.<br />

Dor l'espandida an dounat, vanc.<br />

De veire la fin res s’enchauta.<br />

Atabé, gara de davans!<br />

Ves soun païs cadun s’endralha,<br />

Lous unes cargats de foucalha,<br />

Lous autres pas gaire au pas ges;<br />

D’unes introun dins sous endrechs,<br />

Fiers embé sa cassa enliassada<br />

E penjoulada autour dau col,<br />

Loua pichots van après à vol,<br />

E sas mouliès afeciounadas:<br />

— Noste ome a pas marrida man!<br />

S'ou disoun, sourrisent, plan-plan!<br />

Lous que n'an pas gaire caminoun.<br />

As gandouns que lous enterinoun,<br />

An lèu atroubat de retours:<br />

Das cargues n'en soun estats courts.<br />

Dos au tres ie las an raubadas,<br />

Una autra i’a 'mpourtat lou cop,<br />

N’i’a be quatre, sans dire trop,<br />

Que i’an aloungat matrassadas<br />

E qu'an perdut dins lous rausets.<br />

Pecaire! lous que n'an pas ges,<br />

Per que las lengas badinairas<br />

N'ajoun pas lioc de lous fissà,<br />

Van faire lou tour de las airas;<br />

Aqui res lous ven atissà.<br />

Dins aquel tems, dor las cabanas,<br />

Lous qu'an permés e pescadous,<br />

Qu’an vouidat flasquetas e banas,<br />

A la biassa fan as ounous;<br />

Vous dire coussi las dents trissoun,<br />

Lou noumbre das tòrons de pan,<br />

Das talhous de biòu qu’engoulissoun<br />

E das poutouns qu'au flàscou fan,


Per aco, ma plouma es ben nova.<br />

Mema ai pòu qu'ou sarà bon brieu.<br />

Ai, s’aviei aquela dau prieu,<br />

Dau famous prieu de Cela-nova!…<br />

Pamens, per tant quajoun talent,<br />

En moulinant lou moument ven<br />

Que cau, enfin, que quicom mate;<br />

S'es pas lou prus, es lou recate.<br />

Eh be, quand au toucat la man,<br />

Qu’an dich adieu à soun menaire,<br />

En prenent cadun de soun caire,<br />

N'an pas pus ni biassa ni fam.<br />

(1) L’abbé Jean-Baptiste Favre de Saint-Castor, auteur du Siege de Cadaroussa et du Tresor de<br />

Sustancioun.<br />

Entremens lou sourel davala<br />

Detràs lou pioch de Miraval;<br />

Vai este nioch, mais per aval,<br />

En sus l'estang, la luna escala.<br />

Ansin qu'on vei l’aucel sali<br />

Dau nis à mounte es espelit,<br />

Tout es siau sus l'aiga e dins l'aire:<br />

S'ausis pas que de lion en lion<br />

Lou crid d'un charlot, d'un pieulaire,<br />

Qu'ailalin un autre respond;<br />

Pus tard ven que d'alas brusejoun.<br />

Aco's lous ostes fugidis<br />

Que, passat lou rebaladis,<br />

Un après l'autre se sarrejoun.<br />

Ah! pioi que de festas se fan!<br />

Que de capignadas jouiousas!<br />

S'ausis pamens dins lou sagan<br />

De pieutadetas pietadousas<br />

Que, pecaire, clavoun lou cor!<br />

N'en soun las mesquinas blassadas<br />

Que jusquas ara eroun cap-mort,<br />

Dins un rescoundoun amagadas,<br />

(1) Pic qui domine la mer entre Cette et Montpellier.<br />

(2) Littéralement: faisaient tête morte.<br />

E qu'ausissent lou cant galoi,<br />

S'aubouroun de sa cala e pioi,<br />

Aissejant e rabalant l'ala,<br />

Dralhoun devès l'òurdòu brusous.<br />

Enfin, aisseta e cant jouious,<br />

Pauc à pauc tout verma e s'afala.<br />

Couma una maire qu'endourmis<br />

Soun enfantounet malautis<br />

Dins soun dous mouvement de ressa,<br />

L'estanc lous barjola e lous bressa,<br />

Lous amaisa couma quicom<br />

De sa tranquila soumelhada,<br />

D'aqui tant qu'una autra voulada<br />

Lous derevelhe en subre-som!


(1) Le dimanche de Quasimodo.<br />

LOU GARDA-MAS<br />

I<br />

Lou bèu dimenche de Pasquetas, (1)<br />

A l'oura que canta lou gal,<br />

I'aviè de bruch e grand barral<br />

Au pichot mas de las Aubetas.<br />

Auriàs ausit barrà, doubri,<br />

Mountà, descendre, anà, courri;<br />

Lou lum cremava, es pas de moda;<br />

Lous enfantets, qu'en se levant<br />

An toujour un pauquet de broda,<br />

E bèucop mai en lous sounant,<br />

Per lou traval ou per l'escola,<br />

A loga de fa tira-mola,<br />

De fretà sous pigres iolhous,<br />

Anavoun, venien de tout caire,<br />

Pariès à de perdigalhous<br />

Qu'a pas bandit dau nis la maire.<br />

Caliè que i’agresse de non.<br />

S'era un jour de semana encara,<br />

Que vegessen, mema quand plòu,<br />

Crema lou lum couma tout ara,<br />

E de barral e de sagan.<br />

Fauriè pas res d’espaurugant:<br />

Dau tems qu'en vila tout soumelha,<br />

Per la journada ou lou prefach,<br />

Cade matin que Dieus a fach,<br />

Se vei varalhà la calelha<br />

Dins lou vilage ansin qu'au mas.<br />

Amai que siegue un jour de festa,<br />

Se lou dissate avien fach resta<br />

D'endals de fem noun estremats,<br />

D’esperset brausit ou de grana,<br />

E que, de pòu de tramountana,<br />

Vouguessoun proufichà l'imou<br />

Qu'escampa cada matinada,<br />

Adounc, que siegue festa ou nou,<br />

S'embarra mai d'una carrada.<br />

Mais vese pas res de dalhat,<br />

Lous fems soun encara sus planta,<br />

E tant qu'au rieu raineta canta,<br />

Soun pas madus; quicon mai i'a.<br />

I'a que la velha, à la soupada,<br />

Lou fil ainat de meste Jan,<br />

Que mena lou ben, dis: — Menjau,<br />

De Mount-peliè deman es fieira,<br />

E saique aquesta es la permieira<br />

Que noun i'agen à pachejà.<br />

Ieu, i'anarai me passejà<br />

Sus lou Peirou, sus l'Esplanada.<br />

Tus, Jaquet, ven au carretiè,<br />

Te done touta la journada;<br />

Mais dilus siegues matiniè.<br />

E vous, çai vendrés pas, moun paire?


(1) Littéralement: puisque cela fait votre toile.<br />

— Quau? ieu! De que ie vendriei faire,<br />

Boudieu? respond lou majourau,<br />

A moun tems, souvenis, patria,<br />

Lou mas, lou repaus, la familha:<br />

Fora d'acò, n'ai ges de gaud.<br />

Ah! s’era per croumpà bouhina,<br />

Mioletalha, avé, cavalina,<br />

Diriei pas non; i’ai prou lou goust,<br />

E pioi quatre iols fan mai que dous;<br />

Mais pas que per ie brandi bralha,<br />

Aquela, nou, sarà pas vrai:<br />

Anàs-ie toutes, gardarai.<br />

Prenès tabé la barbelalha,<br />

En metent que vogoun veni,<br />

Reprend lou viel eme un sourrire.<br />

Ah! mous amics! Pas pulèn dire.<br />

Jamai d'enfants s’endeveni!<br />

Zou! d'un vanc toutes tres s'aubouroun,<br />

Ensemble pregoun, risoun, plouroun:<br />

— Voulen i'anà, paire, eme vous;<br />

Saren ben braves, prenès-nous.<br />

— An! pioi qu'acò fai vosta tela, (1)<br />

Un pauquet de paciença: anen<br />

De que dises, ma femna Adela?<br />

— Eh be, tant vòu que lous prenguen!<br />

II<br />

E vejaqui per que lou bèu jour de Pasquetas.<br />

I'a de lum, de barral au mas de las Aubetas:<br />

E vejaqui tabé per que lous enfantous,<br />

Que lous autres matins lou pichot ome aflanca, (1)<br />

Soun ioi tant beluguets; per ieu es pas doutous<br />

Qu’aquela longa nioch, l’ajoun passada blanca,<br />

Maugra’cò lou bonur, qu'en lioc pot tempourà,<br />

Mema dins lous castels, ount tout es en abounde,<br />

Que souvent s'enfugis per trevà paure mounde,<br />

Per segui lou boumian de paurieira assourat<br />

Lion d'ounte la Fourtuna alendrida es enclausa,<br />

Aquela nioch au mas faguet sa brava pausa.<br />

End’acò lou matin, dessus lou carretoun,<br />

El que poudriè se jaire ounte portoun courouna,<br />

— Saiquie atrouvet aqui la plaça ben milhouna, —<br />

Embe lous tres manits mountet de rescoundoun<br />

E fins au lendeman quitet pas sas pesadas.<br />

(1) Littéralement: le petit homme: c’est ainsi que l’on appelle souvent le sommeil.<br />

Mais, dau tems qu'en camin risien couma de fols,<br />

Ou que, per lou fieirau, arregassavoun d'iols<br />

Sus toutes lous jouguets, e n’i’a de milhassadas;<br />

Dau tems qu'eroun aqui badants, embalausits,<br />

Pount à foudre prega per faire sa causida,<br />

E qu'una fes triats, causits e recausits,<br />

Voudrien lous qu'an fourviat sens laissà sa culida.


Lou paure garda-mas, qu'era bandit soulet,<br />

L'enodi desper el l'agantava au galet;<br />

E per lou permiè cop ie seguet tant estrange,<br />

Que belèu d'un pau mai auriè quichat l'irange. (1)<br />

Pamens à la partença aviè seguit countent,<br />

Sourrisent au cascal de sa genta familha,<br />

La galejant de fes, sustout en ie venent:<br />

— Assa, de Mount-peliè cresès segui la via?<br />

Vous troumpés pas, pichots, es pas la de Pecais.<br />

E la vielha mameta e lou paire e la maire,<br />

Qu'au encapat soun dire: — Es acò, s'era vrai!<br />

— A mens, reprend lou viel, qu'enregués dor Bèucaire.<br />

(1) Littéralement; de presser l'orange, c'est-à-dire de verser des larmes.<br />

(1) Comparaison populaire.<br />

E rire que riràs, e lous paures droulets,<br />

Que coumprenien pas chota as perpaus dau papeta,<br />

Risien be sus soun goust, niais en faguent bouqueta,<br />

E, s'agachant l'un l’autre, avien perdut lou les.<br />

Tal un vol d'aucelous pausats dins la ramada,<br />

Que de soun rieu-chieu-chieu dessabralloun lou bos,<br />

S'ausissoun d'aquel tenis ressounti quauques cops<br />

Lous picaments de mans e la gaia chamada<br />

D'un passant fatrassiè, das passerous à fieu<br />

S'amoura cop sus cop l’allegra cantadissa;<br />

Mais, quand lou pas pesuc e la grand bramadissa<br />

An vermat dins lou lion despioi un pichot brieu,<br />

Lou cant entrecoupat d'en pus fort recaliva.<br />

Ansin que lous aucels, lous enfantous de briva<br />

Reprenoun soun bresil tre que lou rire es siau.<br />

Entremens lou falet, d'un pas leste e fricaud<br />

Lou poulit miòu falet ailai davans amalha,<br />

Brandilhant soun esquilla, aurelha e narra au vent,<br />

E lou vielhàs n'es fier, sa luria ie counven;<br />

Es fier de soun filhòu, qu'entre mans ten la tralha,<br />

E ie dona bon biais ansin qu'un omenet;<br />

De sa mouliè, qu’amai ie manque un bon somnet,<br />

Maugrat sous setauta ans, es escarrabilhada<br />

Couma un lende, e propeta e ben requinquilhada,<br />

Pourtant tout soun filhage e que ie fai pa'n plec;<br />

Es fier de soun malhòu, de sa valenta nora,<br />

Souc dau mas que ten cop au dedins, au defora,<br />

E t’abarris d'enfants garruts e sens endec.<br />

Tout ce qu'aima es aqui, san, de bona pourtelha<br />

Ah! sabès s’es countent, lou viel, e i’a de que;<br />

Mema l'ourguiol au cor lou bourdouira un briquet.<br />

E, zou, seguis, seguis tout de long de la leia.<br />

Audant d'un pas laugè de tras lou carretoun;<br />

Lou ten couti-couti, maugrat que lande e proun.<br />

D’aquel frau, soui segu, sens destourbo à la fieira<br />

Sariè gandit. Ben mai, quand la vielha masieira<br />

Ie fai, en sourrisent: — Çai venes, tus tabé!<br />

Quau gardarà lou mas? La pòu. — Es vrai, eh be!<br />

L’ase tique, ma fe, reprend, se ie pensave.<br />

E, se, gratant l’aurelha: — Anen, vau me virà.<br />

Que vous arribe res, au mens; tus, siegues brave,<br />

Menaire, e davans nioch dor lou mas fai tirà.


— Pas pòu! languigués pas! crida la carretada.<br />

E, prenent à bilhòu, a gagnat la crousada.<br />

Mais, franc dau carretiè, que mes sas atenciouns<br />

A ben gardà lou miòu, à lou qu’ailaval resta<br />

Toutes d’aqui-aqui, de las mans, de la testa,<br />

Remandoun sous adieus, que rend eme afecioun.<br />

Mema dins la lionchou, quand l’an perdut de vista,<br />

Tancat dessus lou to, brandis soun capelàs,<br />

Cade cop qu'entre miech das aubrasses lous brista.<br />

E, quand lous vei pas pus, adounc devers lou mas.<br />

Apensit, mauccourat, lou paure s'acamina.<br />

De marrits pensaments venoun frounzi sa mina,<br />

Pioi, se parlant tout soul, couma per camps fasen,<br />

Lous omes de la terra: — Ah! sariè ben cosent!<br />

E, d’un revès de man assugant sa parpela:<br />

— De bon, que plourariei? Sieu pa’na coucoumela?<br />

Lou miòu es franc, l'enfant es pas desenbiaissat,<br />

E pioi soun paire i’es per quicon. S'a biaissat<br />

Quand, plen de galhardiè, i’a demandat las tralhas,<br />

A fach ben; car, quau deu trevà camins, e dralhas<br />

Touta sa vida, es bon de ie lou metre enfant<br />

Dejout lous iols dau paire, en cas que, se maubasta,<br />

Siegue aqui per dounà counsels e cops de man.<br />

An, lous laguis, qu’aviei soun que nescige... Ah! basta!...<br />

Anen, que Dieus ou fague e longa e longa-mai!<br />

Dis b’acò, mais, dempioi qu'a pres la revirada,<br />

Espinchouna à l'arriès à cade pas que fai.<br />

Dedins de l'entremiecha agacha en çai, en lai,<br />

Ce que dis la recolta: — Au diauca! la civada<br />

A pas bon pèu (1)! O tron (2)! Te, veja-m'aquel blat!<br />

De que se i’es passat? Lou grel s'engourgouvelha.<br />

Ai! ai! que de sauclun! L'ordi sembla neblat;<br />

Encara, vai que trai, la pampa se rouvelha,<br />

Se passis e per sòu acoumença à fiblà,<br />

Quand vòu mountà lou glop. Mais ve, la barjalada (3)<br />

Que deuriè s'aboucà... De qu'es aquesta annada!<br />

Tout vai estre marfit, s'aven pas lèu d'imou.<br />

E se lou gran soufris, quicon mai es lou fòure.<br />

Pas qu'un pichot revès, tout se fariè; mais nou,<br />

(1) Littéralement: n'a pas bon poil.<br />

(2) Jurement populaire, très-répandu en Provence et dans le bas Languedoc.<br />

(3) Mélange de vesces, d'avoine et parfois de luzerne.<br />

La terra jeta fioc. Ah! qu'es ben lion de plòure<br />

Un aurage belèu perou tout estralhà!<br />

Que se tengue à-n-ounte es!... Que de nieirun que i'a<br />

De abotas, tabé! Paure bestiau, ou vese,<br />

De luserna faudrà qu'aqueste an vous passés,<br />

En metent que dalhen lous prats, lous espersets.<br />

Trista annada qu'auren! E mai vai, mai oun crese.<br />

E barrisca-barrasca, enfin gandis lou mas,<br />

Repoutegant, boumbant au sòu emb sa tricassa,<br />

Acoutissent lous pouls que venien abramats,<br />

Seguits de la cournada. A sa vielha chinassa,<br />

Que vòu lou caressà, manda un bon lava-dent. (1)<br />

E lous pouls per la cour, e la china en campestre,<br />

Piaulant e jangoulant, mais en s'encourrissent,<br />

Semblavoun que disien: — De qu'a ioi noste mestre?


(1) Littéralement: lave-dent, soufflet.<br />

E, toujour brassejant e countuniant soun frau,<br />

Vai, ven, belèu cent cops, de la jassa au pourtau.<br />

Se tanca. Anen, un ris sus sas boucas varalha.<br />

De qu'a vist per aqui? Pas res, quauqua jougalha,<br />

D’orteta dins un tes, un pichot oustalet,<br />

Lou bres de la petota e bourdufa e palet,<br />

A boudre per lou sòu. Devistant sas causetas.<br />

Lous negres pensaments an ben lèu derrancat:<br />

— Voudriei dau passeroun avedre las aletas,<br />

Per saupre ce que fan! — Pioi, lou front abrouncat:<br />

— D'aquesta oura ie soun, franc qu'una malurança...<br />

Mais nou, ie soun gandits, quicon m'ou dis d’avança…<br />

Ai! quanta journadassa ai à passà, bon Dieu!<br />

La miola, que l’ausis, aqui copa soun fieu:<br />

— Brames de languiment, tus tabé, que, la Moura?<br />

Sariè malauta? Ah be! mancariè pas qu’acò.<br />

Anen... acò's pas res. E, couma i’es, dau cop,<br />

Arriba, apalha, estrelha, amai siegue pas d’oura.<br />

D'aqui vai à la jassa aubourà lou bestiau<br />

Que chauma, e pioi clasfis rastehès e galera.<br />

— De que mai, s’ou dis, Ah! la counilha qu'espera:<br />

Aurés vosta mourrada. Ara, à ieu! A perpaus,<br />

Quand soun d'ouras, veguen, avans d'alandà l'arca.<br />

Disent acò, sourtis, enrega soun regard<br />

Amount dins lou vent drech devers lou roc que marca:<br />

— L'oumbra sarra lou suc. Es dech manca lou quart.<br />

Pas mai qu'acò? Qu'es longa, aquesta matinada?<br />

Per gagnà tems, anen faire boulhe l'alhada.<br />

III<br />

Dos ouretas après, quand a taulejat proun,<br />

Sus lou negre tauliè qu'oumbreja, una trelhassa.<br />

Lou viel vai s'assetà. Dins la bela sasoun,<br />

Per faire soun somnet, voulounta aquela plaça.<br />

Au cant dau roussignòu, qu'alin dins la param<br />

Cade an çai ven cabi soun niset sus lou ram:<br />

Au varalhà galoi d'un vol de giroundelas.<br />

De la prima embaumada anounciairas fidelas,<br />

Mandant as quatre vents lou noum de Jeuse-Crist,<br />

Tout en pourtant la joia e la becada au nis:<br />

An chieu-chieu ruste e fier dau passeroun trafiaire.<br />

Au brounzin de l'issam varalhejant per l’aire<br />

En requista dau mèu amagat dins las flous<br />

Das aubres dau jardin, dau jaussemin dau pous,<br />

Couma l'enfant au bres qu'au cant de 'sa bressaira,<br />

S'escrafa pau à pau sa bebeta fougnaira<br />

E s'endourmis plan-plan, ansin lou viel rnasiè,<br />

Au cant das aucelous d'aiseta se preniè,<br />

Aublidant, tout lou long de sa douça dourmida,<br />

Lou lassige dau cor, lou trigòs de la vida<br />

E malicia de tems, qu’es belèu lou coudous<br />

Qu'apoudesa lou mai sus lous travalhadous!<br />

Aquel jour, per repèut, tout ce qu'amoun zounzouna,<br />

Voulastreja, e boundina, e fusa, e viroulhouna,


Tout ce qu'aiçaval pieuta, e bresilha, e cloussis,<br />

Causissien, auriàs dich, sous pus beles moucis,<br />

Jamai lous abelhous, dins sous monta-davala,<br />

Avien fach ressounti tant fort brounziment d'ala.<br />

Era un entendement? Se pot, mais lou bèu tems<br />

I’era be per quicon, car de tout lou printems<br />

Avian pas belèu vist tant bela matinada,<br />

Seguida de tant linda e cauda tantossada;<br />

Jamai noste ciel blave era estat tant seren,<br />

E de la trelha en flou, jamai sus lou terren,<br />

Aviè tant negrejat l'oumbrassa fresqueirousa!<br />

E lou viel es aqui d'assetoun e sounjous,<br />

Sus soun pitre pelut lous dous brasses en crous:<br />

Quoura cuga plan-plan sa parpela imourousa,<br />

Quoura alauda d’un cop soun iol negràs e vieu,<br />

Quand mola ou que reprend lou galoi rieu-chieu-chieu<br />

Ou que das passerous s'auboura la batesta.<br />

Dins aquela entremieja agacha aiçai, alai,<br />

A bel ime, au travès dau trelusent dardai;<br />

Seguis lou parpantels, qu'aimoun dins la ginesta,<br />

Sus lou trucs rascallats, sus lou teulats roussels,<br />

Sus l'acrin das parets de las blancas masadas,<br />

Fouligaudejoun, fan de sauts, d’escarlimpadas<br />

E de viravòuts, pioi lous farandels,<br />

Au grat d'un ventilhou, tant rede que l'ideia.<br />

Adieu la farandouna e l'ardenta bourreia!<br />

Ara soun l'avalanca andant d'amount, d'aval;<br />

Mai de forma cambiant, dins lous aires poussejoun.<br />

Ou s'espouscant per sòu, regiscloun, beluguejoun,<br />

Couma un revès maienc as degouts de cristal.<br />

A força de guinchà, de faire parpantela,<br />

Desper eles, sous iols se soun cugats: es pres;<br />

E cants e parpantels, noun vei, noun ausis res.<br />

Ara i’a quicon mai que treva sa cervela:<br />

Es lou tour das pantais, lous parpantels dau som.<br />

Soun aqui roudejant à l'entour de soun front,<br />

Couma au davans dau brusc roda l’issam qu'issama.<br />

Bresilhàs d'aise, aucels; Moura, plan-planet brama;<br />

Anesses pas au mens destourbà soun repaus.<br />

Car lous fousques pantais an pres, despioi bon pau,<br />

De là realitat la forma vertadieira.<br />

Laissàs-lou pantaisà de sa vidassa entieira;<br />

Lou moument d'ara es be, de segu, soun pus bèu:<br />

Gachàs coussi sourris. Tabé, quante tablèu<br />

A soun ime vesent de longa se debana!<br />

Sariè, ma fe, pecat de lou derevelhà!<br />

Dins un prat erbagieu e tout ensourelhat,<br />

Una frapa d'enfants e de drollas s'afana.<br />

Descaus, à beles uns, an gasat lou rajòu<br />

Qu'en dous courrents bessouns encenchoun la clausada,<br />

E, brusents e galois, an seguit la rasada,<br />

A l’oumbra de l'espés e ramut rebieiròu.<br />

E, zou, tout trepa e dansa, e zounzouna e bresilha.<br />

Pamens, deçai-delai, la cola s'escampilha,<br />

Cadun seloun soun goust: d'unes van nistejà<br />

Dins lou rounzàs, amount, sus las brancas dau roure;<br />

D'autres, à través camps, allegre, an pres lou courre<br />

Après lous parpalhouns per lous acoussejà;


(1) Littéralement: il tombera à plat ventre<br />

D'autres, per çai, per lai, fan de pignels de flouses.<br />

E toutes soun countents, e toutes soun urouses;<br />

Car despioi lou suquet dau serre abouscassit<br />

Qu'on lai dau pradelàs sembla que lous agacha,<br />

Couma un mourrut vignau gaitant la mala facha,<br />

Fins au gravàs dau rien que jai afatrassit;<br />

Despioi l’aubràs qu'assousta e rausàs e lambrusca,<br />

L'un enliassant sous mars, l'autre agafant sa rusca,<br />

Fins au prim entrefiol alairat per lou sòu.<br />

Sus mauvin, coucoumela e graissoun dau rajòu,<br />

Per lou prat, sus lou truc, dins l'aubràs, sus lous vises,<br />

Es tout de paralhouns, de flouses e de nises,<br />

E pertout d'enfantets coussejant e nistant.<br />

I' a sous fraires, sa sorre emb sas camaradetas;<br />

Amai el tabé i'es, e lou gala-bountan<br />

Nou'n vòu as parpalhouns, ni mai à las flouretas:<br />

D'aquela oura n'en vòu à-n-aquel piboulàs<br />

Que, dins soun vert brancun, rescond un nis d'agassa.<br />

En van, per s'en sarrà, fins au col s'embartassa.<br />

Ni per aquela, ou vòu: es caput, lou drollàs!<br />

Couma un escuriòu, de branca en branca escala;<br />

Prend alen cade cop que gandis as plançouns.<br />

Mais, dessan qu'es au suc, paupant lous agassouns,<br />

La branca ounte a pres ped croucina, s'endavala,<br />

E lou nistoun cabana ansin qu'un fruch madu,<br />

Quand de l'aubre fruchè brandilhoun la grelhada;<br />

E, se daissant anà, couma fai lou perdut<br />

Qu'au reloge dau tems sa mala oura es sounada,<br />

Degola, e zou, degola, e, tout en degoulant,<br />

Sentis viroulejà l'aire autour de sa cara,<br />

Couma la deu senti l'aucel en s'envoulant.,<br />

Mais de qu'en sarà d'el quand sus lou prat tout ara<br />

Vai s'espautà, boudieu? (1) Res que de ie pensà,<br />

Sent galinà sa car, e, zou, toujour degola,<br />

Sens esperas, sens bruch, mais sens pausa ni mola.<br />

Malur! quand sus lou sòu crei de boumbi, sensat<br />

Un caraven moustrous dejout el s'abadalha.<br />

Discounforma es sa maissa, e negrassa, e sens founs,<br />

E dins soun gargatet lou rajòu se perfound.<br />

Diriàs qu'un gigantàs lou chima à la gargalha<br />

Emb un sourne gourgoul que sembla un raufelet.<br />

Adejà lou drollàs de soun orre galet<br />

Sent gandi jusqu'en el la maussana alenada,<br />

L'alenada de mort que sentis à frescun.<br />

Adounc vòu se retene, agantà lou brancun,<br />

Que passa couma un fum qu'un fouletoun rebilha;<br />

Fai un rejet. Dau cop lou viel se derevilha,<br />

E soun pitre repoufa un souspir de soulàs.<br />

Endacò se graumilha e de sous iols neblats<br />

Drech-a-drech dins l'escamp agacha sens res veire.<br />

La clouca agroumandida, e que sus el a l'iol,<br />

Brista soun mouvement e, se virant à reire,<br />

Au mitan de sous pouls çai ven plena d'ourguiol.<br />

Es fiera de soun creis couma una bona maire<br />

E, dins soun parauli, ie fai: — Eh be! pecaire,<br />

Clou, clou! i’a pas res d'ioi per mous bèus pouletous?


Ve, couma soun bravets! an toutes sa cougueta<br />

E la jouina nineia, aubourant sa testeta,<br />

Pieuteja à soun entour d'un aire amistadous:<br />

— Clou, clou! dins tonn bousset i’a pas quauqua migueta,<br />

Un retrous de quicon, un croustetou de pan?<br />

E se sarra, e se freta, e cloussis, mais en van.<br />

Lou dourmeire es représ, mai lous pantais lou tenoun<br />

L'an atissat de longa, aici sian! van e venoun<br />

Tout en parpalhejant, proumtes couma l’uiau.<br />

Aubouroun dins soun cor la douça souvenença<br />

De soun urous filhage. Ai! couma ie fai gau!<br />

Se vei barbèu, jouvent, plen d'esper, d'inoucença;<br />

Lous plasés, pioi l'amour, ie parloun tout ensen;<br />

Pioi de soun endrechou. l'an fach cap de jouvent,<br />

Quand sa mouliè qu'es ioi s'endeven abadessa;<br />

E pioi la dansa jout lou viel belicouquiè.<br />

O jour tres cops urous per el e sa proumessa!<br />

La campaneta amount canta dins lou clouquiè!<br />

Mais de qu'es que ie prend? Sa cara tant risenta<br />

S'afousquis, doumai vai. Soun pèu. que l’age argenta<br />

S'enredena; soun front tant seren se frounzis.<br />

A de longs ferniments dins sas gautas plessadas.<br />

Sa bouca trementis e sas dents soun clavadas.<br />

Pamens la campaneta amount toujour brounzis.<br />

Es vrai, mais pioi cantava embé sa vos douceta;<br />

Ara brama, esclafis, l’ardenta campaneta!<br />

E fai tout trementi, couma quand sona au fioc.<br />

Enfin dins lou planàs, dins lous vans, sus lou pioch,<br />

De toutes lous endrechs que soun terras tenentas,<br />

S'auboura un ara, un pioi, de sounadas brusentas;<br />

Mema dins l'entremiecha, andant de ranc en ranc,<br />

Quicon que fai fiertat couma se pot pas creire,<br />

La gleisa dau patroun de Mountpeliè, Sant-Peire,<br />

(1) Littéralement: de tous les lieux qui sont terres tenantes.<br />

Escampa tins au cel sas tres vosses d'aram.<br />

Lon tems s'escuresis. L’annada es ben marrida;<br />

La nioch i’a de bourjous, la suita miaula, crida;<br />

Dos poulas fan lou gal, acueulat dins la cour;<br />

L'iol estelat, targant la luna que trascoula<br />

Dins un pargue roujàs, lou chinàs, ploura, idoula,<br />

Entre qu'es negra nioch à pouncheta de jour.<br />

Adounc d'aqui aqui, gagnant dor la vilassà,<br />

D'omes viels e jouvents una coulada passa.<br />

N' i' a d'en pèu, de descaus; d'autres per vestiment<br />

An un parel d’esclops e de marridas bralhas;<br />

De fusils, mai que mai de grands fourcats, de dalhas,<br />

D'astes, de longs bastouns, esfraious armament.<br />

Un jouine tambourin, en cape d'aquel mescle,<br />

Picant quoura la pel, quoura tustant l’arrescle,<br />

Rampela lou refrin d'una rusta cansoun,<br />

Bramada per la cola, au pas, à l’unissoun.<br />

E la terra fernis, e lou camin pousseja,<br />

E toujour la campana ailamount campaneja.<br />

Sens saupre couma, enfin, dempioi un moumenet,


Dins lou membre dau mas, emb un fort arcanet,<br />

Se vei la fourca en man e sa femneta ploura<br />

E lou reten, e pioi de la bressola auboura<br />

Soun enfant nouvel nat: Jan, moun Dieu, toun manit,<br />

Ta maire e ieu, sens tu, de qu'anan deveni?<br />

Dor la bausa dau fioc devista adounc sa maire.<br />

En el quicon ie dis. La veiràs pus, pecaire!<br />

Couma es tristassa! Ai! ai! sous iols soun atarits!<br />

La paura a tant soufrit, n'a tant toumbat, tant vist!<br />

Assetada sens vanc dessus la cadieirassa<br />

Ount sous desavanciès un per un an pros plaça,<br />

Desengruna plan-plan sous chapelets de bouis,<br />

Mesclant dedins sa prega un souspir d'ai e d’oui.<br />

Un pau dessabeanlat d’una doulou tant granda,<br />

Flaquis; quand tout d'un cop lou viel pourtau s'alandu.<br />

Intra de sous amics l'escachoun ardelous,<br />

E, sens mai de prepaus, lou capouliè bregous<br />

Ie ven: Se sies Francés, enrega nosta rega.<br />

E dins la leia mai la cela se boulega,<br />

Car i’a preissa de tems, pareis, e Jan seguis.<br />

Seguis, laissant ailai sa femna estabanida,<br />

L'enfantou que tresana e la maire au soulis,<br />

Aubourant sas dos mans e sa facia blasida:<br />

— Ah! se lou mau nous ven das pecats requità,<br />

Siegue facha, ô moun Dieu! ta santa voulountat.<br />

End aquel ròdou, mai quicon lou destrassouna;<br />

N'a pas ime de qu'es. Sariè-ti lou labech<br />

Que gandis tout escàs de vers la Magalouna,<br />

E que, tant lèu çai estre, emb soun alen doucet<br />

Couma lou d'un enfant ou de la femna aimada,<br />

Auboura lou fiolhan de l'espessa ramada,<br />

Zouzouna à soun ausida, afresqueiris soun front,<br />

E, de soun pèu de nèu regoulant à flecadas,<br />

A l'entour de soun col brandis las aneladas?<br />

Sariè-ti lou labech qu'a fach acò, de bon?<br />

Ou be lou roussignèn? Dau tems que tout paupava,<br />

Tristàs, bec alandat, dins la rama chaumava;<br />

Juste s'aviè lou vanc d'escampà dins lou siau<br />

Un quicon que retrai au graulà dau grapaud.<br />

Mais tant lèu qu'a sentit la fresca labechada,<br />

S'escarrabilha, vai, aduse la becada<br />

A l’acouïda as iòus, qu'en fasent graumilhet,<br />

Lou bada e lou seguis emb sous iols de jaiet.<br />

Adounc sautourlejant per grilhous et branquilhas,<br />

Reprend sous cants d'amour. Sariè sas belas trilhas<br />

Que l'an destracassat? Ven-ti de l'acanau?<br />

D'un nis de girouadouns, lou paure caga-trauc<br />

A vist un à per un s'envoulà, sous frairetas.<br />

N'a be la petelega, ai! mais de sas aletas<br />

A paura fe; tabé, sus lou berle dau nis<br />

Es aqui que prend vanc, tremola, s'escarnis:<br />

L'espaça ie fai pòu; mais lou paire e la maire,<br />

Per força ou per bon grat, l'an enbandit dins l'aire,<br />

E lou paure alateja e s'arqueta e, pieu-pieu,<br />

Un vol à soun entour roda per lou mantene.<br />

Maugrà’cò, de pieula noun se pot mai destene<br />

E lou vol ie respond.... Mais, nou; despioi un brieu,<br />

Dau caire d'en amount s'auboura una chamada:


Es d'aqui, de segu, que lou destourbe ven.<br />

Galina, gal, guindard, cascalhou, pieulou 'nsen.<br />

La clouca çai reven, la plouma esfoulissada,<br />

Couchant sa cloucadeta en foga à l'endavans,<br />

Couma lou pastourel quand fugis la groupada,<br />

Fugis per que lou gai emé lou guindard n'an;<br />

E la cournada en plen, pareis, s'en embarrassa.<br />

Belèu una lingousta, un verme, una torassa,<br />

Soun l'encausa de tout aquel rabaladis.<br />

Couma que siegue, un cop que se soun ben sarcits<br />

Lou guindard tout sannous à l'escart se pavouna,<br />

Dau tems que lou galastre es quilhat, glorious,<br />

Sus la paret, brandant eme un vanc nervious<br />

Sas alassas, e canta, e boumba, e dessambrouna<br />

Lous ressouns de l’entour. Mais, encara enclausit<br />

De soun pantai, lou viel a pas pus lèu ausit<br />

Lou cant de soun vesiat que, torna mai sounjaire<br />

E brandilhant la testa, à mots entrecoupats:<br />

— O França! barboutis, moun païs, paura maire!<br />

Una larma perleja à sous iols miech-barrats,<br />

A travès sa parpela un bricoun enaigada.<br />

A miech entravalat, vei be toujour soun gal,<br />

Lou vei b’alatajà; i’ausis be sa cantada,<br />

Mais couma on vei una oumbra au vespre en ailaval;<br />

E soun cant assourdant e soun flajelà d'ala<br />

Retrasoun dins soun ime à la cansoun troumfala<br />

Mandada à plen galet dins lou tron das canouns,<br />

Que de ie pensà soul dona lous fernissouns.<br />

E l’oumbra crei e crei, escala à rebecina<br />

Sa testa fins au ciel, e dins l'auba clarina;<br />

Negreja couma un fum que s'auboura en tems siau<br />

D'un cros de crema-sòuda, ou couma una tourrassa<br />

Que monta dau pounent un jour de caumagnassa,<br />

Majencant en silence e lou tron e l'ilhau.<br />

Mais, en s'esperloungant dins l’autura enlusida,<br />

Pauc à pauc dau gal perd estampadura e biais;<br />

Pioi de tout en per tout, lou tems soul de dire: Ai!<br />

De l’ome a pres la forma e la cara espoumpida,<br />

E l’ome espetaclous qu'es alin ie retrai.<br />

Endacò pioi se mòu e, de sas grands cambadas,<br />

Afranquis la planura, e mounts, e valounadas.<br />

A cade pas que fai, bourjant à plena man<br />

Dins un semenadou penjoulat de biscaire,<br />

Escampa à plens pougnats la semença dins l'aire;<br />

Soun brausent cop de bras, dau pounent au levant,<br />

Dralha un miech-ceucle inmense: on diriè qu'à la terra<br />

Ensegna soun camin. Alin, la bestia fera<br />

Devès l'escuresina as quatre sauts fugis;<br />

Souta soun pas pesuc s'aterris la roucalha,<br />

Lou rajòu desmairat retorna dins sa dralha;<br />

La lona s’apradis, l’armàs s'agarachis;<br />

La mar, l’aurage meme, ansin que lou terraire,<br />

Tout ce qu'es d’aiçaval, pas pus lèu que patrei<br />

Emb soun pas soubairan, emb soun anà troumflaire,<br />

Clena, fai siau, coungria ou fuch davans soun rei.<br />

E zou, toujour, avans e bresseja e camina,<br />

E la semença à floc s'escampilha e brounzina,<br />

Beluguejanta ansin que pampalhetas d'or.<br />

Pioi, gran per gran, au sòu reboumbis, sautourleja,<br />

Couma l’enfantounet qu'en lou mudant cambeja,


Mais, pas pus lèu au sen de sa maire, s'endor.<br />

S'endor be, mais ben lèu sarà derevelhada.<br />

Laissàs que lou bouirac l'age ben acatada<br />

Jouta soun coubertoun blet, imouisse e tebés;<br />

Laissàs qu'à la sournuda age à beles pauquets<br />

Poumpat l’imou dau sòu, pounit sa racineta:<br />

Lou veirés pounchejà fora sa bressouleta<br />

Per s'abeurà d'aigage e d'aire e de sourel.<br />

Tabé, dins l’iòu qu'an mes sout la clouca acouïda,<br />

Lou pouletou dourmis; amai e despèr el,<br />

Quand lou tems es vengut de fa soun espelida,<br />

Embé soun bequetou trauquilha lou cruvel,<br />

E per d'aut la ploumada e las alas caudetas<br />

De la maire ajoucada, urousa que noun sai,<br />

Branquejoun bequetous e poulidas testetas,<br />

Enmascadetas d'estre e vieure. O dous pantai!<br />

Que lous lauraires vengou’ e vendran... Ah! pas mai,<br />

De fet, de tras en tras, lou valent semenaire<br />

Devista lou masiè sous tres garruts maiòus,<br />

Reguejant l'abladat cadun emb soun araire,<br />

Doublisses roussegats per de coubles de miòus,<br />

Repoufant per la narra aura, fum e flamada;<br />

Detràs lous doublissiès, de touta l'encountrada,<br />

Çai ven d'aucelounets à vol, voulatejant;<br />

Pioi dins lous tals douberts bequejoun, fan maugilha<br />

De cadela, babot, courcoussoun ou canilha,<br />

Tout ce que debouris e pampa, e grel, e gran.<br />

Tems linde e grèu! Alena un pauc de la marina.<br />

Bèu tems per la grelhada! A travès lous trauquils,<br />

Lou nourrigat lou sent dau founs de sa jassina:<br />

Adounc se derevelha, embugat de transpils,<br />

Befi en lach, grelha e nai: causa merevilhousa.<br />

De ce qu'en ailaval l'oumbrassa espetaclousa<br />

Camina a se marida emb la fousca lionchou,<br />

De ce que lous bouiracs seguissoun l’enregada,<br />

E que dau semenà la sòuca es adracada,<br />

Lou grel sus lous acrins çai ven faire espinchou.<br />

Verdeja aiqui; de çai, en gagnant l'autre caire,<br />

Girberja, s'amatis, canouna, espiga amount.<br />

Una blanqueta flou coubris l'espigau blound<br />

Que blaqueja à l’alen dau magistrau granaire;<br />

E pioi en ailamount rousseleja, es madu,<br />

E lou glop, que lou pes de l'espiga a rendut<br />

Clena, brausit e, lèu, jout lou voulam croussina,<br />

Jout lou voulam brandit per de valents gavots<br />

Que, relents de susou, la cansouneta as pots,<br />

Envoulanoun de vanc; e la cola camina,<br />

Sas ligairas darriès, aiçai dor lou masiè.<br />

De per davans lou blat pauc à pauc s'amadura;<br />

En molas par darriès l'acampa lou soubriè, (1)<br />

E pioi de per delai, seguissent d'amesura,<br />

D'enfants entenciounats trevoun dins lou garban,<br />

Tout en espepidant l'espiga estrabacada.<br />

(1) Le soubrier est, dans une ferme, le valet qui remplace indifféremment, et au besoin, les autres valets.<br />

E la cola camina emb soun baile davans,<br />

E la garbela tomba, e tant lèu es ligada.<br />

E sega e liga e, zou, canta que cantaràs,


Talament que dau viel soun ben lèu aqui ras.<br />

Adounc das prefachès las esquinas s'agrejoun,<br />

Lous voulams aubourats dins lous aires flamejoun:<br />

— Ben-estre e longa vida à nostre majourau! —<br />

Crida en cor la coulada; e reprend mai soun frau.<br />

Las ligairas après fan sas revenenciatas,<br />

Lou soubriè qu'enmoulava auboura soun capel,<br />

E das maissounairets lou graciouset troupel,<br />

Un rire amistadous esclairant las facietas,<br />

Sa manada cadun, se sarra. Tantequant<br />

Lou paure trementis: a sentit de manetas<br />

Que frustoun soun ginoul, pioi de vosses doucetas,<br />

Que ie traucoun lou cor, sonoun: — Hòu! noste grand!<br />

Bon vespre! dourmissès? Es nautres, que çai sian!<br />

Osca dous cops! pourtan jougalhas e belesas<br />

Au mens una carrada, amai soun pas fouresas.<br />

S'aubourant tout d'un vanc, à travès l’escabour,<br />

Te vei soun oustalada, e, cadun à soun tour,<br />

Lou galeja en risent d'una tala suspresa.<br />

Mais el de sous felens, ce qu'au mounde mai presa,<br />

Que per eles fai, dis, de fouliès, de bauchuns,<br />

Qu'en desfasent sa vos couma eles bretouneja,<br />

De sous felens fai cas, pas mai. Abeles uns,<br />

Sus sa fauda lous prend e pioi lous poutouneja,<br />

Mut e la larma as iols..... De qu'es pas, peracò!<br />

Aubé, lou grand plouret, mais de joia, aquel cop.<br />

IV<br />

Aquela nioch, à las Aubetas,<br />

Lous enfants, dins sas bressouletas,<br />

Jaguts cadun emb sous jouguets,<br />

Subrant lou soupà per se jaire,<br />

Fagueroun pas qu'un som, pecaire!<br />

De talament qu'eroun lassets!<br />

LOUS LAS D’AMOUR (1)<br />

Un brieu après festas de Pascas,<br />

Dor lou grand terraire de Tascas, (2)<br />

Las filhas de l'auboi, lou darniè jour d'abrieu,<br />

Bon matin, d'en Barbian, coustejavoun lou rieu;<br />

S'en anavoun per camps, per orta,<br />

Descauquilhant la riba torta,<br />

L'armàs nus e secant, lou baissau erbagieu,<br />

De sa flourida printanela.<br />

La culida era mai que bela:<br />

Avien saique clafit dous ou tres canastels,<br />

Davans de faire testa amount en Canta-Aucels. (3)<br />

Pamens lou ventilhou paupava;<br />

Tout escasseta s'aubourava<br />

Lous ribanets floucants das capelous roussels.<br />

Sus lous rocs que de lion blanquejoun,<br />

Au suc das serres que blavejoun,<br />

Sus lou negre fiolhan das euses rabagats,


Sus la verda carchofia e lou ruste argelàs,<br />

Sus lous sauses que s'abateloun,<br />

Sus lous iolhous que parpanteloun,<br />

Lou caud sourel trasiè de rais aurripelats;<br />

E, jout sas pougnentas rajadas,<br />

De las drollas entenciounadas,<br />

A beles paus, lou prus qu'avien s’aflaquissiè;<br />

Mai d'una, en se ventant, dau caud se planissiè;<br />

E lous perpaus que toutareta<br />

Salissien de cada bouqueta<br />

Plan-plan avien calat; pus res noun s'ausissiè<br />

Que lou bruch, à belas vegadas,<br />

Dau rajòu que fai sas trepadas,<br />

Un dous chifri de calla, un amourous paspal,<br />

Que d'en garriga manda allegro perdigal,<br />

Ou lou prim brounzin de cliquetas<br />

Das grils fora de sas baumetas,<br />

Pimpant l'escaumarrada à l'abric dau margal.<br />

— Òu que! la broda nous aganta?<br />

Ven Bèu en s’aubourant: — Quau canta<br />

Per fa passà la cagna? Eh be! disès pas mai?<br />

Anen, seguissès-me, canten dau mes de mai<br />

La cansouneta tant poulida.<br />

— Aubé d'acò! la cola crida.<br />

E Bèu entouna aquesta emb fresa e branle gai:<br />

Lou que m'aima e tant me plai,<br />

Mes de mai,<br />

A dich: Jamai de la vida,<br />

Roussignoulet;<br />

A dich jamai de la vida,<br />

Ieu, de mia cambiarai,<br />

Mes de mai.<br />

La mieuneta es trop poulida,<br />

Roussignoulet;<br />

La mieuneta es trop poulida.<br />

A ieu, m'a dich quicon mai,<br />

Mes de mai.<br />

T'ou dirai, un cop souleta,<br />

Roussignoulet;<br />

T'ou dirai, un cop souleta.<br />

Pioi m'a dounat de cor gai,<br />

Mes de mai,<br />

Un bouquetou de flouretas.<br />

Roussignoulet;<br />

Un bouquetou de flouretas.<br />

Dins lou bouquet tant de biai,<br />

Mes de mai,<br />

I'a l'amourousa penseia,<br />

Roussignoulet;<br />

I'a l'amourousa penseia.<br />

I'a 'ncara quicon de mai,<br />

Mes de mai:<br />

La cachousa viauleta,<br />

Roussignoulet;<br />

La cachousa viauleta.


I'a 'ncara quicon de mai,<br />

Mes de mai:<br />

La viergeta margarida,<br />

Roussignoulet;<br />

La viergeta margarida.<br />

I'a ‘ncara quicon de mai,<br />

Mes de mai:<br />

Bela rosa entre-dourbida.<br />

Roussignoulet;<br />

Bela rosa entre-dourbida.<br />

I'a 'ncara quicon de mai,<br />

Mes de mai:<br />

Un riban coulou d'espera,<br />

Roussignoulet;<br />

Un riban coulou d'espera.<br />

Tant que tenguet la cansouneta,<br />

L'acampada anava souleta:<br />

Quoura per çai, per lai, las vesiàs s'alargant;<br />

Qoura d'un mema caire à boudre s'arrambant.<br />

Couma on vei de cops, per las pradas<br />

De parpalhouns à foulestradas,<br />

D'una floureta à l'autra en foga fissounant,<br />

La cantadissa era finida<br />

Que countuniavoun la culida,<br />

Tout en zounzounant l’aire, e noun pus finissien;<br />

Pamens lous roussignòus, qu'en despiech ausissien,<br />

Dins l'aubran se derevelhavoun,<br />

E lous aucelous, qu'escoutavoun,<br />

Dor l'escamp ou lou nis à vol s'enfugissien,<br />

— Ai, boudieu! quanta caumagnassa!<br />

S'esclama enfin una drollassa.<br />

E, desgansant soun juste e soun blanc fichutet:<br />

— Se me cresès, anen prene alen au bousquet,<br />

E pioi, quand nous saren pausadas,<br />

Tournaren sus nostas pesadas.<br />

— Es vrai! toutas à dire: Oi, oi, Louvisa, as drech;<br />

Anen nous cabi jout la rama..<br />

D'un vanc, couma lou brus qu'issama,<br />

S'abrivoun, en risent, à l'oumbra dau blacàs.<br />

— Jouguen à rescounduda; ou voulès-ti, digàs<br />

— Vague, vague, soui la trimaira,<br />

Ven Nena. — Mais, bela jougaira,<br />

E nostes las d'amour, lous aven oublidats?<br />

Respond Bèu; e, sus la frigoula,<br />

Pausa la banasta coumoula:<br />

— Anen, à l'obra! e que lous dets n'ajoun pas grep.<br />

Sans mai mutà, dau cop, tout se mes à-de-re;<br />

Adrechament entre-mesclejoun,<br />

Dins lous las d'amour que gaubejoun,<br />

Flouses de touta mena e fiolha e verd grelet.


A las veire tant embiaissadas,<br />

Auriàs dich un roudet de fadas<br />

Qu'un prince d'autre tems mandava en soun palai,<br />

Emb l'escuma de mar que lou miejournau trai,<br />

Taissent la rauba batistera<br />

Que la mairina daut espera<br />

Per n'en vesti lèu-lèu lou sagatun que nai.<br />

— Escoutàs ben aiçò, jouinessa,<br />

Mai torna dire l'abadessa:<br />

La qu'aurà pus lèu fach, se dis qu'emb soun jouvent<br />

Sarà novia davans que d’estre à l'an que ven:<br />

Cau ie counven, que se boulegue.<br />

— Ai! ma grand, davans Dieu que siegue!<br />

Pecaire! en me brossant ou countava souvent,<br />

Faguet la risoulieira Nena;<br />

Ioi trove que noun vòu la pena<br />

De se desmesoulà, per avé 'n amourous.<br />

Au maridage n'es couma à las belas flous:<br />

Souventas fes on se i' espigna,<br />

Car, en se prenent, quau devigna<br />

Se lou galant sarà toujour amistadous?<br />

Per ieu, countuniè la gandouna,<br />

Aime fossa la farandouna,<br />

Beligangot, bourelha e galoi menuguet:<br />

S’ai l'ur de capità dansaire beluguet,<br />

Subre tout soui à moun delice,<br />

Quand à l'oumbreta m'espandisse,<br />

Qu'entravalada à miech mous iolhous fan cuguet,<br />

Aime, d'entendre l'auboissada<br />

Que, de valoun en valounada,<br />

Ven boundinà plan-plan fins à moun ausidou:<br />

Aime d'un long drapet l'agradiva coulou.<br />

Soui la pus urousa filheta<br />

Quand lous plesses de capeta.<br />

Regoulant dau coupet, m’envòutoun de negrou.<br />

Per de galants, vole pas n'estre.<br />

Se maridà, bi! prene un mestre!<br />

Santa patrouna, oh nou! jamai n'en voudrai ges.<br />

— Ni mai nautres, boudieu! clamoun tout à la fes,<br />

Las jouinas prou destimbourladas.<br />

Mais Bèu, qu'era de las ainadas:<br />

— O paus-de-sen! ie ven, jamai pus mau fagués!<br />

Sabès-ti ce que vous maucora?<br />

Sias encara couma la tora<br />

Que lou frech endourmis dins soun sedous coucoun:<br />

Cantàs, dansàs, risès, trenàs lou tourtilhoun<br />

E laissàs agi la natura.<br />

En soun tems la frucha amadura,<br />

E lou magnan un jour s'auboura parpalhoun.<br />

Quand sariàs nascudas princessas,<br />

Taus juraments, talas proumessas,<br />

Soun couma un aigajàs que lou sourel embeu.<br />

Coussi dire de nou quand n'aurés pas un peu<br />

Que noun parle de maridage,


Que das jocs aurés fach tibage?<br />

Çai vengue un demandaire adounc couma se deu!<br />

Vesès per ieu. Oh! l'ere, oumbrenca,<br />

E foulestrieira e palusenca;<br />

Autant que vautres, l’ere, e saique belèu mai.<br />

Tresa, aqui: — Que te cope, ara couma se fai<br />

Que te veguen tant devirada?<br />

— T'ou dirai be, pioi que t’agrada;<br />

Bota, i’a pas de mau. Era l'an de delai,<br />

Per aqui quauquas cigalieiras,<br />

Pachant d’anà dor Tamarieiras (7)<br />

Faire lou prouviment de nostes canardets,<br />

Janet, que das jouvents es lou mai entre-pres,<br />

S'oufris per estre lou menaire.<br />

Sabiei qu’era per me coumplaire,<br />

Amai l'aviei boufat saique dos ou tres fes,<br />

Tout escàs se la prima aubeta<br />

Pounchejava dor l'Espigueta (8)<br />

Que passaven lou pas de la mainajariè.<br />

Avian pas oublidat noste plan risouliè;<br />

D'assetous sus la carretouna<br />

Qu'à cade pas nous dessambrouna,<br />

A cade pas tabé lou rire esclafissiè.<br />

De cops, lou vergougnous menaire,<br />

Espinchounant un pau de caire,<br />

D'esper el sus ieu trai de regards alucats;<br />

Mais, quand se recounoui que ie fasen de cas,<br />

Quand nous vei traire la guignada,<br />

Vira round sa cara neblada;<br />

E nantres, zou de rire, e n'en vos, aqui n'as!<br />

Couma quicon agandigueren<br />

Sans mai d'encontre. Capiteren;<br />

De la vida vidanta ome vieu n'a tant vist:<br />

Tamarissas, jounquets, bauquilha, eroun clafits<br />

D'estivencas, tendrouns, mourguetas,<br />

E mai que mai de menudetas;<br />

Era una manna, enfin. Jout un gros tamaris<br />

Que l’oumbrassa d'aiçai negreja<br />

(Fasiè caud!), me prenguet l’enveja<br />

De i'anà m'aclatà, tre que moun tarrairòu<br />

Sariè roumplit. Ie vau; ah! filhas, quanta pòu!<br />

Una vedela enferunada,<br />

S'auboura de tras la matada,<br />

Me targa, brama e, zou! dau ped cava lou sòu.<br />

Ieu, à l’arriès, me mete à courre<br />

De tout moun vanc. Lèu, de soun mourre,<br />

Ausisse lou boufà que rauqueja, esfraious;<br />

Tout moun sang s'avalis! Vole cridà secous,<br />

Mais la pòu m’aviè rendut muda:<br />

Un pas de mai ere perduda.<br />

— Oh! te! crida una vos: era moun amourous.<br />

A la crida, l’orre bestiari


Devira dor soun aversari<br />

E sa malicia bruta e sa courrida; fol,<br />

Ourlant, boumbis sus el: i'es dins un virà d'iol.<br />

Pallet, ped bourdou, Jan l’espera;<br />

Pioi à man destra, dor la terra,<br />

Clena soun cors d'un ruste e proumte carracol.<br />

Zou, la bestia cambia de via;<br />

Zou, l'escartaire se rebilha<br />

Juste à tems, vitament, d'un vanc de l'autra man:<br />

Couma la foulestrada, en rasejant soun flanc,<br />

La bestia passa; es lèu virada.<br />

Tres cops ven, tres cops escartada;<br />

A la fin, avencida, alin, gagna l'escamp.<br />

Fier e tancat couma un luchaire,<br />

El per alin dins lou terraire<br />

De l'iol seguis un brieu la taura que fugis;<br />

Pioi dor ieu, que l'esfrai encara enrampesis,<br />

Arriva emb sa cara risenta:<br />

— Eh be! s'ou dis, sies-ti countenta,<br />

Belou, dau que tant t'aima — Oh! ie fau, gramecis!<br />

Aqui sus la terra amichida,<br />

Sans tus, alairada e chaupida,<br />

D'aquesta oura, sariei, sans tus, moun amiguet;<br />

E ieu que te preniei, necia, per moun jouguet!<br />

Perdoun, ere caluga, baucha;<br />

De toun amour sabe la jauja;<br />

De ta novia, emb ourguiol, cargarai, lou bouquet.<br />

E, treboulida, aqui me taise.<br />

— Es ben tus qu'as parlat? Pantaise!<br />

Diga m'ou'n autre cop, en souscant me faguet.<br />

Endacò, davans ieu, d'aginouls se pleguet;<br />

Mas boucas mai barboutigueroun,<br />

Nostes fronts cauds se capiteroun<br />

Es ansin que l'amour en moun cor naisseguet.<br />

De Bèu acò saguet la dicha.<br />

Tout lou tems, la cola se quicha<br />

A l'entour, escoutant de fe, de tout soun sen;<br />

Mema s'en capitet que dau rebouliment<br />

Lous detounets se desclaveroun,<br />

E las flouses que trabuqueroun<br />

Das vantalets venien mirgalhà lou tarren.<br />

D'acò, ges n'avien joc de rire;<br />

Mais Dideta, per aussi dire,<br />

Es la que, de segur, lou preniè mai à cor;<br />

De la genta abadessa envejava lou sort.<br />

La poulida e nova droullassa<br />

Es be simpleta, un pau foulassa,<br />

Mais lous dires d'amour fan bacelà soun cor.<br />

Era aqui tout iol, tout aurelha;<br />

Pas per tout ce que se sourelha<br />

Auriè d'un tau recit entre-coupat lou fieu.<br />

Era finit que res noun mutet d’un bon brieu;<br />

Mais ela, noun poudent pus caupre:


— Dau qu'on aima estre aimada, ou saupre,<br />

Quante plasé deu estre acò, gents dau bon Dieu!<br />

E, sounjousa, clena la testa:<br />

— S'ou vos tant sabé, quau t’arresta?<br />

Rougissent un briquet, Treseta adounc respond.<br />

Quau vòu pousà bona aiga ane à la bona font.<br />

Se vos devignà la pensada<br />

Dau que subre tout mai t'agrada,<br />

As pas besoun, crei-zou, d'anà courre ben lion,<br />

Ni de fa targa à la vaqueta.<br />

Las flouses de margarideta,<br />

Se dis be qu'an aquel rnarevihous poudé.<br />

— Quicon n'en sabes, tus, car i’as fossa la fe,<br />

Reprend Setouna, e i’a, pas gaire<br />

Que de rescoundoun t'ai vist faire…<br />

— Quau, ieu? e sus sa gauta espelis l’arcanet.<br />

N'aime pas ges, vous n'en souvengue.<br />

N'aimarai-ti? jamai m'avengue!<br />

Per de que voulès-ti que lenguege la flou?<br />

— O couquina! sans rire, anen, digàs-nous-lou:<br />

Trouvarian pas à Tartulieiras (9)<br />

Un que vous trasès pas de peiras?<br />

La drolla tourna-mai sent mountà la roujou.<br />

— Que? t'ai mes lou det sus la plaga?<br />

Assa, diga-nous, per la paga,<br />

De que te respoundiè, tout en la desfiolhant,<br />

La margarida? Anen, diga-nous-zou, menjan!<br />

— Oi, oi, la ninelha repeta;<br />

Fai-nous aquel plasé, Treseta?<br />

Mais Bèu, qu'era defora, intre e ie ven: Avans,<br />

Faguen lèu ou gagnen au largue,<br />

Davans que l'aura se demargue.<br />

— Te! te! Veja-m'aquela, ounte vai emb soun vent?<br />

Se crei en Vacairieu; gramecis, prou de tems<br />

Nous an mandat sa reguinnada.<br />

— Lous cavaliès l’an-ti mandada?<br />

Ai! ai! e fin d'abrieu n'a pas de jours cosents?<br />

— Amai fague bèu per la plana,<br />

Gachàs l'Aigal, dins la Serana (10)<br />

Vesès couma a cargat m roupa de counglàs.<br />

De çai, Sant-Loup (11), tabé, cencha soun front negràs<br />

De nivoulasses que s’estripoun.<br />

Aqueles signes prou l'endicoun:<br />

Davans que siegue nioch, auren quauque groupàs.<br />

— Avai, noun sies qu'una pauruga,<br />

Fai un sourelhàs qu'escaluga.<br />

Counouisseira, per ioi acò sarà pas mai;<br />

Pas pòu, bota, l'Erau lou tirarà de lai.<br />

E l'abadessa un pau mourgada:<br />

— Resten, pioi que tant vous agrada.<br />

Au mitan dau roudet s'asseta tourna-mai.<br />

Las parlantinas se caleroun;


D'en pus fort lous detous aneroun;<br />

Estelas, tourtilhouns, plouvien dins lou faissiau.<br />

Mais lou tems aviè fach sa posta, e i'a bon pau<br />

Que rafis, bouirats emb sous coubles,<br />

An desatalat das rastoubles,<br />

Dounant virada dor l'estable ou l'abouau. (13)<br />

Pamens lou din de la sounalha<br />

Dau primadiè que lous amalha<br />

Encara tout escàs s'ausis de lion en lion;<br />

Es l'oura que lou pastre, au fresquet de la font,<br />

A l'oumbra de las oulivedas,<br />

En flabutant, mena sas fedas<br />

Per la chauma, s'estend, badalha e prend soun som.<br />

Mais, mai vai, mai l’aire s'empusa;<br />

Dejà dins la garriga nusa,<br />

Sus la roca blancassa, au suc das nauts acrins,<br />

Lous parpantels, amics das grèus calamandrins,<br />

S'aubouroun, courrissoun, flamejoun,<br />

E, das abels (14) que beluguejoun,<br />

Dins lou ciel atubat s'ausis lous sourds brounzins<br />

Ai! couma on es ben à l’oumbreta,<br />

Quand lous calandres fan l'aleta;<br />

Quand dins lou blau dau ciel s'avalissoun lous trucs,<br />

Subre-tout d'aquel tems que noun soun couneguts<br />

Lous amaruns d'aquesta vida!<br />

Quand l'amour fai soun espelida<br />

Dins lou cor, que fai bon jouta lous pins ramuts!<br />

Dins la calieta rescounduda<br />

Ounte la cola, à la sournuda,<br />

Apignela de vanc sous darniès bouquetous,<br />

Pau à pau, per un flan dau fiolhan negrious,<br />

Un prim rai de sourel, que trauca<br />

Coume un vieu lamp de floc, s'entrauca<br />

E tencha girba, sòu, apalhats de retrous,<br />

Drollas e cacha fouscarina,<br />

D'una lusida escarlatina<br />

Couma la que dardalha à través lous veiraus<br />

De la vielha capela as jours de festenauts.<br />

E toujour lous detous oubrejoun,<br />

Planet las jouinas zounzounejonn.<br />

D'aires que d'aquel tems, pecaire! fan tant gaud.<br />

D'autras, mai que mai las ainadas,<br />

oun aqui couma estasiadas;<br />

L'obreta vai be prou, mais à l'ime dau det.<br />

L'abadessa ela-mema, au mitan dau roudet,<br />

Perd, entre dets, grels e flouretas.<br />

De que las fai tant sounjairetas?<br />

Es-ti lou souveni d'un pantai penlidet,<br />

Ou lou bruch dau rieuset que sousca<br />

E se tors dins la cola fousca,<br />

Cercant sa dralha au founs dau jas ruste, roumpent?<br />

Es lou soun-soun au nis de l’ourtoulau valent,<br />

Lous tris de las tridas brodousas,<br />

Ou las cauquilhadas cachousas


Pieulant dins lous abaus, tout en s'acoutissent?<br />

Quau pot devignà la pensada<br />

D'una filheta enamourada?<br />

Dau tems que tout acò se passava en aiçai,<br />

Lous jouinomes, partits en requista d'un mai,<br />

Despioi lou bon matin bracavoun,<br />

E, dessè que s'en retournavoun,<br />

Douneroun testa, esprès ou d'asard, ou noun sai<br />

Dor lou rode à-n-ount elas eroun;<br />

Tant lèu las colas se mescleroun.<br />

Acò saguet de crids, de rires, un sagan!<br />

Ansinda quand lou vespre, alin, dins lou couchant,<br />

Lou sourel en fioc se i’aclata,<br />

Dins l’ouliviè que lous recata,<br />

Pieula un vol de chichis abrivats de l'escamp;<br />

Ansinda la frapa galoia<br />

Derevelhava, dins sa joia,<br />

Lous ressouns endourmits dau souloumbre devés,<br />

S'esquielant d'un bauchun, d'un retour, d'un pas res,<br />

Oublidant l’oura que s'envoula,<br />

La matinada que trescoula<br />

E lou magistralàs que coufla sous boufets<br />

Ai! couma on es bon à l'oumbreta<br />

Quand lous calandres fan l'aleta,<br />

Quand lou sourel escampa à flac sous rais brausents!<br />

E pioi lous jouinomets soun braves, avenents,<br />

De bon biaisset; an bona charra,<br />

E l'auba de la vida encara<br />

Esclaira d'un dous rai sous frontets inoucents.<br />

Entremens lou daut se cargava<br />

E la parada davalava,<br />

Lous arpis agroupats, dau Causse à l'Esperou;<br />

Quauques vieus liaucets reguejoun la negrou,<br />

E pioi, dau tron, de vòuta en vòuta,<br />

Dau siau entre-coupant la mòuta,<br />

Dins lou lion ressountis la sournuda bourjou.<br />

Pas una fiolha que brandege,<br />

Pas un pèu d'aire que blaquege<br />

Sus terra, en ciel, pas mai que lou grèu caumagnàs;<br />

De vols d'aucelounets badants, afalenats,<br />

Se cabissoun dins las blacadas,<br />

E las tourtouras apariadas<br />

Van cercà la frescura, amount, dins lou bouscàs.<br />

Mais lous manits, que tout enfesta.<br />

N'an pas ime de la countesta.<br />

Veses pas de tant lion, mous braves agnelets.<br />

Se joga à pijoun-voula, à paure; cada fes<br />

Qu'un d'eles requita soun gage,<br />

Dins l’escurin e fres aubrage<br />

S'ausoun rires e crids e poulits poutounets.<br />

Un cop Touneta, qu'es la maire, (15)<br />

Dis, en lenguejant lou trimaire,


Que dins soun vantalou teniè lous iols cugats:<br />

— La, qu'aiçò's sieu, qu'on vei, que tus soul veses pas,<br />

A-n-ounte lou mandes, per veire? (16)<br />

Moustrava un anelou de veire<br />

Que Tresa aviè bailat per gage tout escàs.<br />

— Faire un poutoun au castejaire, (17)<br />

Respond. Juste es lou calignaire,<br />

Que i’an reprouchat pioi. Dor lou pastourlet,<br />

La drolla, qu'auriàs pres, pecaire! au capelet, (18)<br />

S'acamina touta entrepresa,<br />

Lou front coubert de la flambesa;<br />

N'i'aviè per la plani. Tout un cop un foulet,<br />

Panlevant gravàs eo poussilha,<br />

Dor lou rescoundoun prend sa via,<br />

Envòuta, clena, tors la blacada en bramant,<br />

Couma un tau ferrejat per una rusta man,<br />

Dins lou plan, un jour de ferrada,<br />

Ou quand la bestia enterinada<br />

Part sus un rasetaire e l'enrega de vanc:<br />

— Crousa, diable! crousa (19), crideroun<br />

Lous manits; e pioi se rigueroun<br />

Dau vespioun que tant ben lous veniè d'empaumà;<br />

Mais lou dragàs, que passa e fuch revoulumat,<br />

N’es pas mai qu'un avans-courreire<br />

D'aquel auriscle mau-faseire<br />

Que se sarra, e lou tems torna siau e vermat.<br />

Mais acò tirèt pas de longa:<br />

La trounada, que s'esperlonga,<br />

Dau ciel à beles paus atapa lou calèu;<br />

Sus lou rebat d'aquel espetaclous ridèu<br />

Ie rebessina de tourrassas<br />

Nautas, descounformas, blancassas:<br />

Diriàs de piochs gigants cabucelats de nèu.<br />

Lou qu'a vist passà sans soufrages<br />

Lou flèu das omes e das ages,<br />

Ara crana, roundina, ansinda qu'un lioun<br />

Derevelhat dau cop dins lou frech tourtilhoun<br />

D'una sernassa que lou sarra;<br />

En van d'arpis, de dents s'apara:<br />

Toussit, pastat, mòugut, lèu jairà d'abauchoun.<br />

En van s'enredena e caïna.<br />

Lèu sa testa que rebessina<br />

Fins à la nivoulada, e soun rabàs pounit<br />

Dins lous jasses dau truc, soun racinat fournit,<br />

Que tout l’entour dau souc regagna<br />

Couma d'apassas d'estrigagna,<br />

Soun barbun taupejant en terra amouchounit,<br />

E la roucalha que l’acota,<br />

E lou tarren fins à la crota<br />

Ounte eles soun cabits, tout es dessagrilhat;<br />

Lou bosc, mema lou serre, an sentit brandilha;<br />

Quand l'aubràs embe sa moutassa,<br />

En pes, panlevat per l'aurassa,


A cent passes boumbis sus lou sòu badalhat.<br />

De l'oura en lai pus res noun tanca<br />

La viroulada que derranca,<br />

En gafant lou nivàs; de sous longs crocs toussits<br />

Arramba, carrabaugna, arranca, rout, coussis<br />

Ce que dins sa coussa capita,<br />

E pioi de sa maissa au lion jita<br />

Tout ce qu'à rambalhat, brigoulat à moucis.<br />

E trona e plòu à coua d'ase (22):<br />

Zou! zou! foulàs, que tout s'arrase,<br />

Camins, rajòus, valats; bouida-me toun barrau (23)<br />

Entremens que ie sies, entancha! car, per d'aut<br />

Ta barrillassa es deglasida;<br />

Se mostra adejà la lusida<br />

Que dau retour au bèu es l’agradieu signau.<br />

Oi, oi, toun boufetàs se trauca,<br />

E lou coumplot que te recauca<br />

Dirà lèu de nou: sies au founs de toun counquet,<br />

Lou sourel per lou gaule espinchouna un briquet;<br />

E sus la lioncha escuresina,<br />

D'ount lou tron partis e roundina,<br />

Dins sa maja esplendou flambeja un double arquet.<br />

Lou qu'a vist passà sans soufrages<br />

Lou flèu das omes e das ages,<br />

Ara crana, roundina, ansinda qu'un lioun<br />

Derevelhat dau cop dins lou frech tourtilhoun<br />

D'una sernassa que lou sarra;<br />

En van d'arpis, de dents s'apara:<br />

Toussit, pastat, mòugut, lèu jairà d'abauchoun.<br />

En van s'enredena e caïna.<br />

Lèu sa testa que rebessina<br />

Fins à la nivoulada, e soun rabàs pounit<br />

Dins lous jasses dau truc, soun racinat fournit,<br />

Que tout l'entour dau souc regagna<br />

Couma d'apassas d'estrigagna,<br />

Soun barbun taupejant en terra amouchounit,<br />

E la roucalha que l'acota,<br />

E lou tarren fins à la crota<br />

Ounte eles soun cabits, tout es dessagrilhat;<br />

Lou bosc, mema lou serre, an sentit brandilhà;<br />

Quand l’aubràs embe sa moutassa,<br />

En pes, panlevat per l’aurassa,<br />

A cent passes boumbis sus lou sòu badalhat.<br />

De l’oura en lai pus res noun tanca<br />

La viroulada que derranca,<br />

En gafant lou nivàs; de sous longs crocs toussits<br />

Arramba, carrabaugna, arranca, rout, coussis<br />

Ce que dins sa coussa capita,<br />

E pioi de sa maissa au lion jita<br />

Tout ce qu'a rambalhat, brigoulat à moucis.<br />

E trona e plòu à coua d'ase (22):<br />

Zou! zou! foulàs, que tout s'arrase,


Camins, rajòus, valats; bouida-me toun barrau (23).<br />

Entremens que ie sies, entaucha! car, per d'aut<br />

Ta barrillassa es deglasida;<br />

Se mostra adejà la lusida<br />

Que dau retour au bèu es l'agradieu signau.<br />

Oi, oi, toun boufetàs se trauca,<br />

E lou coumplot que te recauca<br />

Dirà lèu de nou: sies au founs de toun counquet,<br />

Lou sourel per lou gaule espinchouna un briquet;<br />

E sus la lioncha escuresina,<br />

D'ount lou tron partis e roundina,<br />

Dins sa maja esplendou flambeja un double arquet.<br />

Anen, aqui las ramassadas,<br />

Restoris de las nivouladas,<br />

Que l'aura adoucilhada à rouneadas brandis;<br />

De viens lamps de clartat per r escur lèu couvrits<br />

Per aqui quauqua rampelada,<br />

Darniè bram de mala ira intrada,<br />

E d’ilhaus que lous iols n'en soun embalausits.<br />

Pau-à-pau tout s’escarrabilha,<br />

Lou ciel, la bauma, la ramilha;<br />

Adejà'n roussignòu, d'un rounzàs degoutant<br />

En s'alisant la plouma, acoumença soun cant,<br />

E bouscarrida e cauquilhada<br />

Dins l'aire prenoun sa voulada;<br />

As abrics voulastreja allegre capelan.<br />

La drollalha soula pigreja:<br />

La pòu encara la capeja?<br />

Mais nou, pioi que s'ausis de cascals risouliès.<br />

An! de terra un per un espinchounoun; pariès<br />

A la counilha dau sauvage,<br />

Qu'on vei à l'auba, dins l'aigage,<br />

Moustrant lous prims mourets fora las cavariès<br />

Rebaussant cambaus e raubilha,<br />

Fin finala, prenoun sa via;<br />

Lous jouinomes davans, caminant au passet,<br />

Das carraus ichagats causissent lou pus sec;<br />

De las filhas pioi ven la tieira,<br />

Pourtant flouses sus la testieira,<br />

Embe tant de bon biai que las mourdriàs, ma fe!<br />

Mai d'un jouvent se vira à reire;<br />

Atabé mai d'un, per las veire,<br />

Sentis routà lou ped dins lou trin empeirat.<br />

Janet, pecaire! un cop a piechat s'alairà.<br />

Adounc la joia recaliva<br />

E de bona imou tout arriva<br />

Sus lou bord dau Barbian: Secous! a desmairat. (24)<br />

Ara, per passà, coussi faire?<br />

Gasà descau, se pot pas gaire.<br />

Per lous barbèus, vai prou; mais las drollas, digàs?<br />

A travès camp pourrien mountà d'aut l'Abrigàs; (25)<br />

La cresca es pas belèu tant grossa,<br />

Mais lous endarrairariè fossa;


E, pioi, lous sautadous saran pas enaigats?<br />

Tout acò fai pas gau, s'en manca.<br />

Dau cop, lou maucor lous embranca;<br />

E lous rires de pioi se cambiarien en plour,<br />

Se n'era pas l'esper que, dor là fin dau jour,<br />

L'aiga fola sarà passada. (26)<br />

I'a toujour aquela pensada<br />

Que sas maires, enlagui, ‘speroun lou retour.<br />

E la cola es aqui sounjousa,<br />

Agachant l'aigassa bouldrousa.<br />

Que sembla ie fa lega e passa en s’en risent.<br />

Mais lou pastre, qu'a vist petà lou loup: — Me vèn,<br />

S'ou dis, embe soun plan bagassa, (27)<br />

Una ideia qu'es pas ben traça.<br />

— Diga-nous-la, boudieu! que noun anen; es tems.<br />

E pas pus lèu dor el s'acampoun:<br />

— Eh be! que lous esclops s'escampoun,<br />

Au cop de bras, de lai; rebounden lou cambau<br />

Fins à la fourcadura, e pioi cadun nous cau<br />

Prene una filha à l'esquineta<br />

Ou, s'aimàs mai, à cadieireta.<br />

— Oi, oi, à cadieireta. Ai, que d'ime! — A perpau,<br />

Dis mai, defenden capignadas,<br />

Pessucs, coutigas e butadas.<br />

— Acò's acò, saren bravets couma d'anjous.<br />

Una man dins la man, enliassats dous per dous,<br />

Lous dets fasen ben la crouqueta:<br />

— Mia, sus nosta cadieireta,<br />

Ie venoun à caduna, anen, assetàs-vous.<br />

E, sans mai, la drolla s'asseta.<br />

A lou que soun mai de couleta,<br />

Plega, per se mantene, un bras autour dau col;<br />

L'autre ten sus sa fauda, ounte a toujour un iol,<br />

Sa part de flouretas oubradas,<br />

De pòu de las veire issaladas<br />

Ou chaire dins lou rieu au mendre carracol.<br />

E zou! lous pourtaires s'engafoun.<br />

Fossa, dedins sa testa, escrafoun<br />

Las defensas qu'au fach; mais un vira-t-en-lai<br />

I'ou remembra dau cop. D'autres fan un trantai<br />

Desprès-esprès; las drollas cridoun,<br />

Sarrant lous gandouns qu'espoufidoun;<br />

D'autres per tout lou cors, e dempioi l’oura en lai<br />

Qu'an adoumençat la passada,<br />

An sentit quauqua tremoulada.<br />

Mais s'es pas saupegut s'era lou fach joious<br />

D'avedre entre las mans fai tant agradious,<br />

Ou lou fresc de l'aiga courrenta,<br />

Que grumeja e fugis mourenta<br />

De noun poudé baisà tant poulits boutelhous. (28)<br />

Enfin tout passa, tout s'espoussa.<br />

An encara una brava escoussa<br />

A faire, e lou camin es pas fossa adracat,<br />

Car lou grand leca-fanga es gaire esperlucat; (29)


Tout-escàs manda d'alenadas,<br />

Qu'en brandant flouses e grelhadas<br />

Espouscoun lous degouts dau fiolhan alacat.<br />

E dessè que d'unes regouloun,<br />

D'autres en tramblejant penjouloun,<br />

Perlejant, au travès das trelusents raissets;<br />

Acò retrai as plours degoutant das iolhets<br />

D'un enfantou que ris e ploura,<br />

Quand sa maire dau bres l'auboura<br />

E ie dona l’espouncha en baisant sous detets.<br />

De cops que i'a, tant ben plouvina,<br />

Mais la gisclada mistoulina<br />

Passa tout lis, sans mai, dins l'aire escalugant.<br />

Ce que fai dire au pastre, un bricou se trufant:<br />

— Acò 's de revesses jalouses,<br />

Bougnoun pas que lous amourouses.<br />

Nautres rescan pas res, es pas vrai, diga, Jan?<br />

E Jan ris couma una poulassa;<br />

Mais Bèu se vira e i'arregassa<br />

Un cop d'iol que ie copa e rires e cascal.<br />

Era entieira, Isabèu; as jocs, couma au traval,<br />

Fasiè tant ou mai sa partida;<br />

Mais, quand era d'imou marrida,<br />

Soun coutelou talhava e de costa e de tal (30).<br />

D'aquel moument es pas de lese,<br />

Amai saique es pas soula; crese<br />

Qu’an toutas un pauquet de fougna: dau matin<br />

Qu'an delargat, fins ara en drougant un camin<br />

Que cau dralhà dins la moulura;<br />

E pioi, subre tout, que i'endura<br />

De saupre ce que fan sous parents en alin.<br />

Pamens, au pont de la Capela,<br />

De pichots portoun la nouvela,<br />

Que lou vilage en plen lous espera emb anciè;<br />

E, dins un virà-d'iol, tout l'oùrdou fatrassiè<br />

A travès camps prend l'escourrida;<br />

Tant qu'a d'alen galopa, crida.<br />

— Soun aici! soun aici! — Dau camin fangassiè<br />

La jouinessa a quitat la vista;<br />

En virant lou recouide, brista<br />

La foula que camina e ven à l'en-davans;<br />

Pas pus lèu estre à port, las maires: — Quante plan!<br />

S'es juste de fa tant museta?<br />

Poudès ie metre noum viauleta (31);<br />

Sias pas prestas, boutàs, à ie tournà, deman.<br />

Ah! mais en las vesent flouradas<br />

Tant ou mai que las girounadas,<br />

Pounchejant das faissous que blaqueja lou vent<br />

E i’oumbrejoun la cara, esclafissoun d'un tems<br />

D'ourguiol e de joia espoumpidas:<br />

— Boudieu! ounte vous sias culidas?<br />

Sus vosta testa, enfants, pourtàs tout lou printems.


E de poutouns e de brassadas:<br />

— Maires, vous sias ben carcinadas;<br />

Mai tabé, noste mai, vesès, qu'aurà d'ounous!<br />

Elas n'an be sa part, quand pioi, de dous en dous,<br />

Fan intrada dins lou vilage<br />

E qu'ausissoun à soun passage;<br />

— Quanta bela jouinessa! O las poulidas flous!<br />

Mai que mai, touta la vesprada<br />

Se parlet que d'aquela intrada,<br />

Das trafis qu'an menat, dau coumplot, de l' esfrai,<br />

Dau rajòu, subre tout, dau famous pin que jai<br />

Amount, alairat sus lou serre;<br />

Se parlet que n’anavoun querre<br />

Lou mar lou pus garrut per n’en faire lou mai.<br />

Lous parlaments encara anavoun<br />

Que lous jouinomes arrivavoun,<br />

Atieirats jout lou fai, cantant à plen galet.<br />

Touacha (32), d'aquel tems, a fach lou castelet.<br />

Oundrat de sous las qu’acimela<br />

Una brusenta martavela (33),<br />

E lou mai capelat jai sus lou cavalet.<br />

Ara cau jougà las aubadas;<br />

Embe de brancas à brassadas<br />

Van à l’aiseta e siaus, l'auboissaire en mitan.<br />

Au davans das oustaus ounte i’a de filhan<br />

La cola cachousa s'arresta,<br />

E l’auboi, que l'a toujours presta,<br />

Joga un aire à la fin, lou tambour aquitant:<br />

— Acò's per tus, bela (34), s'ou disoun,<br />

E s'en van, sans que s'en mesfisoun.<br />

Lou que n'a quauqua ideia ou que n'es amourous,<br />

Ou que vòu coupa palha e, de cops, un jalous,<br />

De rescoundoun vai à la porta, l<br />

Ie pounis un das grels que porta,<br />

E fugis dins l'escur ansin qu'un maufatous<br />

Venien de jougà la de Nena;<br />

La curiousa (m'es pas de pena<br />

De creire que tant lèu aviè sautat dau liech<br />

Espinchouna e devista, aval sus l'escaliè,<br />

Una oumbra que prend l'escourrida.<br />

Davala e vei, touta apensida,<br />

Aqui sus lou soulis, un bèu grel d'amelliè.<br />

Despioi l'au pas pus vista rire.<br />

— Esperàs qu'ai quicon à dire,<br />

en Jan: Es un regret (35). De longa eme Bèu soun<br />

A la bouca dau mounde; ansinda an pas besoun<br />

De se veire de rescounduda<br />

Ni de parlà la lenga muda<br />

De l'aubre ou de la flou (36). Souta soun fenestroun<br />

Soun, agandits, e Jan s'afusta,<br />

Toussis, e pioi, d'una vos rusta,<br />

Un pauquet tremoulanta à l'acoumençament,<br />

Mais qu'una fes à fieu mena galhardament,


Un pau à la moda gavacha,<br />

Canta una cansoun per el facha,<br />

Emb un aire e de mots bèus que be talament.<br />

Parla en premiè de las estelas,<br />

Dis: Tre qu'oubrissoun sas parpelas,<br />

Lou pastre parguejaire es tout estasiat;<br />

Embe gau las seguis dins l'aire adoucilhat,<br />

Oublidant tout ce de la terra.<br />

Aqui finis. L'auboi, qu'espera,<br />

Reprend l'aire en en plen couma un dous bresilhà.<br />

Adounc las fenestras s'alandoun,<br />

Franc d'una, e toutes se demandoun:<br />

— De que vòu dire qu'ela age pas entendut<br />

L'auboissada e lou cant de soun car pretendut?<br />

Cau que siogue morta ou malauta,<br />

Qu'en quicon mai pause la gauta,<br />

Ou be que soun liechou siegue ben rescoundut.<br />

Mais l'en causa es lèu descoubrida:<br />

De sa fenestra entre-dourbida<br />

S'entrevei, dins l'escur, un parelhat d'iolhous<br />

Lusents e lancejants couma lous estelhous<br />

Que d'aquela oura au ciel clarejoun;<br />

Lous drolles entre eles parlejoun,<br />

Mais n'en quincoun pas una au galant vergougnous.<br />

El, mai, reprend sa cansouneta<br />

E dis. — Quand l'auba, afrescadeta,<br />

En sourrisent espincha, au pourtanel dau jour,<br />

La floureta d'en prada arregarda, emb amour<br />

La que ie dona baume e vida,<br />

E pioi torna, trista e passida,<br />

D'ara à deman fins qu'age escoubat l'escabour,<br />

Mai aqui mola una passada,<br />

Mai l’auboi fai sa fignoulada.<br />

Au verset tresen, canta embe fossa de goust<br />

La joia e lou bounur das galois aucelous,<br />

Quand lou sourel, dins la nisada,<br />

A tra sa premieira guignada.<br />

Pioi dau vira-sourel, de sous rais tant jalous,<br />

Fai lou verset quatren, Mais ara,<br />

Que n'es au cinquen, se declara.<br />

Aqui remena tout e ven: O pastourel!<br />

Vira-sourel, floureta, e tus, poulit aucel,<br />

Se counouissiàs Isabeleta<br />

Ah! couma bandiriàs l'aubeta,<br />

E lou sourel flambant e l'estelat dau ciel!<br />

E lou Catouli (37) carramela,<br />

E, zou! lou Capòchou (38) rampela.<br />

D'aquel tems, lou cantaire aganta d'una man<br />

Una branca de chaine e la planta au davans<br />

De la fenestra tant mourruda,<br />

Quand una vos ben couneguda<br />

Ie ven, mais plan-planet: Gramecis! D'aqui van<br />

En co de Tresa; es l’acabada.<br />

Aici lou pastre, après l’aubada,


— A jous set fèus virats, per l’esprouvà, i'a mes<br />

D'euse e de fraisse. Ah! mais t’en mourdras pas lous dets?<br />

A pas pus lèu virat l’esquina,<br />

Que costa à ce sieu rebessina<br />

Un bèu plançoun de pive. E lou pàntou a coumprés<br />

Qu'a fach aqui 'na bajocada,<br />

Car ie torna, vei la grelhada,<br />

Ausis parlà: se velha, aquel vespre, à l’oustau.<br />

Escouta, e ie parei que s'en sap pas trop mau;<br />

Mema un cop, touta risoulieira,<br />

Dis: Parlen pas de la figueira;<br />

Mais dau restant, lou pive, eh be! tant ben, fai gau.<br />

Mouquet, fougnant, à grands cambadas<br />

Vai ajougne sous camaradas,<br />

Que d'aquela oura soun arrapats au trelhau.<br />

Couma eles se i'agroupa, e lou mai matriau,<br />

Emb sa testa que l’endavala,<br />

Mousegut, sans sabrouns escala,<br />

S'adrecha en oumbrejant dins l’aire linde e blau.<br />

Un cop ben coutat de tout caire,<br />

Cadun s'endralha e vai se jaire,<br />

E lou plan resta nus. Mais l'aubre es pas soulet;<br />

Per coumpagna a la luna, emb un ventilhounet:<br />

Una enlusis sous grels, sas pignas;<br />

L'autre, emb sas doucetas capignas,<br />

Espousca lou perfum de soun gent castelet.<br />

Pioi, entre que lou jour s'auboura,<br />

Dins sa rama fournida e moura<br />

Çai ven das passerouns lou vol boulegadis;<br />

En pieulejant, mai d'un adejà ie bastis;<br />

Tre que sourelha, d'alausetas<br />

Fan l'aleta, amount, fricaudetas,<br />

Tout en se miralhant, car lous las soun garnits,<br />

As bords, dins las escavaduras,<br />

De miralhets e de daururas,<br />

E tout acò coulança e lus, enribanat,<br />

Au bresil das aucels, au galoi alenà,<br />

De l'aureta que lous brangela<br />

En brandilhant la martavela,<br />

Talament que l’endrech es lèu destressounat.<br />

Per lou branle, tout se boulega;<br />

Lou veja-aqui que se desplega:<br />

Cap de jouvent, abats, abadessas, davans,<br />

Coucardas au capel, as goùrdous lou riban.<br />

Tres aubois, tres tambourinaires,<br />

Giscloun en cor sous pus bèus aires;<br />

Un vol d'enfants autour, brusents, sautourlejant.<br />

De tras, paires, maires caminoun;<br />

Mai d'un, lous peses ie fouïnoun,<br />

Car ie remembra acò doucets souvenis d'ier;<br />

E lous vielhasses muts, lou regard siave e fier,<br />

Aprouvoun das iols, de la testa,<br />

Urouses d'avedre à la festa


E tout au cop lou fil, lou felen e lou tier.<br />

E la farandouna galoia<br />

Plega e desplega soun emboia<br />

A travès lou vilage; à beles cops diriàs<br />

Un inmensa garlanda à pignels mirgalhats;<br />

Quoura roundela en cagaraula,<br />

Pioi lou vira-vaut se desgaula,<br />

S'alarga, s'esperlonga à flocs escampilhats.<br />

A cade plan, cada carrieira,<br />

Lou primadiè (39), la primadieira (40),<br />

Se dessaparioun per fa la virada, e van<br />

Au davans das aubois, laissant entre mitan<br />

Lous parels, qu'un per un seguissoun;<br />

Pioi à la fin se rejounissoun,<br />

Cadun emb sa caduna, embe gaubi dansant.<br />

Mais un cop gandits à la plaça<br />

Emb la jouinessa, jamai lassa,<br />

Femnas, omes, enfants, se mescloun de cor gai,<br />

E la dansa e lous rounds autour dau poulit mai,<br />

S'en tenoun touta la journada.....<br />

Das las d'amour d'aquela annada,<br />

S'en parla cada fes que nous sarran de mai (41).<br />

NOTES<br />

— (1) Fleurs arrangées en forme d'étoiles, de couronnes, etc.; on les plaçait sur châtelet.<br />

— (2-3) Noms de lieux aux environs de Lansargues.<br />

— (4) Cette chanson est imitée d'une vieille chanson populaire, aujourd'hui presque oubliée.<br />

— (5) Celle qui, dans ces sortes de jeux, est obligée d'aller découvrir celles qui sont cachées.<br />

— (6) Flocons cotonneux ou fils de la Vierge.<br />

— (7) Mas aux environs de Lansargues.<br />

— (8) Phare qui a remplacé celui du grau du Roi, éteint depuis assez longtemps.<br />

— (9) Mas aux environs de Lansargues.<br />

— (10) Montagne et partie des Cévennes, dans le langage des habitants de Lansargues.<br />

— (11) Pic près de Montpellier.<br />

— (12) Rivière qui a donné son nom au département de l'Hérault.<br />

— (13) Étable à bœufs.<br />

— (14) Nom qu'on donne à des abeilles qui sont plus petites que les mouches à miel.<br />

— (15) Celle qui préside aux jeux.<br />

— 16 Phrase consacrée, lorsqu'on joue à ce jeu.<br />

— (17) Berger qui est propriétaire d'un troupeau et qui entre en condition avec lui dans une ferme.<br />

— (18) Phrase proverbiale.<br />

— (19) On est persuadé que le diable est au milieu du tourbillon, et qu'il faut le menacer pour le<br />

détourner de soi. On prétend qu'en tirant un coup de fusil dans le tourbillon, le diable est obligé de se<br />

montrer.<br />

— (20) C'est l'imitation presque littérale d'une prière populaire que l'on dit encore lorsqu'on entend<br />

gronder le tonnerre.<br />

— (21) Planassa (grande plaine), partie de la mer le long du golfe de Lion, ainsi nommée par les<br />

pêcheurs. Elle a une<br />

trentaine de lieues de largeur et les eaux y sont peu profondes.<br />

— (22) Littéralement: à queue d'âne.<br />

— (23) Imitation du proverbe: Lou magistrau porta soun barrau.<br />

— (24) Littéralement: au secours!<br />

— (25) Nom de lieu aux environs de Lansargues.<br />

— (26) Crue qui se produit à la suite d'un orage et qui finit en même temps que lui.


— (27) Littéralement: avec son aire de prostituée. Le mot de bagassa ne s'emploie guère, aujourd'hui,<br />

du moins aux environs de Montpellier, que dans la comparaison populaire: embe soun plan bagassa, et<br />

l'on a perdu le sentiment de sa véritable signification.<br />

— (28) Littéralement: mollets.<br />

— (29) On appelle ainsi le mistral.<br />

— (30) Formule de la largue populaire.<br />

— (31) Formule populaire équivalant à: Vous pouvez en faire votre deuil, du français.<br />

— (32)Nom de la personne qui construisit le châtelet cette année.<br />

— (33) Légère charpente conique couronnant le mai, et à laquelle on attache les lacs<br />

d'amour.<br />

— (34) C'est la formule consacrée.<br />

— (35) Chanson d'amour que l'on chante la nuit, sous la fenêtre d'une jeune file.<br />

— (36) Dans le langage des arbres, l'amandier signifie: Je t'aime à la folie; le chêne, Je t’aime; l'yeuse,<br />

Je deviens vieux; le frêne, Je te délaisse; le peuplier, Je t'estime. Le figuier s'adresse aux jeunes filles<br />

dont la conduite laisse à désirer.<br />

— (37-38) Célèbre joueur de hautbois et son fils, tous les deux tambourins.<br />

— (39-40) Le primadier est le chef des jeunes gens; la primadière, des jeunes filles.<br />

— (41) La langue de ce poème est celle que l'on parle à Lansargues et dans ses environs. Son<br />

orthographe est celle du sous-dialecte, de Montpellier (publications de la Société des langues<br />

romanes).<br />

MALHAN E DAUDET<br />

PER ANTOUNIN DE GLAIZE<br />

MALHAN<br />

Eh be! l'amic Daudet, sies à la galiota (1)?<br />

Toques lou pelaudou, la figa, l'agriota,<br />

En chimant quauques cops de bon vin d'espiran,<br />

Dessè que tous manits, que vese per lou plan,<br />

Souilevoun lou garat per l’autouna avenenta.<br />

L'escachoun qu'es au prat, la recolta pendenta,<br />

Qu'au grat dau vent oundeja alin fins au valat,<br />

Tout aco's tieu?<br />

MALHAN ET DAUDET<br />

(1) Este à la galiota signifie être dans un endroit délicieux, dans un endroit qui réjouit le cœur.<br />

DAUDET<br />

Aubé! ioi soui recabalat<br />

Dau traval, de l'espargna, e la bona counducha;<br />

Long tems ai trimat soul, ara siam tres en lucha;<br />

A beles paucs, dau ben avem pres lou dessus.<br />

Recolte prou de tout, deve res à degus.<br />

Tabé, dins las sasouns que la grand obra mola,<br />

Fau ma brava pauseta à l’oumbra, sus la cola;<br />

Mais, quand la foga ven, soui pas vesiat; enfin,<br />

Ai pas à me plani de moun escur destin.<br />

MALHAN<br />

Ou crese, e dire que poudriei este à tas picas,<br />

Se de moun ime enfant seguissiei las endicas:<br />

Aimave lou bestiau, aviei lou goust dau ben;<br />

Mais moun paire, vouguent de ieu faire un sabent,


Me metet en pensioun dins aquela estigança.<br />

DAUDET<br />

Acos era dau tems que servissiei la França,<br />

E que la desfourtuna agantava l’avé<br />

Que teniei de moun grand, tout moun paure de-qué!<br />

MALHAN<br />

E que ta paura maire, ô Dieu! quand m'en souvene,<br />

De plourà nioch e jour se poudiè pas destene;<br />

Cade cop que veniei, parlava que de tus.<br />

DAUDET<br />

Ou sabe, lous chagrins l'avien messa à noun plus;<br />

Mais per de que, Malhan, ioi que sies libre e mage,<br />

Venes pas te cabi dins toun viel eiritage<br />

E i'emplegà toun saupre?<br />

MALHAN<br />

Oh! nou, lou plec es pres;<br />

La vilassa me ten; n'ai de gaud per pus res;<br />

Tout ce d'ela m'es car, finques à soun senodi,<br />

Talament qu'au vilage, eh be, trove l'enodi.<br />

DAUDET<br />

Sies de plagne, s'aici, per tus, l'enodi jai;<br />

Per ieu es lou rebous, tout me triga e me plai;<br />

A cade pas que fau un souveni m'arresta.<br />

Te, ve'quela ouliveda oumbrejant nosta testa,<br />

Que me fai d'oli à flac, e dous couma lou mèu,<br />

L'ai plantada soulet, ere encara barbèu;<br />

Veses l'amellieiràs que de fruch s'espalanca?<br />

Avem lous memas ans, lou pos creire sans manca;<br />

Ma maire me l'a dich! la figueira blancau,<br />

Que sa ramada ajoun l'aparram à l’oustau<br />

E que dous cops per an lou fruch clena las cimas,<br />

Embé moun ainadet a vist as memas primas;<br />

Lou miougraniè qu'alin s'abeura de sourel,<br />

Quand moun jouine nasquet, moustret soun premiè grel.<br />

E l’oume qu'ailaval la lambrusca enmalhola,<br />

Das jouvents, dau filhan, fugent l'allegra cola,<br />

Un jour qu'à travès prats anavem flourejant,<br />

Moun Agateta, aqui, sa man sarret ma man,<br />

Per lou bèu premiè cop que ie diguere: — T'aime!<br />

O souveni d'amour, qu'es siave e dous toun baime!..<br />

Oi, tout aici m'agrada e m'encanta e sourris;<br />

Tout, tout me parla au cor, oumbrage, fonts, abrics,<br />

Avé, cabra, poudràs; Blanquet, moun fier cavàlhou,<br />

Bouchard, voulountadous, engincous e bèu, càlhou;<br />

Coumpagnouns qu'un per un ai toutes abarrits,<br />

Plantada, armàs, qu'antan bousiguere agarrit,<br />

Enaigat de susou, pan per pan, destre à destre,<br />

A l’oura d'ara sias moun soulàs, moun ben-estre!<br />

MALHAN<br />

Daudet, quau, couma tus, lion de la vila nai<br />

E que, vivent sa vida, enveja pas res mai<br />

Que la santat dau cor e lou pauset de l'ama,<br />

Ausirà pas jamai la granda vos que clama<br />

E me sona d'amount de las lindas nautous;


Es la vos d'una dona à l'estec auturous,<br />

Que per ajougne cau avedre l'ala forta;<br />

Mais, una fes adus, emb ela vous emporta<br />

Dins lous rais trelusents de l’inmourtalitat.<br />

Urous, cent cops urous, quau la pot capità!<br />

DAUDET<br />

Sies b’anat lion, amic, cercà toun amourousa;,<br />

Ieu n'ai una atabé, braveta, amistadousa;<br />

Tout lou jour nous vesem au campestre, à l’oustau;<br />

Parlant la mema lenga, avem lou mema gaud;<br />

Es sans fard, avenenta e gaia e belugueta;<br />

M'apela soun choucard, ie dise: — Ma fadeta.<br />

Se counouissera de longa: au bres, balin-balan,<br />

Dourmissiam gauta à gauta, as soms-soms de ma grand.<br />

La vese, espaurugada ou be risoulieireta,<br />

L'iver, au tour dau fioc, as dichs de la sourneta.<br />

Era de nosta cola, en estent pus grandets,<br />

Per sautourlejà, courre e faire de joquets;<br />

Dau tems de mous jours clars, ô ben urousa passa!<br />

Dansavem à l'auboi, ieu bau, ela foulassa.<br />

Pioi ven ma passa negra. Ah! paure! au régiment,<br />

La vese esfoulissada, andant au premiè reng,<br />

Toujour de ped, toujour en miech de l'arrambage,<br />

Lous iols enmaliciats, dralhant lou mourtalage,<br />

Soufrenta per lou set, soufrenta per lou caud,<br />

Per la talent, lou frech, la lassige, lou mau..<br />

L'ai vista sans pietat (orra e moustrousa guerra)<br />

Davans moun enemic à sa darrieira espera,<br />

Escarraugnant lou sòu de soun sang issallat,<br />

Racant à plena maissa, ama, vida, Allah!!!… (1)<br />

Es tournada dempioi tendreta e pietadousa,<br />

Sounjaira fossa mai, un bricou vergougnousa;<br />

Me quita pas d'un pèu e, quand siam au traval,<br />

Per me desenlagnà, roudeja autour dau tal;<br />

Parla de sous pregits; ieu, das mieunes ie parle;<br />

Tout d'un cop a partit, vai au bos, fai sant-Charle;<br />

Bresilha embé l'aucel, dins lou fres rebieiròu;<br />

Degaugna lou grilhou, l'aureta, lou rajòu;<br />

Trepa embé lous agnels, acousseja las fedas;<br />

A sauts, embé la cabra, escala rancaredas;<br />

Atissa lou Blanquet qu'aupeta per l'armàs,<br />

E Chichou, lèu après, japa que japaràs!<br />

Ven au tour dau doublis, qu'en la vesent mousqueja,<br />

Ris embé moun bouirac, emb moun boùirou canteja (2);<br />

Pioi dor ieu, à l'oumbreta, assetat tout escàs,<br />

(1). Allah, Dieu, expression rapportée d'Algérie, mais ne s'élidant pas avec la voyelle terminale du mot<br />

qui la précède ici.<br />

(2) Le bouirac est le bouvier et le boùirou, son aide, son conseil.<br />

Per fa moun goustadet, çai ven d e tras en tras,<br />

De suspresa me prend, apega sa man blanca<br />

Sus ma gorja en risent, à moun col, zou, s'embranca,<br />

Me baisa en miech dau front e, plan planet, me dis:<br />

— Sounjaire, à, toun aiseta escrieu tout ce qu'as vist!<br />

MALHAN


(1) Guillaume Ier, empereur d'Allemagne.<br />

Ta jouveta, enfantàs, galurana e simpleta,<br />

Canta prou ben, se vos, la flou, l’aucel, l’aureta;<br />

Toun cor, simplet couma ela, a set de sas cansouns;<br />

Mais, fora tus, sa vos n'a pas ges de ressouns;<br />

Au respet de la mieuna, oh! i 'a be cent pans d'aiga:<br />

Una es lou piboulàs, l’autra la bourtoulaiga;<br />

Es l’aigla en coumparança au menut paparrous,<br />

Ou lou mingre auboisset à l'orgue magestous;<br />

Ta jouve boundineja autour de la familha,<br />

La mieuna, amount, gaubis lous cants de la patria.<br />

DAUDET<br />

La patria que canta, es aquela, Malhan,<br />

Qu'ai servit per devé, de moun cor, de moun sang;<br />

Que ioi, de moun traval, amounede e nourrisse,<br />

Qu’as mes, per sa grandou, toun saupre à soun service.<br />

Galesa, pioi roumana, ara franca de noum,<br />

Toutes lous tems aussada en gloria, engin, renoum;<br />

Cencha de mounts, de mars e de regas bistortas,<br />

Regas qu'un souldatàs (1), emb sas orras cavortas,<br />

Ven d’escrafà dau ped, segound soun bon plasé.<br />

Emb ma fada, de cops, quand es prou de lesé,<br />

Arriva que parlam d'aquelas grandas causas.<br />

Fins ara, sus aco, mas boucas eroun clausas,<br />

Se van droubi per tus; escouta ce que dis:<br />

— Païsan, ta patria es en premiè toun nis,<br />

Ounte an viscut tous viels, ounte vieuràs ta vida,<br />

Ounte t'entarraran, ta jouncha un cop finida,<br />

Ounte, en penequejant, lous tiens t'an abarrit;,<br />

An ounte as mai que mai trimat, plourat, soufrit;<br />

Es l’oustalada, enfants, fraires, parents, familha,<br />

Lou vesinat, l'endrech; d'aqui pioi, s'escampilha<br />

De masada en masada, en vilage, en cieutat:<br />

Tal, sus l'aiga un roudet, per la peira encitat,<br />

Agandis, oundejant, à las pus liontas ribas;<br />

Antan ela espandis sas mouventas abrivas;<br />

Afranquis, flume, mount, trempassa countinent,<br />

Se crousant en camin, per faire qu'un tenent<br />

Emb las de la nacionn, de mena (1) e d'encountrada (2),<br />

Couma lou fieu taissut de rasal e telada<br />

Alonga, alonga mai, ven d'encambà las mars;<br />

Dins sous malhuns sarrats, sans mola e sans escarts,<br />

Enliassa, à beles paucs, auceans, illas, terra,<br />

Escanant tout au cop paurieira, posta, guerra!<br />

Ta patria, Crestian, eh be, per t'en fini,<br />

Es la terra, es la mar, es lou Ciel, l’enfinit....<br />

Aqui te q uite, anem, mous drolles desataloun;<br />

Las fedas, en belant, de la costa davaloun;<br />

Es l’oura d'estremà: venes? Te couvidam.<br />

(1-2) Mena équivaut ici à race. Encountrada a le sens de grande contrée, continent, partie du monde.


MALHAN<br />

Grameois, perdriei tems; per tant qu'ai fach, avans<br />

Vole escalà lou sup ounte nisa la gloria.......<br />

DAUDET<br />

E ieu, à moun passet, m'entorne dor ma boria,<br />

Ounte ai, per moun traval, lou pan de cadejour,<br />

Ount jai la libertat, e la pas, e l'amour!.....<br />

MALHAN<br />

Merci, je perdrais mon temps, au point où j'en suis arrivé, je veux gravir le sommet où niche la<br />

gloire!.…<br />

DAUDET<br />

Et moi, à petit pas, je retourne vers la ferme, où j'ai, par mon travail, le pain de chaque jour, où gît la<br />

liberté, et la paix et l'amour!....<br />

(1) Pays bas ou terre basse, plaines du littoral.<br />

(2) Flabuta, espèce de flûte à bec.<br />

PAULET E GOURGAS<br />

PER MADAMA E MOUSSU GASTON BAZILLE<br />

PAULET<br />

Urous quau pot te veire, encara mai t'entendre!<br />

Maugrat qu'en païs bas t'aguem pas vist decendre (1)<br />

Dempioi bon brieu, ai pas dessoublidat lous souns<br />

De ta flabuta, qu'au pertout tant de ressouns. (2)<br />

T'ai counegut de lion, e, devirant ma via,<br />

Me vejaici.<br />

GOURGAS<br />

Paulet, ta vista derevilha<br />

En ieu de jours ben bèus. Te sies ensouvengut<br />

De l’amistat d'antan: siegues lou benvengut.<br />

Sies las; belèu as fam: la routa cura, alassa.<br />

T'oufrisse linda font, girba fresqueta, oumbrassa;<br />

Dins ma saqueta, aqui, i’a 'na bresca de mèu,<br />

De castagnous roussels, de calhat en faissela;<br />

De lach, dous e tebés, roumplirem l'escudela.<br />

Ensemble ou fretarem; end aco, pioi, lèu-lèu, (1)<br />

Cantaràs un nadau ou quauqua cansouneta.<br />

Ieu t'acoumpagnarai emb ma prima sibleta.<br />

A moun tour, te dirai moun pus darriè moucel.<br />

Mais, de qu’as? Sies mourrut. I'a quicom de nouvel?<br />

PAULET<br />

I'a que sies ben urous se, dins aquesta passa,<br />

Tout jasent à l’oumbreta, engaubies de cansouns,<br />

E pos escoutà plòure en toutas las sasouns, (2)<br />

Quand loua Terra-bassencs (3), embé l’arpa e la biassa, (4)<br />

Van de mas en masada, en quista d'un traval<br />

Que mai que mai fugis; pioi, au bout de l'annada


(1) Fretà, manger jusqu'à la dernière miette.<br />

(2) Celui qui a de tout en abondance. On dit de lui: Pot escoutà plòure (Il peut écouter pleuvoir).<br />

(3) Voici le nom des habitants du Languedoc à mesure qu'on s'élève dans le nord: Terra-bassens, ceux<br />

du littoral jusqu'aux premières collines; Coustoulins, ceux de celles-ci; Coutaus ou Raiòus, ceux de la<br />

chaine des Cévennes qui succède, jusqu'aux gens des hautes Cévennes, qui sont appelés Gavachs ou<br />

Gavots.<br />

(4) Pioche à trois branches; elle se distingue du bigot, qui n'en a que deux.<br />

Passada dins l’anciè, lous trafis, lou rambal,<br />

Atroboun à l'oustau l’orra fam assetada;<br />

Dau tems que lous pastrous, à touta oura dau jour,<br />

Trevàs en auboissant ou pantaisant d'amour.<br />

GOURGAS<br />

Es vrai, moun car Paulet, lou bonur me capigna: (2)<br />

Ai pas jamai agut ni prat, ni camp, ni vigna;<br />

Mais moun paire ounourat, en estent goujadet, (3)<br />

Me dounet per estrena un poulit agnelet,<br />

E, desempioi soun crei, gramecis à mas penas,<br />

Es devengut troupel. Dins toutas las Cevenas,<br />

De tant ben enressat n'atrouvariès pas ges. (4)<br />

Per Nadau, moun perrot aguet lou premiè pres. (5)<br />

Se batoun de moun lach; lou curalhat, en fleira, (6)<br />

S'enleva. Tabé, fier de tant bela verquiera,<br />

M'en crese autant qu'un rei, e deve res qu'à Dieu.<br />

(2) Capignà, donner de petites tapes sur la tête.<br />

(3) Jeune apprenti berger.<br />

(4) De même venue, de même âge, de même taille.<br />

(5) A la messe de minuit, les bergers du village portaient un agneau cornu, enrubanné; à l'élévation, le<br />

porteur lui pinçait la queue pour le faire bèler. Nécessairement, celui qui avait porté le plus bel agneau<br />

à l'ordre du jour.<br />

(6) Chaque année, les bergers choisissent dans le troupeau tout ce qui n'est pas sain ou trop vieux, le<br />

vendent et le remplacent par le croit.<br />

PAULET<br />

Amai ieu, tems passat, aviei d'aqueles garris. (3)<br />

Moun dequé pairolau, tout agramenassit,<br />

Espigava d'espèuta, ou d'ordi afatrassit;<br />

Toutes lous vents, chaca an, per el eroun countraris:<br />

Me ie mete de ped, e, roumpe que roumpràs,<br />

Talament que, ben lèu, dedins aquel armàs,<br />

Veguere amadurà la roussela clareta,<br />

E lou carnut cinsaut, lou mourrastel flourat, (4)<br />

E l’ouliva amarganta e l'amella douceta;<br />

E creisse l'aubre d'or, de ramels assourat. (5)<br />

Adounc, fier e galoi, dins moun bel eiritage,<br />

Viviei couma un segnou, res me fasiè soufrage.<br />

Mais ioi, quante disfeci! Ou creiràs-ti, Gourgàs?<br />

Eh be! ieu, qu'aime tant moun bres, moun clau, mas peiras; (6)<br />

Ieu, que per moun endrech auriei courrit carrieiras, (7)<br />

(3) Avé de garris, faire acte d'indépendance, d'insubordination, ou de fantaisie.<br />

(4) Sortes de raisins.<br />

(5) Le mûrier.<br />

(6) Propriété bâtie.<br />

(7) Fou à courir les rues.


M'ou cau quità per vieure. Ounte vau? Sabe pas.<br />

M'arrestarai, belèu, sus la riba de Lergue;<br />

Atrouvarai-ti loga en plana ou per soubergue? (3)<br />

Caurà-ti jusqu'en Auda, afourtunat païs,<br />

Gandi? Veja, anarai, se toujour me fugis,<br />

Finques au Tec roumpent, enfin ounte se manja,<br />

Emb ia flambesa au front, mendiant de granja en granja.<br />

Aco sariè pas res; quau dis que tras la mar<br />

Me caurà pas un jour rabalà mas pesadas,<br />

Servi'n couloun timbrous, e fini mas annadas<br />

Emb l'Arabe pudent, vermenous e flaugnard?<br />

GOURGAS<br />

De que contes aqui, moun brave camarada?<br />

De bon que vos quità toun oustau, ta clausada?<br />

De que se passa dounc dins voste païs bas?<br />

La terra dis de noun? Es que dins, vostes prats,<br />

(3) Soubergue, dans les environs de Béziers, équivaut à garique.<br />

(4) Grange, dans la même contrée, équivaut à mas.<br />

(1) Trèfle incarnat.<br />

(2) Espèce de juron.<br />

Grelhoun pus, au jour d’ioi, ni flouses ni pastura?<br />

L'espercet, la farroucha, en sòus craus e sablouns, (1)<br />

Largoun pus au sourel sous roujasses poumpouns?<br />

Dau blat, en terra tufa, imouissa ou caurilhada,<br />

Aiçai, quand ven Sant-Jan, dins l’inmensa emplanada,<br />

Se vei pus oundejà lou grèus espigaus d'or?<br />

L’ouliviè, de que fai? L'amouriè sariè mort?<br />

E lou grand vignarés que de vostas coustieiras<br />

Davalava, per tems, esperloungant sas tieiras,<br />

Negrejant de vertut, finques en ailalin,<br />

Dounant vanc, chaca annada, à de rajòus de vin?<br />

Tout aqueles tresors que, de maire Natura,<br />

Nautres, paures coutaus, nous creiriam sous vesiats,<br />

Se nou'n bailava qu'un, lous avès degalhats,<br />

PAULET<br />

Gourgàs, tout ce que, ioi, noste païs endura,<br />

Ven de pus naut; diriàs que lous set flèus de Dieu,<br />

Sus nautres, d'en amount, apoudesoun sa clava!...<br />

Oh! quanta malurança assugam, sarna-bieu!!... (2)<br />

L'ouliviè, dau mau negre, aladounc rabalava;<br />

Arriva un ivernàs, e lou gèu lou brausis.<br />

La grella lou reprend, aderet escabassa<br />

Lou sagatun, qu'encara à pena se bournis. (2)<br />

Lous magnans, à las tres, dins lou jas, fan fouassa. (3)<br />

Per repèut, chaca estieu, de milharses de grils<br />

Coussissoun fiolha, fruch, gran, bourres e bourrils,<br />

Enfin tout ce qu'an pas taurrit las grands secadas...<br />

E las vignas, Gourgàs, las vignas soun rafladas<br />

Per un man que degus, en lioc, sap pas lou founs.<br />

Davans tant de malurs, cau-ti coufi sus plaça, (4)<br />

Couma fossa de viels, — que n'an pas fach soun proun, —<br />

Ou fugi lion dau nis e vieure de sa brassa?<br />

Ai vougut vieure, ieu! Ai-ti ben fach? Belèu;


L'aveni lou dirà; mais, per ioi, es ben grèu.<br />

Entremens, l'oustalada a quitat lou vilage:<br />

Un es bouirat aiçai; l'autre es, alai, message.<br />

Ma drolla, tant fricauda e lou gal de l'oustau,<br />

De mainageira qu'era, es ara serviciau;<br />

Ma mouliè vieu de plour, e ieu soui vaganari...<br />

(2) L’olivier, avant de pousser ses boutons à fruit, prend une teinte foncée, ce qui n'a pas lieu quand il<br />

ne doit pas fleurir.<br />

(3) On fait fouassa, lorsqu'à la fin d'une journée de dépiquage on n'a pas achevé de fouler toute l'airée,<br />

et, au figuré, quand on ne réussit pas dans une entreprise.<br />

(4) Conservé dans de l'alcool, le vinaigre.<br />

(5) Mainagè, propriétaire qui vit dans sa propriété et de ses revenus.<br />

GOURGAS<br />

Toun sort es pietadous, dise pas l'encountrari,<br />

Mais, cau pas per aco se tant demaucourà:<br />

Es trop proumte aquel mau per que posque durà:<br />

— I'a pas bon tems, se dis, ni marrit que noun tornou; —<br />

Ou sabes couma ieu, lous ancians nous lou cornoun.<br />

Oi, lou bèu tornara, n'en siegues pas susprés;<br />

Aussa la testa e crei au que te l'aproumés.<br />

Adounc, urous sarà quau, ioi, lou sort, esprova;<br />

Raviscoulat, galoi, ben lèu agoustaràs<br />

Lou pres de la bounancia après un aurajàs.<br />

Ce que t'en dise, aqui, t'en vau dounà la prova.<br />

Es un sounge qu'ai fach; amai i'ague bon brieu,<br />

Toujour lou vese aqui; dins ma memoria vieu<br />

Couma s'era d'anioch. Counouissent pas sa toca,<br />

N'aviei pas quincat res; esperave qu'un tems<br />

Esclaiririè, belèu, lou misteri que ten.<br />

Ara ie vese clar; escouta, te pertoca:<br />

L'annada que paissave en l’Aigal, una nioch, (1)<br />

A las Ensegnas era aqui dor mieja-nioch,<br />

(1) Haute montagne des Cévennes, où l'Hérault prend sa source.<br />

Me derevelhe e done un cop d'iol dins lou caste.<br />

Vesent, au biai das chins, que i’a res que maubaste,<br />

M'alaire dins la bressa e n'estudie lou ciel: (2)<br />

Libre toujour doubert, ount las letras soun d'astres;<br />

Ensegnadou sublime e toujour pus nouvel,<br />

Ounte saboun legi lous gardians e lous pastres. (3)<br />

Seguissiei lou Grand-Carri e soun lusent Roudan,<br />

L'ardit Peperelet, qu'adrechament envia,<br />

Tancat ras dau Biolàs, atalat en cabilha, (4)<br />

La coubla de Banuts, que tira en crouchetant.<br />

Dins aquela entremiecha, alai, en tramountana,<br />

Quicom d'espetaclous atira mous regards,<br />

Un quicom, qu'en vesent me galina las cars:<br />

De perdelai lou Rose e de l'inmensa plana,<br />

Que finques en Aubera acoustieira la mar,<br />

Ben au suc dau Ventous, set asclas s'abadalhoun,<br />

Set maissassas d'enfer que dins l'aire dardalhoun,<br />

Caduna un lamp de fum, mau-san, moufle, bouchard,<br />

Pudissent la saupetra e lou soufre e lou sistre.<br />

Pioi, aquel nivoulàs, que buta un vent sinistre,<br />

Acata lou celeste, e la costa, e lou plan;


(2) Lit de camp des bergers, en forme de hutte, monté sur deux roues et qu'on déplace à volonté.<br />

(3) Bergers de taureaux et de chevaux sauvages.<br />

* {embé la bousa. Alor sa maire lou prend, lou mes dins una gauda plena d'aiga, pioi lou lava ben,<br />

l'assuga ben, ie lava sa fata, e quand saguet seca, ie carga sa camiseta, sas bralhetas, soun pichot<br />

gourdoun, soun boumbetet, e lou gal cantet e la sourneta feniguet!}<br />

(4) Un attelage se compose d'un limouniè (dans le brancard), d'un cabiliè (en avant des bras), d'un<br />

courdiè (en avant de celui-ci), et de l'amalhaire, qui tire devant.<br />

Per ensegnà l'endrech as Mages, as pastrous,<br />

Ounte es nascut lou Dieu qu'espera un jour la crous.<br />

E dins aquel dardai, causa meravilhousa,<br />

Sus lou gour abaucat, una bestial moustrousa<br />

Nada de tout soun vanc; de soun pitre, adralhat<br />

Devès aiçai, regiscla un espoussun de gruma;<br />

De sas alas, que mòu emb un grand baralhat,<br />

Cava l’oun ada, que tras en tras revouluma,<br />

Couma quand l'acoutis un cop de magistrau;<br />

De sa narra salis, couma d'un grand fougau,<br />

De vapous e de fum à belas, alenadas<br />

Que fugissoun de tras e van, abelugadas,<br />

S'avali dins lou lion. Mais aici lou pus fort:<br />

Dessus soun esquinassa, e sans crentà la mort,<br />

Se devista un crestian, courounat de bissanas,<br />

Se vei pus res en lioc qu'una prima lusida,,<br />

Mais ailalin, lion-lion, au fin founs dau couchant:<br />

Es l'amiga dau pastre, es l'estela espoumpida,<br />

Lou bèu lum de l'espera, es enfin lou lugar! (1)<br />

Entremens, tout ce que coungrelha nosta terra,<br />

Dins l'escur, à l'alen dau vent qu'empestifera,<br />

Se passis, se tresseca e mouris. Per asard,<br />

Lou crestian resta en drech, mais la fam l'acousseja, (2)<br />

E tout ce qu'a pas d'or, de fòure e d'escoudut, (3)<br />

S'enfugis de tout caire, espouilat, sourne e mut.<br />

Pamens l'estelhounet, mai vai, doumai clareja;<br />

Pau à pau, dor aiçai, a gagnat de camin,<br />

Soun roundage agroussis; talament qu'à la fin,<br />

Un dardai ven boumbi sus la mar siava e plana,<br />

Couma lou que largava, antan, sus la cabana,<br />

(1) Vénus. On appelle aussi de ce nom toute étoile qui brille plus que les autres et, par extension, les<br />

phares: lou lugar d’Aiga morta, dau Grau, etc.<br />

(2) On appelle crestian toute l'espèce humaine, sans distinction de religion; on dit bestia ou crestian<br />

(homme ou bête).<br />

(3) Fòure, fourrage. Escoudut, grain sorti de la balle.<br />

(1*) Le conte de Peperelet doit son origine, d'après M. Gaston Pâris, à une petite étoile très brillante<br />

qui se trouve tout près de la seconde de la Grande Ourse.<br />

Il existe à Lansargues sous la forme suivante:<br />

I’aviè 'na fes una femna que faguet un enfant tant pichotet, pichotet, pichotet, qu'era pas pus gros<br />

qu'una fura: es per aco que lou bategeroun Peperelet. Mais, amai seguesse pichot, era talament brave<br />

que sa maire n'era baucha. Tabé quand s'en anet soul, per la paga qu'era tant brave, d'un essuga-man ie<br />

faguet un parel de bralhetas, una camisa, un pichot bourdou, un boumbetet e una bouneteta; emb aco<br />

semblava un omenet.<br />

Un jour que sa maire aviè cuioch, ie fai:<br />

— Peperelet, vai-t’en pourtà 'quela fouasseta à toun paire e à tous fraires que buscalhoun<br />

dins lou bos. E Peperelet, qu'era de bona coumanda:<br />

— Oui, s'on dis, maire, ie van.


Prend la fouasseta jouta soun bras e, dran-dran, s'en vai couma un omenet. En camin vei veni lou loup;<br />

pecaire, se dona pòu e vai se rescondre jout un caulet. Lou loup passet sans lou veire, mais la vaca que<br />

trepava per aqui manget lou caulet amai lou paure Peperelet.<br />

Après un brieu, sa maire, que lou vei pas veni, vai defora en lou sout nant: res ie respond. A la fin qu'a<br />

proun sounat:<br />

— Peperelet! Peperelet! ausis una vosseta que ie respond:<br />

— Soui aici, maire.<br />

— Ounte?<br />

— Dins lou ventre de la vaca.<br />

La maire mena la vaca à la jassa, e quand caguet, caguet Peperele<br />

Que mena la bestiassa embé triblas cassanas,<br />

E, moustrant sa courouna e l'astre, que seguis:<br />

— Vostes maus, sembla dire, emb aiço soun finits.<br />

E tout dor la soulieira en granda fe s'acoussa. (3)<br />

L'auba, dins aquel tems, se leva e pioi espoussa<br />

Soun velet ichagat d'aigage fresquieirous.<br />

Adounc, dau regoulum, per un fach miraclous,<br />

Se coungrelha un grand flume alargant à rasetas<br />

Una aiga linda e pioi, per rieus e rigouletas,<br />

Engorga lou terren, dau set abadalhat.<br />

Tant-lèu, tout se coubris de verdura e de flouses.<br />

L'aucelou, dins l'aubran, coumença à bresilhà,<br />

E lous travalhadous, per lou campestre, urouses,<br />

Reprenoun sous trabals, sous cants, sous cacalàs.<br />

(3) Partie de la plage située entre la première rangée des dunes et les flots.<br />

(1) Abreuver à satiété.<br />

(2) Homme apte à tous les emplois.<br />

(3) Peau d'agneau.<br />

(4) Brebis qui nourrissent leurs agneaux.<br />

(5) Serment d'amitié; prêt à tous les sacrifices.<br />

Aqui ce qu'ai sounjat, lous dous iols alandats.<br />

Entremens qu'en per-tout moun pantai se coumpligue,<br />

Ai besoun d'un soubriè; quau vos ti que causigue? (2)<br />

Aqui moun bastoun d'euse, un saquet de peloun; (3)<br />

D'agneladas prendràs un pichot escachoun, (4)<br />

End aco, per campestre, anaràs menà paisse:<br />

A servir un amic vese pas res qu'abaisse.<br />

PAULET<br />

Pioi qu'es de toun sicat, counsente de bon cor;<br />

Das pastres, emb ourguiol, cargarai la lieureia;<br />

E tant que jout moun front cauprà 'na sana ideia,<br />

De ieu à tus sarai à la vida, à la mort! (5)<br />

LA FADA SERANELA (1)<br />

Après una longa escourida,<br />

Sus lous sères de Valhauquès (2);<br />

Me mete à legi l'Atlantida (3),<br />

'Que l’obra masclassa espoumpida,<br />

Dou grand felibre Vicairès.


Dau vilajou la campaneta,<br />

Venié de souna l'angelùs,<br />

E lou ressoun de sa voceta,<br />

Tremoulejanta et belugueta,<br />

Dins lous avaus s'èroun (4) perdùs.<br />

En cèl, en terra, tout chaumava:<br />

La tremoutana en païs d'aut,<br />

Lou labèch sus l'oundada (5) blava,<br />

Aucèl au nis, bestiola en cava,<br />

E lous trimaires à l’oustau.<br />

Quand tout d'un cop subre ma testa,<br />

S'espandis una grand negrou,<br />

Avant-coureira de tempesta,<br />

Que virouleja e piei s'arresta,<br />

Sus l’acrin dau pioch de Sant Loup (6).<br />

A! s'en deçai dau cementeri,<br />

Dèves à quauqu'urous vivent,<br />

Faire lusi lou grand mistèri;<br />

Boudieu! que moun cor (10) sariè lèri,<br />

S'acos era ieu, beu doulmen!<br />

Couma disièi aco, la lausa<br />

Ajèt un pichot fernimen,<br />

De sa foundamenta à la bausa;<br />

L'ourage n'èra-ti l'encausa?<br />

Creseguère un avertiment.<br />

Atenciounat et lenga muda<br />

Espère un bon brieu, mai en van;<br />

N'ausisse de ma rescounduda<br />

Que la bramadissa soumuda<br />

Dau vent, contra-ela se dourdan.<br />

Mai, de qu'en dedins ieu se passa?<br />

Nous iols se cugoun mort-à-fort!<br />

Dins ma tèsta l'ime s'estrassa<br />

Es lou som pautù que m'enliassa<br />

Ou be la brassa de la mort?<br />

Lou tron rampèla, un iau trauca;<br />

E zou! la ploja toumba à ranc,<br />

Lou vent faï ausi sa vos rauca,<br />

Jous soun vanc moun abric s'abauca,<br />

Vese una cala alai-davans.<br />

A coussa; es la peïra levada,<br />

Aqui (7) lou milhou das souplots,<br />

A! gramecis! lausa sacrada<br />

Sembla be que t’an agrejada<br />

Exprès per ieu, sus tous sieis plots.<br />

Tout en m'aparan de l'aurage (9)<br />

Serai secrèt, res nous entend<br />

Diga quicomet: quant as d'aje?<br />

Quau èra lou grand persounaje<br />

Qu'as couvà l’ossa tant de tems?


Tus que de toun sèti regardes<br />

Passa lous ans sans t'en senti;<br />

Que dins lou passa tant retardes,<br />

Seriè per lous morts, soul, que gardes<br />

Ço qu’as aprés, vis e senti?<br />

L'estabanida<br />

Acouïda, sus lou sou, dins la rusta demora<br />

Das paures trepassas, omes d'elei, d'antan,<br />

N'ause (12) res, vese res, d'en dedins, dou defora<br />

En ieu, en fora ieu, lou bouïde, lou neant.<br />

Siei pus d’aqueste mounde e de l'autre pa'ncara;<br />

Passa misteriousa ount l'immourtalità<br />

Faï revieudà lous forts, ounte l'oubli entarra<br />

Lou troupèl das menuts, per toujour, sans pietà.<br />

Quant de tems me tenguèt aquela estabanida?<br />

Aco m'es ben celà, save, segurament,<br />

Qu'à la longa aï fini per faïre una lusida,<br />

Coum' un brasàs cendrous alenà per lou vent.<br />

Save que plan-planet, l’ausida et pioi la vista;<br />

Toutes mous sens, enfin, se soun derevehiàs,<br />

E que dins un pantaïs ou'na vesioun requista,<br />

Lous veles dau passà se soun escaboulhas.<br />

Couma lou passajé que dor de tout soun ime,<br />

De nioch, au ras d'un vabre, e qu'en se graumihan,<br />

Barunla au foun de roule, en premiè perd l'escrime,<br />

Maï pau-à-pau reven, e, mougù, cahinran.<br />

Sous grands iols alandas, vei ço que l’envirouna<br />

Rebatre sous countours negres sus l'escurou,<br />

Couma lou passajè, dau foun de ma dandrouna,<br />

Ausisse e vese l’orre, en sa fièra grandou.<br />

Lou deluje<br />

De nivous suspendùs, empilounàs, einormes,<br />

Dou pus aut de l'airat abrouscoun dor lou sou<br />

Sous corses fouquejàs, retoussis descounformes,<br />

Franjas d'un blanc senistres, antau que draps de dòu.<br />

Ausisse dins lou lion, de bruts espetaclouses:<br />

En premiè, de countugna, es un grèu soun de mar,<br />

Quand a decabestà e qu'en d’alans furiouses,<br />

Bousiga la soulièira e ten tout à l'escar.<br />

Per entre-mieja pioi, couma trous que rabaloun,<br />

Seguls d'espets (13), de tust de roca contra roc:<br />

Diriàs, à bellas fes, de mounts que s'endavaloun,<br />

E qu'en s'espoutissent, ensem tiroun de fioc.<br />

Coura aquel bousinàs s'enforça, qouro mola (14).<br />

Adounc estoumacat, ause en de fernimens,


Esclafi d'ailalin, fins au ped de la cola,<br />

De sibladas, de brams, d'idouls e d'ourlamens,<br />

Que jamai s'es ausi dins lou daut ni la baissa;<br />

Mai, ço pus esfraious, alai dins lou Pounent,<br />

Tout d’un cop, un voulcan abadalhan sa maïssa,<br />

Raca de fum, de fioc emb'un rampelament<br />

Que dessabranlo l'aire. Un ruste terra-trema<br />

Estrementis lou sou, chaca fes que pren vanc<br />

Mai que mai trai de fum, cendreja; mai quand crèma,<br />

Quand a travès de l'escur, alàrga un rouge lamp,<br />

Lamp que sai ven leca lous nivous negriouses,<br />

Que dura soulament lou teras de faïre un aï:<br />

Tout se tencho aladounc de rebats rouginouses,<br />

Couma lou sang espes (15), e dins lou breu dardaî,<br />

Prounte coma l'iau, davans ieu se debana<br />

Lou pus majic tablèu qu'ome vieu n'aje vist.<br />

Dins un paîs estranje, ount un flume s'afana.<br />

Oumbreja tout de lou de soun cours de galis,<br />

Per d'aubres siclairens et de nauta erbajiva<br />

Que jamaï fantasié n'a pouscut dessina<br />

Un troupel d'animaus, en grand esglach, s'abriva<br />

Tal que l'ours de cafouma au pèu rebessina,<br />

Mastoudounte moustruous, cèrvis a grand banaje;<br />

Sernassas, crocodils esfraiouses, luzèrs,<br />

Rinoceròs sournut, lioun au rous pelaje<br />

E l'alegra gazèla, amiga dau desert.<br />

Mais, de qu'es a despart, aquel garut bèstiari?<br />

Que camina soulet en regagnan de dens;<br />

A loga de marchà de pautas, au countrari,<br />

Se tent drech couma un rouve, e, tancat sus sous rens,<br />

Anda, armà dun long pau, fièr e la tèsta alèrta,<br />

Tèsta qu'una crinièira envouta et porta esfraï,<br />

De tout ço qu'es membrat, à l'ome prou reverta,<br />

Mais n'a dos fes l'ausada et pas d'afouns lou biai:<br />

Espanlut, jes de front, embe d’iols lancejaires,<br />

Tant lusens, tant saras que diriàs n'en fa qu'un<br />

Corp pelu, pas de vos, mais de cris rauquejaïres,<br />

Tout espira en el força, e couraje e ferun (17).<br />

E tout aco s'acoussa, aiçai devès l'autura,<br />

Tout fuch tant qu'a d'alen, mari mela à l’asard,<br />

Sus un sòu que s'abisse, e coubris d'a mesura,<br />

En rebihan sous flots, la Mar, la granda Mar!<br />

Lou lam s'es damoussat, aquil l'escuresina,<br />

Pus forta que jamaï, car mous iols i eroun fachs,<br />

Toujour, au vai e ven de la lusou clarina<br />

Que manda lou voulcan, repoujan sous escrachs.<br />

Toujour à l'endavan de mountagnas que brandoun;<br />

La terra que tremola; alin, à l'ourisoun


La Mar descadenada e d'animaus que landoun.<br />

Per repèu ara plòu à flac... Maladicioun!<br />

Malur! Malur! Mai vai, mai lou brounsin se sara,<br />

Lou mount qu'ai jouta ieu, lou sente se quichà;<br />

Antan qu'as primiès temps i aurà que l’ounda amara?<br />

Tout au fins-founs das gourgs vai-ti s'escrouquicha (10)?<br />

La lusida<br />

I a'n rodou dins lou cèl, de per daut la Serana<br />

Ounte de jour, de nioch, en tems enmarinà,<br />

Pescadous, païsans, d'en gariga, d'en plana,<br />

Febrouses, malautis, qu'aquel tems enganà<br />

An lou regard trainà.<br />

Tant que lou nivou escala en bancadas fumousas,<br />

Escampan en camin sas raissas et groupàs;<br />

Tant que lou daut reçap dins sas coumbas aurousas,<br />

Lous jasses siaus, mouvents, tourassas aurajousas<br />

Que goumis lou debàs;<br />

Tant que lou miejournau, imouisse et frejas, bousca,<br />

Avenà per l'escur, dins l'escur s'abrivan;<br />

Lou pescaïre es carpin, lou paure febrous sousca;<br />

E lou travailhadou, la cara trista et fousca,<br />

Tout lou tems vaï cranan.<br />

Mai tant lèu que d'aqui se mostra una esclairida,<br />

Sariè soulamenet coum’un fieusset d'argent,<br />

Tout ço qu'aima lou bèu, lou clar, lou san, la vida,<br />

Sent moure en el l'espèr, car d'ara se decida<br />

La virada dau tems.<br />

Espaurugat, doulen (18) davant pariè basacle<br />

Despar ieu, à l'arriès trase un triste regard.<br />

Oh bou dieu! de qu'ai vist? quante dous espetacle,<br />

Lou daut es tout douver, e pioi, aï! aï! miracle!<br />

Au mitan dou grand arc.<br />

Aparicioun de la Fada<br />

Trelusen que, dau Cer fin qu'en Tramountanèla,<br />

Dralha (19) sa cintra, tal qu'un porgue celestiau,<br />

S'auboura, pau à pau la bela doumaisèla,<br />

La Fada dau païs, la casta Seranela<br />

Que treva en aqui daut.<br />

Drecha sus l'acrinal, tout escàs floureteja<br />

La roca negriousa en sus penons rosàs,<br />

Sa rauba à largue ples lusis et belugueja<br />

Couma la nèu das piocs que la rispa carreja,<br />

E coubris de counglàs.<br />

Cencha d'une taliola à colou cremesina,<br />

Las franjas flouquejan, au grat dau ventoulet,<br />

De sa centura linja autan que l’amarina


Ven rebatre, oundejan dins l'espaça clarina (20)<br />

Las tenchas de l’arquet.<br />

Sa courouna es un fioc que crema dins l’autura;<br />

Sous iols soun de carbouns, d'uiaus escalugans<br />

Sa cara un dous trelùs e sa cabeladura,<br />

Regoulan à l'arriès, blavejan de negrura,<br />

De jaiet flamejan.<br />

Dins sas bonas, sa vos es un cant de serèna,<br />

Mai quant i-a de danjé, brousis couma un claroun.<br />

Ou sap tout; dau crestian devigna ount jai sa pena;<br />

Sap d'ounte ven lou fioc, d'ount lou rajou s'avena,<br />

E legis ailamount.<br />

A lou gaubi de reina; estec de soubeirana;<br />

Ausarda, a belas fes, per para soun goubèr;<br />

Lou pecat la fujis: jamai lou mau l'angana;<br />

A las vertus de l’anjou e de la raça umana<br />

Es l’ourguiol et l'espèr!<br />

Tant lèu que dou pinacle; alin, a pouscut veire<br />

Lou bourroul de sa terrà, en rebutant soun pèu<br />

D'un tal de man, vira e jesta e cara à reire,<br />

Clama d’un soun de vos couma se pot pas creire:<br />

Où! Magistrau! a ieu!!<br />

La veiha d'una magistralada.<br />

Dins las coumbas dau causse negre,<br />

Ounte le jorn trepeja, alegre,<br />

Lou Tarn roundina et l'Aveirou se tord (21).<br />

Sus sa jassina de nivasses,<br />

Embourounas, lusens, grevasses,<br />

Lou Magistrau à l’oura d'ara dor.<br />

Aqui, dempioi que mounde es mounde,<br />

Lou sadoulas trova en abounde<br />

Tout ço que cau per boudoufla soun lèu;<br />

Y a de caravens, un abime,<br />

De baumassas, d'avens sans ime,<br />

De founs sans founs et d'amountels de nèu.<br />

Et pioi couris dins las talhadas<br />

Lous fums de la aigas feradas,<br />

D'envapouras de soufre et d'arjen-vieu,<br />

Et lou goulut de tout acò s'avena,<br />

Meme de cops monta en Cevena<br />

Ounte jamai n'a pas spiga l'estieu.<br />

Per ne poumpa las alenadas,<br />

De las eternas jalibradas<br />

Que chaca iver sai ven recalivà<br />

Alor, malus! Lou grand rouncaire<br />

De baraliè deven jalaîre,<br />

Ce pus mari que posque n'arivà.<br />

Dort be, mais avant de se jaïre,<br />

Couma lou gapou guerejaire


Que davant nioch a vist per lou trescamp,<br />

L'enemi saique toca à toca,<br />

S'es mes dins ço que lou pertoca<br />

A la parada, e meme per avant,<br />

La veilha, saique, daut sous baris<br />

Per n'en gueta sous aversaris<br />

N'a be lusi cauque contra sourel<br />

Couma qu'en sie, la nioch venguda,<br />

En ausen la bourjou soumuda<br />

Qu'escala entre qu'au tremount lou sourel<br />

Bouchar a fa la vira passa<br />

Sans bruch, tout se mou, la tourassa<br />

Quilha, empilouna, aroundis sous mouchouns,<br />

Cadun tant naut qu'una coulina,<br />

Dessina à chaca remoulina,<br />

De mounstres frust que n'an pas cap de noun.<br />

Dins lous vaus la greva parada,<br />

Poumpa de laiga encalourada<br />

Lous blanquinous et laujès fumeirous,<br />

E las neblassas pissourlairas,<br />

Maufatousas et coungriairas<br />

De malautiès, de revas e de dous.<br />

Lous courdouns negres dins las coumbas,<br />

Agantas et tords per la troumbas<br />

En vira-vòu, fins qu'amount, dins lou cel<br />

Van s'espandi, negre apanaje,<br />

Sinne de malicious auraje,<br />

De la mountagna esfraious subre-cèl.<br />

Et tout aqueles maufarasses,<br />

Anounciatous de michans classes,<br />

Lecoun, fringoun, fretoun en s'engaubian,<br />

Lous filons dau metal estaire;<br />

S'emprugnoun d'avapous qu'en l'aire<br />

Per lous bourliens, descapoun, oundejan.<br />

D'aiga-fort que lou soufre (23) espira,<br />

Dau vitriol que la lona tira<br />

De foun de terra, e pioi das boulidous,<br />

Salis en pichotas grumetas:<br />

Pouisoun, ounte las bestioletas<br />

Cassoun la mort ras das abeuradous,<br />

Dau bachas fousque et melanconi,<br />

Pescoun lou sistre et lou petroli<br />

Las troumbas mema an trouva lou sicret<br />

D'ana per gauchi sous iauses<br />

A traves las asclas daus causes<br />

Jusqu'en enfer acipà lou fioc-gré<br />

Grela grespa, jalibre gresa<br />

Tout se carga, tout se tesa<br />

Se veï, se sen,que ie manca pas mai<br />

Qu'una beluga ou'na boufada,<br />

Per desabranla l'encountrada.<br />

Fier e seren, lou magistrau se jai.


Estalouira dedins sa bressa,<br />

Segur dau triomphe, sans pressa,<br />

L'aire bouniàs espèra bravamen<br />

Que sa poudenta soubeirana,<br />

Fague signau de la Serana<br />

Per metre man au grand bouroulamen<br />

Es pas sans que noun trefouligue<br />

De cops ni mai que trementigue<br />

En ausissen las ersas se sarrà<br />

Adounc d'un cop d'iol trach de caire,<br />

Viou e lusen couma l'esclaire,<br />

Gacha ailamount dounte lèu issarà<br />

La Dona. O! Mar, se t’entreprene<br />

Sembla que dis, avant de prene<br />

Dins soun cop d'ocha escampa d'engalis.<br />

Maugrat lou gau de se destene,<br />

Un cop dins soun son, pot pas tène<br />

Un long souspir. Tout en amount fernis,<br />

Tant lèu, la parada marina<br />

Recula et dins la lus clarina,<br />

Que part dau rodou ount'es escoubiat,<br />

Ount l'astre dau vespre nada.<br />

Aparei la Majistra Fada,<br />

Que ven, l’ardida, au Soumail se quiha.<br />

Es d'aqui que d'una guignada<br />

Roudilha touta sa terrada.<br />

D'un vist suptiè devigna ount'es lou mau<br />

Es d'aqui que de la batesta<br />

De la vos, dau cap, de la jesta<br />

Dona lou sinne à soun terible esclau.<br />

La countesta dau magistrau<br />

Tres que lou ruste escabassaire,<br />

Ausiguèt ressounfi dins l'aire<br />

Lous cris d'appel s'adrecha tout d'un cop;<br />

Per el es un couvit de fèsta<br />

Mais a loga de donna tèsta<br />

Coum'un fenat amound èra soun cop<br />

Tal la bouvina d'en sauvaje,<br />

A prima aubeta, en ivernaje<br />

Quand lous gardians alandoun lou cledàs,<br />

En premiè lou troupel boulèga,<br />

Mais maugrat la grand petelèga<br />

Qu'a de landa furnèeja e resta au pas<br />

Pamen urlan la vedelalha<br />

Saris, segui de la vacalha<br />

E pioi lous taus delargoun couetejan<br />

Fiers bateires de reire garda<br />

Que counouissen arest ni garda<br />

Aplanant tout en soun brusen avant


Autan après una passada<br />

Qu'a retengu soun alenada,<br />

Lou boufairàs gournlis sous fouletouns,<br />

Cola boundissaira et ratièira,<br />

Qu'en serpentejan d'en Coustieira<br />

Davala, ardi, mouven sous viroulhouns.<br />

Mai tant lèu agandida en plana<br />

La còla, allegreta, s'engana,<br />

D'unes, cop sec, sus plaça, souri tancàs,<br />

E tornboun; d'autres fan la giba,<br />

En amouderan soun abriva<br />

D'autres, enfin, en aut soun reboucas.<br />

Dins aquel tems la prima aubeta<br />

Se leva galha et belugueta,<br />

Mais en vesen aquel preparatis,<br />

La paoura touta vergougnousa,<br />

D'una veleta roujinousa,<br />

Coubris sa facia, e, plouran, passa lisc.<br />

Lou sourel, soun brausen aimaire,<br />

Que toujour l'acoutis, pecaire!<br />

Sans jamai poudre en lioc la capita,<br />

Tant leu que dau pinacle brista<br />

Lou courous qu'en aicaval ista,<br />

Tout esmougu, alarga per pietat<br />

Sous rais lous pus vieus dins l'espèra<br />

Que van trafiga jusqu'à terra,<br />

Desmarmailian la senistra escurou,<br />

Mais, vans esfors, pena perduda,<br />

La baucadassa es tant founsuda<br />

Que lous dardais blaugissen de clarou,<br />

Soun damoussas à la passada,<br />

Couma la viva calivada<br />

Dins lou cendràs: bèu pais car vesiat<br />

Dis, en s'embaran dins soun pargue;<br />

Ounte que guinche, ounte que targue,<br />

Tout me ven contra et me cau renouncia<br />

A t'aparà de la batèsta,<br />

Lou d'aut es fort, la mar ten tèsta<br />

Couma lou meje en tems de guerra ai pus<br />

Qu'a laissà fa las maliciadas,<br />

E pioi en mas escandilhadas,<br />

Douna soulas as paures demougùs<br />

Tant lèu, una prouvençalassa,<br />

Plan-plan emb soun orra testassa<br />

Lou cabucèla, e l'escur avencis<br />

Aquela premièira lusida;<br />

Es pas ben jour, ni nioch falida,<br />

E lou d'aut, maï, se bara et s'enegris (25).<br />

Pamen la terra es assetada<br />

Se sent pas pus la tremoulada<br />

Que tout oreta espavourdissiè tant


L'animaudalha que la trèva<br />

Mais, e maugra'cò, la calou grèva<br />

Apoundesan, lou tems malaut, lou vanc<br />

De la mar que crei d'amesura<br />

Que sent resisfi, dins l'autura<br />

L'empilounà, siau, orre, espetaclous.<br />

Tout acò trai mala pensada<br />

As animaus; per troupelada,<br />

De mena en mena, arambas pauc a pauc;<br />

A loga d'a bel ime coure<br />

Couma pioi, a l'abric d'un moure<br />

Ou d'un roucàs ou d'un founsa valoun<br />

Van se cabi, mus e tristasses.<br />

Mais lous pelus, das michans classes,<br />

Saique, vougen s'assegura da foun,<br />

A la cima das trucs escaloun,<br />

Gueitoun as quatre vents, davaloun<br />

En se sounan, e van s'encafournà,<br />

En baran la destrecha intrada,<br />

D'una rousassa rebalada,<br />

A la brassa, ou'nde bon amoulounà.<br />

Enfin, tout ço qu'en terra a vida,<br />

Jusqu'a l’erboulha, a la sentida<br />

Dau treboulun que vai lèu espetà.<br />

Un fernimen de branca en branca<br />

Couris: lou fiolhan s'espalanca,<br />

E lou luzèr, per sou, clena amatà.<br />

De fouletouns una autra tieira<br />

Davala, mai de la premieira<br />

Lou mema sort esprouva ailai de bas<br />

Ai que la mar deu estre forta!<br />

Per remouchina de la sorta,<br />

Lous primadies dau fier magistralas!!<br />

Alagan e broufounie<br />

La mar es forta, emmaleciada,<br />

De la terra desmarmailhada<br />

Couma per tems aviè saique aguzà<br />

D'ennaiga touta l'espandida,<br />

Ara que la vei mai sarcida,<br />

Que rejestis e, qu'en lou daut tesà,<br />

Caura lèu avedre bagara.<br />

Dau despiè, la fola desmara<br />

Tout soun amplun et d’un vanc enfiocà<br />

Devèrs lou ferme se rebirhà<br />

Ourla! espoufis et barbaria,<br />

Couma un matins de rabia moussigà.<br />

Subre la plaja se roundèla,<br />

La bousiga a plena maicèla,<br />

Chapla l'esquiol, l'emmaissa, lou goumis;


Das piocs (27), fai croussi l’enroucada<br />

S'entrauca fins à la bounada,<br />

Per lous baumuns qu'a sous flancs se doubris;<br />

E, rassegan, dins las cafoumas,<br />

Esclafis de bramadas soumas,<br />

E de tust grèus, e tout plens de ressouris,<br />

Diriàs, qu’alin, de jouta terra,<br />

Espetoun petards e tounerra,<br />

Ou qu'un voulcan, landa sous flameirouns,<br />

Au lion, lou trangou sus l’oundada<br />

Escala, e l'orra cavalcada,<br />

Cambarelan, caval et cavalié,<br />

Acrinas de mouchouns, de gruma,<br />

Qu'en l'aire lusis, jiscla e fuma,<br />

Van s'espouti contra lou roc batiè.<br />

De sous foundàs, couma d'una oula<br />

D'enfer, sourdis de cuèu-de-poula,<br />

Gourgoulhan, drech et nauts couma de mounts,<br />

Seguis d'einormas cadeladas,<br />

Qu’en sas crinièiras alifadas,<br />

Las prendriàs per d’ègas et garagnouns (28),<br />

Quand la manada a pres sentida<br />

Dau loup, e fuch espavourdida,<br />

Afranquissen oulivastre et rounsas.<br />

Tant que lou cap de mar s'adralha<br />

Au ferme ou countra la roucalha,<br />

Lèu sous cadèls barunloun desbousas,<br />

Embe la clamadissa rauca<br />

D'un senglà que lou fère trauca.<br />

Mais quand engulha, en emplen, lou flumas,<br />

Lous dous acourens acapitoun,<br />

L'un sus l'autre se percipitoun,<br />

Couma d'arrets, furouns, desterminas.<br />

Mais la lucha es pas de durada,<br />

Sus l’oire dous, l'ersa salada,<br />

Lèu escalabra, ensemb se reboucan,<br />

A porta de vista s'en couroun,<br />

D'aqui que sus terra s'amouroun,<br />

Fora dau jas dau flume repoufan.<br />

Zou! D'aqui! per aquèla gaugna,<br />

L'enfla-mola intra, carabaugna,<br />

Moussiga, douga, envessa ribeiròu;<br />

Dejà, la granda emboucadura,<br />

S'es amplejada d'amesura<br />

E de grau qu'èra, es ara un estagnòu.<br />

Un pauc pus lion dins la planassa,<br />

Lou flume entrapacha s'espaça,<br />

D'un bras de mar jusques as esquinaus,<br />

A pres la vasta estampadura,<br />

Oundèja, moulina, tafura,<br />

bacèla, bourja, ennaiga lou baissau.


E la mar toujour tiranèja,<br />

Par aqui se vei qu'a l'envaja<br />

D'acipà mai soun empèri dantan.<br />

E i avendra se res la tanca:<br />

Zou! d'aqui! per gour et calanca<br />

Raca a plen grau, siès la mèstra dau plan.<br />

Coubris, tes, moutas, mourfia, cola,<br />

Brandilha, pena, mountagnola,<br />

Pioi la Serana: anen! e de bon pas!<br />

Esperes pas que leca-fanga,<br />

T’acipe e pioi, zou! vringa-vranga<br />

T’escampe couma un puden levatas.<br />

Anen! Mais ai! de que ieu vese!<br />

Aco's ben el! o! pos m’en crese!<br />

Toun ennemic, lou fera massibran.<br />

Veses pas la poussa qu'escala,<br />

Amount, es el qu'a grand cop d'ala<br />

La revouluma: escouta, ause soun bram;<br />

Veja lou couma çai davala,<br />

Embe lou prus d'una cavala,<br />

Que court devès ount sent soun cavalot.<br />

Auses pas lou bruch de roucalha,<br />

Qu'en sus das apens desmarmalha<br />

E fai rouda fins qu'aje trouva'n plot.<br />

E dau brancun que n'escabassa,<br />

E de l'aubran qu'aranca, estraça,<br />

Entendes pas lous espets, lou sagan:<br />

Lou vej'aqui! boum! d'un cop de tèsta<br />

Dourda una cadelada, arèsta<br />

Cop sec soun frau, aquesta sa cabran<br />

Coum'un tau pouni dins lou moure,<br />

Maugrat lou tus, repren soun coure,<br />

Quand cop-sus-cop, un autre aflac de vent,<br />

Segui d’una grand'rampelada<br />

La prenoun de plec, envessada,<br />

Vai reboundi de tras, espoudissen.<br />

Las oundadas que la seguissoun:<br />

Aquestas, dau ressaut, s'eirissoun,<br />

Las vej-aqui presas per l'alagan,<br />

E la broufouniè terrassièira;<br />

Una sus l'autra en cavalieira<br />

Montoun, tomboun, entr'elas s'embrancan,<br />

Dins un immense couba-leva<br />

Mais lèu la poussa que panleva<br />

La broufouniè, coublis terra, ciel, mar,<br />

D'un brumàs que trebla la vista;<br />

De l’oura-en lai res se devista;<br />

Mais dau bourboul que galina la car,<br />

Sourdis de brounsins ensoudaires:<br />

Un mescladis de vents troussaires<br />

De cops de mar as espets de canoun<br />

De sibladas d'aiga fouitada;


De barunlamens de calada;<br />

De tust de rocs, roudelan dins lous founs!<br />

Quanta taverna! o! noum de mila!<br />

Aco's pas tout, lèu à la fila<br />

Çai vai veni las maliciadas, ai!<br />

Juste una en amount se deraba<br />

Couchada per la foulestrada<br />

De contra cor, plan plan, dralha en açai,<br />

Acroucan a chaca mountagna,<br />

Sas longas arpas d'estrigagna,<br />

Susourlejan nèu, grèla e vilaniè,<br />

La rouncada que la soustia,<br />

Maugrat sous osses, la rebia,<br />

En plena mar, d'autras venoun pariè,<br />

E zou! d'aqui! las virouladas,<br />

Lous cops de tem, las reguinadas,<br />

Grava et sabloun dins l'aire panlevas,<br />

De brisun d'aubres de ramiha,<br />

La pous das moutàs que desquiha,<br />

Fins as calhaus das serres bousigas.<br />

Enfin per mesura coumoula,<br />

L'immense et negras pet de poula,<br />

Qu'espandissiè d'en aval fins amount,<br />

Sas cinq ounglassas verinousas,<br />

Sara sas arpas nerviousas,<br />

A beles paucs en un soulet mouchoun.<br />

E dau mitan de la pautada,<br />

Coumença una viravòutada<br />

Que se renforça et groussis a cha-pau,<br />

D'un embutas à pres la forma;<br />

Dins soun emboucadura enorma<br />

Engoulis, nivou et vapous d’amoundaut;<br />

E pioi, dins la destrecha gorga,<br />

En s'envissan, tout se i engorga<br />

E ven sus terra en foga debounda:<br />

Vira que viraras, mascassa!<br />

Toursis ta moustrousa carcassa,<br />

E faï-t-enlaï ount pouràs t'abounda.<br />

Vai! entramen tout ço qu'envòuta,<br />

La moustrousassa viravòuta<br />

Es derabà, coussi, pastà, mougù,<br />

Couma la monta que degola,<br />

De l'entremieje jout la mola<br />

D'un moulin d'aura en d'osses engrana.<br />

E quand roudan per garigouiha,<br />

A tibà sa vasta panouiha,<br />

De nebla, sistre e vapous e pouisoun;<br />

La goula au ciel, la coua a terra,<br />

Jisclan l’iau et lou tounèra<br />

A traves bosc dralha sous carairouns.<br />

Sus la soulièira es agandida;


Dau tems sus la mar amalida<br />

La sema a fach, enfin, couma quicon,<br />

Desendre un pauquet de relambi,<br />

Soula, la mar toujour engambi,<br />

Desmara tout ço qu'en soun founs rescon<br />

De mouvement, de vanc, de força,<br />

Talament que la viratorsa,<br />

Resta un moument aplantada au soulis,<br />

E, beleu, sariè travirada,<br />

Sans la rufèga estreminada,<br />

Que d'en pus fort repren e la bandis,<br />

Au darnie 'sfort, tras la mountiha,<br />

E la troumba qu'alin rebiha<br />

Suça, abareja en un soulet ourdou<br />

Lous nivous qu'embrumoun lous aires<br />

Embe sous trons e sous esclaires<br />

Em l'amarun que bourja a grand revòu.<br />

E touta aquela mari-mèla<br />

Que dau pus naut dau ciel roundela,<br />

Jusqu'au fins founs das tomples de la mar,<br />

Que toutes lous vents acoutissoun,<br />

Couma de chinasses qu'aquissoun<br />

Lous loubatièrs sus un loup leva car.<br />

Dralia, ailalin, sa via torta;<br />

E tout en s'enfujen emporta,<br />

Dins sous revous alagan broufouniè<br />

Tout ço qu'en mar, en l'aire, en terra,<br />

I a de malicia et de coulèra<br />

Quitan de tras, couma per mascariè.<br />

La levada dau temps<br />

Tems seren, bounacia cailhada.<br />

Enfin, à la longa, laiada<br />

De tant d'esfors, la natura a repres<br />

Sa cara douceta et risenta;<br />

Mais tala qu'ara se presenta<br />

N'a pas pus res de ço qu'era autras fes.<br />

Es pas pus de tout counouissabla;<br />

Lou fluve arasat per la sabla,<br />

Dor lou levant s'es cavà très courens,<br />

Quitan aicai per souvenença<br />

Cauques estangs d'instença istença<br />

Ount van treva lous monstres palusens.<br />

La mar amaisada et soumessa,<br />

Emb soun dous marechou caressa,<br />

Las aussas que la mar a'npilounà<br />

De long de sa riba jibousa;<br />

Ris em la montagna auturbusa,<br />

Dar retenal de soun gòu escanat.<br />

Lou voulcan damoussa, mut, se quiha<br />

Susprès, mourga que la mountiha


Retengue allai soun amiga d’antan,<br />

La que, maugrat cauques auvaris,<br />

Tout riguen, lecava sous baris.<br />

Ount en tems siau vesiè lusi l'autan.<br />

Sus terra! ai! quanta chapladissa<br />

Lou bosc que l'aura a pres en tissa<br />

Es bousigà, vira jouta dessus.<br />

D'aubres tant grosses que de toures<br />

Son jitas sus lou sòu, de moures<br />

Escabassas, d'autres dau fiolhan nus,<br />

De toutes lous caires fan giba,<br />

Saique per fourbià soun abriva,<br />

D'autres, enfin a mita'spalancas,<br />

De las brancassas que penjouloun,<br />

De degouts de saba regouloun:<br />

Diriàs de plours das paures matrassas.<br />

Dau celèste et de las auturas.<br />

L'aigassa a fach d'escavaduras<br />

Contra das jasses terrassas,<br />

Pet de roucailhas rebaladas,<br />

De coulinas enboudenadas<br />

Ou per lous soucs das aubres derabas,<br />

Ount boussejavoun de coustièiras<br />

De gourgs, de clars ou de moulièras,<br />

Dau sourelhet rebatoun lou trelus,<br />

Lou sourelhet, toun bel aimaire<br />

Que te fai oh! moun car terraire<br />

Tant bèu, tant san, coum'en lioc n’i a pus.<br />

De ce qu'alin, dins l'espandida,<br />

La trounada fuch amalida,<br />

En roundinan de lion en lion,<br />

Couma la fera sauvajina,<br />

Que la chourma, de sa jassina<br />

A drevelha de subre-sau.<br />

De ce que lou sourel dardalha<br />

Sus l'escur qu'en de flambas raya,<br />

Que terra et mar a plen peitral,<br />

Poumpoun sas brausentas rajadas,<br />

E que dins l'aire, a grand'oundadas, 4<br />

Lous parpoutels soun en baral.<br />

De ce que tout se requinquilha,<br />

Erbouilha, aubran, greliou, ramilha<br />

Tant au bosc couma per l'armàs<br />

L'alen d'aquela bela journa<br />

As abrigas, dins la cafourna<br />

Vai revieudà lous assoustas.<br />

Adounc touta l'animaudalha,<br />

A traves camps, couris, s'estralha,<br />

Braman de joia et de bonur;<br />

Festejan cadun à sa moda,<br />

Lou sourel qu'ailamount-daut roda,<br />

A travès la capa d'azur.


La festa<br />

L'aubre de macabèu alanda<br />

Sa brancadura linja et canda<br />

Bèu temps amai s'endurarà<br />

Cambadas, joia, amour et cassa<br />

La vida enfin a pres la plaça<br />

De l'esfrai que ten tout chourà.<br />

Lous baumèls an fach sa sourtida,<br />

Mais la colada estabousida,<br />

A loga de faire d'esclan<br />

Davans parièira basacada,<br />

Es aqui muda, estoumacada,<br />

De festejà n'a pas lou vanc.<br />

Arriva un jimèl e la foula<br />

A sa vista se reviscoula,<br />

Es de remarca aquel, ma fe,<br />

Despart la carura e l'ausada,<br />

Una sernassa aprivadada.<br />

Se mòu autour de soun coupet.<br />

Ensemble escaloun la coustièira,<br />

E douminan bosc et rausièra,<br />

Lurgnoun der l’ennaut e l'enbàs;<br />

Se monstrou embe de quieladas,<br />

Estrals, chaples, enbousenadas,<br />

Dralias et caraus bousigàs.<br />

Tout d’un cop, de toutes lous caires,<br />

Esclafis de cris ensourdaires,<br />

Das sieu sai venoun dor eiçai;<br />

Aquestes, en de cris, de gestas,<br />

As arrivans ie fan de festas,<br />

E n'en ven, n'en ven que noun sai.<br />

D'aqui touta la moulounada,<br />

Camina, muda, afeciounada,<br />

Dors un estèrle et naut planas<br />

Ounte se vei a beles rodous,<br />

D'aclapassas de rocs, de codous<br />

Doulmens et manirs atièiras.<br />

La Ceremouniè<br />

Adounc lou jigan que coumanda<br />

S'arresta, sous braces alanda,<br />

E se viran cap au levant,<br />

Sus la roucalha s'ajinoula.<br />

En mema tems touta la (29) foula<br />

Boumbis tres cops en s'amouran.<br />

Lou baile mai, dor la Serana,<br />

Ount de la bela souveirana,<br />

Trelusissenta de clartà,<br />

Pouncheja lou cap de divessa,


Baile et frappa, en grand' alegressa,<br />

Se prousternoun d'aquel coustà.<br />

Tres cops lous fronts sus lou sòu dourdoun,<br />

Tres cops de quiladas qu'ensourdoun<br />

E, pioi, tout d'un cop, s'aubouran,<br />

Dor l’auriscle que l'aura cassa,<br />

Brandissoun lou poun de manaça,<br />

Emb agairada et grand boucan.<br />

Aqui la dansa qu'acoumensa,<br />

La dansa de la delivrença<br />

Quicon d'estrange, d'esfraious.<br />

Que de sauts! que d'escarlinpadas!<br />

Viravaus e farandouladas!<br />

Quante bousin, a! malurous!<br />

De rejets, de clamous, de cambadas,<br />

De brassejamens d'apautadas,<br />

De viroulets, d'idouladas, de brams,<br />

De siblaments de la sernassa,<br />

Qu'au sue dau mage s'esquialassa,<br />

Fissant embe d’iols lancejants.<br />

Lou sacrifice<br />

Ounte vai aquela baugina?<br />

A bandi la cola et camina<br />

E couris, fol, destimbourlà<br />

Brassejan et branlant la tèsta,<br />

Perque dounc a quita la festa?<br />

Subr’un roucas ven d'escalà.<br />

Vai ti faire una predicada?<br />

Noun, car vran! d'aquela aussada<br />

Se trai d’un vang au foun dau vau!<br />

E lou que l'abime recassa,<br />

Mouris per requita sa raça,<br />

E n'amaisa l'esprit dau mau.<br />

La dansa autant leu es tancada,<br />

Ie couroun, a bela brassada,<br />

L'emportoun, en ceremouniè,<br />

Ounte lous martires s'entarroun<br />

Au rodou ounte lous dolmens sarroun,<br />

Lous morts de fe de gaiardiè.<br />

Avant! dins la terra rausada,<br />

Lous omes cavoun'na talhada;<br />

Chaca coustà margoun de plots;<br />

D'autres, enfin, d'una lausassa<br />

Carejada, en pes, a la brassa,<br />

N'en cabucèloun lou san cros.<br />

La vota es pas aqui finida<br />

Un cop aquesta obra coumplida<br />

Un escachoun arma de paucs


S'escampihoun a la sournuda;<br />

Dins lou bosc va fa la batuda;<br />

Lous autres emb'lou majourau<br />

Lou manhir<br />

Van d'un sère, ount la natura<br />

A talhà, d'un cousta, l'autura<br />

Coum'un paret, pioi d'aut en bas<br />

Dins lou granit badoun d'asclassas<br />

De tals sus toutas las faças,<br />

Diriàs de man d'ome traçàs.<br />

Margoun de fustas dins la vena,<br />

Agrejoun e sans força pena,<br />

Un blot es lèu dessagrilha<br />

Un blot nautàs coum una toure;<br />

Tomba en poussejan; lou moure<br />

D'au sabroun n'es destrantalha.<br />

Ardi! Ardi! de mans, de brasses!<br />

De calas, de torous d'aubrasses:<br />

O! iça! de cantèl, de plan;<br />

D'ounças, de mans, escrouquichadas<br />

Où! d'espaulas endavaladas:<br />

Aboutas! l’einorme peçan,<br />

Couma quicon sans tira longa,<br />

Sus lous torsas enfin s'alonga,<br />

S'ausis un souspir de soulàs.<br />

Pioi, un bout, en de rusca nousoun;<br />

Dau tems que per davant lou mousoun<br />

En sagougnan, ferme, de tras,<br />

Per coustà, n'i a que lou mantenoun,<br />

A chaca esfor, tant s'endevenoun.<br />

A chaca hai! fau tant d'alan,<br />

Que dins pauc, la rusta roucassa,<br />

Es gandida juste a la plaça,<br />

Ount van l'adrecha d'ara estan.<br />

Anen! pas de mola ni plèti!<br />

Cau que s'adrèche sus soun sèti,<br />

An! zou! des brasses! des pounchés!<br />

Dau! dau! e cadun se despèra:<br />

Oh iça! la testa perd terra<br />

Soustra, e pas d'espris-esprès!<br />

Tourna soun a cota mailhada:<br />

Oh selia (30)! es a mieja aussada,<br />

Zou! de calas, pounchés, pilouns.,<br />

Ai! ai! las soustas s'entemènoun;<br />

Las ruscas torsas se destrènoun<br />

Lou baile, ourlan, sarra lous pouns.<br />

Cent omes, que digue, cent vidas<br />

Couma autant de cariatidas<br />

Jout lou blot couroun s'arcboutà<br />

Cau dau suc, d'esquina, d'espanla


Cau d'assetoun: vai ben, res branla,<br />

De car et d'osses es tancat<br />

Las cordas, mai, se retoussissoun,<br />

E las quihos s'assujetissoun<br />

S'es pres alen; au dernier cop<br />

O! iça là! Benedicieta!<br />

Lou peçan rota sus sa sieta;<br />

Trantalia un pauc lou monstrous blot,<br />

Diriàs au premiè cop que tomba<br />

Mai pau-a-pau mola et s'aploumba,<br />

Un cris de joia espectaclous,<br />

Fau tressauta bosc et graussièira<br />

Una de mai sus la grand tièira!<br />

Sembloun dire d'un air glourious!<br />

Oi! saguès fiers d'aquèla esclapa;<br />

Es un to dins la granda estapa,<br />

Que dralhoun lous paures umans,<br />

Per el las raças avenentas<br />

Sauprant las causas surprenentas<br />

Que s'es vist i a mila e mil'ans.<br />

Siàs una paja d'escritura.<br />

Siàs un simbel d'arquitetura:<br />

Cromlets, manirs, doulmens, clapàs.<br />

Oi! das beus arts sias l'espelida,<br />

L'aubelisque, la piramida,<br />

Vous seguiran de tras en tras.<br />

E mousouleia e catedrala,<br />

Palais, coulounas triomfalas,<br />

Cap d'obra, au jour-d'ioi das crestians,<br />

Maugrà la coupa disparieira<br />

Vous devran l'ideia premièira<br />

Fiers, e pouderous gigans!<br />

Per pas faire menti ma dicha,<br />

Autour-de la grend Peira-Ficha,<br />

Tournamai se soun acampàs;<br />

Lous que soun ras d'ela s'apautou,<br />

D'autres sus sas esquinas sautou,<br />

Drechs, front au roc apouncheiràs,<br />

Saràs espaula contr'espaula,<br />

Muralia umana que res branla,<br />

E pioi, sus l'estacha de car<br />

Per n'en faire lous façounajes,<br />

Escaloun d'autres persounages:<br />

Lou primadiès dins lou grand art!<br />

En de codous couma la testa,<br />

Baceloun boucignola, areta;<br />

Apounchoun un bricou lou cap,<br />

Ventroun l'enmitan et la baissa<br />

En se saràn dau sòu se biaissa;<br />

Enfin n'en fan de tout sicap.<br />

De lion la forma redounenca;


De lion, creacioun premieirenca,<br />

Dount soun tiràs d'amount d'alai,<br />

Lous astres que lusoun et soureilhou<br />

Las plantas que sus terra grelhou<br />

Tout ce que viou, se mou et paï.<br />

Lou fioc sacrat<br />

Mais dau tems que lous escultaires<br />

Bounboun per amoussa lous caires,<br />

Aplana lous rodous rougnous,<br />

Lou feleman, adounc se sara<br />

En double ren, flamba a la cara,<br />

Marcha.soulene et majestous!<br />

La qu'es en testa l'abadessa,<br />

Porta au col, per touta belesa,<br />

Un tour de cauquilhoun de mar,<br />

De las dos mans sara, ufanousa,<br />

Una branca perousinousa,<br />

Qu'un tron a'spalanca dau marc.<br />

Un cop ras de la pèira freja,<br />

Que jous lou martelà flambèja,<br />

Clena la brancassa en avans<br />

La cima en miech de la belugas<br />

D'en pus fort lous cops de massugas<br />

Boumboun sus lou frejau dindan.<br />

Aï! aï! boudieu! la pegoulada<br />

Petèja en gisclan de fumada,<br />

Joïa! lou flambeu es abrà,<br />

E dins l'aire blau que tremola,<br />

De las clamadas de la cola,<br />

Frejina et lus lou fioc sacrà!<br />

Pioi femelan et primadièira,<br />

Flambèu en man, de la coustièira<br />

Davaloun en serpantejan,<br />

Au founs dau vau que res ajourna,<br />

Aqui badafia una cafourna<br />

Que d'intra res n'a pas lou vanc.<br />

La demourença de la fada<br />

De la fada aco's la demora,<br />

Quand de las Cevenas en fora<br />

S'ai ven treva lou païs bas,<br />

Degùs sa pas souri arrivada,<br />

Couma n'en sort, coum'es intrada,<br />

Se sap quan i es, adounc dau pas,<br />

Tout empachouca de raboustia<br />

Se vei un quicomet que briha<br />

Blanquejan couma lou lumet<br />

Qu'en amount abra la luseta,<br />

Couma la sieu la lusoureta<br />

Dardalia e mola a momenet.


Aquela clarta viva e mola,<br />

Es lou trelùs de l'auriola,<br />

Que sencha soun front, rebutà<br />

Per lou cristal et candeletas<br />

Que plan-plan a belas pausetas,<br />

La terra obra de soun sicap!<br />

D'aquel moumen la bauma escura<br />

Dis que la diva creatura,<br />

Ista per ara en quicon mai,<br />

De fet, l'an vista, au lion dau causse<br />

Lampa coum'un vespral iausse<br />

Darniè dardal d'un jour de mai.<br />

Alors la primadieira soula<br />

S'avança, per sòu s'aginoula<br />

Lou flambèu dins lou roc pounis,<br />

Au ras d'aquèla goula, muda,<br />

Pioi la coudriada esmouguda<br />

Dins las afourests s'avalis.<br />

Lou reboustèri<br />

Dins l'entremièja lous cassaires<br />

S'agandissoun noun sans desaire<br />

Ni a' gut de blassas et de morts!<br />

De que i e faï! la cassa es bona?<br />

Pioi es la vota de la dona<br />

A deman laguis et maucor.<br />

Per ara vengue de majiha:<br />

A mai n'arriva de cassia:<br />

D'ourses, de liouns derencàs,<br />

Cervis la gara brigoulada,<br />

Crocodils pris a la badada;<br />

Mastoudountes amassoulàs.<br />

Lou que pot pas pourta rabala,<br />

Proche la peira trioumfala<br />

Se n'es acampà un gros mouloun;<br />

Sa vista lèu lèu dereveiha<br />

La fam; d'ounglas, de dents s'espèia:<br />

Au grand rebonnis! La rasoun<br />

E lou pauc d'ime qu'òu s'escrafa;<br />

Touta fideia es a la bafra;<br />

L'ome a fach plaça à l’animau.<br />

Jamai un vol de groupatasses,<br />

De vautours ou de chinarasses<br />

A la curada, au cadarau<br />

La nioch sus un camp de batalha,<br />

N'an tant mourfià de carnifalia<br />

Couma aqueles aloubadis (58),<br />

Embe las mans, à plena maissa<br />

Estripoun nervis, carna, graissa<br />

Lou dets, toutes ensanousis


Paisage<br />

Au moure la sang garinada;<br />

Fourfouilhou fins à la boussada.<br />

O! cavalisca o! qu'acò's lai!<br />

Embe vostr'ore gouludije,<br />

Fases veni lou regoulije<br />

O! moustrouses! N’i a pas proun? mai?<br />

A, boutas! Per qu'acò finigue,<br />

Cau que l'ossalha se rousigue,<br />

Tendouns e crouncidèla, enfin,<br />

Embouiricas fins à la goula,<br />

Fauta de car ou de mesoula,<br />

Lou rebonnis aguet'na fin.<br />

L'ome e la bestia an fach sa passa,<br />

Ara qu'an de tout a la lassa,<br />

Afalenas, tiban l'artel<br />

Subre la grava ensanousida,<br />

Lous cors pelus fan la dourmida<br />

Ben a la raja dau sourel.<br />

Lou sourel de sa cintra a pres la devalada;<br />

Sus la plana brausida, en sous rais de galis,<br />

Esperlonga, plan plan, l’oumbra desparaulada<br />

Dau vertuous aubran, que de la valounada<br />

Escalabra lous piocs, lous envouta et coubris.<br />

Traitousas afourests ounte la sauvajina,<br />

Sadoulada de car s'amaga tout lou jour;<br />

D'ount la nioch n'en sourtis ourlanta de famina,<br />

Que per s'apasturga, car res mai l'interessa,<br />

Res que la grand mangia, e, per escas, l'amour.<br />

Bouscàs espetaclous; aubran d'estampadura<br />

Moustra, estranja brancun sans meu, sans flous;<br />

Erbages sans parfum: la sauvaja natura<br />

N'a pas encara enfantà las flouses, la parura<br />

Ni l'aucèl, ni l'abel ni lou fruch agoustous.<br />

Sus lous pins, sus lous is à loga d'aucelina<br />

Las, ratapenadassa agripounan sous crocs<br />

De branca en branca, andan la charnèga mounina<br />

A la cerca d'un fruch que n'a res que la mina,<br />

Tal que gala, pignoun, data amar et tout clos.<br />

De la cadoula, alin, que raseja las pradas,<br />

Ount trevoun crocodils, erbassiès ped fourcat,<br />

N'en vert, a belas fes de plagnuns, de beladas,<br />

De siblamens de serp au lioc de bresilhadas,<br />

Tout grèu, ruste e sauvage e per estoumacà.<br />

Lou sourel de sa cintra acaba l’enregada<br />

Escampan sus lous trucs, lous darnies lamps de fioc,<br />

L'oumbra s'escurecis per coumba et valounada,<br />

Quand lous aubres dau bosc an la testa enflambada<br />

Couma se l'incendia abrasava lou piochs!


Mema quand lou tremoun l'engulis dins sa maissa<br />

Sous lamps van lancejà couma lou d'un voulcan<br />

Sus lous nivous clarins, rebutan dins la baissa<br />

De trelusens dardais retrasen a'na raissa,<br />

A ‘n reves maien qu'espousca dins lous camps.<br />

Es l’oura qu'a passets lous erbassiès caminoun<br />

Devers lou rescoundoun, entre lou feuge aubre<br />

La coussouda et boulets et palmiès que boufinoun<br />

Aderen lou fiolhan; pioi de cops rebecinoun<br />

La testa, en agachan de vers lou mounumen<br />

D'amounte, tout escas, ausissian la chamada<br />

D'ounte n'es davala de cassaires furouns<br />

Qu'an fach chaple de tout de que cour trepa e viuda<br />

Pas pou! pas pou! amount l'ome fai la chaumada<br />

E l’oura a pas souna das ourses, das liouns.<br />

De liauses vesprals de vès lou larg flambejoun<br />

Sinne d'una nioch canda e calou per deman<br />

Quant tout d'un'cop das piochs, qu'alin ara negrejoun<br />

Fusa una grand'lusou que lous iols n'en neblejoun<br />

Un long bram de suspresa esclafis per l'escamp.<br />

La venguda de la fada<br />

Es la dralha que fai a traves l’espandida,<br />

La fada encantarèla en largan dau Soumail<br />

Devès enci d'ount es d'un vira d'iol gandida<br />

Sans touca sou e dins soun airala escourida<br />

Escampilha detràs belugas, iau, dardaïs.<br />

En cadièira dau prècha, ardidamen se quiha<br />

Espincha de tout caire, escouta, tout es siau<br />

L'ome es toujour jagù ount a fach repetita.<br />

Lou ferun, de la cassa, a pas dralha la via<br />

E jouta lou coubert s'es cabi lou bestiau.<br />

La fada et lous quatre majourous<br />

Adounc de tout soun naut la fada gloriousa<br />

Se tesa, en d'aco pioi as quatre vents d'au cèl<br />

Alarga la man dèstra; e la man pouderousa<br />

Es aubeïda, car lèu de l'espaçada blausa<br />

Sourdis quatre malhòus per respondre à l'appèl.<br />

Un ven d'en païs d'aut, un beu grel de jouinessa<br />

Bloundin couma l'espiga e brausen d'estrambord.<br />

Per respondre au signau encamba emb ardidessa<br />

Dous grands flumes et tant qu'eles en pressa<br />

La viola en man, canta l'amour que poung soun cor (31)<br />

L'autre ven dau pounen a'scalabra l’autura<br />

L'autura espectaclousa ount j'ai d'eternas nèus<br />

Das servitous de Diou a fe, vesti, figura<br />

E per ço de l'esprit es d'una estampadura,<br />

Parièira as piochs gigans, das gigans Pireneus!


Lou que ven dau miejour quita castèl et boria,<br />

An'ounte lous plagnens atrouvoun noble cor,<br />

Ounte, tems a veni, vendrà seire la gloria,<br />

Car, a soun tems d'estourbe, escrieu la grand istoria<br />

De la raça latina embe sa plouma d'or.<br />

Dins l’auba lou quatren dor l'aupiha s'auboura<br />

Tout courouna de nerta e de rams e de flous,<br />

E tout en s'en ausan sa cara s'encouloura<br />

De raisses blaugissen que res ne dessanfloura<br />

Car jiscloun d'au fougau etèrne et luminous.<br />

E lous fiers Majouraus dins l'aubeta roussela,<br />

Fusoun couma lou nivou acouti per lou vent:<br />

Soun agandis au cop proche de la piucela<br />

Se donoun la brassada e jous chaca parpèla<br />

Una larma de joia espira tout d'un tems.<br />

En sa cara risenta, adounc la genta fada<br />

Se clena, en d'aco fai salut, joia e soulas<br />

As quatre primadiès de nostra raça astrada<br />

En vesen moun signau aves quit a parada,<br />

Per vent m'atrouva sans agacha detràs.<br />

Gramecis! ben vesiàs de vostra aimabla pressa,<br />

Oi! gramecis! per ieu e per l’umanità,<br />

Car despioi tant de tems que dins l'escura bressa,<br />

Demaucourada per lou vèle que se dressa,<br />

Entre ela e l'aveni, entre ela e lou passà.<br />

E be, dau ridelàs atissous que l’alassa<br />

Per vautres vau sarà lous pleces negrejans<br />

E couma dis acò, vese enlusi l'espaça,<br />

E lous caps de jouven agachoun dor la plaça<br />

Ount jasoun lous sadouls ai! Boudiou lous gigans!<br />

Lous jigans<br />

Mai, ela: Oi! lous jigans suspres au pet de l'obra<br />

Lous terribles jigans, vostres desavanciès,<br />

Que dempioi de mila ans, l'escurità recobra:<br />

Mais, gracia à moun pouder lou misteri se sobra,<br />

E vous lous mostre tals qu'eroun au tems premiès.<br />

Costa emb lou gouril, vivent la mema vida<br />

Ferun et carnassiè coum'el per soun manjà<br />

Malur et venjadis mema testa aganida.<br />

Mais aqueste, au fins founs de sa tuca estequida,<br />

S'atroba un pichot mouc que lou mena a sounjà.<br />

E de l'escur croutoun que lou lunet ajourna,<br />

Sourdis, a belas fes, un lamp d'entendament,<br />

Es vrai qu'a soun estin de bestia lèu retourna:<br />

Mai es lou soul qu'en familha estaja à la cafourna<br />

Lou soul que ris, que ploura e gacha au firmament.<br />

Es lou soul atabé que de la bestia ruda,<br />

Quita la prima forma a beles pauquetous;<br />

Soun corps demenuis, sa cara se tremuda,


Soun biai, amai soun goust; sa lenga presque muda<br />

Breteja un parauli, mai vai, mai fai lou rebous.<br />

Dau que mai ie revèrta entre l’animandalha<br />

Aquel d'aqui tal era, es, e toujour sarà,<br />

D'aqui que de la terra ount tout se degavalha,<br />

Aje disparescu, même, fins à sa dralha,<br />

Car n'es pus que matièra e tout s'estrassarè.<br />

Mais l'autre, es quicon mai, ço qu'a dedins la tèsta,<br />

Daut tems e de la mort a devira lou tal.<br />

Lou lum ara es flambèu, dins sun crei res l'arèsta;<br />

Sus terra couvris tout; e soun cousta tout presta;<br />

Gracia en el l'ome es mestre e coum'el immourtal.<br />

Historia das jigans<br />

Esprit de l’ome! anen jigan rei de la terra<br />

De ta gouverna pren las arenas daut! daut!<br />

As toun plen d'enemis que te fan rusta guerra<br />

Desempioi l’insetoun, à la bestiassa fera.<br />

Toutes lous elements, e lou frech e lou cau.<br />

E d'aquel'oura en lai, la guerra es declarada:<br />

Tout ço qu'a pas soufri la jounta e lou coulà;<br />

Tout ço qu'a pas pourta fruch, espiga daurada,<br />

Es deraba, cassa de countrada en countrada,<br />

D'aqui que n'a fach fin, en d'aco sans moulà.<br />

A la terra s'en pren per acipà la jassa<br />

Dau Cifer, creatou, lou rei das elements<br />

Trafiga entre lous rocs l’einorma calascassa<br />

Vei lous jouta-terrens e l'abime e l’asclassa<br />

Ount lou fioc a jeta gas e metaus rouzens.<br />

Acipa lou sicres dau diaman, vei la vena<br />

Que devala tout drech de ves lou fioc central,<br />

D'ounte, de copsque i a, la mar jouta-terrena<br />

Percipita sous crei sus lou brasas que rena<br />

Escoupis e repouja e mes tout en baral.<br />

E la terra fernis e lou fioc recaliva.<br />

Vei goumi lou voulcan mai vei ges de Cifèr,<br />

Escala a flou de terra, en Piraneu s'abriva,<br />

Grimpa lou Canigou mais tres qu'au suc arriva<br />

Oga d'adusà au cèl couma n'aviè l'esper<br />

S'atroba court et court e sus l'auta mountagna<br />

Tabla de n'i ajougne una autra e beleu mai<br />

Se cau: a l'obra! e zou! sans molura, ni cagna.<br />

Malur! malur! lou fioc dau celestre lou gagna.<br />

E lous mounts Pireneus cremoun de l'oura en lai,<br />

L'arrivada d'Hercula<br />

D'aqui qu'a las dos mars l'incendi se damoussa<br />

Dins aquel intremieja un bateire estranjè<br />

Desbarca em soun armada e coum'un loup s'acoussa


Sus lou pople jigan, de longa, dins la poussa<br />

Lou sang embe lou sang a raja de metiè<br />

E la lucha countunia, ardentu, acarnassida<br />

Quand, per malur, en Crau, ounte soun acampas<br />

L'enemi lous suspren, adounc, pas de causida:<br />

Perdre la libertà, l'ounou ou be la vida,<br />

Per traitressa, lous pros mourissoun aclapas.<br />

Mais lou sagatun, rèsta e quand la coudriada<br />

Que dai ven dau mistèri e fuch dins lou tremoun<br />

E que couma lous fleùs ou couma la trounada<br />

Vai sans causa de res jous la sourna butada<br />

D'un quicon que degun sap pa'n cara lou founs.<br />

Adounc mai que jamai la grand raça regrelha:<br />

E pot be n'en veni de Cimbres, de Teutouns<br />

A mai tout lou ferun que la terra cougriha.<br />

Auran beu a bofà sus l'ardenta caleia,<br />

Lou lum escachara toutes lous mecheirouns.<br />

Oi! gramecis a tus nobla raça latina<br />

Lou flambèu de l’idèia, a parti dau fins foun<br />

D'aquesta terra en jusqu'oun l'ome s'amajina<br />

Qu'es lou trone estelà e poudencia divina!<br />

Pertout flambejarà, qu'es lion aquel crountoun,<br />

Aquel espes cervèl ount coum'una velheta,<br />

Coum'un mouc, per escas ajournava lou suc<br />

Quanta creissensa a fach, dempiei a foura d'ara<br />

Oi! mai jusqu' a la toca autant n'en resta encara<br />

A vautres bels amics a cimela lou truc.<br />

La vesiou de la fada<br />

Mai de qu'es que ie pren? La bela proufetessa<br />

S'arresta, estasiada e lous iols alucas<br />

Targa amount, en amount, veiriè-ti la divessa,<br />

Tras l'abîme, lou lioc d'eternela alegressa<br />

Aproumès au crestian que mouris sans pecats.<br />

Chut! vai parla. De fes d'una vos afetada<br />

Rusta, s'entrecoupan e brassejan lous mots<br />

Que van a belas fes coum'una foulastrada<br />

D'autres cops, plan planet couma si sa pensada,<br />

Penequèja e pioi zou debounda sus lous pots,<br />

Oi! dis: l'escalaran la nautassa montagna<br />

A trouvà lou sicret de la vida, e la mort<br />

De misteris n'i a pus, pus de mau ni magagna<br />

Sap lous sept sens, counoui lous fluides, maja escagna<br />

Qu'encencha, mou e fai d'aqueste mounde un corp.<br />

S'ajounissen ensemb en las autras planetas<br />

Toutas au grand sisteme e pioi lou tout au tout<br />

L'esprit sutiè, l'esprit das reires, beluguetas<br />

Noun vesentas a l’iol, tant que soun menudetas<br />

Parpalièjoun dins l'aire e l'immense clarou.


E soun cervel madu, ioi s'en abeura a roumple<br />

Anen! daut! daut! escala! apren toun vesinà...<br />

L'aire embe sous courens e de vapous regounfle<br />

Es treipassa, per ara es toun pus grand trioumfe...<br />

Entre lous vieus lugars que poploun l'enplanat<br />

Dins lous carraus perdus que dralhoun las Caumetas<br />

S'acoussant de lescur, per baisar lou sourel<br />

Rabinan en passen, caps, niblousas facietas,<br />

Cabeladura d’or, e fujen, beluguetas,<br />

Per de siecles pourtan l'esclat qu'an pres an el<br />

Dins aquel bouïde immense ount lous globous se movoun<br />

Ounte sans comte on vei fusa d'estelounèls<br />

Poussuns de moundes morts que dins l'espaça plovoun<br />

Dins aquel’ espandida es aqui que s'atrovoun<br />

E varalioun sans fins d'immourtals anjounèls.<br />

Arcanjous, serafins, esprits daus benurouses<br />

Qu'an counservà la forma e lou gaubi dau corp<br />

Beu darniès abitans das esferas poussouses…<br />

Tal vous autres, apres de siècles tant noumbrouses<br />

Qu'on pot pas calcula, aurès subi soun sort,<br />

La terra qu'abitàs, l’oumbra dau corp e l'ama<br />

Fugiran per toujour l’einorme cadabràs<br />

Per saupre ounte cadun per la pensada issama;<br />

An'ounte l’ideal e tout a la sant-clama<br />

Das pantais que s'es fach saran realisàs<br />

S'agandiran! vous dise! encara cauqu'espèra<br />

E l'escur tabernacle a perdu soun sicret<br />

Tanca t’aqui! mignota: es l'estela poulèra<br />

La que de soun regard fissona nostra terra<br />

L'envoia dins la dralha e la ten en respet<br />

Mais la terra es pas soula a senti sa fissada<br />

Sans ela lous tres bious se bistirarian leu<br />

Maugrat Peperelet maugrat soun agulhada<br />

Rebalarian lou carri enfora la rodada (35)<br />

Lou troupelet tustard fugiriè la pargada<br />

E dins l'immense apai s'avaliriè belèu<br />

Quau retendriè lou brau quand pres de petelèga,<br />

Bloumbirièe sus la cabra ou quand lou fier lioun,<br />

S'acoussant a soun tour auriè quita la rega<br />

E que de soun sicap la batesta fai lega<br />

E la vièrja, e l’arret. Quante fourbic amount!<br />

Gramecis a l'estèla autour dau zoudiaque<br />

En rengueta tout court jous soun regard magic,<br />

Dau pus fort au pus flac, pas un que fougne ou flaque,<br />

Pas un que cerque a fugi au camin, de Sant Jaque.<br />

Vira que viraran lou fluide magnetic,<br />

Que dins lou vira-vau d'esper el se coungrilha<br />

Es couma lou lian que tent l'egà au roudet<br />

Cauca que caucaràs l'egà s'escarabilha<br />

Sens que siegue besoun dau pounchoun, de la biha<br />

Ni a proun que dau gardian sentigue lou pouder.


E lous ans, meses, jours, celestrala poussia<br />

S'aubouroun de l’airau e fusoun per alin<br />

Dins lou sourne infini O! la bela graniha<br />

Que lou trepil escond que lou tems escoubiha<br />

Revas, tempestas, guerra, azard, ur, fleù, destin.<br />

Tout acò se majença aqui, pioi, zou! s'espaça,<br />

A tusta borgna, gara au que sap pas legi<br />

Dins lou grand libre d'or, sus la testa recassa<br />

Tout lou gran escondù; mais noun la maja raça<br />

A destousca l'estec que fai lou mau fugi.<br />

A! n'en veiren be mai avant d'estre a la toca.<br />

Aven passa lou carri, en sous precious carret;<br />

Raseja lous tres reis que s'en van toca a toca,<br />

En quista dau grand tout, ço que tant nous pertoca,<br />

Aco qu'acoutissen et d'ama e de couret<br />

La dralha dau Cifer, la grand dralha lachada,<br />

Ount regoulina, a floc d'escalugans poussius,<br />

Qui chaca gran brandi, chaca atome aubourada<br />

Es un mounde vivent, en foga estrempassada<br />

Soun lion per ailaval pimes couma de lums,<br />

Lous astres trelusens qu'esclairoun nostra terra,<br />

Zou! toujours escalens dins lous moundes nouvèls;<br />

E sourels sus sourels esfèras sus esfèras<br />

Tout aco s'afranquis. Zou! toujours! ben espèra!<br />

Mai vai, mai se fan clars lous celestes troupèls.<br />

Un aiçai, un enlai la finicioun se sara;<br />

Aqui lou beu darniè que cabana debàs<br />

Debàs, debàs; plan plan l'escuretà se sara,<br />

Un maigre raiounet parpalièja encara<br />

Es avali... pares d'amoun, d'aval, de tras.<br />

De qu'es acò? La mar aici! en aquela autura?<br />

La mar, vista de nioch dau suquet d'un bancau?<br />

Mai noun, la mar per tant que la nioch siegue escura<br />

Se vei mouve quicon, un quicon que tafura<br />

Aici res que la nioch, l'estat, l'eterne siau.<br />

Pamen dins aquel toumple ount sembla que res muda<br />

Se sen que i a quicon dins aquel res de res<br />

[A la longa on devista dins la sournuda]<br />

Quicon coum'un'oundada e moustrousa e pesuda<br />

Que bourja dins lou bouide, en soun esquich tramuda<br />

Las sasouns e coungria aurages, troumbas, frechs,<br />

Mais de qu'es aquela ora e founsuda sournuda<br />

Fin finala de qu'es tout aquel tes de res<br />

Es lou frech, eternal es la nioch trista et muda<br />

Es lou cahos, la mort e causa encouneguda<br />

Es Dieu lou Paire, o be, Dieu lou paire susprés.<br />

Dins lou founs das fins founs de l'escur tabernacle<br />

D'ounte tout ven, ount res torna ni car ni'sprit<br />

O raça de moun cor l'as fach lou grand miracle<br />

As subra dau passa l'espetaclous basacle


En prepoundan lou reve e deschifrant l'escrich<br />

Escandalha entramen lou neant et l’abime<br />

S'en vai veni lou fil, lou cifer creatou.<br />

Lou sublime ensurjà que sans sens e sans crime<br />

Emb lou Paire lucha e gracia en aquel crime<br />

L'univers es crea, mais l'esterminatou,<br />

A bel ime pariè damoussa lus e vida<br />

Crea que crearas, tua que tuaràs<br />

E zou toujours sans gau, sans arrest ni causida<br />

Aici l'inmudadis, alai, van, escourida<br />

Mouvement, cajou, força afounsa, mai veiràs<br />

Lucifèr<br />

Ailalin dins la nioch que pertout enmantela<br />

Un pountichet menut a tout escas lusen<br />

Coum'una vist' d'iol de loup que la fam mortavela<br />

L'as vis e be de qu'es un brigounet d'estela<br />

Lou lun de la luzeta un vespre de printems.<br />

Ou be l'esclar fouscas d'una lioncha neblousa<br />

Vej'aqui que se sara e groussis a chapau<br />

Ai couma fusa e lampa una alenada amousa<br />

La devança e degola, en degoulan nous crousa<br />

O grand Dragàs es tus que pougnes dins lou siau?<br />

Las banas en avant, la couassa anelada<br />

Lou corp espetaclous d'esclotas tout coubert<br />

D'arpassas de dragoun, d'iol de ratapenada<br />

Largan au lion d'ardens a chaca cop d'alada<br />

Vastas coum'un miesferi estracinan l'eter<br />

Fai sourdre e regiscla couma d'un fioc de joia<br />

De belugas a floc, voula que voularàs<br />

L'escur es avenci, l'abime ara es en roia<br />

La vida gracia a tus espeta en sa belaria<br />

Anen vola e degota o pouderous Dragàs!<br />

E dins l'escur s'enfounsa una revoulumada<br />

De perlas de diamant l'envouta e lou seguis,<br />

Tras el lou belugat la poussa coungriada<br />

Per lou flagelamen e la desagriada<br />

Se mòu, roundela a boudre, au drech ou dau galis.<br />

E tout en barunlan (35) en astres se tramuda<br />

E moundes, sourels de l'andiou lusent<br />

Giscloun, degoloun, van dins l'etèrna sournuda<br />

Escampa la clarta, la vida encouneguda<br />

Que jai dins ta natura o miraclous surgent<br />

Mais un cop lion d'au grifou eterne que lou poussa<br />

Cadun de la matièira esprova leu lou sort<br />

Beluguet e creissen la mita de sa coussa<br />

L'autra mita plan-plan maina e pioi se damoussa<br />

Jouta l'esquich frejàs e lou bouf de la mort


A) Notes au texte original en occitan<br />

O mort! Païre eternal, caos, neant, mistèri,<br />

Ara siès dessala destruci d'univers<br />

Toun tronc de counglas, toun tenebrous empèri<br />

N'an pas jes de pouder qu'au pas dau cementèri<br />

L'endeçai, l'endelai soun dau Fil, lou Cifer.<br />

De la divessa aqui la paraula s'arresta<br />

Pioï dor lous majouraus badan estoumacas<br />

Aclina en souriguen lou regard e la testa<br />

En d'acò fai: — Mignots ara ma jouncha es lesta,<br />

M'en van tourna ben leu dins lou brihans foundas<br />

Dins lou gour azurin ount vostre cor barbèla<br />

Ounte vous esperàn em mas sortes de cor<br />

Mas parias en pouder, Melusina, Esterèla,<br />

Dins las limbas ount nous trufan de la mort<br />

A n'ounte lou printemp chac'an s'arenouvella,<br />

Ounte res n'agandis d'aquesta paura terra<br />

Que ço qu'es de l'esprit, lou grand, lou bèu, lou san.<br />

Lou lai, lou greu, lou mau, la matierassa fera<br />

Tout ça que dins lou cros de nioch de jour s'entera<br />

Lion de nautres boumbis de neant en neant.<br />

Entramen qu’aica mount vengue treva vostr’ama<br />

Anas dire pertout ce que ioi aves vist<br />

E se ïou fol touren d'au founs dau vau vous clama<br />

Se la bouvina au prat a vostra vista (36) brama<br />

Se l'aucelet pieutèja e l’abeilhon brusis,<br />

Ime de l'ome, tus qu'as vist l'estruci Paire<br />

E lou fil, creatou de tout ço qu'anda et vieu<br />

Ount es lou Sant Esprit, coum 'un frounfroun d'esclaire<br />

Un quicon respondra alin dau founs de l’aire<br />

Ou voulès saupre? e be l'Esprit Sant aco's ieu.<br />

NOTES ET COMMENTAIRES<br />

(1) Le texte complet de la Fada Seranela qui a servi à la présente édition figure dans deux manuscrits.<br />

Le premier de la main de Langlade intitulé La Fada Ceranela est constitué de neuf cahiers d'écolier<br />

pour un total de 79x2 pages. La traduction française de Langlade est absente du cahier 3 du folio 19<br />

au folio 24. L'ensemble est d'une assez mauvaise écriture avec des corrections, des ratures et des<br />

surcharges. La première page porte de la main de Roque-Ferrier la dédicace A M. Roque-Ferrier. Ce<br />

manuscrit appartient à Monsieur Jean Valette de Lansargues. Le deuxième manuscrit est de la main<br />

d’Emile Valette (1898-1975) de Lansargues qui fut l'un des animateurs de l'école Felibréenne du<br />

Parage à Montpellier. Cette copie présente des différences notables avec le premier texte. La graphie en<br />

a été modernisée selon les principes de l’Escola dau Parage en vigueur dans la première moitié de ce<br />

siècle (graphie félibréenne du Montpelliérain). La traduction est totalement refondue, plus littéraire que<br />

celle de Langlade. Emile Valette a certainement eu en mains deux manuscrits de l'œuvre de Langlade,<br />

celui que nous connaissons qui correspond à ce qui considère comme une deuxième version et un<br />

second qu'il désigne comme une première version (mais ceci correspond-il à une chronologie?) et que<br />

nous n'avons pas retrouvé. Le texte d’Emile Valette comporte parfois des erreurs (il ne peut s'agir de<br />

variantes) qui proviennent de la lecture difficile des écrits de Langlade. Ce manuscrit de 51x2 pages est<br />

la propriété de Monsieur Joseph Valette de Lansargues.<br />

Notre travail a consisté à établir le texte occitan de Langlade et à le traduire. Nous avons conservé<br />

l'orthographe du manuscrit original y compris dans ses variantes, ne corrigeant que ce qui, rarement,


endait la lecture trop malaisée... Certaines transcriptions sporadiques de Langlade ne se rattachant<br />

souvent à aucun principe connu, notamment des agglutinations lexicales et des mécoupures, nous les<br />

avons ramenées à des découpages plus lisibles tels qu'il les utilise d'ailleurs dans le même manuscrit.<br />

On devra donc considérer ce texte (à quelques nuances près) comme un document brut.<br />

La traduction du texte en français par l'auteur était trop lacunaire, trop hâtive, trop littérale pour être<br />

présentée sans désagréments. Nous nous sommes attachés à donner, ici encore, un texte plus lisible en<br />

nous inspirant certes de l'original mais en nous en éloignant aussi. La traduction Valette ne nous a pas<br />

été non plus inutile d’autant plus quelle nous vient d’un autre lansarguois connaissant bien son parler<br />

local. Notre souci principal a été de serrer au plus près un texte qui apparaîtra souvent difficile dans sa<br />

version occitane.<br />

Des extraits de la Fada Seranela provençalisé par Mistral ont été publiés dans la Revue Felibréenne<br />

(T.I p. 409, T. II p. 14, années 1885-1886) et cette publication remaniée fit, nous le savons, rebondir la<br />

querelle, graphique entre languedociens et provençaux (voir notre introduction et l’introduction de<br />

Roque-Ferrier aux <strong>Poésies</strong> <strong>Languedociennes</strong> de Langlade p.XXVII et XXVIII). La Fada présentée au<br />

concours poétique organisé pour le Centenaire du Favre à Montpellier en 1884 obtint une médaille<br />

d'or, elle fut dès lors considérée par Roque-Ferrier comme le chef d'œuvre de Langlade. Cette<br />

appréciation fut maintes fois reprise, par la suite, et par divers auteurs, sans critique aucune, la Fada<br />

devenant le chef d'œuvre inconnu, à la hauteur du mythe...<br />

(2) Roque Ferrier (<strong>Poésies</strong> languedociennes d’A. Langlade vol. I, p. XXVIII) dit ceci: — L'origine de<br />

la Fada, Seranèla remonte à la félibrée de Valhauquès (octobre 1883) à l’examen que ses membres<br />

firent du dolmen et de la pierre à parler de cette commune. Une excursion qui dura jusqu'aux<br />

approches de la nuit, s'égara dans les bois pour se retrouver en jeux groupes dont l’un, celui de<br />

Langlade, était guidé par Emile Planchon.<br />

(3) L'Atlantida du poète catalan Jacint Verdaguer (1845-1902) date de 1877. Verdaguer était originaire<br />

de Folgueroles petit village de la plaine du Vic.<br />

(4) Man. Langl.: serou (en un seul mot).<br />

(5 Le man. Langlade porte ounda, le man. Valette oundada, nous avons choisi oundada qui correspond<br />

à la régularité du ver.<br />

(6) St Loup dans le texte.<br />

(7) Illisible dans le manuscrit Langl., Valette dit Cipe (?) là où nous lisons aqui.<br />

(8) Man. Langl. tan.<br />

(9) Man. Langl. laurage.<br />

(10) Man. Langl.: écrit corp, Valette cor. qui nous semble plus vraisemblable.<br />

(11) Man. Langl.: aco.<br />

(12) Man. langl.: nause.<br />

(13) Man. Langl.: des pets.<br />

(14) Man. Langl.: couro.<br />

(15) Valette lit espera là où nous lisons espes.<br />

(16) Man. Langl.: tout delon, degalis.<br />

(17) Ver irrégulier dans le man. Langl.: força, couraje e ferun, nous avons rétabli força e couraje e<br />

ferun du man. Valette.<br />

(18) En surchage dans le man. Langl.: sut espauragat, doulen en variante couma l'endoulenti, barré d'un<br />

trait.<br />

(19) Man. Langl.: dralha est en surcharge de escambaria (barré).<br />

(20) Man. Langl.: var. à clarina: negrina.<br />

(21) Man. Langl.: Tarn et Aveiron ont une minuscule à l'initiale.<br />

La distribution des majuscules en général, dans le man. Langl. ne semble pas suiVre de règle fixe.<br />

Dans les cas où leur absence risquait de gêner la lisibilité du texte nous les avons rétablies. Nous les<br />

avons conservées dans tous les cas où leur présence (non obligatoire) pouvait être jugée intentionnelle.<br />

(22) Man. Valette: dessinant, mais le ver est irrégulier, Le man. Langlade présente dessina avec une<br />

suite au a qui peut être interprétée en n. Cette solution qui coupe le rythme ne nous semble pas à<br />

retenir.<br />

(23) Man. Langl.: Soufre est en surcharge sur un mot barré (saupeta?) difficilement lisible.<br />

(24) Man. Langl.: variante rayée ailaval.<br />

(25) Man. Langl. p. 25 une strophe barrée: De fouletouns una autra tierra…..<br />

Lous primadies dau fier Magistralès. est reportée 5 strophes plus bas.<br />

(26) Man. Langl.: ou’n de.<br />

(27) Man. Langl.: piocs. On retrouvera cette forme plusieurs fois dans le texte.<br />

(28) Valette note 1ère version d'alègris garagnouns.


(29) Man. Langl.: variante l’immensa foula.<br />

(30) Man. Langl.: selia traduit par selia en français, Valette a laissé un blanc à l'emplacement du mot.<br />

(31) Man. Valette: sas car pour soun cor plus vraisemblable d'après le man. Langlade et la rime.<br />

(32) metié (man. Valette), man. Langl. illisible,<br />

(33), Le man.. Valette attribue ce ver au manuscrit primitif dans le man. Langl. le ver précédent<br />

Maugrat Peperelet… est en surcharge intercalé entre le 2ème et le 3ème ver (qui est ici le 4ème).<br />

(34) Le man. Langl, est ici raturé, surchargé, une feuille collée en rectificatif. La cohérence restituée de<br />

la partie lisible donne une strophe de 6 vers.<br />

(35) Man. Langl,: barunla, man, Valette: bamnlant<br />

(36) Man. Langl.: vist. Man. Valette: vista.<br />

LOU FELIBRE E SOUN AMIGA<br />

A CARLES DE BRUN<br />

LOU FELIBRE<br />

Chut! chut! mignota, arrestem-nous!<br />

Ai pas pus d'alen, la paciença<br />

M'escapa e, pioi, un grèu coudous<br />

Me pesa tant sus la counçiença<br />

Que cau au pus lèu n’en feni!<br />

Oi, parlem enfin, que n’en vogue.<br />

Creses que pousquem i' aveni,<br />

(1) Avant d'être lu par M. Charles-Brun dans la séance des Jeux Floraux de Montpellier (20 décembre<br />

1891), ce dialogue avait été partiellement communiqué à la félibrée de Murviel (18 octobre de la même<br />

année).<br />

Dans la première et la seconde de ces réunions, on ne put s'empêcher d'admirer la puissante et<br />

mélancolique saveur des vers du Felibre e soun Amiga. Aussi croyons-nous nécessaire de joindre à<br />

l'œuvre du maître poète le brinde par lequel M. Roque-Ferrier se fit, à Murviel même, l'interprète, des<br />

sentiments du Félibrige latin.<br />

Per tant que voules e ieu vogue,<br />

Au vanc que n'as pres desempioi<br />

Qu'as vist ailamount dins l'espaça<br />

Alatejà la maja aiglassa<br />

Emb sous aiglous. D'alara à ioi,<br />

As vougut, paura pardigalha,<br />

Trempassà lou nibou ount dardalha<br />

E brounzis lou trou e l'ilhau!<br />

Per gandi, ma miga, amoundaut<br />

Ounte l'ideia nous emporta,<br />

Cau aguedre l’ala pus forta<br />

E mai de couret que tus n'as.<br />

L'AMIGA<br />

Que dises aqui, bel aimaire?<br />

Emb aco m'esparave gaire.<br />

De bon! que t’auriei pres au bres,<br />

Abrasat de moun alenada,<br />

Dralhant ta vida de l'Avès<br />

A l'Ubac; n'agent en pensada<br />

Que toun bonur, ta renoumada,<br />

En te coumtant ausart, valent.


Ara t’arrestes net, d'un tems,<br />

Juste quand siam ras de la toca!<br />

Espaurugat, saique belèu<br />

As delembrat la bela epoca<br />

Ounte, tout escàs lingoustin,<br />

Ai fach grelhà dins ta memoria<br />

L'amour ideal e divin,<br />

L'amour das arts e de la gloria,<br />

De la patria e de toun nis!<br />

Aussa la testa, agacha, susis<br />

L'inmourtalitat, que te sona!<br />

L'aubre divin jamai ne dona<br />

Sa frucha qu'au pus arderous;<br />

Escala, zou! la maja branca<br />

De frucha santa s'espalanca!<br />

D'aut! D'aut! I'adusarem à dous.<br />

Maugrat la pòu que te carcina,<br />

Ensem culirem lou ramèu,<br />

Car t'ai pres à la capelina<br />

E te quitarai qu'au toumbèu!<br />

LOU FELIBRE<br />

Que faguem, que diguem, ma miga,<br />

Das ans cau subi lou destin:<br />

Jouinàs, tout es beu, tout nous triga;<br />

Un cop, acabat de camin,<br />

Qu'on a 'scalat l’auta mountagna,<br />

Triste viajaire afalenat,<br />

S’arregardes aval, la cagna<br />

T’aganta: — Paure dessenat!<br />

Dises en veguent dins la dralha<br />

Qu'as chaupit tout penequejant,<br />

Pregits e raives flouquejant,<br />

Couma la lana qu'en trevant<br />

Lou moutoun à la broussa estralha.<br />

Eh be! d'aut lou serre ai gandit<br />

E, gracia à tus, ai tout sentit,<br />

Tout vist, mai que mai à bel ime.<br />

Ara s'espinchoune detràs,<br />

Se dau passat bourge l'abime,<br />

Vese mous raives embrucats<br />

Un pau pertout de long la routa.<br />

De l'amour pur, caste, ideal,<br />

Dempioi bon brieu, la trena es routa,<br />

E la paura, fins en aval,<br />

Davala, resquilla, roundela,<br />

A chaca roca se martela<br />

E, lou corp tout empoutecat,<br />

Boumbis dins lou gourg dau pecat!<br />

L’umanitat, la poulitica,<br />

Lou pougrès?... ô bastard de sort!<br />

Lous lauriès culits en Africa?...<br />

Souven-te-n’en e, pioi, cap mort!<br />

De que dises de la patria?


L'avem vista un jour ben alai.<br />

De que penses de la familha?...<br />

Pecaire! Couma tout s'en vai!<br />

Ounte sies, cara Pouësia,<br />

Tresor de pas e d'armounia?<br />

Descend dé toun trone d'azur,<br />

Veni soustà louque sus terra<br />

N'a pus de gaud, pas pus d'espera<br />

Qu'en tus per 'sipà lou bonur.<br />

A ma vos, la bela divessa<br />

Çai ven, m'emboufa, me caressa,<br />

D'aqui qu'un jour, malur! ai vist<br />

Entre las cordas de sa lira<br />

Maliciejà lous iols de l'ira!<br />

E la divessa s'enfugis<br />

Mais en s'avalissent me dis:<br />

— Pertout la marrida erba grana,<br />

Lou pus bèu fruch a soun quissou,<br />

Dins la flou mema i’a 'n pouisou!<br />

Crei-me ieu, torna dins ta plana,<br />

Dins toun endrech, dins toun oustau,<br />

Lion de la foula e das badau!<br />

— Que l'aigla, en terra prouvençala,<br />

Trempasse flumes, planas, mounts,<br />

Que chaca an subre de sas alas<br />

Quauqua pluma, quauque canoun,<br />

D'aco d'aqui t'enchautes gaire.<br />

Tout aucel a plaça dins l'aire<br />

E s'a pas lou vanc de roudà<br />

Ailamount dins l'inmensitat,<br />

Pot be degaugnà la lauseta<br />

Qu'au ras de terra fai l'aleta<br />

E bresilha tant qu'a d'alen.<br />

Tus, parai, en toun cel seren,<br />

Embé ta lenga mespresada,<br />

La lenga dau viel garda-mas,<br />

Canta lou rajolet, la prada,<br />

Lou ruste e sentourous armàs,<br />

Las alertas das fiers segaires,<br />

Lous gais refrins das vendemiaires;<br />

Pos, se vos, sans trop faire escart,<br />

Cantà l'estanc amai la mar<br />

Que s'entend brounzi dau terraire,<br />

Lou fier magistrau roundinaire,<br />

Lou fres labech e l'aurajàs<br />

Que la Serrana aiçai debàs,<br />

L'estieu voumis à plena maissa,<br />

E la maliciada e la raissa,<br />

Lous travalhous de chaca jour,<br />

Las dansas e lous las d'amour!<br />

Emb aco d'aqui, poc à poca,<br />

Pos agandi fins à la toca,<br />

Sans crentà que lou beca-grun,<br />

Lou margoulin e pica-raca,<br />

Couma lou chin qu'en cassa braca<br />

Vengoun dins ta vigna à l'oumbrun,<br />

Boutelhà l'agràs, la grapilha


Que s'aublidoun dins la ramilha.<br />

Res n'aurà pas la fantasiè<br />

Tant pauc de brandi l'encensiè<br />

En faça ta persouna escura,<br />

L'encensiè que souleta endura,<br />

La cresonça e de quau l’encen<br />

Fai perdre la vista e lou sen!<br />

Per toun ben, fai aco, te dise.<br />

Tant lèu s'avalis aqui d'aut<br />

— Oi, oi, ie fau, à tus me fise.<br />

No, quitarai pas lou nisau,<br />

D'aqul que, ma jouncha fenida<br />

Ane, seguit de bons amics,<br />

De ma familha adoulentida,<br />

Au ròdou 'nt lou corp s'aterris,<br />

Ount coumença lou grand misteri.<br />

Dins un cantou dau cementeri,<br />

De quauquas canas en carrat,<br />

Facia au sourel, ben aparat<br />

Per una menudeta grilha,<br />

Voudriei aqui, 'mé ma familha,<br />

Poudre toujour en pas chaumà<br />

E clins aquel ròdou 'caumat,<br />

Voudriei qu'un ram se ie plantesse<br />

E que la souca se prenguesse<br />

Au qu'es au founs de l'aparam.<br />

Pioi, se volou', scrincelaran<br />

Sus lou maubre que res n'escrafa<br />

Aquesta pichota pitafa:<br />

Aquel que jai aici, de fach ou de pensada,<br />

Es lou qu'a mai bourjat, dins lou ben, dins lou mau,<br />

La terra, après sa mort, a cipat l'animau<br />

E l'ànjou dor amount a représ sa voulada!<br />

Voudriei tant ben qu'au ped dau ram<br />

Escalesse de campanetas,<br />

Se i’amaguesse de viauletas,<br />

Qu'asegarien mas felenetas<br />

En souveni dau paure grand!<br />

© CIEL d’Oc – Mai 2006

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