CEJM les mutations du travail

Le marché du travail

Le marché du travail a un double sens. Dans le langage courant, il désigne ainsi la situation de l’emploi dans une économie, à savoir le nombre d’emplois disponibles, mais aussi leur nature, les qualifications exigées.

Le marché du travail reste cependant particulier, règlementé et obéit à des logiques différentes que la plupart des marchés. En effet, l’accès à l’emploi est à la fois déterminant en termes de cohésion sociale mais aussi pour la dynamique de croissance du PIB, car le niveau d’emploi influence la solvabilité de la demande intérieure d’un pays. 

Au sens économique, c’est un marché mettant en relation ceux qui offrent leur travail (les salariés) et ceux qui demandent ce service qu’est le travail (facteur de production pour les entreprises).

L’offre de travail des salariés correspond à la demande d’emploi (sens courant). La demande de travail des entreprises correspond à l’offre d’emploi (sens courant).

Les composantes de l’offre de travail

La population active  

La population active au sens du Bureau International du Travail (BIT) comprend les personnes en emploi au sens du BIT et les chômeurs au sens du BIT.

Une personne en emploi au sens du Bureau International du Travail (BIT) est une personne de 15 ans ou plus ayant effectué au moins une heure de travail rémunéré au cours d’une semaine donnée ou absente de son emploi sous certaines conditions de motif (congés annuels, maladie, maternité,etc.) et de durée.

Un chômeur au sens du Bureau International du Travail (BIT) est une personne âgée de 15 ans ou plus :

  • sans emploi durant une semaine donnée ;
  • disponible pour travailler dans les deux semaines ;
  • qui a effectué, au cours des quatre dernières semaines, une démarche active de recherche d’emploi ou a trouvé un emploi qui commence dans les trois mois.

En moyenne en 2020, la population active au sens du Bureau international du travail (BIT) est de 28,9 millions de personnes âgées de 15 à 64 ans en France (hors Mayotte), dont 14,1 millions de femmes et 14,8 millions d’hommes. source

La population active peut varier pour des raisons démographiques (hausse de la population et/ou d’une classe d’âge), mais aussi en fonction du taux d’activité.

Le taux d’activité

Le taux d’activité de la population est le rapport entre le nombre d’actifs (actifs occupés et chômeurs) et l’ensemble de la population. L’indicateur du taux d’activité permet de déterminer la proportion de personnes en emploi ou à la recherche d’un emploi sur les personnes en âge de travailler.

Ainsi 71% de la population âgée de 15 à 64 ans (soit environ 40 millions de personnes) en France est soit en emploi, soit à la recherche active d’un emploi. A population équivalente, une hausse du taux d’activité entraîne une hausse de la population active. La démographie impacte également la population active. La France fait face au vieillissement de sa population :  les 50-64 ans représentent plus de 13 millions de personnes, qui quitteront le marché du travail dans les prochaines années quand les moins 15 ans, seulement 11 millions d’individus. La population active va donc diminuer.

Le taux d’activité varie en fonction de l’âge et du genre. L’activité des femmes reste influencée par la responsabilité ou non de leur famille : le fait d’avoir des enfants fait baisser le taux d’activité des femmes de 84 à 76%. A l’inverse, la responsabilité familiale stimule l’activité des hommes.

En termes d’âge, le taux d’activité des 15-24 ans n’est que de 35% pour une moyenne à 71%,  la plupart étant en formation (lycée/études supérieures). Concernant les seniors, les départs à la retraite ou en maladie longue durée, ou en situation de handicap, justifient un faible taux d’activité, accentué encore après 60 ans.

La population en emploi

Au sens de l’INSEE, l’emploi correspond à l’ensemble des personnes, salariés et travailleurs indépendants, exerçant une activité rentrant dans le domaine de la production de biens ou services

Le taux d’emploi est la proportion de personnes disposant d’un emploi parmi celles en âge de travailler. En 2020, la population en situation d’emploi au sens du BIT était de 26,995 millions.

Le taux d’emploi concernant uniquement les personnes en emploi, il est donc plus faible que le taux d’activité, qui intègre les personnes en emploi et les personnes en recherche d’emplois. La différence entre ces taux est donc constituée par les demandeurs d’emplois.

En ce qui concerne les formes d’emploi, le salariat est la norme

Un emploi dominé par le tertiaire

En 2020, le secteur d’activité tertiaire regroupe 76,6 % des personnes en emploi. Cette part est plus élevée pour les femmes (88,1 % contre 65,7 % pour les hommes), du fait de leur plus forte présence dans l’administration publique, l’enseignement, la santé, l’hébergement médico‐social et l’action sociale ou encore les services aux ménages (52,0 % des emplois occupés par les femmes, contre 22,9 % pour les hommes. En 2020, l’industrie représente 13,0 % des emplois (18,1 % pour les hommes), la construction, 6,7 % (11,5 % pour les hommes) et l’agriculture, 2,3 % (3,2 % pour les hommes). Les jeunes travaillent moins souvent dans l’administration publique, l’enseignement et la santé, mais plus souvent dans le commerce et l’hébergement‐restauration. Les seniors occupent quant à eux plus souvent des emplois dans l’enseignement, l’administration publique ainsi que dans l’hébergement médico‐social et l’action sociale.

Un emploi de plus en plus qualifié

En 2020, en France hors Mayotte, 46,4 % des personnes en emploi sont cadres ou professions intellectuelles supérieures (20,4 %) ou occupent une profession intermédiaire (26,0 %) ; 45,0 % sont employés (25,8 %) ou ouvriers (19,2 %), dont deux sur cinq non qualifiés; 6,8 % sont artisans, commerçants ou chefs d’entreprise et 1,4 % sont agriculteurs exploitants.

La répartition des emplois par catégorie socioprofessionnelle diffère selon le sexe, même si les différences se réduisent progressivement. Ainsi, les femmes occupent plus que les hommes des emplois moins qualifiés : en 2020, 23,5 % d’entre elles sont sur des postes d’employés ou d’ouvriers non qualifiés, contre 14,3 % des hommes. À l’inverse, les hommes sont plus souvent cadres (22,7 % contre 17,9 % pour les femmes), artisans, commerçants ou chefs d’entreprise (9,2 % contre 4,2 %) ou agriculteurs (2,0 % contre 0,7 %).

En près de quarante ans, la répartition des emplois par catégorie socioprofessionnelle s’est profondément modifiée. Entre 1982 et 2020, la part des ouvriers baisse de 11,1 points et celle des agriculteurs de 5,7 points. Sur l’ensemble de la période, la part des emplois les plus qualifiés a fortement augmenté : celle des cadres s’est accrue de 12,6 points et celle des professions intermédiaires de 6,5 points.

Les composantes de la demande de travail

La demande de travail se répartit entre le secteur privé marchand, la fonction publique, et le secteur privé non marchand.

Les entreprises

En 2019, 4,1 millions d’entreprises composent les secteurs marchands non agricoles et non financiers (incluant toutefois les exploitations forestières ; les auxiliaires de services financiers et d’assurance et les holdings ).

Le tissu productif marchand est fortement concentré. 276 grandes entreprises (GE) rassemblent 24 000 unités légales, emploient 3,6 millions de salariés en équivalent temps plein (ETP), soit 27 % du total. Dans le même temps, alors que 96,1% des entreprises françaises sont des micro-entreprises, ce sont les petites et moyennes entreprises (PME), les entreprises de taille intermédiaire (ETI) et les grandes entreprises (GE) qui emploient plus de huit salariés sur dix (en équivalent temps plein (EQTP)).

La quasi-totalité des entreprises des services marchands sont des PME, essentiellement des microentreprises (MIC)

Très présentes dans le commerce de détail et l’hébergement‑restauration, un grand nombre de micro entreprises s’adressent à un marché de proximité. 74 % d’entre elles n’ont aucun salarié, 12 % en ont un, à temps partiel ou à temps plein et seules 14 % d’entre elles ont plus d’un salarié. 

Les PME comptent en moyenne 25 salariés (en ETP), 62 % ont moins de 20 salariés et seules 11 % emploient au moins 50 salariés. Les activités exercées par leurs salariés sont plus diversifiées mais  la construction et les industries de type traditionnel (textile, cuir, bois, imprimerie, fabrication de produits métalliques) y sont davantage représentées). 18 % des effectifs de ces PME, contre 15 % en moyenne exercent leurs fonctions, dans les activités juridiques et comptables, les services relatifs aux bâtiments et aménagement paysager et les activités d’architecture et d’ingénierie.

Les ETI se distinguent des autres catégories d’entreprises par leur orientation industrielle, en particulier manufacturière (fabrication de machines et d’équipements, chimie, plastique, automobile, équipements électriques, optiques…) Parmi les 2,7 millions de salariés (en ETP) que compte l’industrie manufacturière, 37 % sont employés par des ETI, et réalisent 33% de leurs CA à l’export.

L’emploi marchand par secteur d’activité

L’industrie regroupe l’industrie manufacturière mais également les industries extractives (gravières, sablières, etc.), la production et la distribution d’électricité, de gaz, de vapeur et d’air conditionné, ainsi que la production et la distribution d’eau, l’assainissement, la gestion des déchets, la dépollution.

Le commerce comprend trois sous secteurs : le commerce de gros a pour clients d’autres entreprises, notamment du commerce ; le commerce de détail vend principalement aux particuliers ; le commerce automobile regroupe des commerçants, grossistes ou détaillants, spécialisés dans la vente ou la réparation d’automobiles et de motocycles.

En 2019, le commerce de gros réalise 47 % de la VA du commerce, le commerce de détail 41 % et le commerce automobile 11 %. Mais le commerce de gros n’emploie qu’un tiers des salariés (33 %), contre plus de la moitié dans le commerce de détail (54 %).

En 2019, les transports et l’entreposage regroupent 145 700 entreprises pour 1,2 million de salariés en équivalent temps plein (ETP)

Les services marchands se composent de cinq sous secteurs. En 2019, les services aux entreprises réalisent près de la moitié (47 %) de la valeur ajoutée des services marchands et l’information communication, le quart (25 %). Activité de main d’œuvre, l’hébergement restauration emploie 22 % des salariés contre 5 % dans les activités immobilières. 

La fonction publique

La fonction publique rassemblait 5,7 millions de personnes à la fin de 2020 (en hausse de 0,9 % par rapport à 2019), soit 21 % de l’emploi total en France (salariés et non-salariés)

La fonction publique comprend trois « versants » : la fonction publique d’Etat (2,52 millions d’agents en effectifs physiques) ; la fonction publique territoriale (1,93 millions) et la fonction publique hospitalière (1,21 million).

Les associations

En 2018, en France, 170 000 associations sont employeuses et 1,1 million sont non employeuses. Elles fonctionnent grâce à 2,2 millions de salariés et 21 millions de participations bénévoles, un même bénévole pouvant s’investir dans plusieurs associations. Sur l’année, cela représente 1,5 million d’emplois salariés en équivalent temps plein et 580 000 équivalents temps plein bénévoles.

La segmentation du marché du travail

Le principal contrat de travail français est le contrat à durée indéterminée (CDI), qui concerne 75% des personnes en emploi. Mais qu’il concerne la plupart des contrats en cours il ne représente qu’une part limitée des embauches. Il y a ainsi eu, sur les 6,62 millions de recrutement au troisième trimestre 2020,  1,19 million d’embauches en CDI et 1,25 million de CDD de plus d’un mois. Les CDD de moins d’un mois, qui constituent les recrutements les plus précaires ou flexibles selon les points de vue, représentent 4,18 millions d’embauches.

Les catégories les plus concernées par ces emplois courts sont les ouvriers non qualifiés de nature industrielle, les ouvriers agricoles, mais aussi les employés, plus particulièrement ceux du secteur du commerce. A noter également les professions du spectacle pour la catégorie cadre, dont le fonctionnement intermittent est la norme compte tenu de la nature des projets et fait l’objet d’un régime d’assurance sociale dédié.

Les contrats courts ont progressé de 350% en quarante ans, passant de 1% à 4,5% de l’emploi total. Ce type de contrat répond à un besoin de flexibilité des entreprises d’une part, et permet aux salariés en CDI de continuer à bénéficier des avantages liés à leurs postes. La flexibilité du marché de l’emploi est assurée par ces contrats précaires.

Les contrats courts sont souvent assimilés à un tremplin vers un emploi stable, mais cette perception  se révèle fausse. Parmi les salariés en contrat court une semaine donnée en 2017, 25 % ne sont plus en emploi trois mois plus tard : 15 % se retrouvent au chômage et 10 % deviennent inactifs. Les réembauches et renouvellements de contrats chez le même employeur sont fréquents : en 2017, 60 % d’entre elles travaillent encore dans la même entreprise trois mois plus tard, mais toujours en contrat court.

En conclusion,  les personnes en CDD et en intérim ont tendance à rester dans ce type de contrats et peinent à accéder à un emploi stable.

On distingue finalement deux marchés :

  • le marché principal, constitué de personnes en CDI, ( où l’on retrouve les cadres, et professions intermédiaires). 
  • le marché secondaire, constitué de travailleurs précaires, moins qualifiés.

Le marché est donc segmenté, entre des insiders et des outsiders, la flexibilité du marché reposant sur une minorité qui peine à intégrer le marché principal.

Le chômage, un dysfonctionnement du marché

Le chômage résulte d’un déséquilibre entre la demande de travail (les entreprises etc) et l’offre de travail (les travailleurs). Il s’agit donc d’un stock, qu’il est parfois complexe d’évaluer. Ainsi, les chiffres du chômage présentés par le ministère du travail et l’Insee différent fortement, quitte à se télescoper

Le chômage au sens du Bureau International du Travail

Selon la définition du Bureau International du Travail, définition retenue pour effectuer des comparaisons internationales, un chômeur est : 

  • est une personne âgée de 15 ans ou plus :
  • sans emploi durant une semaine donnée ;
  • disponible pour travailler dans les deux semaines ;
  • qui a effectué, au cours des quatre dernières semaines, une démarche active de recherche d’emploi ou a trouvé un emploi qui commence dans les trois mois.

A l’aune de cette définition du chômage, 2 400 000 personnes, soit 8,1% de la population active est à la recherche d’un emploi, contre 3 544 100 en catégorie A pour Pôle emploi. 

Le chômage, au sens du BIT, oscille entre 8,0 % et 8,1 % depuis le quatrième trimestre 2020, au même niveau qu’au quatrième trimestre 2019, avant la crise sanitaire. Le taux d’emploi augmente de 0,5 point à 67,5 %, au plus haut depuis 1975 et excède son niveau d’avant-crise de 0,7 point. Le taux d’emploi en CDI reste à 50,02%, l’amélioration du chômage s’est fait par l’emploi précaire. Le taux d’emploi complet se situe lui à 55,9%.

Le sous emploi

Cette définition du BIT exclut le chômage partiel, à savoir les personnes travaillant à temps partiel mais souhaitant travailler davantage. En 2020, 4,1 millions de salariés sont à temps partiel en France (hors Mayotte), soit 17,6 % des salariés hors apprentis. Il est inégalement répartis selon les secteur d’activités : neuf salariés à temps partiel sur dix travaillent dans le tertiaire, où le temps partiel concerne 20,2 % des emplois salariés, contre 6,0 % dans l’industrie et 6,2 % dans la construction. Le temps partiel est très fortement féminin, 78,9% des postes à temps partiels sont occupés par des femmes, dont 51% pour des raisons personnelles ou familiales.

Cependant, en 2020, près de quatre salariés à temps partiel sur dix le sont parce qu’ils ne peuvent pas travailler davantage alors qu’ils le souhaitent. La durée moyenne du temps partiel est de 23,6 heures.

Le temps de travail effectif de l’ensemble des personnes en emploi est donc plus pertinent pour définir un état de “sous chômage”.

https://www.insee.fr/fr/statistiques/5391992?sommaire=5392045

Le halo du chômage

Le halo du chômage regroupe l’ensemble des personnes sans travail, qui aimeraient travailler, mais qui ne sont pas en recherche active d’emploi (garde d’enfants, éloignement de l’emploi, personnes non indemnisées ou éloignées du marché du travail, conditions de travail insatisfaisantes…) mais qui seraient susceptibles de chercher un emploi en cas d’amélioration du marché du travail.

Le marché lieu de fixation des salaires?

Dans une analyse néoclassique du marché, à savoir une une concurrence pure et parfaite, lorsque l’offre est supérieure à la demande, les offreurs (les travailleurs) se font concurrence pour vendre leur force de travail en baissant le prix qu’ils proposent ce qui permet d’augmenter la demande de ces produits et de réduire l’offre. Le prix baisse jusqu’à ce que les quantités offertes et les quantités s’équilibrent : le marché fixe ainsi le prix d’équilibre qui établit les quantités échangées. 

Toujours selon cette approche, il n’y a donc pas un marché du travail, mais plusieurs, car les compétences échangées diffèrent fortement, et obéissent à des logiques de prix et de concurrence différentes, qui se reflètent dans la répartition des salaires.

le cadre juridique de la fixation des salaires

Le salaire de base est fixé librement entre l’employeur et le salarié sous réserve du respect de certaines règles légales et conventionnelles.

  • les règles relatives au SMIC, qui définit un plancher de rémunération. Le Smic est revalorisé chaque année au 1er janvier. Il est indexé sur l’inflation mesurée pour les 20 % des ménages ayant les revenus les plus faibles. La revalorisation du Smic est effectuée sur la base de la moitié du gain de pouvoir d’achat du salaire horaire moyen des ouvriers et des employés.
  • les règles relatives à la mensualisation ;
  • les salaires minimaux et les éléments de rémunération prévus par les conventions ou accords collectifs applicables, ou l’usage éventuellement en vigueur dans l’entreprise ;
  • le principe d’égalité de rémunération entre femmes et hommes ;
  • la non-discrimination

Salaire et coût du travail

La rémunération du travail sous forme de salaire est distincte de la notion du coût du travail. En effet à ce salaire s’ajoutent les cotisations sociales.

Ces dernières financent le système de protection sociale français. Les salariés et les employeurs cotisent à différentes caisses, qui assurent le salarié en cas de risque lié à la maladie, vieillesse, chômage…

L’appréhension du salaire diffère selon l’agent. Le salarié va se baser sur le salaire qu’il peut consommer, à savoir  le salaire net, l’embauche est déterminée par un salaire brut, le coût du travail est déterminé par le salaire brut et les cotisations patronales.

On distingue donc le salaire du coût du travail, constitué de la rémunération brute et des cotisations patronales. Ces modalités de financement du système de protection sociale diffèrent selon les pays, bien que le coût du travail soit un élément de compétitivité des entreprises.