La famille, à cheval, est en route vers les lacs du nombril, nous approchons d'une yourte. Une vieille femme habillée en deel (vêtement traditionnel) sort de sa demeure. Le dos courbé par l'âge, elle nous sourit, et fait signe d'approcher.

Les Mongols aiment manifester leur sens de l'accueil, leur générosité et leur charme. Elle nous invite dans sa demeure. Nous nous assoyons par terre; il n'y a pas de chaise! Cette grand-maman de 88 ans nous offre chaleureusement du thé au lait de yak, du pain maison et du fromage de chèvre séché. Après 25 km au grand air, cela se prend bien. La yourte ne possède qu'une seule entrée. Sur la paroi opposée, se trouve traditionnellement le lit des parents, entouré de ceux des enfants. Au centre, il y a un poêle dont la cheminée sort par une ouverture au plafond. Quand il y a de la fumée, on peut entrer. Les dures conditions climatiques hivernales et les grandes distances ont façonné le sens de l'hospitalité des Mongols. Depuis 3000 ans, les peuples des steppes ont adopté un mode de vie pastoral. Ils se déplacent quatre fois par année, à la recherche de meilleurs pâturages pour leurs yaks, chèvres et moutons. Nous campons ici. Après souper, la dame nous offre un fromage frais, fait avec de la caillette ou l'estomac du ruminant.

Le lendemain, nous retrouvons nos chevaux au milieu de ses troupeaux. Tout à coup, en allant chercher nos montures, une horde de juments et poulains approche au grand galop. Nos bêtes décideront-elles de les suivre? Marie-Pierre (16 ans) se tient sur ses gardes. Mon fidèle compagnon, encore entravé, rue et essaie de suivre. Je le retiens de peine et misère. Papa Pierre arrive à la rescousse, à cru sur Jules, le cheval de Marie-Michèle (16 ans). Finalement, nous ramenons nos compagnons au campement. Une fois sellés, nous chevauchons une vaste zone de pâturage sur les deux rives d'un ruisseau où un mince filet d'eau s'écoule. Nous atteignons les huit lacs du nombril, dans le nord du pays.

En chemin, nous montons à bord d'un traversier pour franchir une rivière un peu trop profonde. Deux de nos destriers n'ont pas le pied marin. Ils sautent en catastrophe. En réalisant le grand écart. Quelques petits pas de danse; et voilà, la moitié attend sur le pont. Nous faisons deux voyages; pour moins d'un dollar chacun, chevaux et cavaliers ont franchi le cours d'eau. Quelques heures plus tard, nous reprenons un deuxième traversier. Cette fois, le tarif a quadruplé. Papa Pierre refuse de payer autant! Il donne le même montant qu'au premier bateau. Malheureusement, le jeune responsable du traversier est ivre. Il n'a plus toute sa tête. Violemment, il lance l'argent et saute sur Louis-Philippe, 20 ans. Il le frappe, c'est la bataille! Tout le monde est estomaqué. En un instant, Pierre immobilise le scélérat au sol.

En 25 ans de vie de famille, c'est la première fois que nous vivons un tel incident. Les grands arrivent à la rescousse. Le type crie des mots que je suis heureuse de ne pas comprendre. Je m'éloigne avec les plus jeunes et les chevaux. L'adrénaline a monté. Personne n'a de mal. Par bonheur, un homme ne fait pas le pays.

Les circonstances ont creusé l'appétit de mes adolescents. La quantité de pâtes au fromage de chèvre et mouton séché a doublé! Dans trois jours, nous serons chez les éleveurs de rennes, les Tsaatan, une tribu qui vit en autarcie à la frontière de la Russie. Nous avons hâte de les rencontrer.

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