Nouvelle offensive pour rétablir la réserve parlementaire
Près de 300 députés et sénateurs demandent, avec des garde-fous, le retour de la réserve parlementaire, cette enveloppe budgétaire destinée à subventionner localement des petits projets. Un dispositif supprimé au début du premier quinquennat d'Emmanuel Macron.
Par Isabelle Ficek
Ils sont partis à deux. Ils sont désormais près de 300. Des députés et sénateurs de tous bords politiques - même s'ils sont peu nombreux issus des rangs de la gauche - demandent le retour de la réserve parlementaire, cette enveloppe budgétaire destinée à subventionner localement des microprojets et supprimée au début du premier quinquennat d'Emmanuel Macron par la loi pour la confiance dans la vie politique. Ces élus ont adressé cette semaine une lettre ouverte à la présidente de l'Assemblée nationale, Yaël Braun-Pivet, et au président du Sénat, Gérard Larcher, publiée dans « Ouest-France ».
A l'origine de cette initiative ? Les députés LR Dino Cinieri et Horizons André Villiers, rapidement rejoints par le député Renaissance Frédéric Descrozaille. Ils ont déposé en février dernier à l'Assemblée nationale une proposition de loi organique afin de revenir sur la suppression de cette enveloppe annuelle d'un peu plus de 100.000 euros par parlementaire. Dans l'exposé des motifs, ces élus proposent que les montants alloués et la liste des bénéficiaires soient bien rendus publics, « afin d'éviter toute dérive dans l'attribution des fonds ». Et ils prévoient que seules soient éligibles les communes de moins de 18.000 habitants et les associations.
Coupés des maires et des petites communes
Depuis février, les soutiens se sont agrégés au fil d'une pétition en ligne et d'un travail « de pèlerin », dixit André Villiers auprès des parlementaires. « Comme le non-cumul des mandats , la fin de la réserve parlementaire c'était la fausse bonne idée de 2017 qui partait de bonnes intentions. Il manque aujourd'hui un souffle venu du terrain à l'Assemblée nationale », explique le député Renaissance Karl Olive, qui fait partie des signataires.
« Nous nous sommes trompés en 2017, animés de motivations tout à fait respectables. L'idée était que cette réserve nourrissait une sorte de clientélisme. En réalité, nous nous sommes coupés très largement des maires et de nos petites communes. Nous pouvions, pour de petits projets, être la subvention d'appel voire la subvention tout court. Cela donnait un ancrage dans le territoire qui n'existe plus, tout le monde y a beaucoup perdu », regrette la députée MoDem Laurence Vichnievsky.
Démarches complexes
Certes, la réserve parlementaire a été remplacée - pour une enveloppe budgétaire moindre - par le Fonds pour le développement de la vie associative (FDVA), géré par les préfets. Mais nombre d'acteurs, dont parfois les préfets eux-mêmes, reconnaissent que la démarche administrative est complexe et souvent rebutante pour de toutes petites structures en quête de petites subventions.
Il manque aujourd'hui un souffle venu du terrain à l'Assemblée nationale.
Karl Olive Député Renaissance
Encore faudrait-il que le texte soit inscrit à l'ordre du jour au Parlement. Si les initiateurs de la d émarche ont vu leurs rangs s'étoffer, ils savent aussi qu'il risque d'être difficile de voir le texte inscrit lors d'une semaine transpartisane. La présidente de l'Assemblée nationale était en effet rapporteure de la loi pour la confiance dans la vie politique qui a supprimé la réserve.
« Une double connerie »
Ils espèrent en revanche une fenêtre de tir en décembre avec la niche du groupe LR, qui fournit des soutiens en nombre. Et alors que des sénateurs préparent aussi leur propre texte, publier cette lettre ouverte dans « Ouest-France » visait également, explique André Villiers, à se faire entendre sur les terres mêmes de sénateurs qui pèsent, comme le président du groupe LR, Bruno Retailleau.
André Villiers est toutefois lucide sur le regard du gouvernement, a priori peu favorable sur l'initiative : « il y a de manière générale une certaine appréhension à défaire ce qui a pu être fait pendant le premier quinquennat d'Emmanuel Macron. Mais ne pas reconnaître que l'on s'est trompé, serait une double connerie », prévient-il.
Isabelle Ficek